Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A19O0178

Perte de maîtrise et collision avec le relief
Immatriculation privée
Piper PA-32-260, N50DK
Aéroport de Kingston (Ontario), 3,5 NM N

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 27 novembre 2019, à 16 h 01, heure normale de l’Est, un aéronef Piper PA-32-260 sous immatriculation privée (immatriculation N50DK aux États-Unis, numéro de série 32-29) a quitté l’aéroport municipal Toronto-Buttonville (Ontario) à destination de l’aéroport Québec-Neuville (Québec). Le pilote et 6 passagers se trouvaient à bord. L’aéronef était piloté selon les règles de vol à vue, et il a décollé de jour. Cependant, la majeure partie du vol prévu devait avoir lieu dans l’obscurité, puisque la nuit officielle commençait 1 heure après le départ. Pendant le vol, en raison de la détérioration des conditions météorologiques, le pilote a effectué un certain nombre de changements d’altitude et de route. Comme l’aéronef approchait de l’aéroport de Kingston (Ontario), le pilote a communiqué par radio avec la station d’information de vol de NAV CANADA à Kingston, indiquant son intention de se poser à cet endroit. À 17 h 05, l’aéronef a percuté le relief à environ 3,5 milles marins au nord de l’aéroport de Kingston. Les 7 occupants ont été mortellement blessés. L’aéronef a été détruit. Il n’y a pas eu d’incendie après impact.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Déroulement du vol

    Le 27 novembre 2019, vers 15 h 30Note de bas de page 1, le pilote et 6 passagers sont arrivés à l’aéroport municipal Toronto-Buttonville (CYKZ) (Ontario), où l’aéronef privé du pilote, un Piper PA-32-260 (immatriculation N50DK aux États-Unis, numéro de série 32-29), était stationné. L’intention du pilote était d’effectuer un vol selon les règles de vol à vue (VFR) vers l’aéroport Québec-Neuville (CNV9) (Québec), situé à 9 milles marins (NM) à l’ouest-sud-ouest de l’aéroport international Jean Lesage de Québec (CYQB) (Québec). Le vol d’une distance de 372 NM devait durer environ 3 heures en suivant la route directe prévue.

    À 16 h 01, l’aéronef a décollé de la piste 15 à CYKZ avec le pilote et les 6 passagers à son bord. Bien que le départ ait eu lieu de jour, la majorité du vol prévu, y compris l’atterrissage, devait être effectué de nuit.

    L’aéronef a pris la direction générale de CNV9 durant environ 33 minutes (figure 1). Il a d’abord grimpé à l’altitude prévue de 3500 pieds au-dessus du niveau de la mer (ASL), où il a volé durant 15 minutes, avant de descendre à 2000 pieds ASL.

    Figure 1. Route de l’aéronef dans l’événement à l’étude, par rapport à la route prévue (Source : Google Earth, avec annotations du BST, en fonction des données extraites du système de positionnement mondial du pilote)
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    Route de l’aéronef dans l’événement à l’étude, par rapport à la route prévue (Source : Google Earth, avec annotations du BST, en fonction des données extraites du système de positionnement mondial du pilote)

    À 16 h 33, l’aéronef a amorcé une autre descente et à 16 h 35, il a considérablement dévié vers le sud-est, descendant aussi bas que 900 pieds ASL (200 pieds au-dessus du sol [AGL]) près de Havelock (Ontario). L’aéronef a poursuivi sa route en direction sud-est vers Belleville (Ontario) à une altitude variant entre 1000 et 2800 pieds ASL. Au sud-ouest de Belleville, à 16 h 46, l’aéronef a viré au nord-est à 2500 pieds ASL.

    Vers 16 h 56, l’aéronef a grimpé à 2700 pieds ASL, puis il a volé vers l’est, pour enfin amorcer une descente à 17 h 01 min 45 s. À ce moment-là, l’aéronef se trouvait à quelque 6 NM à l’ouest de l’aéroport de Kingston (CYGK) (Ontario).

    À 17 h 02 min 55 s, le pilote a effectué sa 1re communication radio avec la station d’information de vol (FSS) de CYGK pour indiquer qu’il se trouvait à 4 NM au nord de l’aéroport, en rapprochement pour une approche directe vers la piste 19. À ce moment-là, l’aéronef se trouvait en réalité à 4,5 NM à l’ouest sur un cap de 102° magnétiques (M) et franchissait 2400 pieds ASL en descente constante à un taux d’environ 760 pieds par minute (pi/min) (figure 2).

    Figure 2. Route de l’aéronef dans l’événement à l’étude pendant les communications avec la station d’information de vol de Kingston (Source : Google Earth, avec annotations du BST, en fonction des données extraites du système de positionnement mondial du pilote)
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    Route de l’aéronef dans l’événement à l’étude pendant les communications avec la station d’information de vol de Kingston (Source : Google Earth, avec annotations du BST, en fonction des données extraites du système de positionnement mondial du pilote)

    À 17 h 03 min 10 s, le spécialiste de l’information de vol de la FSS de CYGK a demandé au pilote de confirmer sa position. Le pilote a répondu qu’il se trouvait à 4 NM au nord. L’aéronef se trouvait en réalité à 3,5 NM à l’ouest, toujours sur un cap de 102° M, en franchissant 2200 pieds ASL en descente constante. À la fin de sa transmission, le pilote a commencé une phrase indiquant qu’il allait seulement survoler le terrain d’aviation, mais il a hésité et n’a pas terminé la phrase.

    À 17 h 03 min 46 s, le spécialiste a informé le pilote qu’il avait effectué le contact initial trop tard et que le contact initial doit être effectué à une distance de 10 à 15 NM de l’aéroport. Le spécialiste a ensuite demandé le point de départ du vol.

    Pendant cette transmission, le pilote a amorcé un virage progressif vers la gauche (en direction opposée à l’aéroport), tout en maintenant un taux de descente stable alors qu’il franchissait 1400 pieds ASL en descente et en ralentissant jusqu’à une vitesse d’environ 90 à 95 nœudsNote de bas de page 2.

    Alors que l’aéronef continuait à tourner vers la gauche à un angle d’inclinaison atteignant 40°, il a continué à descendre à un taux de près de 2000 pi/min.

    À 17 h 04 min 1 s, le spécialiste a demandé au pilote d’indiquer le type d’aéronef et de confirmer son intention d’atterrir sur la piste 19; le pilote a répondu aux 2 questions en indiquant son type d’aéronef et en confirmant son intention d’atterrir sur la piste 19.

    À 17 h 04 min 24 s, le spécialiste a donné au pilote les renseignements actuels sur les vents et le calage altimétrique. Il a également informé le pilote qu’il ne voyait pas l’aéronef sur le radar et a demandé la position actuelle de l’aéronef.

    À 17 h 04 min 38 s, dans une réponse tardive qui allait être sa dernière transmission radio, le pilote a répondu qu’il se trouvait à 2,5 NM au nord; cette position correspondait à la position réelle de l’aéronef, qui poursuivait son virage à gauche dans la direction opposée à l’aéroport. Le spécialiste a répondu en indiquant que les feux de piste étaient allumés et en demandant au pilote s’il voyait la piste.

    À 17 h 04 min 45 s, alors qu’il était descendu à environ 650 pieds ASL (environ 370 pieds AGL) et avait accéléré jusqu’à environ 130 nœuds, l’aéronef a amorcé une montée abrupte.

    Au cours de la manœuvre de montée, qui a produit une accélération verticale d’environ 1,7 g, l’inclinaison à gauche a commencé à diminuer. À 17 h 04 min 55 s, alors que le taux de montée culminait à près de 4000 pi/min, l’aéronef s’est mis à rouler, a franchi l’horizontale et a poursuivi le roulis vers la droite en un seul mouvement continu. L’aéronef a perdu jusqu’à 7 nœuds de vitesse anémométrique par seconde pendant la montée abrupte.

    Vers 17 h 04 min 59 s, la vitesse anémométrique approchait les 60 nœuds. À ce moment-là, d’après les estimations tirées des données contenues dans un GPS (système de positionnement mondial) récupéré sur les lieux de l’accident, l’angle d’attaque et le coefficient de portance ont augmenté rapidement, l’angle de tangage a diminué et le roulis à droite a accéléréNote de bas de page 3. Le spécialiste a tenté de communiquer avec le pilote. L’aéronef se trouvait sur le prolongement de l’axe d’approche de la piste 19, en direction opposée à l’aéroport.

