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Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A21P0111

Collision entre un aéronef et un bateau-taxi
de Havilland DHC-2 MK. I (Beaver), C-FMXR
Tofino Air
et
Bateau-taxi C12997BC (Rocky Pass)
Eagle Adventures Water Taxi
Tofino (Colombie-Britannique)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 18 octobre 2021, à 16 h 37, heure avancée du Pacifique, un aéronef de Havilland DHC-2 MK. I (Beaver) équipé de flotteurs et exploité par Tofino Air, et un bateau-taxi connu sous le nom de Rocky Pass sont entrés en collision à proximité du quai de la rue First dans le port de Tofino (Colombie-Britannique). L’aéronef a subi des dommages importants et, dans les 2 minutes et 30 secondes qui ont suivi la collision, il s’est retrouvé à l’envers; seuls ses flotteurs se trouvaient hors de l’eau. Les 5 passagers et le pilote à bord de l’aéronef ont pu sortir de l’appareil en toute sécurité. Trois des passagers de l’aéronef ont subi des blessures mineures. Le bateau a subi des dommages mineurs et 1 passagère à bord a été légèrement blessée. La radiobalise de repérage d’urgence de l’aéronef n’a pas transmis de signal. L’accident n’a pas fait de pollution Note de bas de page 1.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement de l’événement

1.1.1 Le vol

Vers 16 h Note de bas de page 2 le 18 octobre 2021, le pilote de l’aéronef de Havilland DHC-2 MK. I (Beaver) exploité par Tofino Air Note de bas de page 3 (immatriculation C-FMXR, numéro de série 374) se préparait à décoller pour effectuer un vol touristique local depuis l’hydroaérodrome du port de Tofino (CAB4) (Colombie-Britannique) (figure 1), avec 5 passagers. Le pilote a rencontré les passagers (4 adultes et 1 enfant) près de l’aéronef sur le quai de la rue First et leur a donné un exposé sur les mesures de sécurité. Il leur a notamment indiqué l’emplacement des issues de l’aéronef et leur a expliqué la façon d’utiliser leurs vêtements de flottaison individuels (VFI) gonflables, qui étaient rangés dans des sacoches se portant à la taille.

À 16 h 07, l’aéronef a décollé pour effectuer le vol aller-retour, lequel devait prendre environ 30 minutes. Le pilote occupait le siège de gauche et avait réglé son siège pour qu’il soit le plus reculé possible. Il s’agissait de son 6e vol aller-retour depuis CAB4 ce jour-là. Il avait commencé à travailler à 9 h 30 et avait effectué 4 vols touristiques et 1 vol nolisé avant le vol à l’étude.

En retournant à CAB4 à 16 h 35, l’aéronef se trouvait à environ 250 pieds au-dessus du sol, sur l’étape vent arrière d’un circuit vers la gauche en vue de l’amerrissage. Le pilote a allumé le phare d’atterrissage, réglé les volets pour l’amerrissage, fait les appels radio d’arrivée appropriés sur la fréquence de trafic d’aérodrome et effectué un balayage visuel du port. Il a noté que l’aire d’amerrissage était libre de toute circulation. L’aéronef a ensuite effectué un virage à gauche au-dessus de la pointe nord-est de l’île Stubbs et, à 16 h 37 min 3 s, il a tourné en courte finale pour amerrir dans le passage Duffin, à proximité du quai de la rue First.

Pendant l’approche finale, les 2 passagères assises à côté des fenêtres du côté gauche de l’aéronef (sièges au milieu à gauche et à l’arrière gauche) ont vu le bateau-taxi Rocky Pass sortir du passage Deadman et se diriger vers le quai de la rue First. Une séquence vidéo obtenue dans le cadre de l’enquête montre que l’entrée du Rocky Pass dans le port était visible principalement en raison de son sillage.

L’aéronef s’est posé sur l’eau vers 16 h 37 min 26 s. La distance entre le bateau et l’aéronef était d’environ 80 m. À 16 h 37 min 29 s, alors que l’aéronef décélérait en se trouvant toujours sur le redanNote de bas de page 4, le pilote a aperçu le Rocky Pass. Prenant conscience de l’imminence d’une collision, il a fait virer l’aéronef vers la droite pour réduire la force d’impact. À 16 h 37 min 32 s, l’aéronef et le Rocky Pass sont entrés en collision.

Figure 1. Carte montrant la trajectoire approximative de l’aéronef (ligne continue) et du bateau (ligne pointillée) (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Carte montrant la trajectoire approximative de l’aéronef (ligne continue) et du bateau (ligne pointillée) (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

1.1.2 Le voyage

Vers 16 h le même jour, le Rocky Pass a quitté Ahousaht (Colombie-Britannique) à destination du quai de la rue First dans le port de Tofino. Le conducteur et 2 passagères se trouvaient à bord. Le conducteur du bateau effectuait son 5e voyage de la journée. Il avait commencé à travailler à 7 h 15 et avait réalisé 3 allers-retours entre Ahousaht et Tofino, et 1 aller-retour à Hot Springs Cove (Colombie-Britannique).

La route entre Tofino et Ahousaht est d’environ 14 milles marins (NM) et prend approximativement 34 minutes. Les bateaux-taxis naviguent régulièrement à des vitesses d’environ 25 nœuds sur cette route, et maintiennent cette vitesse jusqu’à ce qu’ils soient à proximité du quai.

Vers 16 h 36, le Rocky Pass est sorti du passage Deadman et s’est dirigé vers le quai de la rue First à une vitesse d’environ 25 nœuds (figure 1). Une fois le bateau au quai, on prévoyait de déposer les 2 passagères et de prendre quelques autres passagers qui attendaient de se rendre à Ahousaht. Le conducteur a effectué un balayage visuel du secteur lorsqu’il est sorti du chenal et n’a pas remarqué de trafic pouvant nuire à l’itinéraire prévu.

Alors que le Rocky Pass s’approchait du quai de la rue First, le conducteur a remarqué que le poste d’accostage était occupé par d’autres navires qui procédaient à l’embarquement et au débarquement de passagers. Il a commencé à observer les navires au poste d’accostage et à surveiller les annonces de départ d’autres navires sur la voie radiotéléphonique à très haute fréquence (VHF) locale afin de planifier une approche lorsqu’il aurait l’espace pour le faire.

Lorsque le Rocky Pass se trouvait à environ 300 m du quai de la rue First, le conducteur a réduit la vitesse du bateauNote de bas de page 5 pendant qu’il attendait que le poste d’accostage se libère. Peu après, 2 bateaux-taxis au quai ont fait des appels radio annonçant leur intention de partir, et le conducteur du Rocky Pass a réactivé les moteurs pour poursuivre son approche vers le quai. À ce moment-là, le conducteur a remarqué que des personnes sur le quai agitaient les bras et essayaient de l’avertir de quelque chose. Il s’est donc retourné et a regardé derrière lui à travers sa fenêtre de tribord. Il a alors aperçu l’aéronef sur l’eau, à environ 15 m, qui se dirigeait vers le bateau. Le conducteur a mis la barre à bâbord pour tenter d’éviter une collision. Toutefois, quelques secondes après (à 16 h 37 min 32 s), l’aéronef et le bateau sont entrés en collision à la position 49°09.34′ N, 125°54.71′ W. Les pales de l’hélice et le flotteur gauche de l’aéronef sont entrés en contact avec le côté tribord du bateau.

Une séquence vidéo enregistrée quelques instants après la collision et obtenue dans le cadre de l’enquête ne montre aucun changement important dans la direction du sillage du bateau avant la collision.

1.1.3 Événements qui ont suivi la collision

Immédiatement après la collision, le pilote a effectué les vérifications après amerrissage et a coupé le moteur. Le flotteur gauche de l’aéronef a été endommagé lors de la collision et a commencé à se remplir d’eau. Le pilote a ordonné aux passagers de sortir de l’aéronef. Environ 40 secondes après la collision, alors que le pilote et les passagers commençaient l’évacuation, l’aéronef a commencé à s’incliner vers la gauche et vers l’avant, puis s’est immobilisé brièvement en position verticale, le nez dans l’eau et la queue droit dans les airs.

