Rapport d'enquête aéronautique A98W0181

Perte de maîtrise/Atterrissage dur
Canadian Helicopters Ltd
Eurocopter AS350B ASTAR (hélicoptère) C-FSLF
22 milles au sud de Slave Lake (Alberta)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le pilote de l'hélicoptère Eurocopter AS350B portant le numéro de série 1975 qui transportait cinq pompiers effectuait une approche à l'atterrissage à un endroit éloigné. En finale, environ 20 pieds au-dessus du sol (agl), au moment de la réduction du taux de descente en vue de l'atterrissage, le pilote a entendu le klaxon de bas régime rotor. Il a été incapable de maîtriser son taux de descente et l'hélicoptère a effectué un atterrissage dur sur le sabot de queue et le patin droit, puis a rebondi vers l'avant. La poutre de queue s'est détachée et le prolongement avant du tube du patin droit s'est rompu. La traverse tubulaire avant droite s'est enfoncée dans le sable meuble, l'hélicoptère a piqué du nez, a pivoté dans le sens des aiguilles d'une montre puis s'est renversé sur le côté droit. Le moteur (Turbomeca Arriel 1B) a continué à fonctionner et le pilote l'a arrêté. Les quatre passagers occupant la banquette arrière ont glissé vers la droite lorsque l'hélicoptère s'est renversé sur le côté, ce qui a fait sortir de son rail la porte coulissante arrière droite de la cabine. Le passager occupant le siège arrière droit est partiellement tombé hors de l'hélicoptère et le haut de son corps est resté coincé entre la porte coulissante et le fuselage de l'hélicoptère. Les autres passagers ont réussi à soulever suffisamment le fuselage pour dégager le passager coincé. Les occupants ont été transportés à un hôpital local afin d'y être soignés.

    This report is also available in English.

    Renseignements de base

    L'endroit choisi pour l'atterrissage était constitué d'une vaste surface en sable non aménagée située à côté d'un ruisseau, à quelque 2 300 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl). Sur trois de ses côtés, cet endroit était bordé d'arbres de 75 à 80 pieds de hauteur. L'approche a été effectuée de l'est, au-dessus d'arbres moins hauts, le long du lit du ruisseau. Au moment de l'accident, à 17 h 40, heure avancée des Rocheuses (HAR), la température signalée était de 17degrés Celsius et il y avait un léger vent variable.

    La masse et le centrage de l'appareil se trouvaient dans les limites prescrites, et le centre de gravité se situait dans la plage normale. Rien n'indique dans les livrets techniques de maintenance qu'il restait des anomalies à corriger pertinentes aux circonstances de l'événement. Le carburant dont un échantillon a été examiné était du bon type, de bonne qualité et n'était pas contaminé. La radiobalise de détresse (ELT) s'est déclenchée à l'impact. D'après le Manuel de vol de l'appareil, dans les conditions prévalant au moment de l'accident, l'hélicoptère pouvait se mettre en stationnaire hors de l'effet de sol.

    Le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur, et il totalisait 5 000 heures de vol, dont environ 275 heures sur ce type d'appareil. Le pilote a signalé qu'il était en finale, à quelque 20 pieds agl, quand le klaxon de bas régime rotor a retenti et que, malgré l'utilisation du collectif, l'appareil a pris un taux de descente élevé impossible à contrer. Le pilote ne s'est souvenu d'aucune indication des instruments pendant la descente. La vitesse du rotor principal (NR) est habituellement de 385 tr/min et le dispositif d'avertissement de bas régime rotor (klaxon et voyant) se déclenche à 360 tr/min.

    Après l'examen de l'épave, le moteur a été essayé au banc. Il a été établi que la vanne de décharge (Le Bozec, portant la référence 9550158260) fonctionnait irrégulièrement et se fermait parfois trop lentement. Lors de la vérification de son fonctionnement sur un banc d'essai, la vanne de décharge s'est d'abord bloquée en position ouverte. La vanne de décharge est une pièce électro-pneumatique qui, en laissant s'échapper vers l'extérieur une certaine quantité d'air à la sortie du compresseur axial, contribue à prévenir le pompage et le décrochage du compresseur pendant l'accélération du moteur. Habituellement, elle se ferme à 96 pour cent du régime du générateur de gaz (NG) et s'ouvre à 94 pour cent du régime NG. Un retard à la fermeture provoque une détérioration des performances du moteur. Les données obtenues au cours de l'essai au banc ont révélé qu'il y avait une perte de puissance sur l'arbre d'environ 63 horse-power (47 kW) si la vanne de décharge ne se fermait pas.

    L'examen et l'essai de la vanne de décharge, effectués en présence du personnel du Laboratoire technique du BST à un centre de révision autorisé, ont révélé que ce composant avait été mal assemblé au moment de sa fabrication. Au moment de l'assemblage, les engrenages à crémaillère activant la vanne papillon n'avaient pas été bien alignés, ce qui faisait que la vanne papillon ne s'ouvrait pas complètement. Après vérification de son fonctionnement dans l'état où elle avait été reçue, la vanne de décharge a été démontée et, une fois les engrenages de la vanne papillon montés correctement, la vanne de décharge a fonctionné normalement. Il a également été déterminé qu'il y avait eu contamination des surfaces internes des composants de la vanne. L'air évacué du compresseur (P2) du moteur contient de fines particules concentrées de poussière et de sable qui sont ingérées par le moteur lorsque celui-ci fonctionne normalement. Ces dépôts peuvent réduire le jeu de la vanne et la faire coller. Des traces de contamination par la poussière ont été trouvées dans le petit filtre du raccord de la conduite d'arrivée P2. Le centre de révision a mentionné que les traces de contamination trouvées à l'intérieur de cette vanne étaient typiques de celles que l'on trouve à l'intérieur des vannes envoyées en réparation. Les dossiers de l'exploitant indiquent un nombre important de remplacements de vannes de prélèvement sur son parc d'AS350. Les rapports de difficultés en service (RDS) contiennent six cas de panne de cette vanne en cours d'utilisation. Elle totalisait quelque 2 071 heures depuis sa fabrication et, habituellement, ce genre de vanne subit une révision majeure « selon état ». Cette vanne de décharge n'avait jamais subi de révision majeure.

    L'examen de l'épave de l'hélicoptère a révélé que la cabine passagers avait subi une déformation structurale considérable, ce qui avait eu pour effet de faire sortir partiellement la porte coulissante arrière droite de son rail. Lorsque l'hélicoptère est tombé sur son côté droit, la masse des quatre passagers occupant la banquette arrière qui ont glissé vers la droite ainsi que la déformation de la cabine ont fait s'ouvrir la porte coulissante, ce qui explique pourquoi le passager occupant le siège arrière droit est presque tombé hors de l'hélicoptère. Il a été signalé que le passager coincé en détresse respiratoire quand la masse de l'hélicoptère reposait sur le haut de son corps. Les passagers occupant la banquette arrière portaient leur ceinture de sécurité, mais ils ne portaient pas les bretelles. Il se peut que la courte durée du vol ait incité les passagers à ne pas porter les bretelles de sécurité à deux point d'ancrage dont l'appareil était équipé.

    Analyse

    L'analyse porte sur les effets du mauvais fonctionnement d'une vanne de décharge et sur l'utilisation des bretelles de sécurité.

    Si le moteur ne fonctionne pas à plein régime à cause d'une vanne de décharge qui se ferme lentement à une étape critique du vol, cela peut faire que le pilote tire trop sur le collectif, augmentant ainsi avec excès le pas des pales du rotor principal. Ce pas excessif réduit le régime du rotor principal, d'où une augmentation du taux de descente. Pour sortir de cette situation, il faudrait abaisser le collectif, ce qui, dans ce cas-ci, n'était pas possible à cause de la proximité du sol.

    Si les passagers occupant la banquette arrière avaient porté correctement leurs bretelles de sécurité, il est possible qu'ils auraient eu moins tendance à glisser latéralement lorsque l'appareil s'est renversé. Si le passager coincé a eu la vie sauve, c'est probablement dû au fait que les autres passagers ont réussi à soulever à temps l'hélicoptère pour le libérer.

    L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

    • LP 109/98 - Bleed Valve Examination (Examen de la vanne de décharge)

    Faits établis

    1. Le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol
    2. Pendant la descente, la vanne de décharge a mal fonctionné, ce qui a empêché le moteur de fonctionner à plein régime.
    3. En tentant de réduire le taux de descente, le pilote a tiré sur le collectif, ce qui a fait prendre un pas excessif aux pales du rotor principal.
    4. Le pilote a été incapable de freiner la descente rapide de l'appareil et il a effectué un atterrissage dur.
    5. La vanne de décharge avait été mal assemblée au moment de sa fabrication et elle avait été contaminée, ce qui a provoqué un fonctionnement anormal.
    6. La porte coulissante arrière droite de la cabine s'est ouverte lorsque l'appareil s'est renversé, ce qui a eu pour effet de coincer un passager.
    7. Si le passager coincé a eu la vie sauve, c'est probablement dû au fait que les autres passagers ont réussi à soulever à temps l'hélicoptère pour le libérer.

    Causes et facteurs contributifs

    Au cours d'une approche finale à forte pente, le pilote a été incapable de maîtriser le taux de descente de l'hélicoptère à cause du mauvais fonctionnement d'une vanne de décharge du moteur et il a effectué un atterrissage dur. Ce mauvais fonctionnement était dû à la contamination et à un mauvais assemblage de la vanne au moment de sa fabrication.

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.