    À 17 h 05 min 2 s, l’altitude de l’aéronef a culminé à un peu plus de 1400 pieds ASL avant le début de la descente finale. Les derniers points de données laissent croire que la vitesse anémométrique a diminué jusqu’à environ 30 nœuds, que le taux de descente a atteint 2500 pi/min et que l’aéronef a roulé à droite et s’est inversé en piqué prononcé.

    Le spécialiste a tenté plusieurs fois de communiquer avec l’aéronef après sa dernière transmission, mais il n’y a pas eu d’autre message radio provenant de l’aéronef.

    Un signal de radiobalise de repérage d’urgence (ELT) émettant sur la fréquence de 406 MHz a été reçu par le Centre canadien de contrôle des missions à Trenton (Ontario). Deux aéronefs ont été dépêchés et ont entrepris des recherches aériennes, tandis que des policiers de Kingston ont été dépêchés pour effectuer des recherches au sol.

    Vers 19 h 40, l’aéronef a été retrouvé dans une zone boisée à 3,5 NM au nord de CYGK. Les 7 occupants ont été mortellement blessés. L’aéronef a été détruit et il n’y a pas eu d’incendie après l’impact.

    1.2 Personnes blessées

    Tableau 1. Personnes blessées
    Gravité des blessures Équipage Passagers Personnes au sol Total par gravité
    Mortelles 1 6 0 7
    Graves 0 0 0
    Légères 0 0 0
    Total 1 6 0 7

    1.3 Dommages à l’aéronef

    L’aéronef a été détruit.

    1.4 Autres dommages

    Sans objet.

    1.5 Renseignements sur le personnel

    Le pilote détenait un certificat de pilote privé en règle délivré par la Federal Aviation Administration (FAA) aux États-Unis. Il n’était pas titulaire d’un document d’aviation canadien et il n’était pas tenu d’en posséder un en vertu de la réglementation. Il pilotait au Canada un aéronef immatriculé aux États-Unis sur la base de son certificat de la FAA et il était qualifié conformément à la réglementation en vigueur aux États-Unis.

    Le pilote a commencé sa formation au pilotage en avril 2017 et il a obtenu son certificat de pilote privé des États-Unis en mai 2018. Avant le vol de l’événement à l’étude, il avait accumulé un total de 281 heures de vol, dont 190,2 heures aux commandes de l’aéronef à l’étude depuis son achat en février 2019.

    Selon son carnet de vol personnel, il avait accumulé 29,7 heures de vol de nuit, dont 20,7 aux commandes de l’aéronef à l’étude. Au cours des 6 mois précédant l’événement, le pilote avait consigné 10,6 heures de vol de nuit, dont 10 décollages de nuit et 12 atterrissages de nuit.

    Le pilote de l’événement à l’étude avait consigné 5,7 heures de vol aux instruments simulé et 3,2 heures de vol aux instruments réel. Une seule des heures de temps de vol simulé et la totalité des 3,2 heures de temps de vol réel avaient été effectuées sur l’aéronef à l’étude.

    Presque toute l’expérience de vol du pilote a été acquise au Texas, son État de résidence; il n’avait jamais volé dans l’espace aérien canadien avant d’arriver à Toronto quelques jours avant l’événement.

    1.6 Renseignements sur l’aéronef

    Les dossiers indiquent que l’aéronef était homologué, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Rien n’indique qu’il y ait eu une défaillance de la cellule ou un mauvais fonctionnement d’un système avant ou pendant le vol à l’étude.

    L’aéronef a été construit en 1965 par la Piper Aircraft Corporation et avait accumulé un total de 5521,7 heures de vol avant le vol à l’étude. Le moteur avait fait l’objet d’une révision majeure en 2018. Les dossiers indiquent que l’inspection annuelle la plus récente avait été réalisée le 21 octobre 2019 et que l’aéronef avait accumulé 39,7 heures de vol depuis. Selon la fiche technique du certificat de type de la FAA, le PA-32-260 est certifié pour les configurations à 6 et 7 passagers. L’aéronef à l’étude comptait 6 sièges.

    Selon le Cherokee Six Owner’s HandbookNote de bas de page 4 de Piper, la vitesse de décrochage de l’aéronef avec volets rétractés est de 70 mi/h.

    Tableau 2. Renseignements sur l’aéronef
    Constructeur Piper Aircraft Corporation
    Type, modèle et immatriculation PA-32-260, N50DK
    Année de construction 1965
    Numéro de série 32-29
    Date d’émission du certificat de navigabilité / permis de vol 6 juin 1972
    Total d’heures de vol cellule 5521,7
    Type de moteur (nombre) Lycoming, O-540-E4B5 (1)
    Type d’hélice ou de rotor (nombre) Hartzell, HC-C2YK-1BF (1)
    Masse maximale admissible au décollage 3400 lb
    Type(s) de carburant recommandé(s) 100/130 minimum
    Type de carburant utilisé 100LL

    1.6.1 Masse et centrage

    La masse maximale au décollage de l’aéronef à l’étude était de 3400 livres. Le plus récent rapport sur la masse et le centrage de l’aéronef à l’étude datait de juin 2010. Ce rapport indiquait que le poids à vide était de 1929,25 livres, ce qui laissait une charge utile de 1470,75 livres (pour les passagers, le carburant et les bagages).

    Le pilote aurait utilisé un poids de 1500 livres à titre indicatif pour estimer la charge qu’il pouvait transporter à bord de l’aéronef, et il aurait additionné mentalement le poids du carburant et les poids estimés des passagers et des bagages pour s’assurer de rester en-deçà de la masse maximale de l’aéronef.

    Il a été indiqué que les réservoirs de carburant de l’aéronef avaient été remplis avant le départ, ce qui signifie que l’aéronef comptait au total 84 gallons américains de carburant, pesant environ 504 livres. Le poids réel des 7 occupants était de 1030 livres, et les bagages récupérés sur le lieu de l’accident pesaient 135 livres.

    L’enquête n’a permis de retrouver aucun document indiquant le calcul de la masse et du centrage pour le vol à l’étude. Toutefois, les calculs de masse et de centrage effectués par le BST après l’événement indiquent qu’au moment du décollage, l’aéronef dépassait d’environ 200 livres la masse maximale admissible au décollage.

    D’après la consommation de carburant estimée, l’aéronef pesait environ 100 livres de trop au moment de l’événement.

    L’enquête n’a pas permis de déterminer où chaque passager était assis à l’arrière de l’aéronef, ce qui empêche de déterminer avec exactitude si le centre de gravité se trouvait dans les limites établies pendant le vol à l’étude. Toutefois, d’après des calculs effectués en tenant compte de diverses configurations de passagers et de bagages, le centre de gravité aurait probablement respecté les limites établies si le poids avait été inférieur à la masse maximale au décollage.

    Les caractéristiques de vol d’un aéronef dont la masse dépasse la masse maximale ne sont pas consignées dans la section du manuel d’utilisation sur les performances de l’aéronef et ne peuvent pas être prédites avec précision par le pilote à l’aide des renseignements disponibles. Piloter un aéronef dont la masse est supérieure à la masse maximale admissible peut entraîner une augmentation de la distance de décollage, une augmentation de la vitesse de décrochage, une réduction des taux de montée et une dégradation de la réponse des commandes.

    1.7 Renseignements météorologiques

    1.7.1 Renseignements météorologiques vérifiés et disponibles pendant la planification du vol

    Le 25 novembre 2019 (2 jours avant le vol à l’étude), le pilote a commencé à planifier le vol à l’étude à l’aide de l’application mobile ForeFlight installée sur sa tablette (voir section 1.8.1), sur laquelle il a saisi une route directe entre CYKZ et quelques aéroports de la région de Québec. Le 26 novembre, le pilote a saisi une route directe entre CYKZ et CNV9, avec quelques altitudes différentes proposées allant jusqu’à 13 500 pieds.

    Le matin du vol à l’étude (27 novembre 2019), à 8 h 30, le pilote a saisi 8 h 30 le lendemain matin (28 novembre 2019) comme heure de départ proposée dans l’application. Près d’une heure plus tard, à 9 h 25, après avoir examiné de nombreuses cartes météorologiques, le pilote a repoussé l’heure de départ proposée à 15 h 30 le même jour. Par la suite, il a été signalé que le pilote avait pris la décision de partir le jour de l’événement en raison de prévisions pour le lendemain faisant état de chutes de neige.

    Les images météorologiques consultées sur le compte ForeFlightNote de bas de page 5 du pilote étaient des représentations à une échelle qui couvrait l’ensemble des États-Unis continentaux. Néanmoins, les conditions météorologiques indiquées sur ces cartes dépeignaient les conditions couvrant la zone prévue du vol à l’étude, qui était située à proximité de la frontière canado-américaine.

    La carte d’analyse de surface de 13 h a été consultée à 15 h 29, soit 32 minutes avant le départ. Elle présentait une vaste zone de basse pression centrée sur les Grands Lacs et se dirigeant vers la route de vol proposée. Ce type de système météorologique est généralement associé à des précipitations, à une visibilité réduite et à des plafonds bas.

    Le système de basse pression décrit dans l’analyse de surface correspondait à une carte consultée par le pilote ce matin-là, intitulée « Today’s Forecast », produite par la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) des États-Unis et le National Weather Service des États-Unis (figure 3). La carte de la NOAA illustre clairement une vaste zone de précipitations mixtes (pluie et neige) sur l’ensemble de la route prévue du vol.

    Figure 3. Prévisions pour le 27 novembre 2019, consultées par le pilote de l’événement à l’étude dans ForeFlight (Source : National Oceanic and Atmospheric Administration)
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    Prévisions pour le 27 novembre 2019, consultées par le pilote de l’événement à l’étude dans ForeFlight (Source : National Oceanic and Atmospheric Administration)

    D’autres produits météorologiques aéronautiques, comme les messages d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) et les prévisions d’aérodrome (TAF), étaient disponibles dans ForeFlight lorsque le pilote a consulté les renseignements sur les aéroports de départ et d’arrivée dans la matinée du 27 novembre 2019.

    CYKZ et CNV9 ne publient pas de METAR ni de TAF. L’aéroport le plus près de la destination (CNV9) qui émet des TAF est CYQB, situé à 9 NM à l’est-nord-est de CNV9. Pour l’heure d’arrivée prévue, soit vers 19 h, on prévoyait des vents soufflant du 070° vrai (V) à 20 nœuds, avec des rafales atteignant 30 nœuds, une visibilité de 1 mille terrestre (SM) dans de la faible neige et un plafond couvert à 600 pieds AGL. Il y avait également 30 % de probabilités que la visibilité soit de ¼ SM, dans la neige abondante et la poudrerie et qu’il y ait un plafond obscurci à 400 pieds AGL.

    Les TAF de chacun des aéroports situés le long de la route, prévoyaient des vents forts accompagnés de rafales et des périodes de visibilité réduite et de pluie au moment où l’aéronef les survolerait.

    Selon la TAF de l’aéroport international Macdonald-Cartier d’Ottawa (CYOW) (Ontario), au moment où l’aéronef survolerait CYOW, soit 1,5 heure après le départ en suivant la route proposée, la visibilité devait chuter à 2 SM et le plafond devait descendre à 600 pieds AGL.

    Au moment du départ de CYKZ, le METAR à CYOW indiquait une visibilité de 3 SM en raison de la faible pluie et de la brume, avec une température de 3 °C et un point de rosée de 2 °C.   

    Selon la route directe prévue, après environ 2 heures de vol, l’aéronef devait passer à environ 30 NM au nord de l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal (CYUL) (Québec). La TAF de CYUL pour cette période prévoyait une visibilité de 2 SM et un plafond couvert à 600 pieds AGL.

    Le matin de l’événement, 4 pages d’aéroport ont été consultées sur le compte ForeFlight du pilote: l’aéroport international Lester B. Pearson de Toronto (CYYZ), CYKZ (aéroport de départ), CYQB et CNV9 (aéroport d’arrivée). Toutefois, l’enquête n’a pas permis de déterminer si le pilote a examiné les METAR et les TAF pour CYYZ ou CYQB avant le vol à l’étude, à l’aide de ForeFlight Mobile ou d’une autre source de renseignements météorologiques.

    Avant le départ, le pilote s’était renseigné dans l’aérogare de CYKZ et il avait obtenu de l’aide pour avoir accès aux renseignements météorologiques relatifs à sa route prévue ce jour-là. Le pilote aurait montré une carte météorologique à une connaissance et il aurait indiqué une zone de précipitations près de la destination, mais il aurait dit que ce ne serait pas un problème parce qu’il ne s’agissait pas d’une zone très grande, et qu’il pouvait simplement la contourner.

    1.7.2 Conditions météorologiques pendant le vol

    Au moment du départ, 2 zones importantes de précipitations étaient représentées sur le radar d’Environnement et Changement climatique Canada entre CYKZ et CYOW, qui est situé à peu près à mi-chemin de la destination prévue, le long de la route planifiée. La 1re zone, une étroite bande de précipitations formant une ligne s’étendant du nord-ouest au sud-est, devait être croisée près de Peterborough (Ontario). De la visibilité réduite en raison de la pluie, de la brume et des nuages bas (600 pieds AGL) avaient été signalés dans la zone au moment du départ. La 2e zone comprenait des échos radar de précipitations plus intenses et était très étendue. Ces zones se dirigeaient vers l’est et la bordure ouest formait une ligne déchiquetée de la région de Pembroke (Ontario) jusqu’à la région de Kingston.

    Après avoir volé environ 33 minutes, l’aéronef est descendu aussi bas que 900 pieds ASL et a modifié son cap du nord-est au sud-est. Le radar météorologique à ce moment-là illustrait une bande d’intempéries courant du nord-ouest au sud-est, directement sur la route de l’aéronef avant qu’il ne dévie. Le METAR d’une station voisine (Peterborough) a signalé à 16 h 26 un plafond de nuages fragmentés à 600 pieds AGL et une visibilité de 6 SM dans la faible pluie et la brume.

    Après un virage vers le sud-est, l’aéronef a conservé cette direction jusqu’à ce qu’il atteigne la région de Belleville, puis il a repris sa route vers l’est. Bien qu’il fut sorti des conditions météorologiques qui avaient entraîné son déroutement, l’aéronef s’approchait maintenant d’une plus vaste bande de conditions météorologiques défavorables et de précipitations près de la région de Kingston.

    Le radar indiquait des éclaircies dans les précipitations, où le plafond et la visibilité auraient probablement été plus favorables, mais ces éclaircies semblaient rapetisser à mesure que les conditions météorologiques défavorables se déplaçaient vers l’est.

    À 17 h, 5 minutes avant l’événement, le METAR pour CYGK avait signalé des vents soufflant du 060° V à 5 nœuds, une visibilité de 5 SM causée par la brume, des nuages épars à 700 pieds AGL, et un plafond couvert à 4000 pieds AGL. Les images du radar météorologique obtenues après l’événement indiquaient qu’à 17 h, il y avait des précipitations de modérées à fortes tout juste à l’ouest de Kingston, alors que l’aéronef approchait de l’aéroport (figure 4).

    Figure 4. Radar météorologique de Franktown (Ontario) pour 17 h, heure normale de l’Est, montrant de la pluie modérées à forte à l’ouest de Kingston, et la position approximative de l’aéronef à l’étude (N50DK) (Source : Environnement et Changement climatique Canada, avec annotations du BST)
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    Radar météorologique de Franktown (Ontario)  pour 17 h, heure normale de l’Est, montrant de la pluie modérées à forte à l’ouest de Kingston, et la position approximative de l’aéronef à l’étude (N50DK) (Source : Environnement et Changement climatique Canada, avec annotations du BST)

    En raison du couvert nuageux, des précipitations et de la visibilité réduite, le ciel aurait été assombri bien avant le début de la nuit officielle (fin du crépuscule civil) dans la région de Kingston, à 17 h 02.

    Après l’événement, à 17 h 13, un message d’observation météorologique spéciale d’aérodrome (SPECI) a été diffusé. Il indiquait des vents variables soufflant à 2 nœuds et une visibilité de 3 SM dans la pluie fine et la brume; il indiquait en outre que les nuages épars à 700 pieds AGL s’étaient transformés en plafond de nuages fragmentés à 600 pieds AGL.

    Après l’événement, le BST a demandé à Environnement et Changement climatique Canada de faire une évaluation météorologiqueNote de bas de page 6. Selon l’évaluation, il y avait probablement de la turbulence et un cisaillement de vent à basse altitude dans les environs du lieu de l’accident, en plus des plafonds bas et de la faible visibilité; les nuages convectifs produisaient probablement de la turbulence modérée, voire forte.

    Une analyse des niveaux de congélation dans le corridor entre CYKZ et CYGK a révélé qu’ils se situaient entre 5000 et 8000 pieds ASL. Il est peu probable que le givrage ait été un facteur dans cet accident puisque l’aéronef n’a pas dépassé les 3500 pieds ASL.

    1.8 Aides à la navigation

    L’aéronef était muni d’un pilote automatique et de 2 appareils GPS. De plus, le pilote disposait d’une tablette avec ForeFlight Mobile, qu’il utilisait pour la planification du vol et la navigation.

    1.8.1 ForeFlight Mobile

    ForeFlight Mobile est une application conçue pour les tablettes et les téléphones intelligents. Elle aide les pilotes à exécuter diverses tâches avant le vol, notamment la planification du vol (y compris l’accès aux renseignements météorologiques), le dépôt des plans de vol, l’accès aux cartes de navigation aérienne et le calcul de la masse et du centrage de l’aéronef.

    On peut également utiliser l’application en vol pour afficher des cartes aéronautiques montrant la position de l’aéronef en temps réel (carte dynamique), à condition que l’appareil utilisé dispose d’une réception GPS.

    En outre, avec un appareil de surveillance dépendante automatique en mode diffusion – réception (ADS-B réception) compatible installée à bordNote de bas de page 7, les renseignements sur les conditions météorologiques et le trafic peuvent être superposés sur la carte dynamique. Par conséquent, les pilotes peuvent utiliser l’affichage pendant le vol pour contourner les zones météorologiques associées aux précipitations et aux orages et pour accéder aux renseignements sur l’aéroport, comme les fréquences et l’altitude du terrain d’aviation. On peut également utiliser ForeFlight Mobile pour tenir une version électronique du carnet de vol du pilote.

    Le pilote de l’événement à l’étude avait un abonnement Basic Plus pour les États-Unis à ForeFlight, qui comprend des cartes de navigation pour les États-Unis seulement, bien qu’il y ait un certain chevauchement dans la couverture cartographique près de la frontière canado-américaine. Ce chevauchement aurait permis au pilote de l’événement à l’étude de faire le vol complet sur la route prévue sans avoir à acheter de cartes de navigation pour le Canada.

    Le pilote de l’événement à l’étude utilisait ForeFlight Mobile sur une tablette avec réception GPS et connexion Wi-Fi, mais sans connexion de données mobiles (sur réseau cellulaire). Avant le départ, alors qu’il était connecté au réseau Wi-Fi, le pilote aurait pu utiliser la tablette pour la planification du vol, par exemple, vérifier la météo, planifier la route et effectuer des recherches sur les services aéroportuaires. Toutefois, une partie de cette fonctionnalité aurait été perdue une fois en vol : les cartes et la navigation GPS auraient toujours été disponibles, mais sans le réseau Wi-Fi ou les données mobiles, le pilote n’aurait pas eu accès aux mêmes renseignements météorologiques exhaustifs.

    L’aéronef était muni d’un récepteur ADS-B réceptionNote de bas de page 8, qui a la capacité d’afficher les renseignements météorologiques et de trafic sur l’affichage de la carte dynamique de ForeFlight Mobile pendant le vol. Toutefois, étant donné que l’ADS-B réception aux États-Unis repose sur la réception de données provenant de stations au sol, les aéronefs doivent se trouver à portée d’une station ADS-B au sol pour recevoir ces données. Comme ce type de système n’est pas disponible au CanadaNote de bas de page 9, le pilote n’aurait reçu de renseignements météorologiques que s’il se trouvait à portée d’une station ADS-B au sol aux États-Unis.

    D’après la carte de couverture ADS-B de la FAANote de bas de page 10, à une altitude de 1500 pieds AGL, l’aéronef de l’événement à l’étude aurait disposé d’une réception ADS-B pour la majorité du vol à l’étude. Toutefois, cette réception aurait diminué à des altitudes plus basses et aurait été inexistante dans un petit secteur au nord-est de Peterborough. Même si la couverture ADS-B aux États-Unis était disponible, le système ne fournit que des METAR et des TAF pour les aéroports situés aux États-Unis et non pour les aéroports canadiens. De plus, les stations radars météorologiques américaines utilisées par le système ADS-B ne couvrent que les régions du Canada situées à proximité de la frontière.

    Par conséquent, la couverture radar météorologique n’était pas uniforme pour la route et l’altitude de l’aéronef à l’étude. Selon la carte radar des National Centers for Environmental Information (NCEI) de la NOAANote de bas de page 11, à une altitude de 3000 pieds AGL, un radar météorologique est disponible dans la région de Toronto, mais sa couverture se termine à environ 9 milles à l’ouest de Peterborough. Il a été signalé qu’avant le vol, le pilote a mentionné qu’il ne disposait pas des mêmes renseignements météorologiques pour piloter au Canada que ceux dont il disposait pour piloter aux États-Unis.

    1.9 Communications

    CYGK se trouve dans une zone de contrôle de classe E, pour laquelle une fréquence obligatoire est définieNote de bas de page 12, et qui s’étend sur 5 milles autour de l’aéroport et jusqu’à 3000 pieds au-dessus de l’altitude de l’aérodrome. On peut obtenir des renseignements météorologiques pour CYGK en vol au moyen des diffusions du service automatique d’information de région terminale (ATIS). Au moment de l’événement, le pilote était en contact avec la FSS de Kingston (voir la section 1.1).

    1.10 Renseignements sur l’aérodrome

    Sans objet.

    1.11 Enregistreurs de bord

    L’aéronef n’était pas muni d’un enregistreur de données de vol ni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage, et la réglementation ne l’exigeait pas. Plusieurs dispositifs électroniques capables d’enregistrer des données ont été récupérés sur les lieux de l’accident et envoyés au Laboratoire d’ingénierie du BST à Ottawa (Ontario). Toutefois, en raison des dommages causés par l’impact ou des réglages des dispositifs, un seul appareil — un GPS — a fourni des renseignements utiles sur le vol à l’étude.

    Les données GPS comptaient plusieurs vols, dont le vol à l’étude. On a analysé les données enregistrées. Les paramètres consignés comprenaient la date et l’heure, la latitude et la longitude, ainsi que l’altitude GPS. Les données ont été enregistrées à intervalles irréguliers de 11 secondes en moyenne. Au cours des 40 dernières secondes d’enregistrement des données, les intervalles se sont améliorés de façon considérable, passant à environ 3 secondes en moyenne.

    1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

    L’épave de l’aéronef se trouvait dans une zone boisée à environ 1 NM au nord-est de la collectivité de Westbrook (Ontario) et à 3,5 NM au nord de CYGK. L’altitude du lieu d’impact était d’environ 400 pieds ASL.

    L’aéronef a d’abord heurté la cime d’un arbre, à environ 110 pieds au sud du cratère peu profond créé par l’impact principal avec le sol. Plusieurs arbres ont été heurtés entre le choc initial et le lieu d’impact au sol. Certains arbres portaient des marques indiquant qu’ils avaient été heurtés par l’hélice, dont les dommages étaient caractéristiques d’un choc à un régime moteur particulièrement élevé.

    Effectivement, l’examen de l’emplacement de l’épave a révélé que l’aéronef a percuté le sol alors qu’il se déplaçait à grande vitesse dans une assiette en piqué prononcée. Aucun incendie ne s’est déclaré avant ou après l’impact. Un examen plus approfondi de l’épave de l’aéronef a été effectué à l’installation régionale du BST à Richmond Hill (Ontario) et n’a révélé aucun signe d’anomalies de la cellule ou des composants du moteur avant l’impact.

    Plusieurs instruments ont été envoyés au Laboratoire d’ingénierie du BST aux fins d’examen en vue de déterminer leurs indications respectives au moment de l’impact. Toutefois, il n’a été possible de tirer des renseignements que de 2 instruments : il est vraisemblable d’affirmer qu’au moment de l’impact, l’indicateur d’assiette affichait une assiette en piqué maximale et l’indicateur de vitesse verticale affichait un taux de descente de 1900 pi/min.

    1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

    Selon l’enquête, rien ne porte à croire que des facteurs médicaux ou pathologiques aient pu nuire au rendement du pilote.

    1.14 Incendie

    Il n’y a pas eu d’incendie après impact.

    1.15 Questions relatives à la survie des occupants

    Lors de l’événement à l’étude, 1 passager était assis à l’avant de l’aéronef, à côté du pilote, et les 5 autres passagers étaient assis à l’arrière de l’aéronef.

    La ceinture-baudrier et la sangle sous-abdominale du passager avant étaient toutes deux attachées; quant au pilote, seule la sangle sous-abdominale de la ceinture de sécurité était attachée et il ne portait pas la ceinture-baudrier dont il disposait.

    L’aéronef comptait 4 sièges à l’arrière, tous munis de sangles sous-abdominales seulement. Les 4 sangles sous-abdominales ont été découvertes détachées. Les 5 passagers assis à l’arrière ont été éjectés pendant l’événement. Par conséquent, il a été impossible de déterminer avec exactitude où ils étaient assis avant l’impact. De même, il a été impossible de déterminer si l’un ou l’autre des passagers des sièges arrière avait attaché sa sangle sous-abdominale plus tôt pendant le vol, par exemple au décollage, pour ensuite la détacher pendant le vol de croisière ou si la sangle était demeurée détachée pour toute la durée du vol.

    Bien qu’il eut probablement été impossible de survivre à l’événement à l’étude en raison des forces d’impact, il est notoire que l’utilisation de ceintures de sécurité réduit le risque ou la gravité des blessures pour les occupants de l’aéronef.

    L’aéronef transportait une ELT de 406 MHz qui s’est déclenchée comme prévu à la suite de l’impact et qui a aidé le personnel de recherche et sauvetage à retrouver l’aéronef.

    1.15.1 Réglementation sur les ceintures de sécurité

    Le Règlement de l’aviation canadien (RAC) compte plusieurs exigences selon lesquelles les aéronefs doivent être munis de ceintures de sécurité, d’ensembles de retenue et de ceintures-baudriers. Plus précisément, le RAC stipule ce qui suit relativement à l’exigence sur les sièges et les ceintures de sécurité :

    605.22(1) Sous réserve de l’article 605.23, il est interdit d’utiliser un aéronef autre qu’un ballon, à moins que celui-ci ne soit muni, pour chaque personne à bord autre qu’un enfant en bas âge, d’un siège comprenant une ceinture de sécuritéNote de bas de page 13.

    En matière d’utilisation générale des ceintures de sécurité et des ensembles de retenue, l’article 605.25 du RAC précise ce qui suit :

    (1) Le commandant de bord d’un aéronef doit donner à toute personne à bord de l’aéronef l’ordre de boucler la ceinture de sécurité dans les cas suivants :

    1. pendant le mouvement de l’aéronef à la surface;
    2. pendant le décollage et l’atterrissage;
    3. au cours du vol, chaque fois que le commandant de bord le juge nécessaireNote de bas de page 14.

    De plus, l’article 605.26 du RAC stipule ce qui suit :

    (1) Lorsque le commandant de bord ou le chef de cabine donne l’ordre de boucler les ceintures de sécurité, chaque passager autre qu’un enfant en bas âge doit :

    1. s’assurer que la ceinture de sécurité ou l’ensemble de retenue est bouclé et réglé correctementNote de bas de page 15;

    Aux États-Unis, le Federal Aviation Regulations (FAR) comprend des exigences très semblables en ce qui concerne l’utilisation des ceintures de sécurité. Le commandant de bord doit porter une ceinture de sécurité au décollage, à l’atterrissage et pendant le volNote de bas de page 16, et la ceinture-baudrier du pilote doit être attachée, à moins qu’elle n’entrave le pilotageNote de bas de page 17. On doit aviser les passagers de boucler leur ceinture de sécurité pendant les déplacements au sol, au décollage et à l’atterrissageNote de bas de page 18, et ils doivent être assis dans un siège approuvé muni d’une ceinture de sécuritéNote de bas de page 19.

    Au Canada et aux États-Unis, les passagers âgés de moins de 2 ans peuvent être tenus par un adulte assis sur un siège approuvéNote de bas de page 20,Note de bas de page 21. Aucun des passagers impliqués dans l’événement à l’étude n’était âgé de moins de 2 ans.

    1.16 Essais et recherche

    1.16.1 Rapports de laboratoire du BST

    Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

    • LP279/2019 – Pitot Mast Analysis [Analyse du mât Pitot]
    • LP282/2019 – NVM Data Recovery [Récupération des données de la mémoire non volatile]
    • LP001/2020 – Instrument Analysis [Analyse des instruments]
    • LP111/2020 – Flight Analysis [Analyse du vol]

    1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

    Sans objet.

    1.18 Renseignements supplémentaires

    1.18.1 Facteurs humains

    1.18.1.1 Prise de décisions du pilote

    La prise de décisions du pilote (PDP) est un processus cognitif qui permet de choisir un plan d’action parmi diverses options. La FAA définit la prise de décisions aéronautiques comme [traduction] « une approche systématique du processus mental utilisé par les pilotes pour déterminer de manière cohérente la meilleure mesure à adopter en réponse à un ensemble donné de circonstances. Il s’agit des intentions du pilote fondées sur les plus récents renseignements à sa dispositionNote de bas de page 22. »

    Selon une trousse didactique de Transports Canada (TC)Note de bas de page 23, la PDP est fonction du temps; ainsi, avant le vol, il y a « prise de décision sans souci du temps » et pendant le vol, dans un environnement dynamique, il peut y avoir « prise de décisions quand le temps presseNote de bas de page 24 ». Une planification exhaustive avant un vol permet de prendre des décisions éclairées au sol pour éviter de devoir prendre en vol des décisions potentiellement plus difficiles.

    Par exemple, au moment de planifier un vol VFR de jour et de nuit, il est essentiel d’obtenir toutes les données météorologiques pertinentes pour prendre la décision éclairée d’effectuer le vol ou non. Si la décision prise est d’entreprendre le vol, ces données peuvent réduire le risque de passer par inadvertance de conditions VFR à des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC)Note de bas de page 25. Plusieurs facteurs, circonstances et biais peuvent avoir une incidence sur la PDP, y compris l’objectif ou le but du vol ainsi que les connaissances, l’expérience et la formation du piloteNote de bas de page 26, et peuvent faire en sorte qu’un pilote exploite un aéronef au-delà des capacités de l’aéronef ou de ses propres aptitudes.

    Une mauvaise évaluation des risques peut avoir une incidence négative sur la PDP, et la perception des risques et la tolérance aux risques peuvent avoir une incidence subjective sur l’évaluation des risques. Un pilote peut tolérer un risque accru pour atteindre un but ou un objectif perçu comme étant importantNote de bas de page 27. Les pilotes de l’aviation générale, en particulier ceux qui possèdent une expérience de vol limitée, peuvent sous-estimer considérablement les risques associés aux conditions météorologiques, ce qui peut les mener à voler dans des conditions météorologiques défavorables ou dans des conditions qui se détériorentNote de bas de page 28.

    1.18.1.2 Désorientation spatiale

    L’être humain est en mesure de discerner l’orientation de son corps (par exemple, couché, debout, penché) lorsqu’il est physiquement en contact avec le sol. Le milieu en 3 dimensions dans lequel se déroule un vol est étranger au corps humain; il en résulte des conflits entre ses sens et des illusions qui rendent difficile, voire impossible, le maintien de l’orientation spatiale. La désorientation spatiale du pilote se définit comme étant [traduction] « l’incapacité du pilote à interpréter correctement l’attitude, l’altitude ou la vitesse de l’aéronef en fonction de la Terre ou d’autres points de référenceNote de bas de page 29 ».

    Pour s’orienter dans l’espace, l’humain décode l’information reçue de 3 systèmes sensoriels :

    • le système visuel;
    • le système vestibulaire (information provenant de l’oreille interne);
    • le système proprioceptif (information provenant des muscles, des articulations et des os)Note de bas de page 30.

    Le système visuel fournit 80 % de l’information servant à déterminer notre orientation spatiale. En cas de perte d’information visuelle, il ne reste que 20 % de l’information, qui est reçue des systèmes vestibulaire et proprioceptif. Ces 2 derniers systèmes fournissent de l’information moins précise et plus susceptible d’être erronée, car ils sont prédisposés aux illusions et aux erreurs d’interprétationNote de bas de page 31. Lorsque les repères visuels au sol sont faibles ou nuls, la désorientation spatiale peut être surmontée en passant au vol aux instrumentsNote de bas de page 32.

    Une bonne connaissance des mécanismes qui entraînent la désorientation spatiale et des moyens pour y faire face, ainsi qu’une bonne conscience du potentiel de désorientation lorsque la visibilité et les références au sol sont réduites, demeurent des atouts essentiels pour prévenir la perte de maîtrise en volNote de bas de page 33.

    Le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada (AIM de TC) décrit les risques de désorientation. Il indique que la vue est notre sens d’orientation le plus puissant et souligne qu’il est impossible de s’y fier au milieu de nuages ou dans des conditions de voile blanc, ce qui augmente la probabilité de désorientation. Le manuel donne l’exemple suivant :

    Par exemple, une fois qu’un virage est stabilisé, la sensation d’être en virage disparaît. Par conséquent, lorsqu’un pilote sort d’un virage, il peut avoir l’impression d’amorcer un virage en sens contraire et amorcer un autre virage involontairement, voire entraîner l’avion dans une vrilleNote de bas de page 34.

    Bien qu’on mentionne les nuages et le voile blanc, un manque semblable de repères visuels externes et la désorientation résultante peuvent survenir dans l’obscurité. La désorientation spatiale peut entraîner une perte de maîtrise de l’aéronef ou un impact sans perte de contrôleNote de bas de page 35.

    1.18.2 Règles de vol à vue la nuit

    Le vol a quitté CYKZ à 16 h 01, ce qui signifie qu’on estimait arriver à CNV9 vers 19 h. Puisque la nuit officielle (fin du crépuscule civil) commençait à 17 h 02 à CYKZ et à 16 h 34 à CNV9, une partie importante du vol prévu devait être effectuée dans l’obscurité en vol VFR de nuit.

    Pendant la partie nocturne du vol, le pilote aurait pu s’attendre à un certain éclairage émis par les collectivités le long de la route prévue, mais à un éclairage beaucoup moins important dans les régions éloignées(par exemple, des chalets, de la circulation sur les routes et des autoroutes). En outre, plusieurs secteurs n’étaient que peu ou pas éclairés, constituant ainsi des zones sans repère au sol ou à l’horizon. De plus, l’éclairage ambiant de la lune était limité, voire inexistant, à cause du couvert nuageux.

    Les vols de nuit comportent de nombreux risques à cause du manque de repères visuels, particulièrement au décollage et à l’atterrissage. Le nombre limité ou l’absence de repères visuels la nuit peut engendrer diverses illusions qui causent une désorientation spatiale, en raison de l’absence d’un horizon visible. Le vol de nuit vers une surface uniforme (par exemple, un plan d’eau ou un terrain boisé), au-dessus d’elle ou à partir d’elle est difficile. Ces zones sont appelées trous noirs.

    Le vol VFR de nuit est plus dangereux que le vol VFR de jour en raison des limitations de la vision humaine, de la vulnérabilité aux illusions et de l’absence potentielle de repères visuels externes. Il est difficile pour les pilotes d’évaluer à quelle distance se trouvent les nuages et les intempéries, la nuit ou dans l’obscurité, et cette difficulté augmente le risque de vol VFR involontaire dans des IMC, ce qui peut rapidement entraîner une désorientation spatiale et une perte de maîtrise.

    En termes simples, par nature, le vol VFR de nuit présente au pilote peu de repères visuels lui permettant de voir et d’éviter des conditions météorologiques qui se dégradent. La planification avant le vol est particulièrement importante pour les vols de nuit, notamment l’examen des conditions météorologiques et de leurs répercussions sur la route prévue, le clair de lune disponible, le temps de vol estimé au-dessus de grandes étendues d’eau ou de zones ayant peu ou pas d’éclairage artificiel, et la proximité de la route par rapport au relief gagnant en hauteur et aux obstacles importants.

    Pendant le vol, il est important que les pilotes obtiennent des mises à jour météorologiques et comparent à intervalles réguliers les indications météorologiques visuelles de visibilité et de proximité des nuages par rapport aux attentes établies au cours de la phase de planification de vol. Étant donné la difficulté, la nuit, de détecter visuellement le relief et les obstacles et de s’en tenir à l’écart, il est essentiel que les pilotes planifient et maintiennent le vol au-dessus des élévations maximales du relief stipulées sur les cartes VFR.

    1.18.2.1 Repères visuels à la surface

    Le principe qui régit le vol VFR consiste en l’utilisation de repères visuels (par exemple, l’horizon ou des repères au sol) à l’extérieur de l’aéronef pour déterminer son assiette. Il faut donc satisfaire à certaines exigences de base avant d’effectuer un vol VFR, qu’il soit de jour ou de nuit.

    Selon les articles 602.114 et 602.115 du RAC, l’aéronef doit être « utilisé avec des repères visuels à la surfaceNote de bas de page 36 » dans un espace aérien contrôlé ou non contrôlé. Le RAC définit « surface » comme « toute surface au sol ou sur l’eau, y compris une surface geléeNote de bas de page 37 ». Cependant, la réglementation ne définit pas le concept de « repères visuels à la surface »; on peut l’interpréter librement. Le secteur a généralement interprété cet énoncé comme voulant dire des conditions météorologiques de vol à vueNote de bas de page 38, Note de bas de page 39.

    En plus des exigences relatives aux repères visuels à la surface, le règlement interdit également le pilotage d’un aéronef en VFR de nuit dans des secteurs où la visibilité en vol ou au sol, si elle est déclarée, est inférieure à 3 SMNote de bas de page 40.

    Par conséquent, un vol se déroulant au-dessus d’une région où la visibilité est inférieure à 3 SM ou à distance de toute source d’éclairage artificiel et sans éclairage ambiant suffisant pour qu’il soit possible de discerner les repères à la surface ne satisferait pas aux exigences d’exploitation VFR de nuit. Un tel vol exigerait plutôt que les pilotes utilisent leurs instruments de vol pour assurer l’exploitation sécuritaire de l’aéronef.

    À la suite d’une enquête du BSTNote de bas de page 41 sur l’écrasement survenu en mai 2013 d’un hélicoptère qui avait décollé dans des conditions VFR de nuit d’un aéroport éloigné près duquel il y avait peu d’éclairage, le BST avait soulevé des inquiétudes quant au manque de clarté dans la signification pratique de la définition d’un « vol avec repères visuels à la surface ». Le Bureau avait recommandé que

    le ministère des Transports modifie la réglementation de manière à définir clairement les repères visuels (y compris les considérations d’éclairage ou autres moyens) requis pour réduire les risques liés aux vols de nuit selon les règles de vol à vue.
    Recommandation A16-08 du BST

    Au mois de mars 2021, la plus récente évaluation publiée par le BST de la réponse de TC à la recommandation A16-08 avait été effectuée en février 2019Note de bas de page 42 et dénotait une intention satisfaisante.

    TC a indiqué être en train de rédiger 2 avis de proposition de modification (APM) qui mèneraient à la mise à jour des exigences pour les vols VFR de nuit et à des changements exigeant 2 niveaux de qualification de vol de nuit. TC prévoit achever ces dossiers d’APM d’ici le milieu de 2021. TC a également publié une version mise à jour de la circulaire d’information (CI) 603-001 – Autorisation spéciale pour mener des opérations à l’aide de systèmes d’imagerie de vision nocturne, de même que des articles dans des numéros de Sécurité aérienne — Nouvelles afin d’instruire les pilotes et de les sensibiliser aux risques associés aux vols VFR de nuit.

    Depuis mai 2013, le BST a enquêté sur 5 autres accidents mortels mettant en cause un aéronef privé effectuant un vol VFR de nuit. Les rapports de ces enquêtes ont souligné le manque de clarté dans la réglementation en ce qui a trait aux repères visuelsNote de bas de page 43.

    1.18.2.2 Exigences de Transports Canada en matière de qualification de vol de nuit et de mise à jour des connaissances

    La norme 421.42 du RAC présente les exigences relatives à l’obtention d’une annotation de vol de nuit par un titulaire de licence de pilote privé. L’expérience requise est de 10 heures de vol de nuit (5 heures en double commande et 5 heures en solo) et de 10 heures de vol aux instruments en double commande. De plus, le demandeur doit effectuer avec succès un vol de qualification avec un inspecteur de TC ou un instructeur de vol qualifié et faire preuve du niveau de compétences précisé dans le Guide de l’instructeur de vol – AvionNote de bas de page 44.

    Pour ce qui est des détenteurs d’annotations de vol de nuit au Canada, le paragraphe 401.05 du RAC définit les exigences en matière de mise à jour des connaissances pour exercer les privilèges des licences et des annotations d’équipage de conduite. En ce qui concerne les vols VFR de nuit, la seule limitation spécifiée est que, s’il transporte des passagers, le pilote doit avoir effectué 5 décollages et atterrissages de nuit au cours des 6 derniers mois. Il n’existe aucune exigence pour les pilotes de s’exercer à voler aux instruments s’ils effectuent des vols VFR de nuit.

    1.18.2.3 Exigences en matière de vol de nuit de la Federal Aviation Administration

    Les pilotes aux États-Unis ne sont pas tenus d’obtenir une qualification de vol de nuit ou une annotation, car le vol de nuit est inclus dans les exigences de la FAA relatives au vol privé et au pilotage d’avions monomoteursNote de bas de page 45 [traduction] :

    (2) Sous réserve des dispositions de la section 61.110 de la présente partie, 3 heures de formation en vol de nuit à bord d’un avion monomoteur qui comprennent :

    (i) un vol-voyage d’une distance totale de plus de 100 milles marins;

    (ii) 10 décollages et 10 atterrissages jusqu’à un arrêt complet (avec chaque atterrissage comptant un vol dans le circuit) à un aéroport.

    (3) Trois (3) heures d’entraînement en vol à bord d’un avion monomoteur sur la façon de contrôler et de manœuvrer un avion uniquement par référence à des instruments, y compris le vol direct et en palier, les montées et descentes à vitesse anémométrique constante, les virages vers un cap déterminé, le rétablissement d’assiettes de vol inhabituelles, les communications radio et l’utilisation de systèmes ou d’installations de navigation et de services radar appropriés au vol aux instrumentsNote de bas de page 46;

    Selon la réglementation des États-Unis, pour transporter des passagers au cours de la période commençant 1 heure après le coucher du soleil et se terminant 1 heure avant le lever du soleil, il faut avoir effectué au moins 3 décollages et 3 atterrissages jusqu’à un arrêt complet, dans les 90 jours précédents, pendant la période commençant 1 heure après le coucher du soleil et se terminant 1 heure avant le lever du soleilNote de bas de page 47.

    D’après son carnet de vol, le pilote satisfaisait à ces exigences.

    1.19 Techniques d’enquête utiles ou efficaces

    Sans objet.

    2.0 Analyse

    L’enquête n’a révélé aucune défectuosité ou anomalie dans les fonctions mécaniques de l’aéronef. Le pilote détenait les qualifications nécessaires pour le vol, et rien ne porte à croire que des facteurs médicaux ou pathologiques aient pu nuire à son rendement.

    Par conséquent, afin de comprendre les raisons pour lesquelles cet accident s’est produit, l’analyse portera sur les aspects suivants : la prise de décisions du pilote, y compris la planification avant le vol et les effets de l’expérience; le vol de nuit selon les règles de vol à vue (VFR); le vol par inadvertance dans des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC); l’exploitation d’un aéronef qui dépasse la masse maximale admissible au décollage; et l’utilisation des ceintures de sécurité.

    2.1 Prise de décisions

    2.1.1 Planification avant le vol

    Avant le départ d’un vol VFR, il est important que les pilotes examinent toutes les prévisions et tous les bulletins météorologiques pertinents. Cette planification exhaustive avant un vol permet de prendre des décisions éclairées au sol pour éviter de devoir prendre en vol des décisions potentiellement plus difficiles.

    Dans l’événement à l’étude, le pilote a vérifié avant le départ les conditions météorologiques à l’aide de ForeFlight Mobile. Les images météorologiques consultées sur le compte ForeFlight Mobile du pilote étaient à une échelle qui couvrait l’ensemble des États-Unis continentaux. Néanmoins, les conditions météorologiques indiquées sur ces cartes dépeignaient les conditions couvrant la zone prévue du vol à l’étude, qui était située à proximité de la frontière canado-américaine. Certaines des cartes que le pilote a consultées indiquaient la présence d’un système de basse pression associé à des précipitations mixtes et à une possibilité de plafonds bas, ainsi qu’à une visibilité réduite le long de grands segments de la route de vol prévue, y compris à la destination.

    Même si d’autres produits météorologiques aéronautiques localisés, comme les messages d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) et les prévisions d’aérodrome (TAF), étaient disponibles par réseau Wi-Fi dans ForeFlight au moment de la planification avant le vol, l’enquête n’a pas permis de déterminer si le pilote avait accédé à ces renseignements. De plus, il n’a pas été possible de déterminer si le pilote avait vérifié d’autres sources de renseignements météorologiques avant le départ. Ces sources de renseignements météorologiques, y compris les METAR et les TAF pertinents, auraient pu indiquer que les conditions prévues seraient inférieures au minimum requis pour effectuer un vol VFR de nuit.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Le pilote a quitté l’aéroport municipal Toronto-Buttonville (CYKZ) (Ontario) alors que les conditions météorologiques du vol prévu étaient inférieures aux limites requises pour un vol VFR de nuit.

    2.1.2 Effet de l’expérience

    Même si le pilote était qualifié pour effectuer le vol, il ne détenait son certificat de pilote privé que depuis peu de temps. Il ne possédait pas de qualification de vol aux instruments et n’avait qu’une expérience limitée en vol de nuit. Le pilote avait acquis la majeure partie de son expérience de vol au Texas, où le climat est très différent de celui du Canada et où il aurait eu un meilleur accès à des renseignements météorologiques en vol à l’aide de sa tablette.

    Il n’a pas été possible de déterminer si le pilote consultait ForeFlight Mobile pendant le vol à l’étude, mais selon les renseignements obtenus, il l’utilisait couramment pour naviguer et afficher des renseignements météorologiques pendant le vol. Cependant, lors du vol à l’étude, étant donné que le système repose sur la surveillance dépendante automatique en mode diffusion – réception (ADS-B réception) et parce que l’ADS-B réception n’est pas disponible au Canada, le pilote n’aurait pas eu accès aux produits météorologiques qu’il avait l’habitude de consulter aux États-Unis, comme les radars météorologiques, les METAR et les TAF.

    Les pilotes de l’aviation générale, en particulier ceux qui possèdent une expérience de vol limitée, peuvent sous-estimer considérablement les dangers et les risques associés aux conditions météorologiques auxquelles ils sont confrontés pour la première fois, ce qui peut les mener à voler dans des conditions météorologiques qui se détériorent.

    Même si le pilote avait examiné certaines sources météorologiques avant le vol à l’étude, compte tenu de son expérience de vol limitée, y compris de nuit, il n’était probablement pas pleinement conscient des dangers associés au vol. Il s’agissait notamment de piloter l’aéronef de nuit sans bénéficier des mises à jour météorologiques en direct de l’ADS-B sur ForeFlight, par mauvais temps et dans des zones qu’il ne connaissait pas bien, et dans des conditions météorologiques difficiles à évaluer une fois en vol, étant donné les repères visuels limités disponibles.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Étant donné l’expérience de vol limitée du pilote, il est probable qu’il n’ait pas reconnu les dangers associés au vol VFR de nuit dans des conditions météorologiques défavorables.

    2.2 Vol de nuit selon les règles de vol à vue

    L’aéronef a décollé de jour; toutefois, une partie importante du vol prévu devait être effectuée en VFR de nuit. Puisqu’il peut être difficile d’évaluer la distance qui les sépare des nuages et des intempéries pendant les heures d’obscurité, les pilotes peuvent y entrer par inadvertance, ce qui peut entraîner une désorientation spatiale, surtout chez les pilotes qui n’ont que très peu de formation aux instruments ou qui n’ont pas de qualifications de vol aux instruments.

    Le vol devait survoler des régions où, par moments, l’éclairage artificiel était limité ou inexistant. Ainsi, le pilote n’aurait eu aucun repère au sol pendant une partie du vol.

    Bien que la zone de la collision avec le relief ait été entourée d’éclairage artificiel, la lune n’aurait fourni que peu, voire pas, de lumière, et le pilote aurait eu de la difficulté à voir les repères visuels extérieurs en raison d’une combinaison d’obscurité et de conditions météorologiques défavorables.

    Le Règlement de l’aviation canadien (RAC) exige que le pilote utilise constamment des repères visuels à la surface au cours d’un vol de nuit selon les règles de vol à vue, mais il ne définit pas le terme « repères visuels à la surface ». Comme l’indique la recommandation A16-08 du BST, le secteur a généralement interprété ce terme comme voulant dire des conditions météorologiques de vol à vue, qui sont fondées sur la visibilité et la distance par rapport aux nuages.

    Fait établi quant aux risques

    Si le RAC ne définit pas clairement ce que sont les « repères visuels à la surface », des vols de nuit pourraient être effectués avec des repères visuels inadéquats, ce qui augmente les risques associés aux vols VFR de nuit, notamment les impacts sans perte de contrôle et les accidents avec perte de maîtrise.

    2.3 Vol par inadvertance dans des conditions météorologiques de vol aux instruments

    Après avoir volé environ 30 minutes dans la direction générale de l’aéroport de Québec-Neuville (CNV9) (Québec), l’aéronef a amorcé une descente et un virage vers l’aéroport de Kingston (CYGK) (Ontario) en direction sud-est. Cette manœuvre a sans doute été effectuée en réaction aux mauvaises conditions météorologiques. Les images radar météorologiques obtenues après l’événement confirment qu’il y avait des précipitations dans le secteur à ce moment-là, et le METAR pour une station voisine indiquait également des plafonds bas et une visibilité réduite.

    Après avoir communiqué avec la station d’information de vol de CYGK et avoir indiqué son intention d’atterrir sur la piste 19, le pilote a commencé à descendre et à ralentir, ce qui signale le début d’une approche. Au cours de son dernier appel radio, il a correctement signalé sa position à 2,5 milles marins (NM) au nord de l’aéroport, ce qui montre qu’il avait une certaine connaissance de sa position horizontale; il ne semblait pas animé par un quelconque sentiment d’urgence.

    Les motifs qui font que le pilote a effectué un virage à gauche pour s’éloigner de l’aéroport ne sont pas clairs. Toutefois, il est probable que pendant les manœuvres d’atterrissage et les tentatives de localisation visuelle de l’aéroport dans de mauvaises conditions météorologiques, l’aéronef a pénétré dans un nuage ou dans une zone de visibilité réduite et le pilote a perdu tout repère visuel avec la surface.

    Dans ces circonstances, il aurait été difficile pour le pilote en cause d’interpréter correctement l’assiette, l’altitude ou la vitesse de l’aéronef.

    La vision est notre sens d’orientation prédominant, et lorsque les pilotes perdent ce sens en perdant les repères visuels externes, la probabilité d’une désorientation est grandement augmentée. La désorientation spatiale peut être surmontée en passant au vol aux instruments. Cependant, le pilote ne possédait pas de qualification de vol aux instruments et n’avait que peu d’expérience de vol aux instruments. Compte tenu de son manque d’expérience de vol aux instruments et du peu de repères visuels extérieurs, le pilote a probablement subi une désorientation spatiale, ce qui a mené l’aéronef à entamer une montée abrupte et un roulis de gauche à droite.

    À ce moment-là, le pilote a perdu la maîtrise de l’aéronef, la vitesse a chuté bien en dessous de la vitesse de décrochage et une descente rapide s’en est suivie. L’aéronef a roulé sur le dos en piqué prononcé avant de percuter le sol.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Alors que l’aéronef approchait de CYGK, le pilote a probablement perdu tout repère visuel à la surface, subi une désorientation spatiale et perdu la maîtrise de l’aéronef.

    2.4 Exploitation d’aéronefs qui dépassent la masse maximale admissible au décollage

    Dans l’événement à l’étude, l’aéronef a décollé avec environ 500 livres de carburant, 7 occupants et au moins 135 livres de fret à bord. Un examen de la masse totale à bord de l’aéronef a permis de déterminer que l’aéronef pesait environ 200 livres de plus que la masse maximale admissible au décollage lorsqu’il a quitté CYKZ. Au moment de l’événement, d’après la consommation de carburant estimée, l’aéronef pesait encore environ 100 livres de trop.

    On n’a trouvé aucune trace écrite du calcul de la masse et du centrage; toutefois, selon les données obtenues, le pilote connaissait les limites de masse de l’aéronef et effectuait souvent un calcul mental pour s’assurer que la masse respectait ces limites.

    Fait établi quant aux risques

    Si des aéronefs sont exploités avec une masse supérieure à la masse maximale admissible au décollage, il y a un risque de dégradation des performances et des caractéristiques de vol, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.

    2.5 Utilisation des ceintures de sécurité

    La réglementation relative à l’utilisation des ceintures de sécurité est semblable au Canada et aux États-Unis. Tant le RAC que les Federal Aviation Regulations exigent que les passagers portent des ceintures de sécurité pendant les déplacements au sol, le décollage et l’atterrissage, mais ne l’exigent pas pendant la partie en route du vol.

    Bien que l’aéronef n’ait été équipé que de 6 sièges et de 6 ceintures de sécurité, le vol a été effectué avec 7 occupants à bord, dont aucun n’était assez jeune pour être transporté par un autre passager assis. Les 4 ceintures de sécurité à l’arrière de la cabine étaient détachées lors de l’impact. Peu avant la collision avec le relief, l’aéronef approchait de CYGK pour un atterrissage; à ce moment, le pilote devait donner l’ordre aux passagers de boucler leur ceinture de sécurité. L’enquête n’a pas permis de déterminer pourquoi les passagers des sièges arrières ne portaient pas la ceinture, ni s’ils l’avaient bouclée plus tôt dans le vol.

    De plus, le pilote ne portait pas la ceinture-baudrier disponible au moment de l’impact. Bien qu’il eut probablement été impossible de survivre à l’événement à l’étude en raison des forces d’impact, il est notoire que l’utilisation des ceintures de sécurité et ceintures-baudriers réduit le risque ou la gravité des blessures pour les occupants de l’aéronef.

    Fait établi quant aux risques

    Dans un accident, les passagers qui ne sont pas attachés correctement courent plus de risques d’être gravement ou mortellement blessés que ceux qui sont attachés correctement.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

    1. Le pilote a quitté l’aéroport municipal Toronto-Buttonville (Ontario) alors que les conditions météorologiques du vol prévu étaient inférieures aux limites requises pour un vol selon les règles de vol à vue de nuit.
    2. Étant donné l’expérience de vol limitée du pilote, il est probable qu’il n’ait pas reconnu les dangers associés au vol à vue de nuit dans des conditions météorologiques défavorables.
    3. Alors que l’aéronef approchait de l’aéroport de Kingston, le pilote a probablement perdu tout repère visuel à la surface, subi une désorientation spatiale et perdu la maîtrise de l’aéronef.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.

    1. Si le Règlement de l’aviation canadien ne définit pas clairement ce que sont les « repères visuels à la surface », des vols de nuit pourraient être effectués avec des repères visuels inadéquats, ce qui augmente les risques associés aux vols à vue de nuit, notamment les impacts sans perte de contrôle et les accidents avec perte de maîtrise.
    2. Si des aéronefs sont exploités avec une masse supérieure à la masse maximaleadmissible au décollage, il y a un risque de dégradation des performances et des caractéristiques de vol, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.
    3. Dans un accident, les passagers qui ne sont pas attachés correctement courent plus de risques d’être gravement ou mortellement blessés que ceux qui sont attachés correctement.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    Le Bureau n’est pas au courant de mesures de sécurité prises à la suite de l’événement à l’étude.

    Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .