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Rapport d'enquête sur la sécurité du transport aérien A17O0264

Collision avec le relief
Hydro One Networks Inc.
Airbus Helicopters AS 350 B2 (hélicoptère), C-GOHS
Tweed (Ontario), 8 NM NNE



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 14 décembre 2017, un hélicoptère Airbus Helicopters AS 350 B2 avec plateforme extérieure (immatriculation C-GOHS, numéro de série 3240) exploité par Hydro One Networks Inc. transportait des équipes de monteurs de ligne entre une zone de rassemblement et des pylônes de transmission, dans un secteur situé à 8 milles marins au nord-nord-est de Tweed (Ontario).

À 11 h 44, heure normale de l'Est, une équipe de 3 monteurs de ligne est montée à bord de l'hélicoptère près du pied d'un pylône pour retourner à la zone de rassemblement. Les monteurs de ligne avaient pris l'habitude de fixer des sacs à outils et d'autres petits articles à la plateforme extérieure durant les vols en direction ou à destination des chantiers. Suivant cette pratique, les monteurs de ligne ont fixé quelques articles à la plateforme au moment de l'embarquement, puis ont rejoint leur siège dans la cabine arrière de l'hélicoptère.

La pratique de transporter des objets à l'extérieur fixés à la plateforme ne faisait pas partie des procédures normalisées de la compagnie; par conséquent, il n'y avait aucune mesure adéquate en place pour s'assurer que les objets soient rangés et attachés correctement. D'ailleurs, un sac d'équipement en toile vide muni d'un mousqueton n'avait pas été attaché solidement sur la plateforme avant le départ de l'hélicoptère vers la zone de rassemblement.

L'hélicoptère se trouvait à 0,26 mille marin de la zone de rassemblement quand le sac en toile s'est séparé de la plateforme et a percuté le rotor de queue de l'hélicoptère. L'impact a causé d'importants dommages, un important déséquilibre de la masse et de fortes vibrations.

Peu de temps après, alors que le pilote tentait d'atterrir, le rotor de queue, la boîte de transmission arrière et le plan fixe vertical se sont séparés de l'hélicoptère. L'hélicoptère est devenu impossible à maîtriser et a percuté le relief. Aucun des 3 monteurs de ligne n'était attaché; ils ont été séparés de l'hélicoptère, peu avant l'impact ou durant celui-ci. Ils ont été mortellement blessés à la suite d'un contact avec l'hélicoptère ou le relief avoisinant. Le pilote a subi des blessures mortelles lors de l'impact. L'hélicoptère a été détruit.

Chacun des sièges dans la cabine arrière était muni d'une ceinture de sécurité qui comprenait une ceinture-baudrier détachable; toutefois, ces ceintures-baudriers avaient été enroulées et fixées avec du ruban isolant avant le vol, ce qui les rendait inutilisables. En vertu du règlement de Transports Canada, le port des ceintures de sécurité est obligatoire; or, la définition usuelle d'une ceinture de sécurité dans le règlement était interprétée comme voulant dire que, pour se conformer au règlement, on pouvait utiliser la ceinture sous-abdominale seule, ou avec la ceinture-baudrier.

Outre ne pas avoir pu utiliser les ceintures-baudriers, les monteurs de ligne en cause dans l'événement à l'étude n'avaient pas bouclé leur ceinture sous-abdominale, peut-être à cause de leur perception d'un faible risque inhérent à un vol de courte distance ou qu'il leur était difficile de boucler les ceintures par-dessus leurs vêtements d'hiver.

De 1990 à 2018, le BST a enquêté sur de nombreux accidents d'aéronefs équipés de ceintures-baudriers détachables dans lesquels on a déterminé que les occupants ne portaient pas les ceintures au moment de l'accident. Des 62 accidents recensés, 33 ont été mortels, ce qui a occasionné 68 pertes de vie au total. Parmi les 68 personnes ayant perdu la vie, 37 personnes ne portaient pas la ceinture-baudrier qui était en place.

Même si les probabilités de survie dans ces 62 accidents étaient différentes, dans la plupart des cas, le port de la ceinture-baudrier aurait pu augmenter les chances de survie et d'évacuation des occupants. Bien que l'interprétation du règlement n'est pas l'unique raison pour laquelle les occupants n'aient pas porté la ceinture-baudrier dans les cas examinés, dans l'événement à l'étude, son ambiguïté a eu une incidence sur son utilisation.

Par conséquent, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports modifie le Règlement de l'aviation canadien pour éliminer toute ambiguïté relativement à la définition de « ceinture de sécurité ».
Recommandation A19-01 du BST


1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

À 8 h 45Note de bas de page 1, le 14 décembre 2017, un hélicoptère Airbus Helicopters AS 350 B2 (immatriculation C-GOHS, numéro de série 3240), exploité par Hydro One Networks Inc. (Hydro One) et muni d'une plateforme extérieure (aussi appelée Air Stair), a décollé d'une héliplateforme sur le chemin Industrial Park à Tweed (Ontario), le pilote seul à bord. L'hélicoptère se dirigeait vers une zone de rassemblement, située à quelque 8 milles marins (NM) au nord-nord-est de Tweed, pour transporter des monteurs de ligneNote de bas de page 2 entre une zone de rassemblement et des pylônes de transmission. Le pilote a atterri l'hélicoptère à la zone de rassemblement à 8 h 52 et a éteint le moteur de l'hélicoptère.

Peu de temps après, les employés de Hydro One ont pris part à une réunion préparatoireNote de bas de page 3 à la zone de rassemblement pour discuter du plan de travail pour la journée. Le pilote a ensuite tenu une autre réunion préparatoire avec tous les monteurs de ligne qu'il transporterait ce jour-là. Un représentant en santé et sécurité au travail de Hydro One a assisté à ces 2 réunions.

La réunion préparatoire du pilote consistait en un exposé standard sur les mesures de sécurité relatives à l'hélicoptère, y compris les procédures d'utilisation normalisées à suivre pour s'approcher de l'hélicoptère, y monter et en descendre. Durant l'exposé, il a aussi été question de l'utilisation des ceintures de sécurité et de l'emplacement de l'équipement de sécurité. On a affirmé que le pilote avait indiqué aux monteurs de ligne où ranger leur équipement.

Le pilote avait également mentionné qu'en raison de la basse température, il n'allait pas retirer les portes de droite de la cabine ni utiliser le Air StairNote de bas de page 4 pour effectuer des transferts aériens, comme il l'avait fait par le passé. Les monteurs de ligne devaient plutôt être déposés au pied des pylônes et y grimper.

Une fois l'exposé de sécurité terminé, l'hélicoptère a décollé à 9 h 39 pour transporter la première équipe au pylône auquel elle était affectée. Le pilote a ensuite transporté une autre équipe à un pylône différent, avant de retourner à la zone de rassemblement à 11 h 16.

À 11 h 39 min 13 s, le pilote a quitté la zone de rassemblement pour commencer à ramener les équipes pour leur pause-repas. Il a fait route vers l'est en suivant la ligne de transport d'électricité, avant d'atteindre un pylône à 2,25 NM de distance à 11 h 42 min 9 s. Le pilote a laissé tourner le moteur de l'hélicoptère pendant que les monteurs de ligne montaient à bord et rangeaient leur équipementNote de bas de page 5.

On n'a pu déterminer par quelle porte les monteurs de ligne sont montés à bord de l'hélicoptère; toutefois, les monteurs de ligne utilisent habituellement le Air Stair et entrent par la porte de droite.

Une grande poulie ainsi que 2 sacs à outils souples avec des sangles en tissu (désignés ci-après « sacs à outils ») partiellement remplis de diverses pièces d'équipement ont été fixés au Air Stair à l'aide de mousquetons. Le pilote a décollé à 11 h 44 min 9 s et a mis le cap vers l'ouest pour regagner la zone de rassemblement, à environ 250 pieds au-dessus du niveau du sol (AGL).

À 11 h 45 min 54 s, le pilote a amorcé la descente pour atterrir. À 11 h 46 min 9 s, l'hélicoptère se trouvait à environ 0,26 NM de la zone de rassemblement. Il se déplaçait à une vitesse de 51 nœuds et était à 230 pieds AGL quand un sac d'équipement en toile vide (désigné ci-après « sac canvasNote de bas de page 6 ») de 4 pieds de long, muni d'un mousqueton, a percuté le rotor de queue et a causé la séparation de l'extrémité d'une de ses pales, y compris la masse d'équilibrage.

L'enquête a permis de déterminer que le sac canvas et son mousqueton se trouvaient fort probablement sur le Air Stair ou dans l'un des sacs à outils fixés au Air Stair avant qu'ils ne percutent le rotor de queue; toutefois, on n'a pu déterminer son emplacement exact ni même comment il était attaché, s'il l'était.

Le pilote a d'abord réussi à garder la maîtrise de l'hélicoptère et a poursuivi l'approche à la zone de rassemblement. Il n'a fait aucune communication radio avec le personnel au sol à la zone de rassemblement.

À environ 75 pieds AGL, le rotor de queue, la boîte de transmission arrière et le plan fixe vertical se sont séparés de la poutre de queue. Le pilote a perdu la maîtrise de l'hélicoptère, qui a pris de l'altitude avant de pivoter rapidement vers la gauche et d'amorcer une descente rapide. À 11 h 46 min 42 s, l'hélicoptère a percuté les arbres avoisinants, puis le sol, à environ 400 pieds au nord-ouest du site d'atterrissage prévu (figure 1). Les 3 passagers ont été séparés de l'hélicoptère avant l'impact et ont été mortellement blessés. Le pilote a lui aussi été mortellement blessé.

Figure 1. Trajectoire de vol de l'hélicoptère à l'étude (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Trajectoire de vol de l'hélicoptère à l'étude (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
  1. Lieu de l'accident
  2. Zone de rassemblement
  3. Sac canvas
  4. Pylône de transmission

Les employés de Hydro One qui ont été témoins de l'écrasement se sont précipités vers l'hélicoptère. Un superviseur a composé le 9-1-1 immédiatement après l'écrasement de l'hélicoptère, et les services d'urgence sont arrivés sur les lieux peu de temps après.

La radiobalise de repérage d'urgence s'est activée durant l'accident, et le signal a été détecté par le système Cospas-SarsatNote de bas de page 7 à 11 h 52.

1.2 Tués et blessés

Les 3 passagers, qui ont été séparés de l'hélicoptère avant l'impact, ont subi des blessures mortelles causées par un contact avec le sol ou l'hélicoptère. Le pilote, qui est demeuré assis dans le poste de pilotage avec sa ceinture de sécurité et sa ceinture-baudrier bouclées, a aussi subi des blessures mortelles.

Tableau 1. Tués et blessés
  Équipage Passagers Autres Total
Tués 1 3 4
Blessés graves 0 0 0
Légèrement blessés ou indemnes 0 0 0
Total 1 3 4

1.3 Dommages à l'aéronef

Lorsque le sac canvas et le mousqueton ont percuté et endommagé le rotor de queue, le déséquilibre de la masse dynamique engendré par la séparation de l'extrémité de la pale et la perte de la masse d'équilibrage a entraîné de fortes vibrations. Ces vibrations ont ensuite causé la défaillance totale de l'ensemble du rotor de queue. Ce dernier s'est séparé de la poutre de queue, suivi du plan fixe vertical.

