Image
Liste de surveillance 2025

Gestion de la fatigue

La fatigue continue de poser un risque pour la sécurité dans les secteurs du transport aérien, maritime et ferroviaire parce qu’elle peut influer sur les performances humaines au point de causer des accidents.

Contexte

Depuis le début des années 1990 jusqu’au milieu de 2025, la fatigue due au manque de sommeil a figuré dans les faits établis du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) dans le cadre de 119 événements : 49 dans le secteur du transport aérien, 38 dans le secteur du transport maritime et 32 dans le secteur du transport ferroviaireLa Liste de surveillance 2025 tient compte de tous les types de faits établis formulés dans les rapports du BST (faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs, faits établis quant aux risques et autres faits établis). Ces catégories diffèrent dans les anciens rapports. La Liste de surveillance 2025 tient également compte de la fatigue chez les membres des équipes et chez les autres acteurs, comme les contrôleurs aériens. Le nombre total de faits établis sera donc différent de celui indiqué dans les versions antérieures de la Liste de surveillance du BST..

La gestion de la fatigue des équipes de train de marchandises figure sur la Liste de surveillance du BST depuis 2016 et, en 2018, cet enjeu a été élargi aux secteurs du transport aérien et maritime.

Bien que la réglementation et les procédures comportent des dispositions relatives au temps de travail et de repos, l’établissement des horaires de travail pose encore un défi pour les employeurs et les employés dans les secteurs du transport aérien, maritime et ferroviaire. Si la réglementation et les procédures ne tiennent pas compte de tous les facteurs que l’on sait contribuer à la fatigue, les employeurs ne disposeront pas des lignes directrices dont ils ont besoin pour atténuer les risques posés par la fatigue pour leurs employés.

Les dispositions sur le temps de travail et de repos à elles seules ne sont pas suffisantes.Si les exploitants ne sont pas tenus de mettre en œuvre des plans de gestion de la fatigue, les membres d’équipage pourraient travailler alors qu’ils sont fatigués, ce qui augmente la probabilité que des erreurs opérationnelles se produisent. En l’absence de formation de sensibilisation à la fatigue, il y a aussi un risque que les membres d’équipage ne soient pas en mesure de prévenir, de repérer et d’atténuer les risques ou les symptômes associés à la fatigue. Pour que la gestion de la fatigue soit efficace, le personnel doit comprendre les risques, se sentir appuyé et sentir qu’il peut signaler les problèmes sans crainte de représailles, et avoir la possibilité de se retirer lorsqu’il n’est pas apte à travailler.

Appel au changement  

Les enjeux de la Liste de surveillance sont complexes et exigent la participation coordonnée des exploitants, des organismes de réglementation et d’autres intervenants. Même si des progrès ont été réalisés, il reste encore beaucoup à faire.

La gestion efficace de la fatigue et l’atténuation des risques connexes exigent de profonds changements d’attitudes et de comportements, tant chez les gestionnaires que chez les employés. Ces changements nécessitent une formation de sensibilisation soutenue, et la mise en œuvre de plans de gestion de la fatigue qui encouragent les employeurs et les employés à prendre leurs responsabilités afin de prévenir les événements liés à la fatigue.

Pour favoriser ce changement de culture, l’enjeu de la gestion de la fatigue dans le secteur des transports demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que plusieurs mesures soient prises dans les secteurs du transport aérien, ferroviaire et maritime au Canada.

Secteur du transport aérien

Les opérations aériennes s’effectuent souvent à travers plusieurs fuseaux horaires et exigent de longues périodes de service, ce qui fait de la fatigue un risque considérable pour la sécurité.

Des consultations ont mis en évidence des désaccords dans le secteur en ce qui concerne l’utilisation de systèmes de gestion des risques liés à la fatigue et des exemptions, certaines associations mettant en garde contre le fait qu’une mauvaise surveillance pourrait miner les moyens de protection pour la sécurité.

Les préoccupations constantes signalées au BST, en particulier par les exploitants régionaux et de plus petite taille, mettent en évidence que la gestion de la fatigue demeure une préoccupation et un important risque pour la sécurité.

L’enquête A22O0161 du BST a montré que même lorsque les exploitants respectent la réglementation, les périodes de service prolongées peuvent augmenter la fatigue des pilotes, ce qui démontre que les règles à elles seules ne peuvent pas éliminer les risques.

Mesures prises

Le Règlement de l’aviation canadien a été mis à jour et les exigences en matière de gestion de la fatigue pour les exploitants aériens sont entrées en vigueur en 2020 et en 2022. Le Règlement offre deux approches :

  • Une approche prescriptive : des limites fixes sur les temps de vol, les périodes de service, les périodes de repos et les périodes sans service.
  • Une approche axée sur le rendement : Un exploitant peut s’éloigner de l’approche prescriptive en utilisant un système de gestion des risques liés à la fatigue pour prévoir et prévenir la fatigue des équipages de conduite.

Mesures à prendre

La gestion de la fatigue dans le transport aérien demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que les enquêtes et les données du BST démontrent que la réglementation atténue efficacement les risques liés à la fatigue.

Secteur du transport maritime

La fatigue continue de contribuer à des événements dans le monde entier et demeure une grande préoccupation dans le secteur du transport maritime. Au Canada, l’application des dispositions sur le temps de travail et de repos à bord des navires canadiens n’est pas homogène et le Règlement sur le personnel maritime ne s’applique pas à quelque 95 % des bateaux de pêche. Les dispositions nationales existantes sont moins exigeantes que les normes internationales et continuent de permettre des horaires de travail comme 6 heures de travail et 6 heures de repos, qui peuvent causer une fatigue chronique.

Les recherches internationales montrent que les règles existantes sur le temps de travail et de repos sont inadéquates, que de nombreux gens de mer travaillent malgré un niveau de fatigue considérable et que, dans certains cas, ils falsifient les registres de temps de travail et de repos pour faire croire qu’ils respectent les exigences.

Au cours des trois dernières années, le BST a publié des faits établis liés à la fatigue dans cinqM22A0332M21C0214M21A0065M20A0434M20P0229 rapports d’enquête sur le transport maritime, dont trois concernaient des bateaux de pêche d’une jauge brute de moins de 100, navires qui ne sont actuellement pas assujettis aux dispositions sur le temps de travail et de repos. Ces faits établis mettent en évidence les risques constants posés par la fatigue, particulièrement dans les opérations qui ne sont pas couvertes par le cadre réglementaire actuel.

Mesures prises

En mars 2024, TC a lancé une formation gratuite de sensibilisation à la fatigue offerte par le Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail. Cette formation ne sera toutefois pas obligatoire avant l’entrée en vigueur du Règlement sur le personnel maritime mis à jour.

Mesures à prendre

L’enjeu de la gestion de la fatigue dans le transport maritime demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que

  • TC exige que les officiers de quart dont les périodes de travail et de repos sont régies par le Règlement sur le personnel maritime reçoivent un cours pratique sur la fatigue et une formation de sensibilisation;
  • les propriétaires de navires mettent en œuvre des plans de gestion de la fatigue, y compris une formation sur la fatigue et un soutien aux gens de mer pour le signalement, la gestion et l’atténuation de la fatigue;
  • les dispositions nationales sur le temps de travail et de repos soient mises à jour afin d’inclure les bateaux de pêche d’une jauge brute de moins de 100, de refléter les travaux scientifiques actuels sur la fatigue et de s’aligner sur les normes internationales.

Secteur du transport ferroviaire

La fatigue est bien connue et bien documentée dans le secteur du transport ferroviaire et elle a figuré dans les faits établis de 32 événements ferroviaires entre 1990 et 2025. Malgré les efforts réglementaires, des risques subsistent en raison des heures de départ imprévisibles dans le transport de marchandises, des longues heures de service, de la rotation des quarts de jour et de nuit ainsi que des dispositions sujettes à la négociation collective.

Bien que les Règles relatives aux périodes de service et de repos du personnel d’exploitation ferroviaire aient été approuvées par TC en 2020, les règles ne s’appliquent qu’au personnel d’exploitation et ne reflètent pas toujours les plus récents travaux scientifiques sur la fatigue en ce qui concerne les périodes quotidiennes et cumulatives de travail et de repos. Plusieurs enquêtes du BST menées entre 2014 et 2025R16H0024, R16D0076, R15V0003R14W0256 ont montré que la fatigue affecte également les employés qui ne font pas partie du personnel d’exploitation, mais qui sont essentiels pour assurer la sécurité des opérations ferroviaires, comme les contrôleurs de la circulation ferroviaire et le personnel d’entretien de la voie.

De 2011 jusqu’au milieu de 2025, le BST a transmis à TC 16 avis de sécurité et lettres d’information sur la sécurité découlant de préoccupations au sujet de la fatigue. Bien que TC ait reconnu la nécessité d’une approche plus complète, les progrès à cet égard sont lents. Des consultations au sujet du Règlement sur le système de gestion de la fatigue proposé ont eu lieu en 2022; même si TC prévoit intégrer ce règlement au Règlement sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire, aucun échéancier défini n’a été communiqué. Tant que ces règlements modifiés ne seront pas entrés en vigueur et mis en application, les risques liés à la fatigue pourraient ne pas être atténués.

Mesures prises

TC et les compagnies de chemin de fer ont maintenant pleinement mis en œuvre les Règles relatives aux périodes de service et de repos du personnel d’exploitation ferroviaire, qui sont entrées en vigueur en mai 2023 pour les chemins de fer de marchandises et en novembre 2024 pour les chemins de fer de voyageurs. Toutefois, le secteur demeure préoccupé par l’absence de préavis et par l’emplacement des congés. Les compagnies de chemin de fer ont présenté leurs plans de gestion de la fatigue avant novembre 2022, et ces plans ont maintenant été mis en œuvre.

Mesures à prendre

L’enjeu de la gestion de la fatigue dans le transport ferroviaire de marchandises demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que

  • TC transfère les dispositions du Règlement sur le système de gestion de la fatigue proposé au Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire;
  • les compagnies de chemin de fer démontrent à TC qu’elles ont mis en œuvre des plans efficaces de gestion de la fatigue;
  • TC s’assure que les exigences réglementaires relatives à l’établissement des horaires de travail des équipes tiennent réellement compte des réalités opérationnelles et que les exploitants ferroviaires démontrent qu’ils respectent ces exigences.