La cabine de l’aéronef a alors commencé à se remplir d’eau et l’aéronef a continué de couler. Environ 2 minutes et 30 secondes après la collision, l’aéronef était renversé, et seuls les flotteurs se trouvaient hors de l’eau. Après l’évacuation du pilote et des passagers, divers navires qui étaient arrivés sur les lieux ont aidé à transporter les passagers au quai de la rue First. Le Rocky Pass, qui était resté sur les lieux, a aidé à récupérer le pilote de l’eau et à le transporter au quai.

La structure de la coque du bateau est demeurée intacte et la coque n’a pas pris l’eau après la collision. Les machines ont également continué de fonctionner normalement.

Trois passagers de l’aéronef ont subi des blessures mineures pendant l’évacuation et 1 passagère du Rocky Pass a subi des blessures mineures en raison de l’impact de la collision. Le pilote, le conducteur du bateau et les autres passagers n’ont pas été blessés.

Une embarcation de sauvetage de la Garde côtière canadienne est arrivée sur les lieux à 16 h 48 et a attaché l’aéronef pour s’assurer qu’il ne dériverait pas avec le courant sortant.

Plus tard dans la soirée, l’aéronef a été tiré dans l’eau par un navire commercial jusqu’à une rampe où il a été retiré de l’eau au moyen d’une grue. Le lendemain, l’aéronef a été partiellement démonté et transporté par camion au hangar de Tofino Air à l’aéroport de Tofino.

1.2 Personnes blessées

1.2.1 Aéronef

Un pilote et 5 passagers se trouvaient à bord de l’aéronef. Le tableau 1 indique la gravité des blessures subies.

Tableau 1. Personnes blessées à bord de l’aéronef
Gravité des blessures Membres d’équipage Passagers Personnes ne se trouvant pas à bord de l’aéronef Total selon la gravité des blessures
Mortelles 0 0 0
Graves 0 0 0
Légères 0 3 3
Total des personnes blessées 0 3 3

1.2.2 Bateau

Un conducteur et 2 passagères se trouvaient à bord du bateau. Le tableau 2 indique la gravité des blessures subies.

Tableau 2. Personnes blessées à bord du bateau
Gravité des blessures Membres d’équipage Passagers Personnes ne se trouvant pas à bord du bateau Total selon la gravité des blessures
Mortelles 0 0 0
Graves 0 0 0
Légères 0 1 1
Total des personnes blessées 0 1 1

1.3 Dommages

1.3.1 Aéronef

L’aéronef a été lourdement endommagé en raison de la collision.

1.3.2 Bateau

Le bateau a subi des dommages mineurs en raison de la collision.

1.4 Autres dommages

Sans objet.

1.5 Renseignements sur le personnel

1.5.1 Pilote de l’aéronef

Tableau 3. Renseignements sur le pilote de l’aéronef
Licence de pilote Licence de pilote professionnel
Date d’expiration du certificat médical 1er novembre 2021
Heures totales de vol 2275
Heures de vol sur type 1780
Heures de vol au cours des 7 jours précédant l’événement 4,4
Heures de vol au cours des 30 jours précédant l’événement 31,8
Heures de vol au cours des 90 jours précédant l’événement 90,6
Heures de vol sur type au cours des 90 jours précédant l’événement 88,1
Heures de service avant l’événement 7
Heures hors service avant la période de travail 168

Le pilote détenait la licence et les qualifications appropriées pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Il avait terminé sa formation périodique annuelle au sol le 24 mars 2021 et s’était soumis à une vérification annuelle des compétences le 2 février 2021 à bord de l’aéronef DHC-2.

Il avait également suivi une formation en gestion des ressources de l’équipage le 22 février 2021. Cette formation comprenait la gestion des menaces et des erreurs, la conscience situationnelle et la prise de décisions du pilote. Le pilote avait suivi une formation annuelle sur les procédures d’urgence en mars 2021, laquelle comprenait l’enfilage et le gonflage des gilets de sauvetage, avec formation pratique.

Le pilote n’avait pas suivi de formation sur l’évacuation d’urgence, et la réglementation ne l’exigeait pas au moment de l’événement.

Après l’événement, le 6 mars 2022, de nouvelles dispositions réglementaires sont entrées en vigueur à la suite de la recommandation A13-02 du BSTNote de bas de page 6. Ces dispositions exigent que les exploitants aériens qui exploitent des hydravions en vertu de la sous-partie 703 (Exploitation d’un taxi aérien) du Règlement de l’aviation canadien (RAC) offrent une formation sur l’évacuation subaquatique à leurs pilotesNote de bas de page 7.

1.5.2 Conducteur du bateau

Tableau 4. Renseignements sur le conducteur du bateau
Certification Certificat de compétences des conducteurs de petits bâtiments
Date d’expiration du certificat médical Non exigé
Nombre d’années d’expérience de l’exploitation de bateaux-taxis 20
Heures de service avant l’événement 9,5
Heures hors service avant la période de travail 10,5

En septembre 2008, le conducteur du Rocky Pass avait suivi une formation sur les compétences des conducteurs de petits bâtiments et une formation sur la sécurité de base des navires (Fonctions d’urgence en mer A3). À l’époque, le plan de la formation sur les compétences des conducteurs de petits bâtiments comprenait un minimum de 24 heures d’enseignement et un examen de 2 heures. Trois heures d’enseignement étaient consacrées à la sécurité de la navigation et à la prévention des abordages, ce qui permettait aux participants d’avoir une compréhension de base du Règlement sur les abordages.

Le conducteur, qui exploitait des bateaux-taxis depuis environ 20 ans, est le principal conducteur du Rocky Pass. Il ne détenait pas de certificat médical maritime; il n’était pas tenu, en vertu de la réglementation existante, d’en détenir un.

1.6 Renseignements sur l’aéronef et sur le bateau

1.6.1 Aéronef

L’aéronef de Havilland DHC-2 MK. I (Beaver) est un monomoteur à voilure haute et à hélice, équipé de flotteurs EDO 58-4580 (figure 2).

Tableau 5. Renseignements sur l’aéronef
Constructeur de Havilland Aircraft of Canada Ltd.*
Type, modèle et immatriculation DHC-2 MK. I, C-FMXR
Année de construction 1952
Numéro de série 374
Date d’émission du certificat de navigabilité 3 juin 1987
Total d’heures de vol cellule 23 630 heures
Type de moteur (nombre) Pratt & Whitney USA, R-985-AN-14B (1)
Type d’hélice (nombre) Hamilton Standard, 2D30-237 (1)
Masse maximale autorisée au décollage 5090 livres (2308,79 kg)
Type de carburant recommandé Essence aviation à indice d’octane minimum de 80/87
Type de carburant utilisé 100 LL

* Viking Air Ltd. est le titulaire actuel du certificat de type pour l’aéronef de Havilland DHC-2 MK. I (Beaver).

L’aéronef à l’étude a fait l’objet d’une inspection à intervalles de 300 heures le 15 septembre 2021. Au moment de l’événement, l’aéronef avait accumulé 42,6 heures de temps dans les airs depuis cette inspection.

La maintenance la plus récente avait eu lieu le 5 octobre 2021 et comprenait l’installation d’un réchauffeur d’échappement, le remplacement de l’ensemble de commande de chauffage et l’inspection d’un réchauffeur de cabine.

Rien n’indique que la défaillance d’un composant ou d’un système de l’aéronef a joué un rôle dans l’événement à l’étude.

Figure 2. Aéronef à l’étude (Source : tierce partie, avec autorisation)
Aéronef à l’étude (Source : tierce partie, avec autorisation)

1.6.2 Bateau

Tableau 6. Renseignements sur le bateau
Nom du bateau C12997BC (connu sous le nom de Rocky Pass)
Numéro officiel/numéro de permis C12997BC
Pavillon Canada
Type Bateau à passagers et bateau-taxi
Jauge brute 4,6
Longueur 7,92 m
Tirant d’eau 0,61 m
Construction 1994 par E & D Manufacturing Ltd., Qualicum Beach (Colombie-Britannique)
Propulsion 2 moteurs hors-bord de 150 hp
Nombre maximal de passagers 12
Exploitant Eagle Adventures Water Taxi

Le Rocky Pass (figure 3) a une coque en aluminium et une cabine fermée dans laquelle se trouvent le poste de conduite et une section sièges pour les passagers. La section sièges pour les passagers est constituée de rangées de sièges séparées par une allée centrale. Le poste de conduite, situé sur le côté tribord avant de la cabine, comporte un siège pour le conducteur, les commandes de propulsion et de l’équipement de navigation comprenant un radar, un radiotéléphone VHF, un compas magnétique et un GPS (système de positionnement mondial).

Figure 3. Photo du Rocky Pass (Source : BST)
Photo du Rocky Pass (Source : BST)

La cabine est dotée de fenêtres avant, latérales et arrière qui offrent au conducteur une vue généralement dégagée sur le plan horizontal. Le plafond est en aluminium. Les 2 moteurs hors-bord qui propulsent le bateau sont de 150 hp chacun et ont été installés en 2021.

1.7 Renseignements météorologiques

La station d’observation météorologique pour l’aviation la plus proche était l’aéroport de Tofino (CYAZ), à environ 7 NM du lieu de l’événement. La prévision d’aérodrome (TAF) la plus récente pour CYAZ au moment de l’événement indiquait ce qui suit :

Le message d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) émis pour CYAZ à 16 h était le suivant :

Il n’y a pas de manche à vent sur le quai de la rue First ou à proximité. Pour déterminer la direction et la vitesse du vent, les pilotes peuvent utiliser des drapeaux dans la ville de Tofino et observer les vagues, les arbres et les bateaux amarrés au port. D’autres données recueillies auprès d’une station météorologique sans fil, située sur le quai de la Garde côtière canadienne dans le port, ont enregistré des vents du sud-est à 3 nœuds.

Le jour de l’événement, le pilote avait effectué 6 décollages et 5 amerrissages avant l’amerrissage à l’étude et était au courant des conditions météorologiques et du vent à CAB4 et dans les environs.

Au moment de l’événement, la mer était calme et la marée était descendante. La température de l’eau était d’environ 11 °C.

1.8 Aides à la navigation

Sans objet.

1.9 Communications

1.9.1 Aéronefs

Les hydravions sont équipés de radios VHF qui fonctionnent sur des fréquences de l’aviation civile allant de 118,0 à 136,975 MHz. Les pilotes dans les environs de CAB4 utilisent généralement la fréquence de trafic d’aérodrome (122,15 MHz) pour communiquer avec d’autres aéronefs dans la région.

1.9.2 Navires

Les navires sont équipés de radios VHF qui fonctionnent sur des fréquences maritimes allant de 156,0 à 162,5 MHz. Les navires à proximité du quai de la rue First utilisent généralement la voie VHF 68 (156,425 MHz) pour communiquer entre eux.

1.10 Renseignements sur l’aérodrome et sur le port

1.10.1 Aérodrome

CAB4 est un hydroaérodrome enregistré situé à environ 7 NM au nord-ouest de CYAZ. Un certain nombre d’exploitants aériens et d’aéronefs privés utilisent l’aérodrome, et la circulation aérienne augmente pendant les mois d’été. Par exemple, il y a eu environ 40 décollages et amerrissages par jour en juillet 2019 et 14 décollages et amerrissages par jour en octobre 2019Note de bas de page 8.

Tofino Air exploite l’aérodrome, et le quai de la rue First est le quai d’hydroaérodrome affecté aux aéronefs. Cependant, divers autres quais privés dans le port de Tofino sont utilisés par les hydravions.

Il n’y a pas d’aires de décollage et d’amerrissage désignées dans le port de Tofino; cependant, les hydravions décollent et amerrissent régulièrement dans le passage Duffin, près des quais.

1.10.2 Port

Le port de Tofino a un certain nombre de quais publics et privés qui desservent des embarcations diverses, y compris des bateaux-taxis, des hydravions, des navires d’observation de baleines, des bateaux d’excursion, des embarcations de plaisance et des kayaks. Les 2 quais publics les plus achalandés sont le quai de la rue First (aussi appelé le quai municipal [Municipal Wharf]) et le quai de la rue Fourth (aussi appelé le port des petits bateaux de Tofino [Tofino Small Craft Harbour]). Le Rocky Pass utilise le quai de la rue First pour ses opérations de bateau-taxi.

L’administration portuaire de Tofino gère, exploite et entretient 3 des quais publics, dont le quai de la rue Fourth, qui offrent des installations accessibles aux pêcheurs commerciaux. L’administration portuaire de Tofino fait partie du Programme des ports pour petits bateaux, un programme national géré par Pêches et Océans Canada qui vise à maintenir l’ouverture des ports essentiels à l’industrie de la pêche et à assurer leur entretien. Le quai de la rue First n’est pas géré par l’administration portuaire de Tofino et, par conséquent, relève de la responsabilité générale du district de Tofino.

Les bateaux-taxis utilisent principalement le côté ouest du quai de la rue First, et les aéronefs se servent surtout du côté est. Les quais publics de Tofino sont fortement utilisés, en particulier pendant les mois d’été lorsque la population augmente considérablement en raison du tourisme. Les bateaux-taxis partagent l’espace d’accostage avec d’autres navires au quai, ce qui signifie que l’espace d’accostage n’est parfois pas disponible et que les conducteurs de bateaux-taxis doivent synchroniser l’arrivée de leur navire avec le départ d’un autre navire.

Tofino, qui compte une population permanente d’environ 2000 personnesNote de bas de page 9, est une destination touristique populaire qui accueille de nombreux visiteurs pendant les mois d’été. En 2018, par exemple, environ 600 000 personnes ont visité Tofino, avec un pic estimé cette année-là de près de 70 000 visiteurs au mois d’août. Les activités aquatiques sont un attrait majeur pour les visiteurs de TofinoNote de bas de page 10.

Le port de Tofino sert également de lien essentiel pour les personnes vivant dans des collectivités éloignées le long de la côte ouest de l’île de Vancouver, y compris les membres des Premières Nations Tla-o-qui-aht, Ahousaht et Hesquiaht. Les bateaux-taxis et les exploitants aériens transportent régulièrement les résidents de ces collectivités à destination de Tofino qui viennent faire l’épicerie, obtenir des soins médicaux et accéder au reste de l’île de Vancouver. Ils transportent également des travailleurs essentiels (p. ex., infirmiers, enseignants et spécialistes) à destination et en provenance de ces collectivités.

Après l’événement à l’étude, en octobre et en novembre 2021, 3 réunions ont eu lieu concernant la sécurité dans le port de Tofino. Divers exploitants de navires et d’aéronefs, dont Tofino Air, ont assisté à ces réunions. Parmi les sujets abordés, mentionnons la sensibilisation à la communication entre les exploitants, les pratiques exemplaires en matière de sécurité et les moyens possibles d’améliorer la sécurité dans le port.

1.11 Enregistreurs de données de vol et de voyage

1.11.1 Aéronef

L’aéronef n’était muni ni d’un enregistreur de données de vol ni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage, et la réglementation n’exigeait ni l’un ni l’autre. Cependant, l’aéronef était équipé d’un système de suivi des vols par satellite Spidertracks à des fins de surveillance et de suivi des vols. Tofino Air a donné au BST accès aux données de vol sur le site Web de Spidertracks.

De plus, le BST a été en mesure d’extraire et d’utiliser les données de suivi GPS d’une application installée sur un appareil mobile appartenant à l’une des passagers de l’aéronef.

1.11.2 Bateau

Le bateau n’était pas équipé d’un enregistreur de données de voyage, et la réglementation en vigueur ne l’exigeait pas.

1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

1.12.1 Aéronef

L’hélice et le flotteur gauche de l’aéronef ont été endommagés en raison de la collision.

Les 2 pales de l’hélice étaient tordues et recourbées et avaient des ébréchures et entailles sur les bords d’attaque. Il manquait environ 8 cm de l’extrémité extérieure d’une pale, et l’autre pale avait une ébréchure de 1,2 cm de profondeur et de 1,7 cm de long sur le bord d’attaque situé à environ 6,3 cm de l’extrémité de la pale.

Le montant arrière du flotteur gauche s’est déconnectée et la barre d’écartement arrière a été endommagée. Il y avait des ondulations et des dommages importants sur les revêtements extérieurs et intérieurs du flotteur gauche.

Lors de la collision avec le côté tribord du bateau, le flotteur gauche s’est courbé vers le haut et vers l’intérieur. Les marques de l’hélice sur la partie avant et intérieure du flotteur gauche indiquent que le flotteur s’est courbé suffisamment vers le haut pour que l’hélice le heurte plusieurs fois et le perce, laissant un trou d’environ 8 cm de long.

Le revêtement sur le dessous du flotteur gauche était gravement ondulé, créant un trou dans le dessous du flotteur. Ce trou a permis à l’eau de pénétrer dans le flotteur gauche (figure 4).

Figure 4. L’aéronef immédiatement avant d’être tiré vers le quai (Source : Gendarmerie royale du Canada)
L’aéronef immédiatement avant d’être tiré vers le quai (Source : Gendarmerie royale du Canada)

1.12.2 Bateau

Le côté tribord de la coque du Rocky Pass a subi des égratignures et des entailles au-dessus de la ligne de flottaison quand l’hélice de l’aéronef l’a heurtée (figure 5). La coque est restée intacte et le bateau n’a pas pris l’eau.

L’hélice de l’aéronef a également heurté un pare-chocs en caoutchouc qui était suspendu au-dessus du côté tribord du bateau par une corde. La corde était fixée à la rambarde sur le dessus de la cabine. La corde a été tirée avec une force importante jusqu’à ce qu’elle se brise. La rambarde s’est courbée par la force de l’hélice tirant sur le pare-chocs. Le pare-chocs n’a pas été récupéré.

Figure 5. Dommages à la coque du côté tribord du bateau (Source : propriétaire du bateau)
Dommages à la coque du côté tribord du bateau (Source : propriétaire du bateau)

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Rien n’indique que des facteurs médicaux ou la fatigue ont nui à la performance du pilote ou du conducteur du bateau.

1.14 Incendie

Il n’y a pas eu d’incendie.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

1.15.1 Aéronef

1.15.1.1 Évacuation

Lorsque le pilote s’est rendu compte que le flotteur gauche était endommagé à l’avant, il a ordonné aux passagers d’évacuer l’aéronef. L’aéronef s’est incliné vers la gauche et vers l’avant, puis s’est brièvement immobilisé en position verticale (position nez en bas et queue dans les airs) pour finalement continuer de couler et se renverser. L’aéronef était complètement renversé environ 2 minutes et 30 secondes après la collision.

Les occupants sont tous sortis de l’aéronef avant qu’il ne chavire et ont été transportés au quai de la rue First par divers navires qui étaient venus pour prêter assistance. Le passager qui occupait le siège avant droit est sorti par la porte avant droite. La passagère qui occupait le siège arrière gauche est sortie par la porte du milieu à gauche. Les autres passagers et le pilote sont sortis par la porte du milieu à droite (figure 6). La passagère qui occupait le siège arrière gauche est sortie sur l’aile gauche et a pu monter à bord d’un navire sans entrer dans l’eau. Tous les autres occupants sont entrés dans l’eau après être sortis de l’aéronef et ont dû nager sur une courte distance pour monter à bord de divers navires. L’enquête n’a pas permis de déterminer précisément le temps que chaque occupant a passé dans l’eau; cependant, il a été estimé qu’il s’était écoulé jusqu’à 2 minutes.

Figure 6. Schéma montrant la direction de l’évacuation de chaque occupant (Source : BST)
Schéma montrant la direction de l’évacuation de chaque occupant (Source : BST)
1.15.1.2 Vêtements de flottaison individuels

En vertu de l’article 703.83 du RAC, les exploitants aériens d’hydravions sont tenus d’inclure des procédures dans leur manuel d’exploitation de la compagnie pour s’assurer que les membres d’équipage et les passagers portent un vêtement de flottaison lorsqu’un hydravion est utilisé sur un plan d’eau ou au-dessus de celui-ci. Les commandants de bord d’hydravions sont également tenus d’ordonner aux membres d’équipage et aux passagers de porter un vêtement de flottaison lorsque l’hydravion est utilisé sur un plan d’eau ou au-dessus de celui-ciNote de bas de page 11. L’article 703.83 du RAC est entré en vigueur le 6 juin 2021 à la suite de la recommandation A11-06 du BSTNote de bas de page 12.

Lors de l’événement à l’étude, le pilote et tous les passagers portaient des VFI à la taille, lesquels respectaient les exigences réglementaires. Ce type de VFI est rangé dans une sacoche et porté à la taille, comme une ceinture. Pour gonfler le VFI, la personne tire sur une languette, puis passe le VFI gonflé par-dessus la tête et l’attache au niveau du cou. Avant le départ, le pilote avait indiqué aux passagers la façon d’utiliser les VFI. Le VFI d’un passager a été gonflé pendant l’évacuation.

Ce type de VFI porté à la taille est seulement conçu pour les personnes âgées de 16 ans et plus qui pèsent plus de 40 kg. Le pilote n’était pas au courant de ces limites. Un passager à bord de l’aéronef était âgé de moins de 16 ans et pesait moins de 40 kg.

Tofino Air utilise normalement un VFI différent pour les passagers âgés de moins de 16 ans pesant plus de 16 kg (35 livres) et moins de 40 kg (88 livres). Tofino Air avait ce type de VFI disponible à la base le jour de l’événement.

1.15.2 Bateau

Après la collision, le conducteur du bateau s’est arrêté pour évaluer les dommages et vérifier l’état des passagers. Il a ensuite manœuvré le bateau vers l’hydravion et a embarqué le pilote pendant que d’autres navires à proximité embarquaient les passagers de l’aéronef. Le conducteur du bateau s’est ensuite rendu au quai de la rue First pour y déposer le pilote et les passagers du bateau.

Le Rocky Pass transportait l’équipement de sauvetage suivant : des gilets de sauvetage, des VFI, 6 fusées éclairantes, 1 bouée de sauvetage et 1 extincteur.

1.16 Essais et recherche

1.16.1 Rapports de laboratoire du BST

Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Exploitant de l’aéronef

Tofino Air détient un certificat d’exploitation aérienne qui lui permet d’offrir des vols panoramiques et nolisés conformément aux sous-parties 702 (Opérations de travail aérien) et 703 (Exploitation d’un taxi aérien) du RAC. Tofino Air ne fonctionne pas selon un horaire fixe.

Pendant la haute saison, de mai à septembre, Tofino Air exploite 2 aéronefs DHC-2 et 1 aéronef C180. L’événement s’est produit pendant la basse saison et 1 aéronef DHC-2 était utilisé à Tofino à ce moment-là.

Le manuel d’exploitation de la compagnie de Tofino Air ne comporte pas de procédures officielles propres à l’exploitation à CAB4, et la réglementation n’en exige pas.

1.17.2 Exploitant du bateau

Le Rocky Pass est exploité par Eagle Adventures Water Taxi. Le bateau sert principalement de bateau-taxi pour transporter des passagers entre Ahousaht et Tofino. Il est également utilisé pour transporter des passagers à Hot Springs Cove et effectuer des excursions d’observation des baleines et des ours. Le Rocky Pass n’est pas exploité selon un horaire fixe.

Les navires à passagers comme le Rocky Pass, d’une jauge brute inférieure à 15 et transportant au plus 12 passagers, sont définis comme des « petits bâtiments » et sont donc assujettis au Règlement sur les petits bâtiments. Même si de tels navires ne sont pas tenus d’être inspectés ou certifiés par Transports Canada (TC) pour être exploités, ils doivent respecter les exigences réglementairesNote de bas de page 13,Note de bas de page 14 en tout temps.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Modèles mentaux

Les modèles mentaux sont des représentations internes qui permettent à une personne de décrire, d’expliquer et de prédire des événements ou des situations dans son environnementNote de bas de page 15. La création de modèles mentaux permet de réduire les exigences cognitives, de sorte que l’attention peut être dirigée ailleurs. Lorsqu’un modèle mental est adopté, il génère des attentes et résiste au changement. De nouveaux renseignements convaincants doivent être assimilés pour modifier un modèle mental.

