Rapport d'enquête aéronautique A95W0034

Sortie en bout de piste
Lignum Ltd.
Mitsubishi MU-300 Diamond C-GLIG
Aéroport de Jasper-Hinton (Alberta)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    L'avion à réaction Mitsubishi MU-300 Diamond effectuait un vol selon les règles de vol aux instruments entre Williams Lake (Colombie-Britannique) et Hinton (Alberta). Il y avait deux pilotes et deux passagers à bord. Pendant l'approche directe à vue sur la piste 02 de l'aéroport de Jasper-Hinton, l'équipage a rencontré de faibles turbulences et un courant d'air descendant. Le commandant de bord a augmenté la vitesse de l'avion de 105 à 115 noeuds en approche finale, et l'avion a touché des roues à 1 000 pieds environ après le seuil de piste, à la vitesse de 110 noeuds. Le commandant de bord a d'abord serré les freins à fond, puis quand il a réalisé que l'avion ne s'arrêterait pas sur la longueur de piste restante, il s'est mis à faire des S sur la piste pour permettre à l'avion de s'arrêter plus facilement. L'avion est sorti en bout de piste et a terminé sa course à 255 pieds de l'extrémité de piste. L'avion a subi des dommages importants; personne n'a été blessé.

    Le Bureau a déterminé que l'avion est sorti en bout de piste parce que l'équipage a atterri en présence d'un vent arrière de 14 à 21 noeuds. Le centre de contrôle régional avait indiqué que le vent était nul au village de Jasper, mais l'équipage a cru que ce renseignement concernait l'aéroport de Jasper-Hinton, et il a décidé de poursuivre l'approche directe sans survoler l'aéroport; ces deux facteurs ont contribué à l'accident.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Déroulement du vol

    L'avion à réaction Mitsubishi MU-300 Diamond effectuait un vol selon les règles de vol aux instruments (IFR)Note de bas de page 1 entre Williams Lake (Colombie-Britannique) et Hinton (Alberta). Il y avait deux pilotes et deux passagers à bord. Avant de lui donner l'autorisation de descendre du niveau de vol 270 (FL 270), le centre de contrôle régional (ACC) d'Edmonton a indiqué à l'équipage le temps qu'il faisait au village de Jasper (Alberta), précisant que le vent était nul. L'équipage a annulé son plan de vol IFR pendant la descente et a effectué une approche à vue sur la piste 02 de l'aéroport de Jasper-Hinton. Pendant l'approche, en courte finale, l'équipage a rencontré des turbulences modérées. Le commandant de bord a augmenté la vitesse de 105 à 115 noeuds afin de compenser le courant d'air descendant et les fluctuations de la vitesse. L'équipage a remarqué que la manche à vent de la piste 02 était entièrement déployée et que la direction du vent variait fréquemment. L'équipage a décidé de poursuivre l'approche et d'atterrir sur la piste 02. À 50 pieds, il a réduit la puissance au régime de ralenti. L'avion a touché des roues à 1 000 pieds environ après le seuil de piste. Pendant la course à l'atterrissage, le commandant de bord a d'abord serré les freins à fond, puis quand il a réalisé que l'avion ne s'arrêterait pas sur la longueur de piste restante, il s'est mis à faire des S sur la piste pour permettre à l'avion de s'arrêter plus facilement. L'avion est sorti en bout de piste et a terminé sa course à 255 pieds de l'extrémité de piste. L'avion a subi des dommages importants; personne n'a été blessé.

    L'accident s'est produit de jour, à 9 h 20, heure normale des Rocheuses (HNR)Note de bas de page 2, par 53° 19′ de latitude Nord et 117° 45′ de longitude OuestNote de bas de page 3, à une altitude de 4 016 pieds-mer.

    1.2 Victimes

    Équipage Passagers Tiers Total
    Tués - - - -
    Blessés graves - - - -
    Blessés légers/ indemnes 2 2 - 4
    Total 2 2 - 4

    1.3 Dommages à l'aéronef

    L'avion a subi des dommages importants.

    1.4 Autres dommages

    Plusieurs centaines de livres de carburéacteur se sont écoulées d'un réservoir d'aile perforé et ont légèrement endommagé le sol. Quelques heures après l'accident, un véhicule d'incendie municipal a répandu de la mousse sur l'avion et sur le sol imbibé de carburant.

    1.5 Renseignements sur le personnel

    1.5.1 Généralités

    Commandant de bord Premier officier
    Âge 47 ans 48 ans
    Licence pilote de ligne pilote de ligne
    Date d'expiration du certificat de validation 1er juillet 1995 1er juillet 1995
    Nombre d'heures de vol 3 500 13 500
    Nombre d'heures de vol sur type en cause 360Note de bas de page 4 350
    Nombre d'heures de vol dans les 90 derniers jours 50 63
    Nombre d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours 50 63
    Nombre d'heures de service avant l'événement 3,5 3,5
    Nombre d'heures libres avant la prise de service 13 48

    1.5.2 Renseignements sur le commandant de bord

    Le commandant de bord possède la licence de pilote de ligne et la qualification de vol aux instruments de classe 1, groupe 1, sur avions. Il est qualifié sur avions terrestres, hydravions, multimoteurs, Cessna 500 et Mitsubishi MU-300. Sa dernière visite médicale de classe 1 de membre d'équipage remontait au 29 décembre 1994. Sa licence était validée jusqu'au 1er juillet 1995. Il doit porter des verres correcteurs pour piloter. Il avait passé avec succès sa vérification de compétence pilote (PPC) en janvier 1995. Il avait déjà atterri une fois à l'aéroport de Jasper-Hinton, plusieurs mois avant l'accident. Il effectue l'entretien régulier des avions de la compagnie en tant que chef mécanicien de Lignum Air.

    1.5.3 Renseignements sur le premier officier

    Le premier officier (co-commandant de bord) possède la licence de pilote de ligne et la qualification de vol aux instruments de classe 1, groupe 1, sur avions. Il est qualifié sur avions terrestres, hydravions, multimoteurs, Cessna 500, Mitsubishi MU-300 et Hawker-Siddeley HS25. Sa dernière visite médicale de classe 1 de membre d'équipage remontait au 2 décembre 1994. Sa licence était validée jusqu'au 1er juillet 1995. Il doit avoir des verres correcteurs à sa disposition pour piloter. Il avait passé avec succès une PPC de commandant de bord en janvier 1995. Il avait atterri à l'aéroport de Jasper-Hinton plusieurs mois avant l'accident. Il occupe le poste de chef pilote de Lignum Air.

    1.6 Renseignements sur l'aéronef

    Constructeur Mitsubishi Heavy Industries Ltd.
    Type MU-300
    Année de construction 1984
    Numéro de série A0076SA
    Certificat de navigabilité valide
    Nombre total d'heures de vol cellule 3 290,2
    Type de moteur (nombre) Pratt & Whitney JT15D-4D (2)
    Type d'hélice (nombre) S.O.
    Masse maximale autorisée au décollage 15 500 lb
    Types de carburant recommandés kérosène, Jet A, Jet A1, Jet B, JP4
    Type de carburant utilisé Jet B

    1.6.1 Renseignements supplémentaires sur l'avion

    Lignum Air avait importé le biréacteur au Canada en 1993. Le 3 juin 1989, l'avion avait été modifié aux États-Unis conformément au Supplemental Type Certificate no SA3891NM de Branson Aircraft Corporation. Cette modification avait permis d'augmenter la masse maximale au décollage de 14 700 à 15 500 livres. L'avion n'était pas équipé d'inverseurs de poussée, ce qui n'est pas contraire à la réglementation.

    On a calculé que la masse de l'avion était de 13 000 livres au moment de l'accident. Le centre de gravité était à 22,45 % de la corde aérodynamique moyenne (MAC). La masse et le centrage étaient dans les limites prescrites. La masse maximale autorisée à l'atterrissage, volets braqués à 30 degrés, est de 13 200 livres. La composante vent arrière maximale spécifiée par le constructeur pour le décollage et l'atterrissage est de 10 noeuds. Il faut effectuer le freinage avec antidérapage à fond pour respecter les distances d'arrêt indiquées sur les tableaux. L'utilisation du freinage avec antidérapage permet de raccourcir la course à l'atterrissage, quel que soit l'état de la piste.

    L'examen des dossiers a permis de constater que l'avion était certifié et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. On a indiqué que l'avion était en bon état de service et qu'il ne présentait aucune anomalie connue ni de point d'entretien différé au départ de Williams Lake.

    1.6.2 Planification du vol de l'avion et données de performances

    La veille du vol de l'accident, l'équipage avait déterminé à l'aide du manuel de vol que l'avion pouvait décoller et atterrir en toute sécurité aux aéroports de Williams Lake et de Jasper-Hinton. Lors de l'exposé météorologique avant vol, la station d'information de vol (FSS) de Vancouver avait indiqué à l'équipage le temps qu'il faisait au village de Jasper; toutefois, l'équipage se rendait à l'aéroport de Jasper-Hinton.

    1.7 Renseignements météorologiques

    Les observations météorologiques effectuées à 9 h HNR par Environnement Canada pour le village de Jasper faisaient état des conditions suivantes : mince couche de nuages épars à 20 000 pieds, visibilité de 25 milles, vent du 210 degrés vrai à deux noeuds, température de moins 21 degrés Celsius et point de rosée de moins 23 degrés Celsius. Le bureau météorologique du village de Jasper est situé à 30 nm environ de l'aéroport de Jasper-Hinton, et à 7 nm de la piste d'atterrissage de Jasper. Le bureau est situé derrière des montagnes culminant à 8 000 pieds. Le public, les équipages de conduite et l'ACC d'Edmonton peuvent facilement se procurer les bulletins du bureau.

    La station AWOS (Système automatisé d'observations météorologiques) située à l'aéroport de Jasper-Hinton faisait état des conditions suivantes à 9 h 20 HNR : vent du 200 degrés magnétique à 14 noeuds avec rafales pouvant atteindre les 21 noeuds; température de moins 16,7 degrés Celsius, point de rosée de moins 21 degrés Celsius, et calage altimétrique de 30,30 pouces de mercure. Les observations météorologiques de l'AWOS sont faites et enregistrées toutes les 20 minutes, et elles sont transmises deux fois par jour, habituellement à 7 h et à 15 h, au bureau météorologique d'Environnement Canada à Grande Prairie (Alberta), par le gestionnaire de l'aéroport. Un examen des renseignements enregistrés sur le vent a montré qu'ils avaient soufflé du sud-ouest pendant plusieurs heures avant l'accident. Les observations de l'AWOS, transmises par messagerie vocale, peuvent être obtenues par téléphone. Toutefois, les numéros de téléphone ne sont en général pas connus du milieu aéronautique ni de l'ACC d'Edmonton. Les renseignements météorologiques pour l'aéroport de Jasper-Hinton ne peuvent pas être obtenus auprès de l'ATC ni d'une FSS.

    1.8 Procédures IFR pour l'aéroport de Jasper-Hinton

    Conformément aux exigences de l'article 471.2 du Manuel d'exploitation du contrôle de la circulation aérienne (MANOPS) et de l'Ordonnance sur la navigation aérienne (ONA), série V, no 16, l'ACC d'Edmonton a communiqué les conditions météorologiques (bureau météorologique d'Environnement Canada au village de Jasper) et le calage altimétrique officiel à la station de calage la plus proche à l'équipage lorsque ce dernier se trouvait encore dans l'espace aérien contrôlé, au FL 270, avant la descente sur l'aéroport de Jasper-Hinton. Vers 9 h 11 HNR, après être descendu au-dessous de 18 000 pieds, l'équipage a été autorisé à sortir de l'espace aérien contrôlé. L'équipage a annulé son plan de vol IFR alors qu'il franchissait 16 000 pieds en descente, et il n'a pas transmis de plan de vol VFR, ce qui n'était pas contraire à la réglementation. Toutefois, sans plan de vol, le service de suivi de vol n'est pas assuré à l'avion par l'ATC.

    1.9 Renseignements sur l'aérodrome de Jasper-Hinton

    1.9.1 Généralités

    L'aéroport de Jasper-Hinton est exploité par le ministère des Transports de l'Alberta. Il possède une piste en asphalte de 4 500 pieds de longueur sur 100 pieds de largeur orientée au 020/200 degrés magnétique. L'altitude de référence est de 4 026 pieds-mer. Une inspection effectuée tôt le matin de l'événement par le personnel de l'aéroport avait permis de constater que la piste était sèche et propre. L'aéroport est situé dans une région montagneuse désignée. À cause de la direction imprévisible des vents, l'aéroport possède trois manches à vent : une manche à chaque extrémité de la piste, et une manche lumineuse située à peu près au milieu de l'aéroport. Le vent d'ouest dominant est généralement plus fort à l'aéroport de Jasper-Hinton à cause de l'effet d'entonnoir de la vallée montagneuse à l'ouest. Des courants d'air descendants, surtout en présence d'un vent de l'ouest, proviennent généralement des montagnes à l'ouest de l'aéroport de Jasper-Hinton. L'aéroport n'est pas contrôlé, et il est souvent laissé sans personnel. Au moment de l'accident, personne ne s'occupait des radiocommunications à l'aéroport.

    1.9.2 Données relatives à la piste de l'aéroport de Jasper-Hinton

    Le Canada Air Pilot (CAP) indique que l'altitude du seuil de la piste 02 de l'aéroport de Jasper-Hinton est de 4 025 pieds-mer et qu'elle diminue à 4 006 pieds-mer au seuil de la piste 20. Les 400 premiers pieds de la piste présentent une très légère pente ascendante; le reste de la piste accuse une pente descendante qui varie de 1 à 0,36 %. Une pente descendante augmente la distance d'atterrissage des avions.

    1.9.3 Noms et emplacements des aéroports de Jasper et de Jasper-Hinton

    L'aéroport de Jasper est exploité par le gouvernement fédéral et est situé dans le parc national Jasper, à environ 23 nm de l'aéroport de Jasper-Hinton.

    L'aéroport de Jasper-Hinton est exploité par le gouvernement provincial et il est situé à environ 9,5 nm au sud-ouest de la ville de Hinton. À cause de l'emplacement et du relief environnant des deux aéroports, le vent et les conditions météorologiques peuvent varier considérablement.

    Le ministère des Transports de l'Alberta a construit l'aéroport de Hinton dans les environs de Hinton pour desservir Hinton et Jasper. Cet aéroport peut accueillir la plupart des avions turbopropulseurs et les avions d'affaire à réaction. Puisque cet aéroport a été construit pour satisfaire aux besoins de Jasper et de Hinton, on lui a donné le nom d'aéroport de Jasper-Hinton. L'endroit où a été construit l'aéroport de Jasper-Hinton a été choisi parce qu'il serait presque impossible de planifier une approche aux instruments dans les limites du terrain montagneux à l'aéroport de Jasper. En outre, l'aéroport de Jasper se trouve sur le terrain d'un parc national.

    1.10 Enregistreur de données de vol, enregistreur phonique et radiobalise de détresse

    L'avion n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR), mais il possédait un enregistreur phonique (CVR); toutefois, le CVR avait été débranché par la compagnie parce qu'il produisait des parasites dans les écouteurs des pilotes. La réglementation n'exigeait pas que l'appareil soit équipé d'un FDR ni d'un CVR; toutefois, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a recommandé que tous les avions propulsés par des moteurs à turbine soient équipés de ces enregistreurs. L'enquête a été gênée par l'absence de renseignements qu'aurait pu fournir un FDR et un CVR en bon état de fonctionnement; ces données aurait pu permettre d'établir un rapport d'enquête plus précis et de meilleure qualité.

    L'avion n'était pas équipé d'une radiobalise de détresse (ELT), contrairement aux exigences de l'Ordonnance sur la navigation aérienne, série II, no 17, intitulée Ordonnance sur les radiobalises de secours (ELT). Cette ordonnance stipule que «nul ne peut faire voler un aéronef au Canada ou un aéronef canadien hors du Canada, à moins que cet aéronef ne soit équipé d'une ou plusieurs radiobalises de secours en état de fonctionnement. Il n'est pas nécessaire qu'un aéronef soit équipé d'une radiobalise de secours si cet aéronef est un avion multimoteur à turboréacteur d'un poids maximal certifié au décollage de plus de 12 500 lb (5 700 kilogrammes) et exploité : (i) au-dessus du sol en régime IFR dans l'espace aérien contrôlé, et (ii) au sud de la latitude 66°30′N.»

    Lorsqu'il a été importé au Canada, l'avion n'était pas équipé d'une radiobalise de détresse en vertu des exemptions accordées par l'ONA pertinente. Dans le présent cas, lorsqu'il a reçu l'autorisation de sortir de l'espace aérien contrôlé pendant la descente au-dessous de 18 000 pieds et au moment de l'annulation du plan de vol IFR, le vol ne satisfaisait plus aux conditions des exemptions.

    1.11 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

    Lors du toucher initial du train principal et de la mise en rotation des roues, le pneu gauche a laissé des marques de pneu à environ 900 pieds du seuil de la piste 02, et le pneu droit à environ 1 070 pieds. Le train avant a touché la piste, puis les freins ont été serrés, comme l'indiquent les marques de dérapage commençant à 1 350 pieds dans le cas du pneu gauche et à 1 400 pieds dans le cas du pneu droit du train principal. Les marques de dérapage des pneus du train principal étaient ensuite continues, mais leur importance variait jusqu'au point d'immobilisation de l'avion. Les traces inégales de dérapage indiquent qu'il y a eu modulation de l'antidérapage au freinage. La roue avant a laissé une marque de dérapage à 1 900 pieds. Les traces de dérapage indiquent que l'avion a amorcé une série de virages en S à environ 2 950 pieds du seuil et que ces virages se sont poursuivis jusqu'à la fin de la piste. Le commandant de bord a utilisé cette technique parce qu'il croyait qu'il avait probablement plus de chances d'immobiliser l'avion sur la piste, car ainsi l'avion parcourerait une plus grande distance avant d'arriver en bout de piste. On ne sait pas si cette technique augmente les chances du pilote d'immobiliser l'avion sur la piste.

    L'avion s'est immobilisé à environ 255 pieds au-delà de la surface asphaltée de la piste, au cap de 112 degrés magnétique. Le train avant et le train principal gauche se sont affaissés. Le train principal droit a été endommagé. Tous les pneus semblaient intacts et gonflés. Le revêtement et la structure du fuselage présentaient de nombreuses ondulations, et le revêtement inférieur de l'aile gauche était écorché et perforé.

    1.12 Incendie

    Rien n'indique qu'il y ait eu un incendie, que ce soit avant ou après l'accident. Il n'y a pas de service d'intervention d'urgence à l'aéroport de Jasper-Hinton, mais le service d'incendie de Hinton intervient si on fait appel à ses services.

    1.13 Questions relatives à la survie des occupants

    Personne n'a été blessé. Les membres de l'équipage ne portaient pas leurs bretelles de sécurité; ils ont déclaré que les bretelles de sécurité montées dans l'avion limitaient leurs mouvements.

    1.14 Professionnalisme et prise de décision par les pilotes

    L'équipage a effectué une approche directe à vue et a atterri à l'aéroport de Jasper-Hinton. Il avait annulé son plan de vol IFR à 16 000 pieds et n'avait pas transmis de plan de vol VFR; il ne volait donc pas conformément à un plan de vol pendant la descente et l'atterrissage. Toutefois, il avait suivi un itinéraire de vol de la compagnie tout au long du vol, et le personnel de la compagnie à Vancouver savait qui était à bord et connaissait toutes les heures de départ et d'arrivée de l'avion.

    La section «Exploitation des aéronefs aux aérodromes non contrôlés» de la Publication d'information aéronautique (A.I.P.) de Transports Canada décrit les procédures recommandées qui doivent être exécutées par les aéronefs en vol VFR aux aérodromes non contrôlés. La section 4.5.2 «Circuit d'aérodrome aux aérodromes non contrôlés» décrit la procédure qu'il faut suivre pour s'engager dans le circuit en vue de l'atterrissage. Aux endroits où les pilotes n'ont pas tous les renseignements nécessaires, ils doivent effectuer une inspection visuelle de la piste. Les pilotes doivent déterminer la direction du vent et s'assurer que la piste est dégagée avant d'atterrir. L'aérodrome de Jasper-Hinton dispose d'une fréquence de trafic d'aérodrome (ATF) de 123,2 MHz; toutefois, il n'y a pas toujours de personnel à cet aérodrome, et l'ATF ne fait pas toujours l'objet d'une veille. Au moment de l'accident, il n'y avait pas de personnel à l'aérodrome, et l'ATF ne faisait pas l'objet d'une veille.

    2.0 Analyse

    2.1 Généralités

    On a jugé que l'avion était en bon état de service et qu'il convenait au vol. Les compétences des membres d'équipage sur cet avion étaient à jour, et les pilotes avaient déjà atterri à l'aéroport de Jasper-Hinton. Bien que la piste utilisée par l'équipage présente une légère pente descendante, elle était propre et sèche, et elle était assez longue pour que l'avion puisse se poser. En conséquence, l'analyse portera sur les facteurs relatifs à la prise de décisions, notamment les raisons pour lesquelles l'équipage a choisi d'effectuer une approche directe. La confusion existant entre les bulletins météorologiques destinés à l'aéroport de Jasper et ceux destinés à l'aéroport de Jasper-Hinton sera également examinée.

    2.2 Bulletins météorologiques pour les aéroports de Jasper et de Jasper-Hinton

    L'aéroport de Jasper est situé près de l'aéroport de Jasper-Hinton, et les deux aéroports portent des noms qui se ressemblent. L'ATC a transmis à l'équipage la météo et la direction du vent concernant l'aéroport de Jasper; toutefois, comme l'avion se rendait à l'aéroport de Jasper-Hinton, l'équipage a cru que l'ATC avait abrégé le nom de l'aéroport et qu'il s'agissait de l'information pour l'aéroport de Jasper-Hinton. Ainsi, lorsqu'il a appris de l'ATC que le vent à l'aéroport de Jasper était nul, l'équipage s'est fié à des renseignements météorologiques concernant un autre aéroport. Cette confusion entre les deux aéroports a été constatée plus tôt lorsque l'équipage a reçu un exposé météorologique avant vol de la FSS de Vancouver. L'équipage avait alors obtenu les renseignements météorologiques concernant l'aéroport de Jasper, et il avait cru qu'il s'agissait des données pour l'aéroport de Jasper-Hinton, sa destination. Après avoir reçu des renseignements qu'il a mal interprétés, l'équipage a décidé d'effectuer une approche directe.

    2.3 Prise de décisions

    Il n'est pas recommandé d'effectuer une approche directe en vue d'un atterrissage sur un aéroport non contrôlé lorsqu'il n'existe pas d'avis air-sol indiquant les données relatives au vent, aux conditions météorologiques et à l'état de la piste qui sont nécessaires pour se poser en toute sécurité. Lorsque les pilotes n'ont pas tous les renseignements nécessaires relatifs à l'atterrissage, ils doivent effectuer une inspection visuelle de la piste en survolant l'aéroport. Ils doivent déterminer la direction du vent et s'assurer que la piste est dégagée avant d'effectuer l'atterrissage.

    L'équipage avait compris que le vent à l'aéroport de Jasper-Hinton était nul, il voyait qu'il n'y avait pas d'autre avion sur la piste, et il était également à l'écoute de la fréquence radio de l'aéroport et d'autres aéronefs. L'équipage n'a donc pas senti la nécessité de s'engager dans le circuit et d'effectuer une inspection visuelle du terrain avant d'atterrir. L'équipage ne s'est rendu compte de la présence du vent de surface qu'une fois en courte finale lorsqu'il a remarqué que la manche à vent était déployée parallèlement au sol et qu'elle changeait de direction fréquemment.

    L'équipage avait augmenté la vitesse d'environ 10 noeuds afin de compenser le courant d'air descendant, les turbulences et les fluctuations de la vitesse rencontrés en approche. L'avion a touché des roues sur le premier quart de la piste; toutefois, la vitesse d'approche plus élevée que la normale, combinée à la pente descendante de la piste et à la présence d'un vent arrière de 14 noeuds avec des rafales pouvant atteindre les 21 noeuds, s'est traduite par une vitesse-sol inhabituellement élevée au toucher des roues. Pour toutes ces raisons, l'équipage n'a pas pu immobiliser l'avion sur la longueur de piste restante.

    Les traces inégales de dérapage indiquent que la modulation de l'antidérapage au freinage s'est produite plusieurs fois, ce qui permet de penser que le système d'antidérapage a fonctionné normalement. Le commandant de bord, après s'être rendu compte que l'avion ne s'arrêterait pas sur la longueur de piste restante, a cru qu'il avait plus de chances d'immobiliser l'avion sur la piste s'il faisait des virages en S, ce qui augmentait la distance à parcourir avant d'arriver à la fin de la piste. On ne sait pas si cette technique augmente les chances du pilote d'immobiliser l'appareil sur la piste.

    3.0 Faits établis

    1. Les membres de l'équipage de conduite possédaient les licences et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur.
    2. L'avion était certifié et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
    3. Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule ou un mauvais fonctionnement d'un système, que ce soit avant ou pendant le vol.
    4. La masse et le centrage étaient dans les limites prescrites.
    5. L'avion n'était pas équipé d'une radiobalise de détresse, contrairement aux exigences de l'ANO, série II, no 17.
    6. L'équipage a exécuté une approche directe et n'a pas bien évalué le vent de surface à l'aéroport.
    7. On avait transmis à l'équipage les données relatives au vent de surface pour l'aéroport de Jasper, mais l'équipage a cru qu'il s'agissait des données pour l'aéroport de Jasper-Hinton.
    8. L'équipage s'est posé sur une piste qui présentait une pente descendante, dans un vent arrière de 14 à 21 noeuds, ce qui dépassait la composante vent arrière maximale autorisée à l'atterrissage.
    9. Le réservoir de carburant de l'aile gauche a été perforé, ce qui a provoqué une fuite de carburant importante; toutefois, il n'y a pas eu d'incendie après l'accident.
    10. L'avion était équipé d'un CVR, mais il avait été débranché par le personnel de maintenance de la compagnie.
    11. L'équipage a utilisé une vitesse d'approche plus élevée que la normale pour compenser les turbulences et le courant d'air descendant en approche finale.
    12. Il n'y avait pas de service d'intervention d'urgence à l'aéroport en question, ce qui n'était pas contraire à la réglementation.
    13. Lorsque l'équipage a annulé son plan de vol IFR, il n'a pas transmis de plan de vol VFR, et il a poursuivi le vol sans bénéficier d'aucun service de suivi par l'ATC.
    14. L'approche à vue directe sur l'aéroport non contrôlé n'était pas conforme aux procédures de l'A.I.P. Canada.

    3.1 Causes et facteurs contributifs

    L'avion est sorti en bout de piste parce que l'équipage a atterri en présence d'un vent arrière de 14 à 21 noeuds. Le centre de contrôle régional avait indiqué que le vent était nul au village de Jasper, mais l'équipage a cru que ce renseignement concernait l'aéroport de Jasper-Hinton, et il a décidé de poursuivre l'approche directe sans survoler l'aéroport; ces deux facteurs ont contribué à l'accident.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    Le Bureau n'a, jusqu'ici, recommandé aucune mesure de sécurité.

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président John W. Stants et des membres Zita Brunet et Maurice Harquail.

    Annexes

    Annexe A - Sigles et abréviations

    ACC
    centre de contrôle régional
    A.I.P.
    Publication d'information aéronautique
    ATC
    contrôle de la circulation aérienne
    ATF
    fréquence de trafic d'aérodrome
    AWOS
    Système automatisé d'observations météorologiques
    BST
    Bureau de la sécurité des transports du Canada
    CAP
    Canada Air Pilot
    CVR
    enregistreur phonique
    ELT
    radiobalise de détresse
    FDR
    enregistreur de données de vol
    FL
    niveau de vol
    FSS
    station d'information de vol
    h
    heure(s)
    HNR
    heure normale des Rocheuses
    IFR
    règles de vol aux instruments
    lb
    livre(s)
    MAC
    corde aérodynamique moyenne
    MANOPS
    Manuel d'exploitation du contrôle de la circulation aérienne
    MHz
    mégahertz
    nm
    mille(s) marin(s)
    OACI
    Organisation de l'aviation civile internationale
    ONA
    Ordonnance sur la navigation aérienne
    PPC
    contrôle de compétence pilote
    S.O.
    sans objet
    UTC
    temps universel coordonné
    VFR
    règles de vol à vue