L'hélicoptère est devenu impossible à maîtriser après la séparation du rotor de queue et du plan fixe vertical; durant sa descente rapide et incontrôlée, il a percuté des arbres avoisinants, puis le relief. L'hélicoptère a été détruit durant l'accident (figure 2).

Figure 2. Site principal de l'écrasement (Source : BST)
Site principal de l'écrasement (Source : BST)

1.4 Autres dommages

Sans objet.

1.5 Renseignements sur le personnel

1.5.1 Pilote

Le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur.

Le pilote était au service de Hydro One depuis 2009. Il avait effectué un vol d'entraînement périodique le 26 octobre 2017, qui comprenait de l'entraînement sur les défaillances du système de commande du rotor de queue et du rotor de queue durant le vol stationnaire.

Tableau 2. Renseignements sur le pilote
Licence de pilote Licence de pilote professionnel - hélicoptère
Date d'expiration du certificat médical 1er février 2018
Nombre total d'heures de vol 6585
Heures de vol sur type 5605
Heures de vol au cours des 7 derniers jours 15,6
Heures de vol au cours des 30 derniers jours 29
Heures de vol au cours des 90 derniers jours 112,7
Heures de vol sur type au cours des 90 derniers jours 112,7
Heures de service avant l'événement 4,3
Heures hors service avant la période de travail 13

1.5.2 Monteurs de ligne

Les 3 passagers étaient au service de Hydro One comme monteurs de ligne. L’un était un apprenti et les deux autres étaient des compagons certifiés. Ils avaient tous suivi la formation requise sur les travaux avec le Air Stair, dont une en juin 2017 et les deux autres en septembre 2017.

Pour ces 3 monteurs de ligne, les travaux qu’ils effectuaient sur les lignes de transmission dans les environs de Tweed, commencés en septembre 2017, étaient leur première expérience opérationnelle avec transfert aérien et le Air Stair. Toutefois, aucun transfert aérien ne devait avoir lieu le jour de l’événement.

Tableau 3 . Renseignements sur les monteurs de ligne
  Monteur de ligne 1 Monteur de ligne 2 Monteur de ligne 3
Accréditation Compagnon Compagnon Apprenti de niveau 3*
Heures de service avant l’événement à l’étude 4,5 4,5 4,5
Heures de congé avant la période de travail 14 14 14

* Le programme d’apprentissage comprend 4 niveaux, chacun exigeant 2000 heures de travail. Le niveau 4 est le plus élevé; il faut environ 4 ans pour terminer le programme complet. Une fois ce programme terminé, l’apprenti peut être certifié comme compagnon monteur de ligne.

1.5.2.1 Formation

Le cours de Hydro One sur l'accès aux structures de transport d'électricité depuis le Air StairNote de bas de page 8 de l'hélicoptère comprend 8 modules qui couvrent plusieurs sujets portant sur l'utilisation sécuritaire du Air Stair. La formation comprend un cours en classe de 2 heures et une formation pratique de 6 heures, au terme de laquelle les monteurs de ligne passent un test d'habileté. En général, cette formation couvre les procédures que les monteurs de ligne doivent suivre lorsqu'ils passent de l'hélicoptère aux pylônes ou poteaux de transmission.

D'après les documents de formation, lorsque les monteurs de ligne montent à bord de l'hélicoptère, ils doivent fixer les sacs à outils à la rampe du Air Stair et attacher les sacs canvas au plancher de la cabineNote de bas de page 9. Il n'y a aucune directive similaire sur la façon d'attacher ces sacs quand on monte à bord de l'hélicoptère depuis le sol. Toutefois, l'enquête a permis de déterminer l'existence de diverses pratiques pour ranger et attacher les sacs canvas.

1.5.2.2 Équipement

Pour effectuer des travaux sur les pylônes de transmission, les monteurs de ligne portent l'équipement de protection individuelle, ce qui comprend un harnais de sécurité complet muni d'un dispositif antichute, et des vêtements approuvés et adaptés aux conditions météorologiques au moment d'effectuer les travaux.

Le jour de l'événement, les monteurs de ligne portaient des vêtements d'hiver épais et auraient porté leur harnais de sécurité complet avec dispositif antichute pendant qu'ils travaillaient sur le pylône. Or, durant le vol de retour à la zone de rassemblement, comme les harnais de sécurité complets avec dispositif antichute n'étaient plus nécessaires, les monteurs de ligne les avaient retirés. L'enquête n'a pas permis de déterminer exactement quand les monteurs de ligne ont retiré leur harnais de sécurité complet.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

Tableau 4. Renseignements sur l'aéronef
Constructeur Airbus Helicopters
Type, modèle et immatriculation AS 350 B2, C-GOHS
Année de construction 1999
Numéro de série 3240
Date d'émission du certificat de navigabilité 5 janvier 2000
Total d'heures de vol cellule 10 130
Type de moteur (nombre) Turbo-hélice (1)
Type d'hélice ou de rotor (nombre) Rotor Starflex semi-rigide (3 pales)
Masse maximale autorisée au décollage 2250 kg
Type(s) de carburant recommandé(s) Jet A, Jet A-1, Jet B
Type de carburant utilisé Jet A

1.6.1 Généralités

L'AS 350 B2 est un hélicoptère de servitude léger monomoteur initialement conçu et construit en France par Aérospatiale dans les années 1970. En janvier 1992, Aérospatiale et Daimler-Benz Aerospace AG ont fusionné pour former la compagnie Eurocopter, qui a été intégrée à Airbus par la suite. En janvier 2014, Airbus a rebaptisé Eurocopter, qui est désormais connue sous le nom de Airbus Helicopters.

Les dossiers indiquent que l'aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation et aux procédures approuvées en vigueur. La masse et le centre de gravité étaient en deçà des limites prescrites par le constructeur au moment de l'événement.

1.6.2 Air Stair

L'hélicoptère était muni d'une plateforme (connue sous le nom de Air Stair) pour permettre aux monteurs de ligne de passer d'un pylône ou d'un poteau de transmission à l'hélicoptère en vol stationnaire tout près (et vice-versa).

Le Air Stair est monté au ventre de l'hélicoptère, mais ne dépasse pas la partie inférieure de l'atterrisseur à patins (figure 3). Lorsqu'un Air Stair est installé, on remplace le siège avant gauche de l'hélicoptère par une boîte dont se servent les monteurs de ligne pour ranger leur équipement. En outre, le plancher de l'hélicoptère comprend des points d'ancrage auxquels les monteurs de ligne peuvent fixer leur dispositif antichute lorsqu'ils sont prêts pour le transfert.

Figure 3. Hélicoptère muni d'un Air Stair (Source : Hydro One Networks Inc.)
Hélicoptère muni d'un Air Stair (Source : Hydro One Networks Inc.)
1.6.2.1 Certificat de type supplémentaire du Air Stair

Tous les aéronefs commerciaux doivent avoir un certificat de type qui certifie la conformité de leur conception aux exigences réglementaires. Lorsqu'on doit installer sur un aéronef de l'équipement de travail qui n'a pas été conçu par la compagnie détentrice du certificat de type, un certificat de type supplémentaire (STC) est requis.

Hydro One a retenu les services de JCM Aerodesign Limited pour concevoir le Air Stair. Transports Canada (TC) a approuvé le STC SH01-62 le 22 novembre 2001.

Le STC a été délivré accompagné de plusieurs restrictions, dont [traduction] :

Les giravions ainsi modifiés doivent être exploités conformément au supplément au manuel de vol […]

L'utilisation de cet équipement aux fins d'embarquement ou de débarquement en vol exige une approbation opérationnelle distincte de la part de Transports CanadaNote de bas de page 10.

1.6.2.1.1 Supplément au manuel de vol et supplément au manuel de maintenance

Conformément aux exigences énoncées dans la réglementation, le concepteur du Air Stair a publié un supplément au manuel de vol et un supplément au manuel de maintenance. Le détenteur du STC (c.-à-d. l'exploitant) avait l'obligation de tenir les manuels à jour.

Un supplément au manuel de vol informe les équipages de conduite de tout changement relatif aux limites, aux procédures normales et d'urgence, et à la performance d'un aéronef décrits dans le manuel de vol de l'aéronef. Le supplément doit être ajouté au manuel de vol de l'aéronef, auquel les équipages de conduite ont accès.

Un supplément au manuel de maintenance contient de l'information sur la maintenance et l'installation d'équipement. Ce supplément n'est généralement pas aussi accessible aux équipages de conduite.

Le Air Stair a été modifié en 2007 pour permettre l'ajout d'un siège amovible et d'un plateau à outils installés directement sur le Air Stair; ainsi, un monteur de ligne pourrait travailler depuis le Air Stair sans devoir en débarquer. JCM Aerodesign Limited a modifié le supplément au manuel de maintenance pour qu'il reflète ces changements; toutefois, bien que le supplément au manuel de vol ait lui aussi été modifié au même moment, il ne comprenait aucun renseignement sur l'ajout d'un siège et d'un plateau à outil.

Ces modifications aux manuels ont été approuvées par TC; or, il y avait plusieurs incohérences entre ces 2 manuels qui n'ont pas été relevées durant le processus d'approbation. Par exemple, l'inscription sur la plaquette qui doit être fixée au tableau de bord, publiée dans le supplément au manuel de vol, était différente de l'inscription publiée dans le supplément au manuel de maintenance (tableau 5).

L'enquête a permis de constater que la plaquette n'était pas sur le tableau de bord de l'hélicoptère conformément aux modifications apportées en 2007.

Tableau 5. Texte sur la plaquette, publié dans le supplément au manuel de vol et le supplément au manuel de maintenance. Les caractères gras ont été ajoutés par le BST pour faire ressortir les différences.
Inscription sur la plaquette dans le supplément du manuel de vol [traduction]* Inscription sur la plaquette dans le supplément du manuel de maintenance [traduction]**

« AVEC LE AIR STAIR INSTALLÉ
VNE SANS PORTE 100 KIAS
VNE AVEC PORTES 100 KIAS
LORSQUE LE AIR STAIR EST OCCUPÉ,
NE PAS DÉPASSER 30 NŒUDS DANS QUELQUE DIRECTION, OU
INCLINAISON DE 10°. DÉCOLLAGE ET ATTERRISSAGE INTERDITS SI LE AIR STAIR EST OCCUPÉ. »

« QUAND LE AIR STAIR EST INSTALLÉ
VNE SANS PORTE 100 KIAS
VNE AVEC PORTES 100 KIAS
QUAND LE AIR STAIR EST OCCUPÉ, VOL
STATIONNAIRE SEULEMENT
SANS DÉPASSER 17 NŒUDS, OU EN PALIER
VOL VERS L'AVANT SANS DÉPASSER 30 KIAS
ET UNE INCLINAISON DE 10°. DÉCOLLAGE ET ATTERRISSAGE INTERDITS SI LE AIR STAIR EST
OCCUPÉ. »

* JCM Aerodesign Limited, Flight Manual Supplement No. 003063FMS (approuvé par TC le 27 septembre 2007), p. 4.

** JCM Aerodesign Limited, Maintenance Manual Supplement No. 003063MMS (accepté par TC le 28 septembre 2007), p. 7.

Voir l'annexe A pour une liste complète des différences entre le supplément au manuel de vol et le supplément au manuel de maintenance.

1.6.2.2 Spécifications d'exploitation

Outre les STC, et selon l'utilisation que l'on compte faire de l'équipement opérationnel, l'exploitant aérien pourrait devoir obtenir une approbation opérationnelle de TC, sous forme d'une spécification d'exploitation ajoutée à son certificat d'exploitation aérienne.

Étant donné le type de travail qu'effectuait Hydro One avec le Air Stair, la compagnie devait détenir 2 spécifications d'exploitation distinctes.

La spécification d'exploitation 044, Entrer dans un hélicoptère ou le quitter en vol, était obligatoire pour permettre aux monteurs de ligne de monter à bord de l'hélicoptère ou d'en descendre durant les opérations en vol (au moyen du Air Stair). L'exploitant a demandé cette spécification, et TC l'a approuvée.

La spécification d'exploitation 047, Charges externes de classe D pour hélicoptère - RAC 702.21(2)a)Note de bas de page 11, était obligatoire pour permettre aux monteurs de ligne d'effectuer le travail à partir du Air Stair durant les opérations en vol.

En août 2001, Hydro One a communiqué avec TC concernant cette autorisation. TC a répondu verbalement ce type de travail correspondrait au transport d'une charge externe de classe A et que, par conséquent, la spécification d'exploitation 047 n'était pas requise. TC n'a toutefois pas de preuve que cette conversation a eu lieu, et a indiqué qu'on a possiblement affirmé verbalement que la spécification d'exploitation 047 n'était pas requise, car on croyait que Hydro One se servait du Air Stair uniquement pour l'embarquement et le débarquement (conformément au STC).

Après l'événement à l'étude, TC a indiqué qu'on ne savait pas que l'exploitant se servait du Air Stair à des fins qui exigeaient une autorisation pour des charges externes de classe D (spécification d'exploitation 047). Hydro One n'avait pas obtenu l'approbation de TC pour cette spécification d'exploitation.

1.6.2.3 Transport d'équipement et d'outils durant les opérations avec le Air Stair

Les monteurs de ligne doivent apporter plusieurs outils à main au sommet des pylônes de transmission pour effectuer leurs travaux. Lorsqu'ils accèdent à un pylône depuis le sol, les monteurs de ligne travaillent habituellement en équipes de 3 : 2 personnes effectuent les travaux sur le pylône et le 3e demeure au sol à titre d'aide.

Quand on utilise le Air Stair pour les transferts aériens, les monteurs de ligne passent de l'hélicoptère au sommet du pylône ou du poteau de transmission. Ainsi, les monteurs de ligne peuvent travailler en équipes de 2 au lieu de 3, car l'aide au sol n'est pas nécessaire.

Durant les opérations depuis le sol, le monteur de ligne qui demeure au sol utilise un système à poulie pour monter les outils et l'équipement jusqu'au sommet du pylône. Durant les transferts aériens, on transporte l'équipement et les outils au sommet du pylône à bord de l'hélicoptère avec les 2 monteurs de ligne. On ne peut pas transporter les outils et l'équipement dans les compartiments à bagages extérieurs normaux de l'hélicoptère, car ils ne sont pas accessibles durant le vol. Pour faciliter le transfert aérien des articles depuis l'hélicoptère, on les attache au Air Stair avec un mousqueton.

Quand on transporte de l'équipement à l'extérieur de la cabine d'un aéronef ou en dehors d'un compartiment destiné à cet usage, le Règlement de l'aviation canadien (RAC) stipule ce qui suit :

Il est interdit à l'exploitant aérien d'utiliser un aéronef qui transporte une charge externe, à moins que le dispositif qui retient la charge ne soit autorisé aux termes d'un certificat de type supplémentaire ou d'une approbation de navigabilité relative à la configuration opérationnelle de l'aéronefNote de bas de page 12.

Le Air Stair était une modification apportée à l'hélicoptère approuvée conformément à un STC; ainsi, on ne le considérait pas comme une charge externe. Toutefois, ni le supplément au manuel de vol d'origine publié en 2001 ni sa version modifiée en 2007 n'indiquait s'il était permis ou non d'attacher un objet, comme une pièce d'équipement et un sac à outils, au Air Stair pendant que l'hélicoptère était en vol. Tout objet de ce type serait considéré comme une charge externeNote de bas de page 13.

D'après le supplément au manuel de vol [traduction], « le Air Stair est conçu entre autres pour fournir un accès aérien aux monteurs de ligne qualifiés aux pylônes de HydroNote de bas de page 14 ». Comme les monteurs de ligne rangent leurs outils dans le plateau à outils externe lorsqu'ils travaillent directement à partir du Air Stair, et attachent leur équipement ainsi que les sacs à outils au Air Stair durant les transferts entre l'hélicoptère et le pylône, Hydro One a interprété cet énoncé dans le supplément au manuel de vol comme voulant dire que l'on pouvait attacher un objet au Air Stair pendant que l'hélicoptère était en vol.

1.7 Renseignements météorologiques

Les stations météorologiques les plus proches du site de l'accident étaient la Base des Forces canadiennes Trenton, en Ontario (31 NM au sud-sud-ouest du site de l'accident) et l'aéroport de Kingston, en Ontario (35 NM au sud-est du site de l'accident).

Le message d'observation météorologique régulière d'aérodrome (METAR) émis à 12 h pour Trenton faisait état des conditions suivantes :

Le METAR émis à 12 h pour Kingston faisait état des conditions suivantes :

La prévision de zone graphique indiquait une possibilité de quelques nuages de 3000 pieds à 5000 pieds, une visibilité supérieure à 6 SM, et aucun temps significatif.

1.7.1 Basses températures

Au moment de l'accident, la température était d'environ −15 °C. Toutefois, le matin de l'accident, le facteur de refroidissement éolien enregistré aux aéroports de Trenton et de Kingston variait de −28,4 à −23,3. En raison de ces basses températures, on n'allait pas utiliser le Air Stair pour les opérations ce jour-là, et les monteurs de ligne ont dû grimper dans les pylônes pour effectuer leurs travaux. Avant de monter à bord de l'hélicoptère, les monteurs de ligne avaient travaillé dans ces basses températures pendant environ 2 heures.

Il est reconnu que les basses températures affectent la performance physique, dont la motricité fine, comme celle requise pour piloter ou manier des outils pour faire des réparations. Les tâches effectuées respectivement par le pilote et par les monteurs de ligne exigent en outre une vigilance et une concentration constantes pour atténuer leurs risques inhérents.

Le temps froid peut également nuire aux fonctions cognitives. Plusieurs études ont montré que la basse température peut atténuer la performance des fonctions cognitives, comme la vigilanceNote de bas de page 15, la mémoireNote de bas de page 16, le temps de réactionNote de bas de page 17 et la prise de décisionNote de bas de page 18. La théorie de la distraction de TeichnerNote de bas de page 19 pourrait expliquer les conclusions convergentes sur la baisse de la performance. Selon cette théorie, on croit que le stress dû au froid pourrait causer un détournement d'attention de la tâche cognitive, ce qui diminue la performance. Autrement dit, on se concentre plus sur le fait d'avoir froid que sur l'exécution en bonne et due forme de la tâche. Cette théorie est appuyée par de récentes conclusionsNote de bas de page 20 d'une étude expérimentale dans laquelle des participants ont été soumis à des températures aussi clémentes que 10 °C, qui auraient représenté un défi sensoriel suffisant pour les distraire d'un ensemble de tâches. Dans cette étude, le temps de réaction, la mémoire de travail et la fonction exécutive ont diminué durant l'exposition au froid. Ces symptômes ne sont disparus complètement qu'après 60 minutes après le début de la période de récupération, une fois que les participants étaient réchauffés.

Une étude réalisée en FinlandeNote de bas de page 21 a montré que, comparativement aux tâches complexes, les tâches simples sont effectuées plus rapidement, mais avec moins de précision lors d'une exposition au froid. L'une des explications possibles à cette baisse de performance est que, comme les tâches évaluées exigent moins d'attention que les tâches complexes, le froid pourrait être une distraction.

Même s'il faisait froid le jour de l'accident, rien ne laisse croire que la basse température ait nui au pilote durant la brève période où la porte de la cabine était ouverte pour laisser les monteurs de ligne entrer dans l'hélicoptère et en sortir.

1.8 Aides à la navigation

Sans objet.

1.9 Communications

Sans objet.

1.10 Renseignements sur l'aérodrome

Sans objet.

1.11 Enregistreurs de bord

L'hélicoptère n'était pas muni d'un enregistreur de conversations de poste de pilotage ni d'un enregistreur de données de vol, et la réglementation en vigueur n'en exigeait pas. Toutefois, on a réussi à extraire des renseignements d'un système de positionnement mondial (GPS) et d'un émetteur-récepteur mondial par satellite à bord.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

1.12.1 Généralités

L'hélicoptère s'est écrasé dans une zone boisée à environ 400 pieds au nord-ouest du site d'atterrissage prévu (figure 4). La boîte de transmission arrière a été retrouvée à 67 pieds au nord-nord-ouest du site principal de l'écrasement. Les pales de rotor étaient toujours sur l'hélicoptère. Le plan fixe vertical a été retrouvé à 144 pieds au sud-ouest du site principal de l'écrasement, l'extrémité de la poutre de queue toujours en place.

Figure 4. Site de l'écrasement (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Site de l'écrasement (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

Un mousqueton brisé attaché à un morceau de sac canvas a été retrouvé à environ 1900 pieds à l'est du lieu de l'accident. Le reste du sac a été retrouvé à environ 310 pieds plus à l'est.

Une pale du rotor de queue avait perdu un morceau d'une longueur d'environ 10,75 pouces sur sa partie extérieure, y compris les masses d'équilibrage de la pale. La majorité de la partie extérieure de la pale a été récupérée, mais pas son extrémité ni ses masses d'équilibrage. Le bord d'attaque de la pale de rotor était endommagé, probablement à la suite du choc avec le mousqueton, où la partie extérieure de la pale s'était détachée.

La porte de droite de la cabine a été retrouvée à 180 pieds au nord du site principal de l'écrasement, et la verrière a été retrouvée à 40 pieds au nord-nord-est du site principal de l'écrasement. Le reste de l'hélicoptère était circonscrit à l'intérieur du site de l'impact, et les dommages étaient typiques d'une descente verticale abrupte.

L'hélicoptère a percuté le relief sur son côté gauche dans une assiette légèrement en piqué et s'est immobilisé avec son nez orienté vers le sud. L'espace habitable du compartiment à passagers et du poste de pilotage n'était pas compromis.

On a déterminé que le moteur tournait au moment de l'impact. Aucune anomalie n'a été relevée dans le système de contrôle du moteur qui aurait pu empêcher le contrôle normal du moteur. Le système de commandes de vol était intact, et aucune anomalie n'a été relevée qui aurait pu empêcher le fonctionnement normal de l'un ou l'autre des axes de commande.

Le réservoir de carburant principal était en plastique et monté sous le plancher du compartiment moteur ou de la boîte de transmission, derrière le compartiment à passagers. Il s'était fracassé en plusieurs gros morceaux. Il n'y avait plus de carburant dans le réservoir. Il y a eu un déversement de carburant sur le site de l'accident et dans les environs.

Les 3 pales du rotor principal ont percuté des arbres et le relief. Elles ont été lourdement endommagées. La tête de rotor principal était très endommagée; toutefois, les 3 pales du rotor principal étaient toujours dans leur moyeu respectif, et les connexions de contrôle étaient intactes. La poutre de queue s'était partiellement séparée du côté droit, près de son point d'attache à l'arrière de la structure.

Les rampes du Air Stair ne montraient aucun signe de dommage antérieur à l'impact, ce qui aurait pu causer le détachement des mousquetons en vol.

1.12.2 Sacs des monteurs de ligne

1.12.2.1 Sac canvas

Le sac canvas est un sac de toile légère en forme de tube, d'une longueur de 43 pouces, qui servait à transporter du matériel pour l'entretien des lignes. Le fond du sac était en plastique noir, et les rebords du bas et du haut étaient renforcés de cuir (figure 5). Le haut du sac comportait 2 boucles en corde de type polypropylène fixées de part et d'autre du sac en guise de poignées. L'une des boucles s'était détachée du sac et manquait.

Figure 5. Sac canvas sur les lieux de l'accident (Source : BST)
Sac canvas sur les lieux de l'accident (Source : BST)

Un gros mousqueton d'environ 8,5 pouces de long, servant à transporter de lourdes charges, était attaché aux poignées en corde du sac. Seul le corps du mousqueton était toujours présent; sa partie supérieure était déformée, et le doigt articulé muni d'une bague de sécurité vissable s'était séparé et manquait (figure 6).

Figure 6. Vue du mousqueton en cause dans l'événement (à gauche) et d'un modèle type (à droite) (Source : BST)
Vue du mousqueton en cause dans l'événement (à gauche) et d'un modèle type (à droite) (Source : BST)
1.12.2.2 Sacs à outils

Deux sacs à outils ont été retrouvés sur les lieux de l'accident. L'un était fixé à la rampe du Air Stair au moyen d'un grand mousqueton (figure 7) et était intact. L'autre était lourdement endommagé et se trouvait parmi les débris sur les lieux de l'accident (figure 8). Ce sac a été arraché de son mousqueton, lequel était toujours fixé à la rampe du Air Stair.

Figure 7. Sac à outils fixé à la rampe du Air Stair (Source : BST)
Sac à outils fixé à la rampe du Air Stair (Source : BST)
Figure 8. Sac à outils qui s'est détaché du Air Stair et qui se trouvait parmi les débris (Source : BST)
Sac à outils qui s'est détaché du Air Stair et qui se trouvait parmi les débris (Source : BST)

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Rien n'a indiqué, au cours de l'enquête, que la fatigue ou des facteurs médicaux aient pu nuire au rendement du pilote ou des monteurs de ligne.

1.14 Incendie

Sans objet.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

1.15.1 Sièges et ceintures de sécurité

Le siège du pilote était réglable vers l'avant et l'arrière, et muni d'une ceinture de sécurité à 4 points, qui comprenait une ceinture sous-abdominale et des baudriers à verrouillage automatique (enrouleur à inertie). On a déterminé que la fixation du siège du pilote à la cellule s'est rompue latéralement, et que la sangle de droite de la ceinture sous-abdominale était partiellement sortie du baquet du siège en fibre de verre. Ces dommages correspondent au choc subi par l'hélicoptère sur le côté gauche après avoir percuté le relief.

L'hélicoptère comprenait une banquette arrière fixe à 4 places, chacune normalement munie d'une ceinture de sécurité à 4 points. Pour boucler la ceinture de sécurité, l'agrafe de la ceinture sous-abdominale devait passer dans des anneaux en métal reliés à la ceinture-baudrier, avant d'être insérée dans l'autre moitié de la boucle de ceinture sous-abdominale (figure 9). En levant le loquet de la boucle, la ceinture sous-abdominale et les ceintures-baudriers se défaisait automatiquement. Il était possible de porter la ceinture sous-abdominale seule, sans la ceinture-baudrier avec dispositif de verrouillage automatique.

Figure 9. Carte d'exposé de sécurité de Hydro One qui illustre comment utiliser la ceinture de sécurité sur les sièges arrière de l'hélicoptère (Source : Hydro One Networks Inc.)
Carte d'exposé de sécurité de Hydro One qui illustre comment utiliser la ceinture de sécurité sur les sièges arrière de l'hélicoptère (Source : Hydro One Networks Inc.)

Après l'accident, l'ensemble du système de ceintures de sécurité de la banquette arrière (figure 10) a été examiné au Laboratoire d'ingénierie du BST à Ottawa (Ontario). On a noté les faits suivants :

Figure 10. Le système de ceintures de sécurité sur la banquette arrière de l'hélicoptère à l'étude, avec une image insérée montrant une ceinture-baudrier enroulée et retenue avec du ruban (Source : BST)
Le système de ceintures de sécurité sur la banquette arrière de l'hélicoptère à l'étude, avec une image insérée montrant une ceinture-baudrier enroulée et retenue avec du ruban (Source : BST)
1.15.1.1 Exigences réglementaires

Le RAC comprend plusieurs exigences selon lesquelles les aéronefs doivent être équipés de ceintures de sécurité, d'ensembles de retenue et de ceintures-baudriers. Plus précisément, le RAC stipule ce qui suit en ce qui a trait à l'exigence sur les sièges et les ceintures de sécurité :

605.22 (1) Sous réserve de l'article 605.23, il est interdit d'utiliser un aéronef autre qu'un ballon, à moins que celui-ci ne soit muni, pour chaque personne à bord autre qu'un enfant en bas âge, d'un siège comprenant une ceinture de sécurité […]Note de bas de page 22

Le RAC contient les exigences suivantes relatives aux ensembles de retenue :

605.23 Il est permis d'utiliser un aéronef non muni de l'équipement prévu à l'article 605.22 pour les personnes suivantes, si un ensemble de retenue fixé à la structure principale de l'aéronef est disponible pour chacune d'entre elles :

  1. chaque personne transportée sur une civière ou dans une couveuse ou autre dispositif semblable;
  2. chaque personne transportée pour effectuer des sauts en parachute;
  3. chaque personne qui doit travailler près d'une ouverture dans la structure de l'aéronefNote de bas de page 23.

Le RAC stipule que les hélicoptères doivent être équipés de ceintures-baudriers comme suit :

605.24 (4) Il est interdit d'utiliser un hélicoptère construit après le 16 septembre 1992 dont le certificat de type initial précise qu'il s'agit d'un hélicoptère de catégorie normale ou de catégorie transport, à moins que chaque siège ne soit muni d'une ceinture de sécurité comprenant une ceinture-baudrier […]Note de bas de page 24

Pour ce qui est de l'utilisation générale des ceintures de sécurité et des ensembles de retenue, le RAC précise que :

605.25 (1) Le commandant de bord d'un aéronef doit donner à toute personne à bord de l'aéronef l'ordre de boucler la ceinture de sécurité dans les cas suivants :

  1. pendant le mouvement de l'aéronef à la surface;
  2. pendant le décollage et l'atterrissage;
  3. au cours du vol, chaque fois que le commandant de bord le juge nécessaire.

(2) L'ordre visé au paragraphe (1) s'applique également aux ensembles de retenue suivants :

  1. un ensemble de retenue d'enfant;
  2. un ensemble de retenue utilisé par une personne qui effectue des descentes en parachute;
  3. un ensemble de retenue utilisé par une personne qui travaille près d'une ouverture de la structure de l'aéronef. […]Note de bas de page 25

Le RAC stipule ce qui suit sur l'utilisation des ceintures de sécurité et des ensembles de retenue pour les passagers :

605.26 (1) Lorsque le commandant de bord ou le chef de cabine donne l'ordre de boucler les ceintures de sécurité, chaque passager autre qu'un enfant en bas âge doit :

  1. s'assurer que la ceinture de sécurité ou l'ensemble de retenue est bouclé et réglé correctement; […]Note de bas de page 26

La définition d'une ceinture de sécurité selon le RAC est « [un] dispositif de retenue individuel qui se compose soit [caractères gras ajoutés] d'une ceinture sous-abdominale, soit d'une ceinture sous-abdominale et d'une ceinture-baudrierNote de bas de page 27 ». La définition d'une ceinture-baudrier selon le RAC est « [t]out dispositif qui sert à retenir le torse et qui se compose d'une sangle diagonale simple passant sur l'épaule ou d'une paire de sangles passant sur les épaulesNote de bas de page 28 ».

Quoique le règlement indique clairement que chaque siège à bord de l'hélicoptère à l'étude devait comprendre une ceinture de sécurité, ainsi qu'une ceinture-baudrier, il n'indique pas clairement les circonstances dans lesquelles les équipages de conduite et les passagers doivent porter la ceinture-baudrier installée. Or, d'après la correspondance reçue de TC, l'objectif du règlement était que les passagers portent toujours la ceinture-baudrier lorsqu'elle est installée.

En revanche, le RAC comprend une disposition visant les compagnies aériennes qui est claire et précise. Elle précise que les équipages de conduite doivent boucler leurs ceintures de sécurité, y compris la ceinture-baudrier, conformément au paragraphe 705.29(1) du RAC, selon lequel :

Sous réserve du paragraphe (2), les membres d'équipage de conduite en service au poste de pilotage doivent demeurer à leur poste de membre d'équipage de conduite et boucler leur ceinture de sécurité et, dans le cas où l'aéronef est utilisé à moins de 10 000 pieds ASL [au-dessus du niveau de la mer], ils doivent boucler leur ceinture de sécurité, y compris leur ceinture-baudrier [caractères gras ajoutés]Note de bas de page 29.

1.15.1.2 Directives récentes de l'organisme de réglementation sur l'utilisation des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers

En novembre 2014, TC a publié une nouvelle édition de la circulaire d'information 605-004, Utilisation des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers à bord d'un aéronef. L'objectif de cette circulaire d'information, qui vise tous les exploitants d'aéronefs immatriculés au Canada, est de « rappeler aux exploitants la nécessité d'établir des procédures visant le port des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers à bord d'un aéronef. Il sert à informer les exploitants quant aux procédures sur l'utilisation des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers recommandées par [TC]Note de bas de page 30 ».

La circulaire d'information définit un dispositif de retenue comme étant :

un terme générique désignant les dispositifs de sécurité des occupants, comme une ceinture de sécurité, une ceinture baudrier, un dispositif de retenue gonflable, un dispositif de retenue pour enfant, ou toute autre courroie, sangle ou dispositif similaire conçu pour retenir une personne à bord d'un aéronefNote de bas de page 31.

Concernant les ceintures de sécurité plus particulièrement, la version anglaise de la circulaire d'information donne les précisions suivantes :

[t]he definition of “safety belt” recognizes that two configurations of personal restraint systems continue to exist on Canadian-registered aircraft; those fitted with only a lap strap, and those consisting of both a lap strap and shoulder harness. To provide for the safety of the user, where a shoulder harness is affixed to the aircraft, it should be wornNote de bas de page 32.

Dans cette version de la circulaire d'information, lorsqu'il est question du port de la ceinture-baudrier, le verbe « should » semble contraire à l'objectif du règlement énoncé par TCNote de bas de page 33.

1.15.1.3 Procédures de Hydro One sur les ceintures de sécurité

Hydro One reprend la définition de ceinture de sécurité du RAC dans le manuel d'exploitation de la compagnie; toutefois, l'enquête a permis de déterminer qu'à Hydro One, on croyait que cette définition signifiait que les occupants pouvaient choisir de porter la ceinture sous-abdominale seulement, ou avec la ceinture-baudrier.

Le manuel d'exploitation de la compagnie de Hydro One stipule que [traduction] « chaque passager doit occuper un siège muni d'une ceinture de sécurité en bon état et la porter en tout temps pendant le vol, y compris durant les décollages et les atterrissagesNote de bas de page 34 ». Il stipule en outre que l'exposé de sécurité aux passagers doit indiquer [traduction] « quand et comment utiliser les ceintures de sécurité ou les ceintures-baudriersNote de bas de page 35 ».

Le manuel d'exploitation de la compagnie de Hydro One stipule donne aussi les précisions suivantes [traduction] : « [a]vant le décollage et l'atterrissage, le commandant de bord doit vérifier visuellement que chaque personne est assise et attachéeNote de bas de page 36 ». Toutefois, dans le cas d'un atterrissage en région éloignée ou sur une surface qui n'a pas été aménagée pour les décollages et les atterrissages, la surface n'est pas toujours uniforme; par conséquent, le pilote ne devrait probablement pas complètement éteindre le moteur. Dans de tels cas, les pilotes choisissent habituellement de laisser les monteurs de ligne entrer ou sortir pendant que le moteur est en marche.

Ainsi, le pilote doit souvent maintenir l'équilibre de l'hélicoptère en le gardant léger sur les patins d'atterrissage. Cette manœuvre exige un haut niveau de concentration et tout mouvement de la tête vers l'arrière durant cette manœuvre pourrait entraîner un danger. Ainsi, il n'est pas toujours possible pour le pilote de confirmer visuellement si les monteurs de ligne ont bouclé leur ceinture de sécurité pour ces types d'embarquement.

Dans de telles situations, on adapte souvent la procédure standard de vérification visuelle. L'enquête a permis de déterminer qu'il était habituel pour l'un des monteurs de ligne de faire un pouce en l'air à la gauche du pilote pour lui indiquer que tous les occupants sont assis, attachés et prêts pour le décollage. Le pilote devait se fier aux monteurs de ligne pour s'assurer que tous les passagers avaient bouclé leur ceinture de sécurité, conformément à ce qui devait être abordé durant la réunion préparatoire et au manuel d'exploitation de la compagnie.

1.15.1.4 Comportement des passagers et utilisation de la ceinture de sécurité

Les ceintures sous-abdominales et les ceintures-baudriers sont des systèmes de sécurité active, car l'utilisateur doit poser un geste particulier, comme boucler sa ceinture, pour se protéger.

La non-utilisation de la ceinture de sécurité par les passagers constitue un problème de sécurité qui n'est pas exclusif à l'aviation. Par exemple, dans un sondage publié en 2018 par le Insurance Institute for Highway Safety des États-Unis, près du tiers des répondants avaient admis qu'ils étaient moins enclins à boucler leur ceinture de sécurité lorsqu'ils occupaient le siège arrière d'une voitureNote de bas de page 37. Parmi ces répondants, la plupart ont dit qu'ils ne bouclaient pas leur ceinture de sécurité pour un court trajet ou un déplacement en taxi. Les passagers ont donné plusieurs raisons pour ne pas boucler leur ceinture lorsqu'ils occupent le siège arrière d'une voiture au lieu du siège avant. En voici quelques exemples :

Les enquêtes du BST sur les accidents de petits avions menées au cours des dernières années ont permis d'établir que les membres d'équipage et les passagers bouclent fréquemment la ceinture sous-abdominale. Toutefois, l'utilisation de la ceinture-baudrier varie énormément. Des blessures graves et mortelles se sont produites dans des accidents aériens, car les avions en cause étaient dépourvus de ceinture-baudrier ou en étaient pourvus, mais les passagers ne les utilisaient pas.

Une recherche dans la base de données du BST a permis de relever 62 accidents, de 1990 à 2018, dans lesquels des ceintures-baudriers étaient installées, mais non utilisées. Parmi ces accidents, 33 ont causé la mort, et 68 personnes ont perdu la vie au total. Parmi les personnes ayant perdu la vie, 37 personnes ne portaient pas la ceinture-baudrier installée (annexe B). Le port de la ceinture-baudrier aurait pu augmenter les chances de survie et d'évacuation dans plusieurs de ces accidents, même si les probabilités de survie et d'évacuation étaient différentes.

1.15.1.5 Utilisation de la ceinture de sécurité et opérations effectuées au moyen du Air Stair

Les opérations effectuées au moyen du Air Stair doivent être conformes au supplément au manuel de vol, qui donne les précisions suivantes [traduction] : « [s]auf lorsqu'il débarque de l'aéronef, le personnel doit être attaché à la cellule par une ceinture de sécurité ou par un dispositif antichuteNote de bas de page 38 ». Pourtant, l'ensemble de retenue mentionné à l'alinéa 605.25(2)c) du RAC, qui inclut le dispositif antichute, s'applique uniquement lorsqu'une personne travaille près d'une ouverture de la structure d'un aéronef, et non durant son transport d'un endroit à un autre. Dans tous les cas de transport, le port de la ceinture de sécurité est requis.

Le document de procédureNote de bas de page 39 pour les opérations aéroportées effectuées au moyen du Air Stair n'indique pas clairement quand les monteurs de ligne doivent boucler ou détacher leur ceinture de sécurité à chaque étape. Toutefois, ce document indique que [traduction] :

[l]es ouvriers doivent porter un harnais de sécurité complet avec dispositif antichute comme protection antichute pour accéder au Air Stair/cabine de l'hélicoptère et pour travailler depuis le Air StairNote de bas de page 40.

L'enquête a permis de déterminer que les monteurs de ligne qui avaient suivi la formation sur les travaux aériens avec le Air Stair estimaient que s'ils arrimaient leur équipement de protection individuelle (c'est-à-dire le harnais de sécurité complet avec dispositif antichute) à un point d'ancrage sur le plancher, cela suffirait pour assurer leur sécurité pendant le vol ou en cas d'urgence. Cette perception les a menés à croire qu'il n'était pas nécessaire de porter la ceinture de sécurité tant qu'ils portaient leur équipement de protection individuelle amarré au plancher. Ce n'était pas le cas durant le vol à l'étude, puisque les monteurs de ligne ne portaient pas leur harnais de sécurité complet.

L'enquête a également permis de déterminer que le port d'un harnais de sécurité complet pouvait poser un nouveau risque. Quand les monteurs de ligne passaient de la cabine à la plateforme durant un transfert aérien, les sangles de la ceinture-baudrier se coinçaient parfois dans un anneau à l'arrière du harnais de sécurité complet. Par conséquent, les monteurs de ligne risquaient de perdre l'équilibre, de tomber sur la plateforme et de déranger le pilote, ce qui pourrait provoquer un mouvement de l'hélicoptère et une collision avec le pylône. Souvent, on enroulait les ceintures-baudriers et on les fixait avec du ruban isolant pour éliminer ce risque durant les opérations qui comprenaient des transferts aériens.

Aucun transfert aérien n'était prévu durant le vol à l'étude. Le plan était plutôt que les monteurs de ligne débarqueraient au pied du pylône pendant que l'hélicoptère était en marche. Hydro One n'a aucune procédure standard détaillée que les pilotes et monteurs de ligne doivent suivre dans cette situation. Le fait que les ceintures-baudriers étaient enroulées et fixées avec du ruban isolant n'était pas approprié à ce type de vol.

1.15.2 Forces d'impact

Le document Analysis of Rotorcraft Crash Dynamics for Development of Improved Crashworthiness Design Criteria, publié par la Federal Aviation Administration des États-Unis (FAA), indique ceci à propos de la tolérance de l'être humain dans une situation d'écrasement [traduction] :

En général, on distingue trois catégories de blessures quand il est question de la tolérance de l'être humain à une situation d'écrasement : les blessures internes causées par la décélération du corps entier, les blessures par impact secondaire causées par le contact avec la structure environnante, et les blessures résultant d'un incendie, causées par l'exposition thermique ou l'inhalation des produits de combustion. Les deux premières catégories sont directement liées aux principales forces d'impact […]Note de bas de page 41.

Les possibilités de survie à l'impact principal dépendent de la tolérance du corps entier à l'accélération, qui peut varier d'une personne à l'autre.

Dans les accidents d'hélicoptère, environ 70 % de toutes les blessures graves et mortelles touchent principalement la tête, la colonne vertébrale, le torse et le cou. Les ceintures-baudriers sont particulièrement efficaces pour limiter les blessures à ces parties du corps. La FAA a analysé les forces dynamiques d'un écrasement et a déterminé que, dans les accidents d'hélicoptère, seulement 9 % des occupants qui portaient une ceinture-baudrier avaient été grièvement blessés, comparativement à 34,3 % de ceux qui ne portaient que la ceinture sous-abdominaleNote de bas de page 42.

Les ceintures-baudriers peuvent aider à prévenir les blessures dues à l'écartèlement, mais dans le cas d'un impact latéral à force gNote de bas de page 43 élevée, elles n'empêcheraient pas les blessures internes. Comparativement au fait de ne pas porter la ceinture de sécurité ou de porter uniquement la ceinture sous-abdominale, le port de la ceinture sous-abdominale et de la ceinture-baudrier augmente les chances de demeurer à l'intérieur de l'hélicoptère et diminue la probabilité de subir des blessures secondaires dues à l'écartèlement.

Dans l'accident à l'étude, l'hélicoptère n'avait pas d'enregistreur de bord capable d'enregistrer les forces d'impact (g). Par conséquent, on n'a pu déterminer la direction, la durée et la charge exactes des forces g auxquelles l'hélicoptère et ses occupants ont été soumis au moment de l'impact. Cependant, les enquêteurs ont calculé que la charge d'impact sur l'hélicoptère dans son ensemble était d'au moins 77 g. Cette force est supérieure aux niveaux de tolérance latéraleNote de bas de page 44 du corps humain; toutefois, les forces de décélération que subissent les occupants sont habituellement inférieures à celles que subit l'hélicoptère, étant donné que la structure de l'hélicoptère absorbe l'énergie durant l'impact.

1.15.3 Casque

Le pilote en cause dans l'événement à l'étude portait un casque qu'il a perdu durant l'impact; on a retrouvé le casque endommagé à quelques pieds du pilote. L'enquête n'a pas permis de déterminer pourquoi le pilote a perdu son casque.

Le RAC ne comprend aucune exigence concernant le port d'un casque protecteur pour les pilotes d'hélicoptère; toutefois, le Règlement sur la santé et la sécurité au travail (aéronefs) l'exige s'il existe un risque de blessure à la têteNote de bas de page 45. Hydro One exige que les pilotes portent un casque lorsqu'ils effectuent des opérations avec le Air StairNote de bas de page 46.

1.16 Essais et recherche

1.16.1 Rapports de laboratoire du BST

Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

1.17 Renseignements sur les organismes et la gestion

1.17.1 Généralités

En 1999, Ontario Hydro, une société d'État, a été restructurée en 4 entités distinctes, dont Ontario Hydro Services Company Inc., une société de portefeuille avec filiales. En 2000, Ontario Hydro Services Company Inc. a été rebaptisée Hydro One Inc. La société en cause dans l'événement, Hydro One Networks Inc., est l'une des filiales de Hydro One Inc. En novembre 2015, le gouvernement de l'Ontario a commencé à vendre des actions au public en vue de privatiser Hydro One Inc.

Hydro One Networks Inc. est le plus important fournisseur de services de transport et de distribution d'électricité en OntarioNote de bas de page 47. L'entreprise mène ses activités dans 3 secteurs : transport, distribution, et autre. Le secteur du transport détient, exploite et maintient son propre réseau de transport (électricité haute tension de sources nucléaire, hydroélectrique, de gaz naturel, éolienne et solaire). Le secteur de la distribution consiste en quelque 123 000 kilomètres-circuits de lignes de transport primaires basse tension qui sont exploitées par ses filiales. L'autre secteur représente ses activités de télécommunications et certaines activités administratives.

Autant le secteur du transport que celui de la distribution sont exploités principalement par Hydro One Networks Inc., qui permet aux 2 secteurs d'utiliser les mêmes technologies ainsi que le même équipement et personnel de terrain afin de tirer parti des gains d'efficacité et d'une plus grande efficienceNote de bas de page 48.

1.17.2 Exploitant aérien

Ontario Hydro, le prédécesseur de Hydro One Networks Inc., a commencé le nolisement ou l'exploitation d'hélicoptères au début de 1949. Hydro One Networks Inc. détient actuellement un certificat d'exploitation aérienne pour exploiter des hélicoptères AS 350 B2/B3 et AS 355 NP, conformément aux sous-parties 702 (opérations de travail aérien) et 703 (activités de taxi aérien) du RAC.

D'après le Registre d'immatriculation des aéronefs civils canadiens, Hydro One Networks Inc. exploite une flotte de 8 hélicoptères : 7 hélicoptères AS 350 B2/B3 et 1 hélicoptère AS 355 NP.

Hydro One Networks Inc. s'est dotée d'un système complet de gestion de la santé, la sécurité et l'environnement qui englobe toutes ses activités commerciales. Hydro One Networks Inc. n'a pas actuellement de système de gestion de la sécurité de l'aviation, et la réglementation en vigueur ne l'exige pas.

1.17.3 Réunions préparatoires

Les procédures d'utilisation normalisées pour les employés se trouvent dans le Hydro One Document System (HODS). Cette base de données de la compagnie contient les procédures de travail détaillées pour toutes les opérations normales et spécialisées.

Dans le cadre du programme de santé et sécurité au travail de Hydro One, un représentant en santé et sécurité au travail avait assisté à la réunion préparatoire entre le pilote et les monteurs de ligne le matin de l'événement. Cette réunion a été documentée sur un formulaire de visite du site qui comprenait les commentaires du représentant sur l'exposé de sécurité. D'après ces commentaires, avant l'embarquement, le pilote [traduction] :

  • a fait un exposé complet et détaillé;
  • a expliqué et montré la procédure appropriée pour approcher et s'éloigner de l'hélicoptère;
  • a montré comment ranger correctement les outils, le matériel et l'équipement;
  • a montré comment le premier membre de l'équipage tient la porte ouverte pendant que les autres membres déchargent leurs outils et l'équipement au sol et s'éloignent de l'hélicoptère de façon sécuritaire;
  • a mis en garde les monteurs de ligne contre les dangers de s'approcher de l'arrière de l'hélicoptère;
  • a passé en revue l'utilisation correcte des ceintures de sécurité et les a préparées à l'utilisationNote de bas de page 49.

On a dit que, durant la réunion préparatoire, le pilote avait dit aux monteurs de ligne d'aplatir le sac canvas, de le glisser à l'intérieur du sac à outils et de ranger le sac à outils dans la cabine, sous le siège arrière, une fois leurs travaux terminés. Or, ce renseignement n'a pas été documenté sur le formulaire de visite du site ou ailleurs.

L'enquête n'a pas permis de déterminer si le sac canvas avait été déposé dans le sac à outils, si on l'avait laissé sur le Air Stair, ou s'il était tombé sur le Air Stair lorsque les monteurs de ligne sont montés à bord de l'hélicoptère.

1.17.4 Atténuation des dangers que posent les objets non arrimés

Le HODS comprend les procédures de travail avec le Air Stair. Un examen de ces procédures a révélé des écarts considérables par rapport aux directives sur ce qui peut et ne peut pas être arrimé au Air Stair, et ce que l'on peut transporter dans le sac à outils durant le vol.

L'enquête a permis de déterminer que certains documents HODSNote de bas de page 50 comprennent une annexe qui contient une liste d'étapes de travail, les dangers connexes, et des suggestions pour les atténuer. Or, on n'avait pas anticipé qu'un objet puisse sortir d'un sac à outils durant le vol au départ ou à destination d'un pylône; par conséquent, la compagnie n'avait établi aucune mesure pour atténuer ce risque. De plus, les documents HODS ne mentionnent pas ce qu'il est permis ou interdit de ranger dans le sac à outils ou ce qui peut être fixé ou non à la barre transversale.

La liste de vérification pour la réunion préparatoireNote de bas de page 51 de Hydro One Networks Inc. ne comprend que 3 éléments qui font référence au transport des outils et de l'équipement sur la barre transversale :

1.18 Renseignements supplémentaires

En 2017 et 2018, on a signalé au BST 2 événements mettant en cause d'autres exploitants dans lesquels des objets mal arrimés ont percuté le rotor de queue de l'hélicoptère en volNote de bas de page 55. Dans les 2 cas, les dommages causés au rotor de queue étaient mineurs, et le pilote a pu poser l'hélicoptère. Le rotor de queue ne s'est pas séparé dans ni l'un ni l'autre des événements.

1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

2.1 Généralités

Les événements spécifiques qui ont mené à l'accident à l'étude ont commencé lorsque l'hélicoptère a embarqué 3 monteurs de ligne au pied d'un pylône de transmission pour les ramener à la zone de rassemblement non loin de là. En route, un sac canvas muni d'un mousqueton s'est détaché et a percuté le rotor de queue. L'analyse visera à déterminer pourquoi une charge externe était arrimée de façon inadéquate, les ceintures sous-abdominales et ceintures-baudriers des passagers n'étaient pas bouclées, et ces dangers sont passés inaperçus et n'ont pas été atténués avant le départ.

2.2 Charges externes

Durant le vol à l'étude, plusieurs articles, dont une grande poulie et 3 sacs différents (2 sacs à outils et 1 sac canvas), chacun muni d'un mousqueton, se trouvaient sur le Air Stair. La poulie ainsi que 2 sacs à outils étaient fixés au Air Stair au moyen de leur mousqueton respectif. On n'a pas pu déterminer avec certitude la façon dont le sac canvas était rangé avant le départ. Il est probable qu'il ait été placé dans un autre sac, mal fixé à l'hélicoptère, ou pas fixé du tout.

Durant le vol, un sac canvas muni d'un mousqueton, qui se trouvait sur le Air Stair, a percuté le rotor de queue de l'hélicoptère. Le choc a causé de graves dommages, un important déséquilibre de la masse et de fortes vibrations. Le Air Stair ne présentait aucun dommage qui ait pu entraîner le détachement du mousqueton attaché. Étant donné l'état après impact et la capacité de charge du mousqueton, il est peu probable qu'il se soit rompu.

Lorsque le pilote a tenté de poser l'hélicoptère endommagé près de la zone de rassemblement, l'ensemble du rotor de queue s'est complètement séparé, et l'hélicoptère a amorcé une rotation involontaire. Peu de temps après, l'hélicoptère a percuté le relief et a été détruit.

2.2.1 Politiques, procédures et méthodes de la compagnie

Quand on utilisait le Air Stair pour les transferts aériens, conformément aux pratiques de la compagnie, on attachait temporairement de petites charges externes au Air Stair durant le transfert aérien du personnel et de l'équipement, pendant que l'hélicoptère était en vol stationnaire au sommet des pylônes de transmission. Cette pratique est consignée dans les manuels de la compagnie et est expliquée dans les documents de formation. Toutefois, aucune directive officielle n'interdisait le transport de petites charges externes durant les vols de transfert. Ainsi, il était devenu courant pour les monteurs de ligne d'attacher des sacs à outils et d'autres petits objets sur le Air Stair durant les vols en provenance ou à destination des chantiers.

On a dit que, durant la réunion préparatoire, le pilote avait dit aux monteurs de ligne d'aplatir le sac canvas, de le mettre dans le sac à outils et de ranger ce dernier dans la cabine, sous le siège arrière, une fois leurs travaux terminés. Or, ces instructions ne sont consignées dans aucun document.

Même si la pratique d'attacher des sacs à outils comme charges externes était habituelle et permise par l'exploitant, aucune procédure ni instruction n'expliquait ce qui pouvait être transporté de cette manière, comment arrimer solidement ces charges durant les vols où l'on n'utilisait pas le Air Stair et comment le pilote devait vérifier l'arrimage des charges.

Comme il s'agissait d'une pratique officieuse, aucun contrôle adéquat (comme des procédures normalisées, de la formation, des listes de vérification ou des vérifications par des pairs) n'était en place pour assurer que ces objets étaient rangés ou arrimés correctement. Dans l'événement à l'étude, une partie de la charge externe n'était pas solidement arrimée à l'hélicoptère.

Des procédures officialisées, de la formation et des contrôles pour prévenir les inattentions sont tout particulièrement importants lorsque les monteurs de ligne arriment des charges pendant que le pilote garde l'hélicoptère léger sur les patins d'atterrissage. Dans ce cas, le pilot demeure aux commandes et ne peut pas effectuer les mouvements de tête requis pour confirmer visuellement que tout l'équipement est bien arrimé. Durant le vol à l'étude, le pilote ne pouvait probablement pas confirmer que la charge était rangée dans la cabine, car il était occupé à contrôler l'hélicoptère, qu'il gardait léger sur les patins pendant l'embarquement; il aurait été incapable de tourner la tête pour voir l'ensemble du Air Stair.

2.2.1.1 Temps froid

Le temps froid diminue la dextérité, la vigilance et la concentration, ce qui peut accroître la fréquence des erreurs. Certaines tâches qui sont faciles à exécuter par temps doux peuvent être plus difficiles à exécuter par temps froid. Dans l'événement à l'étude, les effets négatifs du froid ont possiblement influé sur la façon dont les monteurs de ligne ont chargé leur équipement.

Si les personnes qui travaillent dans de basses températures sont affaiblies par le froid, il y a un risque que des tâches essentielles soient mal effectuées, ce qui pourrait accroître le risque de blessures au personnel et de dommages à l'équipement.

2.2.2 Spécifications d'exploitation

Hydro One avait obtenu l'approbation pour utiliser le Air Stair en vertu de la spécification d'exploitation 044, Entrer dans un hélicoptère ou le quitter en vol, qui est nécessaire pour que les monteurs de ligne puissent passer de l'hélicoptère aux pylônes pour effectuer leur travail. 

De plus, les monteurs de ligne de la compagnie effectuaient couramment leurs travaux sur les pylônes directement à partir du Air Stair, ce qui n'a pas été le cas le jour de l'accident. Toutefois, pour que les monteurs de ligne puissent travailler directement à partir du Air Stair, Hydro One devait obtenir l'autorisation de Transports Canada (TC) d'exploiter ses hélicoptères avec une charge externe de classe D. L'entreprise devait donc ajouter la spécification d'exploitation 047, Charges externes de classe D pour hélicoptère – RAC 702.21(2)a), à son certificat d'exploitation aérienne.

En août 2001, Hydro One a été informé verbalement par des inspecteurs de TC, et a pris note, que ce type d'exploitation s'inscrivait dans la classe A et que, de ce fait, une autorisation de classe D n'était pas nécessaire. Par conséquent, TC n'avait évalué aucun processus formel de détermination des dangers associés à ces opérations, et aucune mesure d'atténuation n'avait été mise en place pour contrer les risques de telles opérations. Il y a peut-être eu une discussion entre TC et Hydro One concernant la spécification d'exploitation 047, mais TC n'a aucun dossier à cet effet.

Si les exploitants aériens n'obtiennent pas d'approbation formelle de TC pour mener des activités pour lesquelles une spécification d'exploitation est requise, ou s'ils ne font pas la demande pour l'obtenir, il y a un risque que les dangers associés à ces activités ne soient ni cernés ni atténués.

2.2.3 Autres risques associés aux opérations avec le Air Stair

L'enquête a relevé plusieurs incohérences entre le supplément au manuel de vol et supplément au manuel de maintenance après la dernière modification apportée au certificat de type supplémentaire (STC), dont des restrictions de vol qui devaient être indiquées sur une plaquette installée sur le tableau de bord.

Étant donné l'utilisation que l'on faisait du Air Stair le jour de l'événement, ces incohérences n'auraient pas été un facteur durant le vol à l'étude. Toutefois, si les manuels de vol ne sont pas tenus à jour et si les équipages de conduite ne sont pas informés des limites résultant des modifications aux STC, il y a un risque que ces limites soient dépassées, ce qui pourrait causer des blessures au personnel et des dommages à l'équipement.

2.3 Ceintures de sécurité

Il y avait 3 ceintures sous-abdominales dans la partie arrière de la cabine; 2 d'entre elles ont été trouvées détachées et complètement étirées, et 1 était bouclée. Les 3 ceintures-baudriers ont été trouvées enroulées et fixées avec du ruban isolant, ce qui les rendait inutilisables.

Le port à la fois de la ceinture sous-abdominale et de la ceinture-baudrier augmente les chances qu'un occupant demeure à l'intérieur de l'hélicoptère durant un accident et diminue la probabilité qu'il subisse des blessures secondaires dues à l'écartèlement, comparativement aux occupants qui ne portent pas la ceinture de sécurité ou qui portent uniquement la ceinture sous-abdominale.

Dans l'événement à l'étude, aucun des 3 monteurs de ligne n'était attaché; ils ont été séparés de l'hélicoptère, peu avant l'impact ou durant celui-ci. Ils ont été mortellement blessés à la suite d'un contact avec l'hélicoptère ou le relief avoisinant.

On n'a pu déterminer la force d'impact réelle qu'a subie l'hélicoptère durant l'écrasement; toutefois, des calculs indiquent qu'à l'impact, la force latérale (g) était d'au moins 77 g. Les forces d'impact durant l'accident étaient élevées, et les chances de survie étaient probablement nulles.

Toutefois, dans un accident offrant des chances de survie, en particulier lorsque le compartiment passagers principal demeure relativement intact, les passagers qui ne sont pas attachés correctement sont davantage exposés à des blessures graves ou mortelles que ceux qui sont attachés correctement.

2.3.1 Utilisation de la ceinture sous-abdominale

Dans un sondage publié en 2018 par le Insurance Institute for Highway Safety des États-Unis, près du tiers des répondants avaient admis qu'ils étaient moins enclins à boucler leur ceinture de sécurité lorsqu'ils occupaient le siège arrière d'une voiture. Parmi ces répondants, la plupart ont dit qu'ils ne bouclaient pas leur ceinture de sécurité pour un court trajet ou un déplacement en taxi. Les passagers ont donné plusieurs raisons de ne pas porter la ceinture de sécurité dans ces conditions, notamment l'évaluation du risque et les difficultés d'utilisation de la ceinture de sécurité. Ces 2 mêmes facteurs pourraient avoir influé sur la décision des monteurs de ligne de ne pas porter leur ceinture sous-abdominale dans l'événement à l'étude.

De plus, la capacité des passagers d'évaluer le risque influe énormément sur leur comportement. Les passagers qui n'ont jamais été blessés ou qui ne connaissent personne qui a déjà été blessé parce qu'il ne portait pas de ceinture de sécurité tendent à sous-estimer le risque latent.

La formation peut amener les passagers à changer leur perception des dangers ou des risques. La formation favorise les comportements sécuritaires, informe les passagers de l'existence de dangers, et permet d'expliquer les conséquences potentielles du non-respect des consignes de sécurité. Les monteurs de ligne ne reçoivent aucune formation sur les risques de ne pas porter la ceinture de sécurité, y compris la ceinture-baudrier, ou sur les blessures qu'un occupant qui n'est pas attaché peut causer à autrui s'il y a une perte de maîtrise de l'hélicoptère.

Dans l'événement à l'étude, il est possible que les monteurs de ligne n'aient pas bouclé leur ceinture de sécurité après qu'ils furent montés dans l'hélicoptère à cause de leur perception d'un faible risque inhérent à un vol de courte distance ou parce qu'il leur était difficile de boucler les ceintures par-dessus leurs vêtements d'hiver.

Les mêmes facteurs qui ont nui à la capacité du pilote de vérifier l'arrimage de la charge externe ont aussi nui à sa capacité de vérifier si les monteurs de ligne étaient correctement attachés. Selon la procédure de Hydro One, les monteurs de ligne assis sur la banquette arrière confirment qu'ils sont correctement attachés avant le départ en donnant au pilote un signal de pouce en l'air. Comme les pilotes pourraient être incapables de détourner leur attention assez longtemps pour confirmer visuellement que les ceintures de sécurité sont bouclées, ce signal sert à les informer que les passagers sont attachés et prêts pour le décollage.

Normalement, les pilotes ne décollent pas tant qu'ils n'ont pas reçu le signal de pouce en l'air. Dans l'événement à l'étude, étant donné le niveau d'expérience du pilote et la formation que les monteurs de ligne avaient récemment suivie, il est probable que ce signal ait été donné avant le départ.

2.3.2 Utilisation de la ceinture-baudrier

D'après la réglementation, chacun des sièges de l'hélicoptère à l'étude devait être équipé d'une ceinture de sécurité et d'une ceinture-baudrier. Ainsi, chaque siège dans la partie arrière de la cabine avait une ceinture de sécurité à 4 points détachable qui comprenait une ceinture sous-abdominale et une ceinture-baudrier avec dispositif de verrouillage automatique (enrouleur à inertie). Toutefois, les ceintures-baudriers étaient enroulées et fixées avec du ruban isolant et étaient donc inutilisables.

De nombreux règlements requièrent que l'équipage de conduite donne aux passagers des instructions sur le port de la ceinture de sécurité et leur indique de suivre ces instructions et de la porter. Le Règlement de l'aviation canadien (RAC) définit la ceinture de sécurité comme étant un « dispositif de retenue individuel qui se compose soit [caractères gras ajoutés] d'une ceinture sous-abdominale, soit d'une ceinture sous-abdominale et d'une ceinture-baudrier ». Partant de la définition d'une « ceinture de sécurité » du RAC, Hydro One estimait qu'elle se conformait au règlement si les occupants portaient soit la ceinture sous-abdominale, soit la ceinture sous-abdominale et la ceinture-baudrier ensemble.

De plus, les manuels de Hydro One abordent l'utilisation de la ceinture de sécurité et de la ceinture-baudrier dans des sections séparées, ce qui pourrait alimenter ou renforcer l'interprétation selon laquelle le port de la ceinture-baudrier est facultatif. En effet, la ceinture-baudrier peut être perçue comme un dispositif distinct de la ceinture de sécurité, dont le port est obligatoire.

Comparativement à la ceinture sous-abdominale seule, la ceinture de sécurité complète avec ceinture-baudrier peut être plus difficile à utiliser, surtout lorsque les monteurs de ligne portent des vêtements épais, et embarquent dans un hélicoptère et en sortent fréquemment. La compagnie a aussi déterminé qu'il y avait un risque que les ceintures-baudriers des monteurs de ligne se coincent durant les transferts aériens. Étant donné cette difficulté et le risque accru perçu, on a décidé que la ceinture sous-abdominale à elle seule suffisait dans ces conditions, et que l'on pouvait ranger les ceintures-baudriers et les fixer avec du ruban isolant pour atténuer ce danger.

En novembre 2014, TC a publié une nouvelle édition de la circulaire d'information 605-004, Utilisation des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers à bord d'un aéronef, qui donne de l'information et des directives aux exploitants sur l'utilisation des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers. D'après TC, l'objectif du règlement était que les passagers portent toujours la ceinture-baudrier lorsqu'elle est installée. Même si c'est effectivement l'objectif, s'il n'est pas clair dans le règlement que l'utilisation de tous les composants disponibles d'une ceinture de sécurité est obligatoire, il y a un risque que les ceintures-baudriers ne soient pas utilisées comme prévu, ce qui augmente le risque de blessures et de pertes de vie.

Le BST a enquêté sur de nombreux accidents mettant en cause des aéronefs qui étaient équipés de ceintures-baudriers détachables, mais qui n'étaient pas utilisées (annexe B). Des 62 accidents étudiés, 33 ont été mortels, ce qui a occasionné 68 pertes de vie au total. De ces 68 pertes de vie, 37 personnes ne portaient pas la ceinture-baudrier installée. Le port de la ceinture-baudrier aurait pu augmenter les chances de survie et d'évacuation dans plusieurs de ces 62 accidents, même si les probabilités de survie et d'évacuation étaient différentes. Dans l'événement à l'étude, l'interprétation du règlement n'est pas l'unique raison pour laquelle les occupants n'ont pas porté la ceinture-baudrier, sauf que son ambiguïté a eu une incidence sur l'utilisation des ceintures-baudrier par l'exploitant.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Quand on utilisait le Air Stair pour les transferts aériens, conformément aux pratiques de la compagnie, on attachait temporairement de petites charges externes au Air Stair durant le transfert aérien du personnel et de l'équipement, pendant que l'hélicoptère était en vol stationnaire au sommet des pylônes de transmission.
  2. Aucune directive officielle n'interdisait le transport de petites charges externes durant les vols au cours desquels on n'utilisait pas le Air Stair. Ainsi, il était devenu courant pour les monteurs de ligne d'attacher des sacs à outils et d'autres petits objets sur le Air Stair durant les vols en provenance ou à destination des chantiers.
  3. Comme il s'agissait d'une pratique officieuse, aucun contrôle adéquat (comme des procédures normalisées, de la formation, des listes de vérification ou des vérifications par des pairs) n'était en place pour assurer que ces objets étaient rangés ou arrimés correctement. Dans l'événement à l'étude, une partie de la charge externe n'était pas solidement arrimée à l'hélicoptère.
  4. Le pilote ne pouvait probablement pas confirmer que la charge était rangée dans la cabine, car il était occupé à contrôler l'hélicoptère, qu'il gardait léger sur les patins pendant l'embarquement; il aurait été incapable de tourner la tête pour voir l'ensemble du Air Stair.
  5. Il est possible que les monteurs de ligne n'aient pas bouclé leur ceinture de sécurité après qu'ils furent montés dans l'hélicoptère, à cause de leur perception d'un faible risque inhérent à un vol de courte distance ou qu'il leur était difficile de boucler les ceintures par-dessus leurs vêtements d'hiver.
  6. Un sac d’équipement en toile muni d’un mousqueton, qui se trouvait sur le Air Stair, a percuté le rotor de queue de l'hélicoptère; le choc a causé de graves dommages, un important déséquilibre de la masse et de fortes vibrations.
  7. Lorsque le pilote a tenté de poser l'hélicoptère endommagé près de la zone de rassemblement, l'ensemble du rotor de queue s'est complètement séparé, et l'hélicoptère a amorcé une rotation involontaire. Peu de temps après, l'hélicoptère a percuté le relief environnant et a été détruit.
  8. Aucun des monteurs de ligne n'était attaché; ils ont été séparés de l'hélicoptère, peu avant l'impact ou durant celui-ci. Ils ont été mortellement blessés à la suite d'un contact avec l'hélicoptère ou le relief avoisinant.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Si les exploitants aériens n'obtiennent pas d'approbation formelle de Transports Canada pour mener des activités pour lesquelles une spécification d'exploitation est requise, ou s'ils ne font pas la demande pour l'obtenir, il y a un risque que les dangers associés à ces activités ne soient ni cernés ni atténués.
  2. Si les manuels de vol ne sont pas tenus à jour et si les équipages de conduite ne sont pas informés des limites résultant des modifications aux certificats de type supplémentaire, il y a un risque que ces limites soient dépassées, ce qui pourrait causer des blessures au personnel et à l'équipement.
  3. S'il n'est pas clair dans le règlement que l'utilisation de tous les composants disponibles d'une ceinture de sécurité est obligatoire, il y a un risque que les ceintures-baudriers ne soient pas utilisées comme prévu, ce qui augmente le risque de blessures et de pertes de vie.
  4. Si les personnes qui travaillent dans de basses températures sont affaiblies par le froid, il y a un risque que des tâches essentielles soient mal effectuées, ce qui pourrait accroître le risque de blessures au personnel et de dommages à l'équipement.
  5. Dans un accident offrant des chances de survie, en particulier lorsque le compartiment passagers principal demeure relativement intact, les passagers qui ne sont pas attachés correctement sont davantage exposés à des blessures graves ou mortelles que ceux qui sont attachés correctement.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada

Le 21 décembre 2017, le BST a émis l'avis de sécurité aérienne A17O0264-D1-A1 pour aviser les organismes concernés quant aux risques associés aux charges non arrimées et aux passagers qui ne portent pas leur ceinture de sécurité dans les hélicoptères. L'avis comprend les deux messages de sécurité suivants :

La cargaison doit être arrimée adéquatement en tout temps pour éviter qu'elle se déplace dans l'hélicoptère ou qu'elle en sorte pendant le vol.

et

Les passagers qui ne bouclent pas leur ceinture de sécurité risquent des blessures graves ou même la mort en cas d'urgence.

4.1.2 Transports Canada

Transports Canada (TC) a publié le document Sécurité aérienne — Nouvelles 1/2018, dans lequel un article du document Sécurité aérienne — Nouvelles 4/2013 a été publié à nouveau. L'article abordait l'importance du port de la ceinture de sécurité, qui comprend à la fois la ceinture sous-abdominale et la ceinture-baudrier, et expliquait que l'objectif de l'article 101.01 du Règlement de l'aviation canadien (RAC) est que les pilotes portent à la fois la ceinture sous-abdominale et la ceinture-baudrier, lorsqu'elle est installée.

Le 14 mars 2018, TC a publié l'alerte à la sécurité de l'Aviation civile (ASAC) No 2018-02 pour « rappeler aux exploitants les exigences relatives à l'utilisation adéquate des ceintures de sécurité des passagers et l'importance d'arrimer le fretNote de bas de page 56 ». L'ASAC comprenait la mesure recommandée suivante :

Conformément aux articles du RAC mentionnées [sic] ci-dessus, il faut rappeler aux exploitants l'obligation et l'importance d'arrimer le fret et les bagages. De plus, il incombe au pilote de s'assurer que tous les passagers ont reçu des instructions sur l'utilisation adéquate des ceintures de sécurité. Comme en témoigne cet accident, il est extrêmement important que ces mesures soient mises en œuvreNote de bas de page 57.

4.1.3 Hydro One Networks Inc.

Hydro One Networks Inc. a pris les mesures correctives suivantes :

4.2 Mesures de sécurité à prendre

4.2.1 Définition de « ceinture de sécurité »

Tous les sièges de la banquette arrière de l'hélicoptère en cause dans l'événement à l'étude étaient munis d'une ceinture de sécurité à 4 points qui comprenait une ceinture sous-abdominale et une ceinture-baudrier à verrouillage automatique (enrouleur à inertie). Toutefois, avant l'événement, les ceintures-baudriers de la banquette avaient été enroulées et fixées avec du ruban isolant, ce qui les a rendues inutilisables.

Selon le paragraphe 101.1(1) du RAC, une ceinture de sécurité est « [un] dispositif de retenue individuel qui se compose soit [caractères gras ajoutés] d'une ceinture sous-abdominale, soit d'une ceinture sous-abdominale et d'une ceinture-baudrier ». Partant de cette définition, Hydro One Networks Inc. estimait qu'elle se conformait au règlement qui oblige l'utilisation de ceintures de sécurité si les occupants portent soit la ceinture sous-abdominale, soit la ceinture sous-abdominale et la ceinture-baudrier ensemble.

De 1990 à 2018, le BST a enquêté sur de nombreux accidents d'aéronefs équipés de ceintures-baudriers détachables, dans lesquels on a déterminé que les occupants ne portaient pas les ceintures au moment de l'accident (annexe B). Des 62 accidents recensés, 33 ont été mortels, ce qui a occasionné 68 pertes de vie au total. Parmi les 68 personnes ayant perdu la vie, 37 ne portaient pas la ceinture-baudrier qui était en place. Même si les probabilités de survie dans ces 62 accidents étaient différentes, dans la plupart des cas, le port de la ceinture-baudrier aurait pu augmenter les chances de survie et d'évacuation des occupants.

Dans un accident offrant des chances de survie, en particulier lorsque le compartiment passagers principal demeure relativement intact, les passagers qui ne sont pas attachés correctement sont davantage exposés à des blessures graves ou mortelles que ceux qui sont attachés correctement. Dans l'événement à l'étude, l'interprétation du règlement n'est pas l'unique raison pour laquelle les occupants n'ont pas porté la ceinture-baudrier, sauf que son ambiguïté a eu une incidence sur son utilisation.

TC a tenté de clarifier le règlement dans les documents Sécurité aérienne — Nouvelles 4/2013 et 1/2018, ainsi que dans la circulaire d'information 605-004 (novembre 2014). Toutefois, s'il n'est pas clair dans le règlement que l'utilisation de tous les composants disponibles d'une ceinture de sécurité est obligatoire, il y a un risque que les ceintures-baudriers ne soient pas utilisées comme prévu, ce qui augmente le risque de blessures et de pertes de vie.

Par conséquent, le Bureau recommande que

le ministère des Transports modifie le Règlement de l'aviation canadien pour éliminer toute ambiguïté relativement à la définition de « ceinture de sécurité ».
Recommandation A19-01 du BST

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Il a été publié en premier lieu le .

Correction

La note en bas de page 2 et la section 1.5.2 (y compris le tableau 3) ont été modifiés de façon à montrer que 1 des passagers était un apprenti monteur de ligne et que les 2 autres passagers étaient des monteurs de lignes agréés comme compagnons. La version originale laissait entendre que les trois monteurs de ligne étaient des apprentis.

Cette correction a été approuvée par le Bureau le ; la version corrigée du rapport a été publiée le .

Annexes

Annexe A – Incohérences entre le supplément au manuel de vol et le supplément au manuel de maintenance

Texte du supplément au manuel de vol* Texte du supplément au manuel de maintenance**

Plaquette obligatoire sur le tableau de bord [traduction] :

« AVEC LE AIR STAIR INSTALLÉ
VNE SANS PORTE 100 KIAS
VNE AVEC PORTES 100 KIAS
LORSQUE LE AIR STAIR EST OCCUPÉ, NE PAS DÉPASSER
30 NŒUDS DANS QUELQUE DIRECTION, OU
INCLINAISON DE 10°. DÉCOLLAGE ET ATTERRISSAGE
INTERDITS SI LE AIR STAIR EST OCCUPÉ. »

Plaquette obligatoire sur le tableau de bord [traduction] :

« QUAND LE AIR STAIR EST INSTALLÉ
VNE SANS PORTE 100 KIAS
VNE AVEC PORTES 100 KIAS
QUAND LE AIR STAIR EST OCCUPÉ,
VOL STATIONNAIRE SEULEMENT SANS DÉPASSER
17 NŒUDS, OU EN PALIER

VOL VERS L'AVANT SANS DÉPASSER 30 KIAS
ET UNE INCLINAISON DE 10°. DÉCOLLAGE ET
ATTERRISSAGE
INTERDITS SI LE AIR STAIR EST OCCUPÉ. »

Autres plaquettes obligatoires :

Sur la boîte à équipement (2 endroits) [traduction] :
« CAPACITÉ MAX 250 LB (113 KG) »

Le Air Stair doit porter la plaquette suivante [traduction] :
« CHARGE MAX SUR AIR STAIR 300 LB (136 KG) »

Autres plaquettes obligatoires :

Sur la boîte à équipement (2 endroits) [traduction] :
« CAPACITÉ MAX 250 LB (113 KG) »

Le Air Stair doit porter la plaquette suivante [traduction] :
« CHARGE MAX SUR AIR STAIR 300 LB (136 KG) »

La poignée arrière doit porter la plaquette suivante [traduction]  :
« CHARGE MAX BARRE TRANSVERSALE 100 LB (45 KG) »

Les points d'ancrage doivent porter la plaquette suivante [traduction] :
« CHARGE MAX DISPOSITIF ANTICHUTE 300 LB (136 KG) »

Le contrepoids doit porter la plaquette suivante [traduction] :
« DÉFENSE DE MARCHER »

Description [traduction] 

Le Air Stair sert, entre autres, à fournir un accès aérien aux monteurs de ligne qualifiés aux pylônes de Hydro One.

Description [traduction] 

Ce système doit servir à l'embarquement et au débarquement en vol des monteurs de ligne. On peut installer un plateau à outils et un siège sur le Air Stair pour qu'un monteur de ligne effectue des travaux de maintenance depuis le Air Stair.

* JCM Aerodesign Limited, Flight Manual Supplement No. 003063FMS (approuvé par TC le 27 septembre 2007), p. 4.
** JCM Aerodesign Limited, Maintenance Manual Supplement No. 003063MMS (accepté par TC le 28 septembre 2007), p. 7.

Annexe B – Accidents dans lesquels au moins un occupant ne portait pas la ceinture-baudrier installée

Numéro d'événement du BST Nombre d'occupants selon la gravité des blessures Blessures mortelles des personnes qui ne portaient pas la ceinture-baudrier installée
Mortelles Graves Légères Aucune
A93H0023 7 0 0 0 2
A93W0159 0 1 0 0 0
A94C0065 0 0 3 0 0
A94P0215 0 0 0 1 0
A94W0162 0 0 0 1 0
A95C0139 3 1 4 0 1
A95H0012 8 2 0 0 1
A95O0150 1 0 0 0 1
A96P0105 0 0 2 0 0
A96P0201 1 0 0 0 1
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Total 68 48 63 10 37