Lorsque les personnes prennent des décisions (en partie en se construisant un modèle mental du monde), les limites de leurs sens font en sorte qu’un modèle mental n’est jamais complètement exact. S’il y a des écarts ou des conflits dans le modèle mental d’une personne, l’esprit tend à trouver des moyens de leur donner un sens afin qu’ils s’intègrent au modèle mental existant. Parfois, cependant, ces écarts ou conflits sont des signes qui indiquent que le modèle mental n’est pas exact, et les actions qui reposent sur ce dernier peuvent être incorrectes compte tenu du contexte réel.

1.18.2 Attention exclusive

L’attention exclusive s’entend d’un état cognitif par lequel l’attention d’une personne est concentrée sur une tâche ou un concept particulier pendant une période donnée. Dans les contextes opérationnels, une attention exclusive permet aux exploitants de rechercher activement des types spécifiques d’information à l’appui d’une tâche. Si un exploitant doit effectuer des tâches simultanées qui nécessitent chacune le même degré d’attention, le rendement global diminue. Par exemple, l’exécution d’une tâche visuelle, comme la surveillance de la circulation à un poste d’accostage et la détection du moment où le poste d’accostage se libère pour l’amarrage, exige une plus grande attention visuelle et réduit la capacité d’effectuer d’autres tâches visuelles, comme le balayage pour déceler d’autre trafic à proximité. Selon des études, les stimuli dans la vision périphérique sont plus difficiles à détecter lorsque l’attention est concentrée sur une tâche centraleNote de bas de page 16.

1.18.3 Détection visuelle de mouvement

Les différences physiologiques entre les visions fovéale et périphérique influent sur la perception des objets se déplaçant vers une personne. Les personnes sont sensibles au mouvement dans leur vision périphérique; cependant, cette sensibilité diminue lorsque les objets sont stationnaires dans le champ de vision. Si une cible converge au même point que la personne qui regarde, le gisement relatif restera constant et il est probable que la cible ne sera pas remarquée, car sa position sur la rétine semble stationnaire (figure 7). En outre, bien que les systèmes de vision fovéale et périphérique puissent détecter le mouvement, le système fovéal réussit mieux à détecter les mouvements lents, tandis que le système périphérique est meilleur pour détecter les mouvements rapidesNote de bas de page 17.

Figure 7. Diagramme d’un scénario où la cible semble stationnaire (Source : BST)
Diagramme d’un scénario où la cible semble stationnaire (Source : BST)

1.18.4 Contraste

L’ampleur du contraste entre un objet sur l’eau et son arrière-plan peut avoir une incidence sur la capacité d’un pilote à détecter l’objet; les objets qui ont un contraste minimal avec leur arrière-plan sont plus difficiles à détecter. En outre, les arrière-plans qui comprennent des caractéristiques terrestres peuvent interagir avec la forme de l’objet et réduire le caractère distinctif de l’objetNote de bas de page 18.

1.18.5 Structure de l’aéronef et configuration des pare-brise

Le fuselage de l’aéronef DHC-2 présente une structure entre les 2 fenêtres gauche les plus à l’avant (figure 8). Les pilotes dont le siège est réglé pour qu’il soit le plus reculé possible, comme c’était le cas dans l’événement à l’étude, s’assoient à côté de cette structure, ce qui peut limiter la vue à gauche de l’aéronef.

Figure 8. Structure de l’aéronef à l’étude (photo prise en 2010, avec les anciennes couleurs) (Source : Tofino Air, avec annotations du BST)
Structure de l’aéronef à l’étude (photo prise en 2010, avec les anciennes couleurs) (Source : Tofino Air, avec annotations du BST)

Les configurations de pare-brise d’aéronef peuvent également limiter le champ de vision d’un pilote et nuire à sa capacité de détecter des objets (figure 9). Dans le cadre de l’analyse effectuée par le laboratoire du BST, il a été déterminé que, pendant l’étape de la courte finale et de la prise de contact avec l’eau, le bateau aurait probablement été visible par le pilote dans le bas du pare-brise gauche pendant environ 25 secondes alors que le bateau se déplaçait de l’arrière du jambage de la fenêtre gauche jusqu’au milieu du pare-brise gauche. Le bateau aurait semblé rester immobile au milieu du pare-brise gauche pendant 12 secondes, jusqu’à ce que la collision se produise.

Figure 9. Poste de pilotage de l’aéronef à l’étude (Source : BST)
Poste de pilotage de l’aéronef à l’étude (Source : BST)

1.18.6 Limites visuelles du bateau

Outre le trafic maritime régulier, les hydravions constituent un danger qui peut se présenter sur l’eau lors du passage dans le port de Tofino. Les hydravions qui en sont aux étapes du décollage et de l’amerrissage, que ce soit sur l’eau ou dans les airs, se déplacent à une vitesse plus élevée que le trafic maritime et se trouvent dans la zone portuaire pendant une période relativement courte. Pour les navires qui ont des plafonds opaques, comme le Rocky Pass, le champ de vision du conducteur est limité par le plafond, ce qui peut rendre difficile la détection visuelle des aéronefs qui se déplacent relativement plus vite. Les conceptions de cabine qui intègrent des plafonds solides sont typiques des bateaux-taxis exploités dans la région.

Lorsque le conducteur du Rocky Pass était assis au poste de conduite, la portée verticale de son champ de vision à partir du plan horizontal vers le haut était d’environ 35°. Au-delà de ce point, le plafond obscurcissait son champ de vision. Lorsque le Rocky Pass est sorti du passage Deadman, l’aéronef se trouvait dans le champ de vision du conducteur, mais il était dans sa vision périphérique. L’aéronef n’était pas masqué par le plafond.

Selon les instructions nautiquesNote de bas de page 19, pour la côte du Pacifique, [traduction] « dans les dernières années, le nombre d’incidents de trafic maritime entre les navires et les hydravions a augmentéNote de bas de page 20 ». Les instructions nautiques conseillent aux conducteurs de navires [traduction] « d’éviter les zones où l’on sait que les hydravions sont exploités, en particulier dans des conditions de mauvaise visibilitéNote de bas de page 21 ».

1.18.7 Évitement des collisions dans les ports partagés par des exploitants aériens et maritimes

Il y a un certain nombre de ports en Colombie-Britannique partagés par des exploitants de navires et d’aéronefs, y compris ceux de Vancouver, de Victoria, de Nanaimo et de Campbell River. Ces ports utilisent diverses stratégies pour atténuer les risques de collision entre des aéronefs et des navires, comme des aires d’amerrissage désignées, des feux activés par le pilote et des limites de vitesse pour les navires.

1.18.7.1 Aires d’amerrissage désignées

Des aires d’amerrissage désignées pour les hydravions peuvent aider à garder les zones d’exploitation des aéronefs libres en permettant aux conducteurs de navires de planifier des routes en dehors de ces zones. Les limites de ces aires d’amerrissage désignées sont souvent indiquées par des bouées, de sorte qu’elles sont clairement visibles par les conducteurs de navires. Les conducteurs de navires qui doivent passer près d’une aire d’amerrissage peuvent atténuer le risque de conflit en assurant une surveillance, précisément pour déceler tout aéronef qui approche.

L’information sur les aires d’amerrissage désignées est mise à la disposition des conducteurs de navires dans les cartes marines et les instructions nautiques. À titre d’exemple, la figure 10 montre la carte marine du port de Nanaimo, qui comporte à la fois une aire d’amerrissage désignée et un feu activé par le pilote. Il n’y a pas d’aire d’amerrissage désignée pour les hydravions à Tofino.

Figure 10. Carte du port de Nanaimo qui montre l’aire d’amerrissage désignée pour les hydravions, la route des traversiers et le feu stroboscopique activé par le pilote (Source : Service hydrographique du Canada, avec annotations du BST)
Carte du port de Nanaimo qui montre l’aire d’amerrissage désignée pour les hydravions, la route des traversiers et le feu stroboscopique activé par le pilote (Source : Service hydrographique du Canada, avec annotations du BST)
1.18.7.2 Feu activé par le pilote

Les aides visuelles, comme les feux aéronautiques clignotants qui sont activés par le piloteNote de bas de page 22 d’un hydravion, sont une façon pour les pilotes de diffuser leurs intentions aux conducteurs de navires dans la région. Le port de Tofino n’était pas équipé de feux activés par le pilote.

1.18.7.3 Limites de vitesse pour les navires

Les limites de vitesse pour les navires peuvent aider à faire en sorte que le trafic maritime se déplace à des vitesses qui permettent aux conducteurs de navires de prendre des mesures efficaces afin d’éviter les dangers. Dans certains ports de la Colombie-Britannique, la vitesse respecte les limites de vitesse imposéesNote de bas de page 23. Dans d’autres, le choix de la vitesse est laissé à la discrétion de chaque conducteur. Pour déterminer une vitesse de sécurité, le conducteur évalue le risque que posent divers facteurs, comme la géographie du secteur, les conditions météorologiques, la visibilité, les caractéristiques du navire, le trafic à proximité, la proximité de la rive, le niveau d’expérience de l’équipage, les risques de dommages causés par le sillage et les débris flottant dans l’eau.

Au Canada, les administrations localesNote de bas de page 24 peuvent demander à TC de mettre en œuvre des restrictions en vertu du Règlement sur les restrictions visant l’utilisation des bâtiments (RRVUB). TC a publié un guide intitulé Guide des administrations locales : Règlement sur les restrictions visant l’utilisation des bâtimentsNote de bas de page 25 afin d’aider les administrations locales à présenter une demande officielle en vertu du règlement susmentionné.

À l’heure actuelle, 61 restrictions de vitesse sont en vigueur à certains endroits en Colombie-BritanniqueNote de bas de page 26. Quelques exemples de limites de vitesse et des raisons de leur instauration sont indiqués dans le tableau 7.

Tableau 7. Exemples de limites de vitesse en vigueur à certains endroits en Colombie-Britannique
Emplacement Limite de vitesse Justification
Baie Hardy (port intérieur), Port Hardy (Colombie-Britannique) 5 km/h Préoccupation relative à la sécurité parce que le port devenait de plus en plus achalandé et crainte que les grands sillages créés par des navires se déplaçant rapidement endommagent d’autres navires.
Havre Tsehum, North Saanich (Colombie-Britannique) 8 km/h De nombreux signalements de quasi-accidents dans le havre et à proximité, ainsi que des dommages aux navires qui se ravitaillaient en carburant, causés par les grands sillages de navires qui se déplaçaient trop rapidement.
Havre Ganges, île Saltspring (Colombie-Britannique) 10 km/h Érosion à la laisse des hautes eaux, dommages matériels et dommages aux quais causés par les entrées et sorties trop rapides des navires dans le havre.

Aucune limite de ce genre ne s’appliquait aux navires dans le port de Tofino, et le district de Tofino n’était pas au courant du RRVUB ou du guide au moment de l’événement.

1.18.7.4 Évitement des collisions et vitesse de sécurité

Au Canada, le Règlement sur les abordages établit des règles pour aider à prévenir les collisions dans les voies navigables. Les règles s’appliquent aux navires et aux hydravions lorsque l’hydravion circule sur l’eau. Conformément aux règles, les hydravions sur l’eau doivent, en général, « se tenir largement à l’écart de tous les navires et éviter de gêner leur navigationNote de bas de page 27 ». Dans les cas où il existe un risque de collision, le Règlement sur les abordages prévoit que le bâtiment (navire ou hydravion) qui voit l’autre sur tribord doit s’écarter de la route de celui-ci et éviter de croiser sa route sur l’avantNote de bas de page 28.

Les règles exigent également que les navires se déplacent à une vitesse de sécurité en tout temps afin que des mesures appropriées et efficaces puissent être prises pour éviter les collisions et que les navires puissent être arrêtés à une distance appropriée aux circonstances et aux conditions existantesNote de bas de page 29.

Les conducteurs de navires à passagers d’une jauge brute inférieure à 15, comme le Rocky Pass, sont tenus de détenir un certificat sur les compétences des conducteurs de petits bâtiments, qui prévoit une formation de 3 heures sur la prévention des collisions.

1.18.8 Événement antérieur

Le 17 août 2020, un aéronef Cessna 208B équipé de flotteurs effectuait un vol entre le port de Vancouver et le port de Tofino avec 1 pilote et 9 passagers à bordNote de bas de page 30. Pendant que l’aéronef amerrissait, un bateau-taxi est passé devant lui, ce qui a obligé l’aéronef à utiliser l’inversion de poussée maximale pour éviter une collision. Ni le pilote ni le conducteur du bateau n’avait remarqué l’autre avant de se trouver tout près l’un de l’autre.

1.18.9 Cérémonie de l’eau

En novembre 2021, les communautés locales des Premières Nations ont tenu une cérémonie de l’eau sur le quai de la rue First à Tofino et dans le port de Tofino afin de purifier l’eau, les pilotes, le conducteur du bateau, les passagers, les aéronefs et les navires concernés par 2 accidents d’aéronefsNote de bas de page 31, dont celui à l’étude, survenus dans le port de Tofino en 2021 et de rassembler la communauté pour guérir et tourner la page.

2.0 Analyse

2.1 Généralités

Rien n’indique que la défaillance d’un composant ou d’un système de l’aéronef ou du bateau a joué un rôle dans l’événement à l’étude.

L’analyse portera sur les facteurs qui ont influé sur les perceptions visuelles du pilote de l’aéronef et du conducteur du bateau, les questions locales liées à la sécurité dans le port et l’utilisation de vêtements de flottaison individuels (VFI) à bord de l’aéronef.

2.2 Facteurs ayant influé sur la perception visuelle

2.2.1 Aéronef

À son arrivée à l’hydroaérodrome du port de Tofino (CAB4) (Colombie-Britannique), le pilote avait une vue dégagée du port et, pendant que l’aéronef était à l’étape vent arrière du circuit vers la gauche, l’aire d’amerrissage prévue semblait être libre, sans trafic ni obstacles. Rien d’inhabituel n’a été observé pour justifier des mesures spéciales visant à suivre la circulation entrante sur l’eau jusqu’à l’aire d’amerrissage, et le pilote a poursuivi les balayages visuels habituels pendant qu’il se trouvait dans le circuit vers la gauche pour l’amerrissage.

La coque en aluminium du Rocky Pass, vue des airs, était d’une couleur semblable aux eaux grises environnantes dans le port; il s’agissait donc d’une cible offrant un contraste minimal par rapport à son arrière-plan immédiat. Selon les données recueillies au cours de l’enquête, il semblerait que, lorsque l’aéronef manœuvrait pour amerrir dans le port de Tofino, l’entrée du Rocky Pass dans le port était perceptible principalement en raison de son sillage, qui était blanc et qui contrastait donc davantage avec les eaux grises environnantes. Cependant, d’autres caractéristiques telles que des structures blanches et des rochers sur le rivage et à proximité ont probablement rendu le sillage moins distinct.

Lorsque l’aéronef virait dans le circuit vers la gauche en train de manœuvrer pour l’amerrissage, son aile abaissée masquait la circulation sur l’eau qui était perpendiculaire au côté gauche de l’aéronef. De plus, le fuselage présente une structure entre les 2 fenêtres gauche les plus à l’avant; les pilotes qui règlent leur siège pour qu’il soit le plus reculé possible, comme c’était le cas dans l’événement à l’étude, s’assoient à côté de cette structure, ce qui nuit à leur capacité de voir des objets du côté gauche de l’aéronef à moins qu’ils ne se penchent vers l’avant pour effectuer des balayages visuels. Au moment où l’aéronef a commencé à virer de l’étape de base en finale, le Rocky Pass venait de sortir du passage Deadman et sa trajectoire était perpendiculaire au côté gauche de l’aéronef.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

L’aile abaissée de l’aéronef pendant le virage de l’étape de base en finale, jumelée à la position du siège du pilote, a nui à la vue du pilote par la fenêtre gauche, et l’entrée du Rocky Pass dans le port, qui était inattendue dans une zone par ailleurs dégagée, n’a pas été détectée.

En approche finale, l’attention d’un pilote est normalement axée sur un balayage visuel de l’extérieur pour déceler la circulation et les obstacles dans l’aire d’amerrissage, en jetant occasionnellement un coup d’œil à l’intérieur pour les vérifications des instruments (p. ex., vitesse anémométrique, altitude). Cependant, tout juste avant la prise de contact avec l’eau, l’attention d’un pilote est généralement centrée sur l’horizon pour juger de l’assiette de l’aéronef et de son altitude par rapport à l’eau. Cette attention concentrée droit devant n’est pas inhabituelle, mais cela signifie que la portée des balayages visuels est plus étroite.

Une fois l’aéronef en approche finale, le Rocky Pass serait apparu dans le pare-brise gauche de l’aéronef, du point de vue du pilote, alors que le bateau se dirigeait vers le quai de la rue First. Dans les 25 secondes à partir du moment où le bateau aurait été visible pour la première fois dans le bas du pare-brise gauche, en se déplaçant de l’arrière du jambage de la fenêtre gauche vers le milieu du pare-brise gauche, le mouvement du bateau dans le pare-brise aurait été suffisamment lent pour ne pas être remarqué. La vision périphérique est plus apte à détecter les mouvements rapides que les mouvements lents.

Dans les 12 secondes avant l’impact, la position du bateau dans le pare-brise aurait semblé rester immobile parce que, lorsque 2 objets se déplacent vers le même point en même temps, le gisement relatif pour chacun reste constant. Étant donné que la vision humaine est plus apte à détecter le mouvement que des cibles stationnaires, le bateau est passé inaperçu. Il est également probable qu’à certains moments, alors que l’aéronef était en courte finale et pendant l’étape de la prise de contact avec l’eau, la capacité du pilote de voir le bateau était réduite, car sa vue était obstruée par le nez et le jambage de la fenêtre gauche de l’aéronef.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

Au cours de l’étape de la prise de contact avec l’eau, l’attention du pilote, qui était principalement concentrée droit devant, combinée au mouvement relatif faible ou nul du bateau dans le pare-brise gauche et à l’obstruction visuelle causée par le nez et le jambage de la fenêtre gauche de l’aéronef, a réduit la probabilité de détecter le bateau.

2.2.2 Bateau

Lorsque le bateau est entré dans le port par le passage Deadman, le conducteur du bateau a effectué un balayage visuel du port et n’a pas observé de circulation qui nuirait à l’itinéraire prévu pour atteindre le quai de la rue First. À ce moment-là, l’aéronef était dans la vision périphérique du conducteur et le Rocky Pass se déplaçait à une vitesse d’environ 25 nœuds. Cette vitesse est conforme à la vitesse à laquelle la plupart des autres bateaux-taxis circulent à l’intérieur du port de Tofino. Cependant, les vitesses dans cette plage ont des répercussions sur la perception de l’information visuelle qui est essentielle pour qu’un conducteur soit conscient d’autre trafic.

Pour les conducteurs de bateaux-taxis comme le Rocky Pass, l’établissement d’un modèle mental exact des aéronefs et des autres navires dans le port de Tofino est largement fondé sur la vue. Voyager à des vitesses plus rapides réduit le temps dont disposent les conducteurs pour détecter les objets autour d’eux, en particulier lorsque l’objet est dans leur vision périphérique. À des vitesses plus grandes, les conducteurs ont également moins de temps pour déterminer la trajectoire d’un objet en mouvement par rapport à leur propre navire. Les conducteurs de navires peuvent également se trouver dans des situations où le gisement relatif d’un objet convergent demeure constant, ce qui le rend plus difficile à détecter parce qu’il semble stationnaire.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

La vitesse à laquelle le bateau se déplaçait et la position relativement stationnaire de l’aéronef dans la vision périphérique du conducteur ont probablement contribué à ce que le conducteur ne détecte pas l’aéronef lorsque le Rocky Pass sortait du passage Deadman.

Pour le conducteur du bateau, l’approche vers le quai de la rue First était une étape du voyage faisant intervenir de nombreuses tâches; il devait partager son attention entre les tâches de navigation et la surveillance visuelle du trafic maritime entrant et sortant au quai afin de déterminer la disponibilité d’un poste d’accostage. Après que le conducteur du bateau avait balayé visuellement le port et établi un modèle mental selon lequel son itinéraire prévu était dégagé, son attention visuelle a été principalement concentrée vers l’avant, vers le poste d’accostage, pour accomplir les multiples tâches qui lui incombaient.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

Après que le conducteur du bateau a sorti du passage Deadman, son attention visuelle était principalement concentrée vers l’avant, vers le poste d’accostage, ce qui a réduit la probabilité de détecter l’approche de l’aéronef du côté tribord du bateau.

2.2.3 La collision

L’aéronef s’est posé sur l’eau à approximativement 80 m du Rocky Pass. Trois secondes après l’amerrissage, le pilote a aperçu le Rocky Pass et a viré à droite pour réduire la force d’impact. Le conducteur du bateau a remarqué l’aéronef à peu près au même moment, après avoir été alerté par des personnes qui lui faisaient signe sur le quai. Le conducteur a mis la barre à bâbord pour tenter d’éviter une collision, mais, compte tenu de la distance entre l’aéronef et le bateau, une collision était inévitable.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

La perception visuelle du pilote de l’aéronef et du conducteur du bateau a été influencée par plusieurs facteurs, et ni l’un ni l’autre ne s’est rendu compte que leurs routes allaient se croiser avant qu’il ne soit trop tard pour que les mesures d’évitement soient efficaces. Par conséquent, l’aéronef et le bateau sont entrés en collision, ce qui a causé des dommages importants à l’aéronef et obligé les occupants à effectuer une évacuation d’urgence.

2.3 Sécurité du port

Dans le port de Tofino, les hydravions effectuent un grand nombre de décollages et d’amerrissages à proximité de quais publics qui sont beaucoup utilisés par les bateaux-taxis, les embarcations de plaisance et d’autres navires. En quittant le port, les navires peuvent rapidement atteindre des vitesses d’environ 25 nœuds et peuvent passer d’une position amarrée au quai à une position qui nuit à la trajectoire d’amerrissage d’un aéronef en moins d’une minute. Les aéronefs décollent et amerrissent également à divers endroits dans le port en fonction du vent, de la circulation et du bruit, de sorte qu’il n’y a aucune prévisibilité quant à l’endroit où ils seront exploités à un moment donné. De plus, ni les aéronefs ni les bateaux-taxis dans le port ne sont exploités selon un horaire fixe, de sorte qu’il n’y a aucune prévisibilité en ce qui concerne le moment de leurs départs et de leurs arrivées, et la dynamique dans le port peut changer rapidement.

L’identification visuelle d’une cible qui s’approche est actuellement le seul moyen disponible permettant aux pilotes d’hydravions et aux conducteurs de navires dans le port de Tofino d’atténuer les risques de collision. Cependant, des facteurs tels que l’éblouissement du soleil, le contraste avec l’arrière-plan, la taille et la couleur du navire ou de l’aéronef, ainsi que les lignes de visibilité à partir de l’aéronef et du navire, peuvent entraver la vue des pilotes et des conducteurs de navires et limiter leur capacité à cerner les risques de collision. La tâche peut devenir encore plus difficile dans des conditions de visibilité réduite. De plus, comme les aéronefs et les navires se servent de différentes fréquences radio à très haute fréquence (VHF), ils ne peuvent pas maintenir une écoute permanente pour connaître les intentions de l’autre.

Fait établi : Autre

Les hydravions et les navires se servent de différentes fréquences radio VHF; par conséquent, les pilotes et les conducteurs de navires ne sont au courant d’aucune communication que l’autre pourrait transmettre, comme les intentions d’arrivée ou de départ, les communications ou les avertissements liés au trafic, ou les renseignements sur l’évitement des collisions.

Le port de Tofino n’a pas de limites de vitesse, ce qui signifie que les navires peuvent se déplacer très rapidement, augmentant ainsi les risques de collision. Des vitesses plus lentes donnent aux conducteurs plus de temps pour évaluer pleinement et éviter les situations très rapprochées. Pour atténuer les risques de collision, certains ports de la Colombie-Britannique ont mis en œuvre des restrictions de vitesse conformément au Règlement sur les restrictions visant l’utilisation des bâtiments (RRVUB) de Transports Canada (TC). La procédure de TC pour l’instauration des restrictions de vitesse dans les ports repose sur le fait que les administrations locales reconnaissent qu’il existe un risque dans leurs ports, s’efforcent de façon proactive de connaître la procédure de mise en œuvre d’une restriction et présentent une demande de restriction à TC. Toutefois, étant donné que les administrations locales des différents ports ont divers degrés de connaissances maritimes et des mandats différents, il se peut qu’elles n’aient ni l’expérience nécessaire pour déterminer le niveau de risque dans leurs ports ni le mandat de le faire. À Tofino, on ne pouvait pas déterminer clairement qui pouvait agir à titre d’administration locale, et TC ne communique pas de façon proactive avec les administrations locales pour les informer du RRVUB et de leur capacité à mettre en œuvre des restrictions de vitesse. Le district de Tofino n’était pas au courant du RRVUB et de la procédure de mise en œuvre des restrictions de vitesse.

Fait établi quant aux risques

Si le processus de TC pour la mise en œuvre de vitesses de sécurité dans les ports repose uniquement sur le fait que les administrations locales reconnaissent qu’il existe un risque et lancent de façon proactive le processus de mise en œuvre d’une restriction, il y a un risque que des restrictions ne soient pas mises en œuvre et que les navires continuent de se déplacer à des vitesses qui présentent des risques de collision.

Enfin, certains ports de la Colombie-Britannique qui sont partagés par le trafic aérien et maritime ont des aires d’amerrissage et de décollage désignées pour les hydravions et/ou ont des feux aéronautiques clignotants qui peuvent être activés par le pilote d’un hydravion lorsqu’il a l’intention d’amerrir ou de décoller. Les feux activés par le pilote permettent aux pilotes d’hydravions d’avertir les conducteurs de navires de leur présence. Les aires d’amerrissage désignées permettent aux conducteurs de navires de savoir où les hydravions peuvent décoller et amerrir, ce qui leur permet d’emprunter des routes qui évitent une rencontre avec un hydravion. Toutefois, aucun de ces moyens de défense n’avait été mis en œuvre dans le port de Tofino, et les pilotes et les conducteurs de navires se fiaient uniquement à l’identification visuelle d’autre trafic dans le secteur pour atténuer les risques de collision.

Fait établi quant aux risques

Si les ports achalandés qui accueillent à la fois le trafic maritime et aérien n’ont pas d’aires d’amerrissage désignées pour les aéronefs, de moyens pour que les aéronefs signalent leur présence ou de limites de vitesse pour les navires, il y a un risque accru de collision en raison des navires et des aéronefs qui sont exploités tout près les uns des autres à des vitesses élevées.

2.4 Vêtements de flottaison individuels

Dans l’événement à l’étude, le pilote et tous les passagers portaient un VFI rangé dans une sacoche se portant à la taille qui respectait les exigences réglementaires. Cependant, ces VFI sont conçus pour des personnes âgées de plus de 16 ans pesant plus de 40 kg.

L’un des passagers du vol était plus jeune et pesait moins que le poids minimal pour le VFI; par conséquent, le VFI ne convenait pas à la taille de ce passager. Un VFI de taille appropriée est un facteur important pour la capacité de survie.

Fait établi quant aux risques

Si les passagers d’un aéronef portent des VFI qui ne sont pas de la bonne taille, il y a un risque que le dispositif ne fonctionne pas comme prévu, ce qui pourrait entraîner des blessures ou la mort.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

  1. L’aile abaissée de l’aéronef pendant le virage de l’étape de base en finale, jumelée à la position du siège du pilote, a nui à la vue du pilote par la fenêtre gauche, et l’entrée du Rocky Pass dans le port, qui était inattendue dans une zone par ailleurs dégagée, n’a pas été détectée.
  2. Au cours de l’étape de la prise de contact avec l’eau, l’attention du pilote, qui était principalement concentrée droit devant, combinée au mouvement relatif faible ou nul du bateau dans le pare-brise gauche et à l’obstruction visuelle causée par le nez et le jambage de la fenêtre gauche de l’aéronef, a réduit la probabilité de détecter le bateau.
  3. La vitesse à laquelle le bateau se déplaçait et la position relativement stationnaire de l’aéronef dans la vision périphérique du conducteur ont probablement contribué à ce que le conducteur ne détecte pas l’aéronef lorsque le Rocky Pass sortait du passage Deadman.
  4. Après que le conducteur du bateau a sorti du passage Deadman, son attention visuelle était principalement concentrée vers l’avant, vers le poste d’accostage, ce qui a réduit la probabilité de détecter l’approche de l’aéronef du côté tribord du bateau.
  5. La perception visuelle du pilote de l’aéronef et du conducteur du bateau a été influencée par plusieurs facteurs, et ni l’un ni l’autre ne s’est rendu compte que leurs routes allaient se croiser avant qu’il ne soit trop tard pour que les mesures d’évitement soient efficaces. Par conséquent, l’aéronef et le bateau sont entrés en collision, ce qui a causé des dommages importants à l’aéronef et obligé les occupants à effectuer une évacuation d’urgence.

3.2 Faits établis quant aux risques

Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.

  1. Si le processus de Transports Canada pour la mise en œuvre de vitesses de sécurité dans les ports repose uniquement sur le fait que les administrations locales reconnaissent qu’il existe un risque et lancent de façon proactive le processus de mise en œuvre d’une restriction, il y a un risque que des restrictions ne soient pas mises en œuvre et que les navires continuent de se déplacer à des vitesses qui présentent des risques de collision.
  2. Si les ports achalandés qui accueillent à la fois le trafic maritime et aérien n’ont pas d’aires d’amerrissage désignées pour les aéronefs, de moyens pour que les aéronefs signalent leur présence ou de limites de vitesse pour les navires, il y a un risque accru de collision en raison des navires et des aéronefs qui sont exploités tout près les uns des autres à des vitesses élevées.
  3. Si les passagers d’un aéronef portent des vêtements de flottaison individuels qui ne sont pas de la bonne taille, il y a un risque que le dispositif ne fonctionne pas comme prévu, ce qui pourrait entraîner des blessures ou la mort.

3.3 Autres faits établis

Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

  1. Les hydravions et les navires se servent de différentes fréquences radio à très haute fréquence (VHF); par conséquent, les pilotes et les conducteurs de navires ne sont au courant d’aucune communication que l’autre pourrait transmettre, comme les intentions d’arrivée ou de départ, les communications ou les avertissements liés au trafic, ou les renseignements sur l’évitement des collisions.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada

Le 8 février 2022, le BST a émis la lettre d’information sur la sécurité maritime MSI 01/22, avisant Transports Canada qu’il n’y a pas de limites de vitesse pour les navires dans le port de Tofino et que les administrations locales de Tofino n’étaient pas au courant du Règlement sur les restrictions visant l’utilisation des bâtiments (RRVUB).Dans sa réponse au BST, Transports Canada a réitéré qu’il incombe à l’administration locale de demander des restrictions relatives à l’exploitation des navires. Transports Canada n’a pas l’intention de prendre d’autres mesures pour mieux faire connaître le RRVUB.

4.1.2 Tofino Air

Le 4 novembre 2021, le pilote a suivi une formation supplémentaire sur les procédures d’urgence, y compris les différents types de vêtements de flottaison individuels et leurs limites.

Depuis l’accident, la formation au pilotage de Tofino Air a été modifiée pour inclure des techniques de balayage plus complètes (bouger le torse pour le balayage, balayer pour repérer les objets qui semblent stationnaires et aborder les angles morts) et une case pour le balayage avant l’amerrissage a été ajoutée au formulaire de formation au pilotage de Tofino Air.

4.1.3 Transports Canada

Le 26 avril 2022, Transports Canada a communiqué avec le Conseil tribal Nuu-chah-nulth en ce qui concerne les événements survenus dans le port de Tofino ou à proximité de celui-ci en 2021 et au début de 2022. Il a offert de tenir une discussion de suivi afin de transmettre des renseignements sur le régime de réglementation actuel et de mieux comprendre les points de vue du Conseil à l’égard de la sécurité des transports dans la région de Tofino.

Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .