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Rapport d'enquête maritime M12W0062

Chavirement et naufrage
du petit bateau de pêche Pacific Siren
au large de l'île Banks, détroit d'Hécate
(Colombie-Britannique)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 9 mai 2012, vers 20 h 30, heure avancée du Pacifique, le petit bateau de pêche Pacific Siren,chargé d’engins de pêche à la crevette, a donné de la bande sur tribord et chaviré au large de l’île Banks (Colombie-Britannique). Les trois membres d’équipage ont abandonné le bateau dans un petit canot pneumatique et sont restés coincés pendant neuf jours à la pointe Terror, sur l’île Banks, avant d’être secourus par la Garde côtière canadienne.

This report is also available in English.

Renseignements de base

Fiche technique du navire

Fiche technique du navire
Nom du navire Pacific Siren
Numéro officiel ou de permis 803083/VRN 29342
Port d’immatriculation Victoria (Colombie-Britannique)
Pavillon Canada
Type Petit bateau de pêche, casiers et palangre
Jauge brute 14,55
Longueur Note de bas de page 1 10,58 m
Construction 1984, par R.H. & K.A. Herlinveaux, North Saanich (C.-B.)
Propulsion Moteur Detroit Diesel 6-71 de 135 kW entraînant une seule hélice à pas fixe
Cargaison Environ 1 500 kg d’engins de pêche et 45 kg de crevettes
Équipage 3
Propriétaire enregistré Propriétaires privés, Prince Rupert (C.B.)

Description du navire

Le Pacific Siren était un petit bateau de pêche ponté à bordé à franc-bord, à bouchains ronds et à coque en acier (photo 1). Il a été construit en 1984 en tant que chalutier-ligneur et converti en bateau à palangre et à casiers en 2007. Le pont principal était entouré d’un pavois massif et de rambardes. Un rouf en contreplaqué de 1/4 po recouvert de fibre de verre contenant la cuisine, le coin à manger et le poste de barre était situé à l’avant du milieu du bateau, sur le pont principal. On y accédait par une porte du côté tribord du pont principal.

Sous le pont principal, la coque était divisée en quatre compartiments par trois cloisons transversales étanches formant les postes d’équipage à l’avant, le compartiment moteur, la cale à poisson isolée et réfrigérée et la cambuse.

Le bateau était équipé d’une rallonge arrière en aluminium qui se prolongeait d’environ 1,5 m à l’arrière du pont principal. Un poste de boëttage Note de bas de page 2 en aluminium s’étendant sur toute la largeur du bateau recouvrait la rallonge arrière. Un tambour de palangre se trouvait à l’avant du poste de boëttage et une table de tri était située à l’arrière du rouf. Il y avait deux réservoirs de carburant de 1 800 L de part et d’autre du moteur principal, et un réservoir d’eau d’environ 380 L dans la cambuse.

Le rouf contenait l’équipement de navigation et de communication suivant :

Le bateau transportait un canot pneumatique de plaisance de 4 m arrimé sur le toit du poste de boëttage et un radeau de sauvetage pour quatre personnes situé sur le toit du rouf. Il y avait aussi à bord deux gilets de sauvetage rangés dans la cuisine, quatre combinaisons d’immersion rangées dans un caisson du côté arrière bâbord du rouf et un vêtement de flottaison individuel (VFI) rangé près du tambour de palangre, sur le pont principal. Le bateau était muni de deux bras stabilisateurs équipés de paravanes servant à amortir le roulis.

Photo 1. Agencement général du Pacific Siren

Photo 1. Agencement général du Pacific Siren

Déroulement du voyage

Le 6 mai 2012, le capitaine-propriétaire et les deux membres d’équipage du Pacific Siren ont rempli les réservoirs de carburant du bateau en vue de faire route jusqu’au bras Cumshewa dans Haida Gwaii et de commencer à pêcher la crevette (annexe A). Ils ont chargé 350 casiers à crevettes, des ancres, une ligne de fond et d’autres engins de pêche à bord du bateau, soit un poids combiné d’environ 2 500 kg. Les casiers à crevettes et les engins étaient arrimés sur le pont principal ou au-dessus de celui-ci; les ancres et la ligne de fond étaient arrimées dans la cale à poisson. Le capitaine-propriétaire et les membres d’équipage ont quitté Prince Rupert le lendemain matin dans l’intention de traverser le détroit d’Hecate pour se rendre au bras Cumshewa. Cependant, comme le temps dans le détroit d’Hecate était mauvais et qu’on ne prévoyait aucune amélioration avant la fin de la semaine, le capitaine a changé de cap de manière à se rendre aux lieux de pêche du passage Verney, à 75 milles marins (NM) au sud de Prince Rupert (annexe A).

Le bateau est arrivé au passage Verney à la fin de l’après-midi du 7 mai Note de bas de page 3. Les membres de l’équipage ont installé les engins de pêche à la crevette et tendu des bâches sur le pont principal pour protéger la zone de tri des crevettes du vent et de la pluie. Les bâches reliaient le rouf au poste de boëttage du côté bâbord et traversaient le pont principal.

L’équipage a pêché pendant deux jours au passage Verney, puis, vers 16 h Note de bas de page 4 le 9 mai, appareillé en direction du bras Cumshewa par mer calme. Les prévisions météorologiques pour le détroit d’Hecate s’étaient améliorées et la prise au passage Verney avait été maigre. Tous les engins de pêche à la crevette avaient été rentrés, chargés et assujettis sur le pont principal et la rallonge arrière du bateau. La prise, d’un poids approximatif de 45 kg, avait été stockée dans la cale à poisson. Les bâches étaient encore tendues sur le pont principal lorsque le navire a appareillé en direction du passage Otter, en route vers le bras Cumshewa.

Vers 19 h, le bateau est sorti du passage Otter, où l’opposition entre la marée et la houle avait produit une mer agitée. Les conditions de marée se sont améliorées une fois le bateau entré dans le détroit d’Hecate et le capitaine a changé de cap pour éviter l’île Banks. Le changement de cap vers tribord a exposé le Pacific Siren aux vagues et au vent qui approchaient par bâbord avant, ce qui a entraîné le roulis du bateau. L’équipage a alors déployé les paravanes.

Vers 19 h 45, le bateau a dépassé l’île Banks. Le capitaine a modifié le cap une seconde fois vers tribord de façon à pouvoir se rendre au bras Cumshewa en ligne droite et réglé le pilote automatique en mode NAV Note de bas de page 5. Les vagues et le vent arrivant par bâbord avant ont amené le bateau à embarquer de l’eau et, avec l’ajout de la force exercée par le vent sur les bâches et le poste de boëttage, celui-ci a commencé à donner de la bande sur tribord.

Peu après, une forte houle doublée d’une rafale a amené le bateau à embarquer plus d’eau. Le gîte sur tribord a augmenté et le livet de pont s’est retrouvé sous l’eau. Le Pacific Siren a commencé à se coucher sur ses extrémités de barrot pendant que le capitaine lançait un message de détresse MAYDAY sur le canal 16 du radiotéléphone VHF. Le capitaine est alors passé en mode de pilotage manuel et, dans une tentative pour redresser le bateau, a mis la barre à tribord toute. Lorsque l’eau s’est engouffrée dans le rouf, il a lancé un second message de détresse.

Lorsque le bateau s’est engagé, les deux membres d’équipage ont sauté à l’eau. Ils se sont rendus à la nage du côté bâbord, pour ensuite grimper sur la coque du bateau. Le chavirement a été rapide et la montée de l’eau a forcé le capitaine à sortir du rouf à la nage. Il a alors grimpé sur la coque, aidé par l’un des membres de l’équipage. À cause de la vitesse à laquelle le bateau a chaviré, les membres de l’équipage n’ont pu accéder aux gilets de sauvetage, aux combinaisons d’immersion ou au VFI; ils n’ont pas non plus été en mesure de déployer le radeau de sauvetage manuellement.

L’équipage a attendu d’être secouru sur la coque du navire chaviré pendant environ une heure. Pendant ce temps, un des membres de l’équipage a réussi à récupérer une bâche et le canot pneumatique, qui s’était partiellement dégagé du poste de boëttage. Les membres d’équipage ont attaché le canot pneumatique à la coque du bateau et sont demeurés dans l’embarcation dans l’attente d’être secourus. Le radeau de sauvetage s’est éloigné du bateau d’environ 10 m; il est demeuré attaché au toit du rouf par la bosse et ne s’est pas gonflé.

La coque du bateau en perdition a commencé à raguer le canot pneumatique et les membres d’équipage ont donc détaché le canot de la coque; celui-ci s’est alors mis à flotter librement. Le Pacific Siren a lentement été envahi par les hauts par la porte du rouf et les évents des réservoirs sur le pont principal jusqu’à ce qu’il coule, vers 23 h, par 52° 06.00′ N, 130°02.00′ W, à environ 5,5 NM au sud-ouest de la pointe Terror (annexe A). L’équipage a dérivé dans le canot pneumatique toute la nuit, se servant de la bâche pour se couvrir. Le lendemain, il a utilisé la bâche comme voile pour se propulser vers le rivage.

Le 10 mai, après avoir passé environ 20 heures en mer dans le canot pneumatique, l’équipage a atteint la pointe Terror, sur l’île Banks. Neuf jours plus tard, il a été repéré par les occupants du voilier Macoma. Ceux-ci ont avisé la Garde côtière canadienne (GCC), qui a secouru les membres d’équipage une heure plus tard.

Avaries subies par le bateau

Le bateau a coulé et n’a pas été récupéré.

Conditions environnementales

Au moment de l’événement, le vent était du sud-ouest, de modéré à fort; la houle était du sud-ouest et modérée. Le vent du sud-ouest était de 14 nœuds, avec rafales à 20 nœuds; la hauteur des vagues, qui était de 1,4 m au cours de la journée, était passée à 1,2 m au moment de l’événement.

Certification du bateau

En tant que petit bateau de pêche dont la jauge brute ne dépassait pas 15 tonneaux, le Pacific Siren était assujetti à la partie II du Règlement sur l’inspection des petits bateaux de pêche en vigueur. Il n’était donc pas tenu d’être inspecté par Transports Canada (TC); sa stabilité n’avait pas non plus à être évaluée.

Brevets, certificats et expérience du personnel

Le capitaine était titulaire d’un certificat de formation sur les fonctions d’urgence en mer (FUM) A3. Il était aussi titulaire d’un certificat de formation de conducteur de petits bâtiments (CFCPB), ce qui incluait une heure de formation sur la stabilité. Le CFCPB n’était pas obligatoire. Le capitaine avait dirigé le Pacific Siren depuis 2006 et il en était devenu le propriétaire en 2007.

Les membres d’équipage étaient titulaires d’un certificat de formation FUM A3; la réglementation n’exigeait aucune autre qualification. Tous les membres d’équipage avaient au moins six ans d’expérience dans la pêche. Le capitaine et les membres d’équipage connaissaient bien le bateau et avaient travaillé ensemble au cours de pêches à la crevette précédentes.

Engins de sauvetage

Le Pacific Siren avait à son bord un radeau de sauvetage pour quatre personnes qui reposait dans de profonds chantiers Note de bas de page 6, permettant au radeau de flotter librement ou de déployer celui-ci manuellement. Il y avait deux gilets de sauvetage et un VFI à bord. Il y avait aussi des extincteurs, des fusées éclairantes de secours et quatre combinaisons d’immersion, conformément aux exigences de la réglementation.

Le bateau n’était pas équipé d’une radiobalise de localisation des sinistres (RLS), qui n’était pas obligatoire. La RLS est obligatoire dans le cas d’un bâtiment de plus de 8 m de long qui navigue à l’extérieur des eaux de cabotage, classe III Note de bas de page 7. Lorsqu’elle est activée, la RLS émet un signal de détresse qui aide à localiser le navire et l’équipage.

Le bateau était équipé d’un radiotéléphone VHF-ASN, conformément aux exigences de la réglementation; la fonction ASN n’était toutefois pas raccordée à un appareil GPS. Au lieu, l’appareil GPS embarqué était couplé au programme de pointage de carte. L’ASN est une fonction qui envoie des messages numériques prédéfinis au moyen d’un système de radio maritime VHF. Une fois enregistré et programmé avec un numéro d’identité dans le service mobile maritime (ISMM), un radiotéléphone VHF-ASN connecté à un appareil GPS permet au capitaine d’envoyer un signal de détresse qui identifie automatiquement le navire et sa position.

Stabilité du bateau

Il existe un certain nombre de facteurs qui ont une incidence sur la stabilité d’un bateau, tels que la répartition de la charge, la dérive en raison du vent, l’utilisation de paravanes stabilisateurs et les modifications apportées au bateau Note de bas de page 8.

Répartition de la charge

Dans le cas d’un petit bateau de pêche dont la stabilité ne fait l’objet d’aucune évaluation, les pêcheurs ont une connaissance minimale des limites du bateau. Dans ce genre de situation, une bonne pratique de matelotage de base consiste à garder la masse du bateau basse, ce qui permet de garder bas le centre de gravité du bâtiment. Il est important qu’un capitaine comprenne la façon dont la répartition de la charge influe sur la stabilité du bateau et reconnaisse que faire passer des masses qui se trouvent sous le centre de gravité du bateau à un emplacement situé au-dessus de celui-ci réduit généralement la stabilité. Dans le cas de l’événement en question, le capitaine avait suivi le cours de CFCPB, qui incluait une heure de formation sur la stabilité. Il n’avait reçu aucune autre formation sur le sujet; sa sensibilisation à la façon dont la répartition de la charge influe sur la stabilité du bateau était par conséquent minimale.

Sur le Pacific Siren, l’espace de stockage était limité. Des articles comme une génératrice portative, des provisions et de l’équipement personnel étaient arrimés sur le toit du rouf. Le réservoir d’eau était vide lorsque le bateau a quitté Prince Rupert; plus tard, lorsque ce dernier a quitté le passage Verney, il avait à son bord des engins de pêche à la crevette mouillés, et des articles lourds, tels que les ancres et la ligne de fond, étaient stockés sur le pont principal et la rallonge arrière.

Fardage

La force du vent a une incidence accrue sur la stabilité d’un bâtiment dont les superstructures sont importantes et/ou qui comporte une grande surface efficace. Sur le Pacific Siren, les superstructures telles que le rouf et le poste de boëttage étaient sujettes au fardage. Aussi, des bâches étaient tendues sur le pont principal du bâtiment. Celles-ci reliaient le rouf au poste de boëttage du côté bâbord et traversaient le pont principal. Les bâches étaient tendues lorsque le bâtiment est arrivé au passage Verney et elles ont été laissées en place pendant le reste du voyage.

Paravanes amortisseurs de roulis

Les paravanes amortisseurs de roulis, généralement connus sous le nom de « paravanes stabilisateurs », servent à amortir le roulis d’un bâtiment, améliorant ainsi le confort de l’équipage, en plus de réduire la fatigue et les blessures. La sécurité du fonctionnement des paravanes submergés dépend en grande partie de la vitesse du bateau et de l’action de dragage complémentaire des paravanes de chaque côté du bâtiment en cas de roulis dans un bras de mer.

Les paravanes amortisseurs de roulis n’améliorent toutefois pas la stabilité du bateau. Le gréement supplémentaire associé au système de paravanes augmente le poids en hauteur du bâtiment, ce qui rehausse le centre de gravité de ce dernier par rapport à celui d’un bâtiment semblable sans paravanes stabilisateurs. De plus, la force de dragage des paravanes qui agit bien au-dessus du pont principal rehausse encore plus le centre de gravité du bâtiment. En 2000, TC a publié le Bulletin de la sécurité des navires (BSN) 15/2000 qui avertissait les propriétaires de bateau des risques liés à l’utilisation d’un dispositif amortisseur de roulis.

Modifications

Le propriétaire d’un bateau de pêche est tenu de fournir au registrateur de navires le dossier de toute modification qui change la jauge brute du bateau. À son tour, le registrateur de navires transmet le dossier à TC. Les propriétaires du Pacific Siren ont procédé à des modifications destinées à équiper le bâtiment de façon à permettre la pêche à la crevette à l’aide de casiers et celle du flétan à la palangre. Les modifications incluaient l’enlèvement de deux treuils de chalut et d’un tambour de chalut en acier. On a aussi ajouté un tambour de palangre, une rallonge arrière et un poste de boëttage sur le pont principal. Comme elles n’ont pas changé la jauge brute du Pacific Siren, les modifications n’ont pas été déclarées au registrateur de navires ou à TC. En 2008, TC a publié le Bulletin de la sécurité des navires (BSN) 01/2008, qui fournissait aux propriétaires et aux capitaines des lignes directrices relatives à la consignation des modifications et mettait en évidence l’incidence négative potentielle de celles-ci sur la stabilité du bâtiment.

Gestion des ressources halieutiques

Avant d’accorder un permis de pêche à la crevette au propriétaire d’un bateau, le ministère des Pêches et des Océans (MPO) exige que la longueur de la coque immergée du bâtiment soit conforme aux restrictions relatives à la longueur mentionnées dans le permis. La mesure de la coque immergée n’inclut toutefois pas la rallonge arrière. La longueur de la coque immergée du Pacific Siren respectait les exigences relatives à la longueur décrétées par le MPO. La rallonge arrière permettait d’entreposer les 300 casiers à crevettes alloués au permis.

En Colombie-Britannique, il n’y a aucune limite de prises pour un permis de pêche à la crevette donné. Sans une telle limite, les pêcheurs se disputent la ressource jusqu’à ce que le point de référence que constitue l’indice de géniteurs Note de bas de page 9 à l’échelle de la côte soit atteint, moment auquel la saison est fermée. Les heures de pêche sont de 7 h à 19 h tous les jours, et les pêcheurs ne peuvent relever leurs casiers qu’une seule fois par jour. Parmi les facteurs qui influent sur le profit, on retrouve le nombre de jours de pêche et la vitesse à laquelle les pêcheurs peuvent récolter et transformer leur prise. Dans le cas de l’événement en question, le Pacific Siren, que les travaux de radoub avaient retardé, a appareillé pour la pêche à la crevette avec quatre jours de retard, ce qui a réduit le nombre de jours de pêche et limité la prise potentielle.

Coût de la sécurité

Au cours des années, les enquêtes menées par le Bureau de la sécurité des transports (BST) sur la sécurité des bateaux de pêche ont révélé que les mesures qui maximisent le profit aux frais de la sécurité sont courantes et qu’elles ont contribué à des accidents et à des pertes de vie Note de bas de page 10. Une opération de pêche à la crevette rentable permet au pêcheur de recouvrer les coûts de pré-exploitation et les coûts d’exploitation, et de gagner sa vie. Les coûts couvrent notamment les radoubs, les modernisations ou les réparations nécessaires; l’inspection du bateau; l’assurance; la location d’un permis ou d’un quota; l’achat d’engins de pêche, d’équipement de sécurité, et de provisions. Aussi, dans bon nombre de cas, le profit tiré d’une saison de pêche à la crevette représente un pourcentage important du revenu annuel d’un pêcheur. L’aptitude d’un pêcheur à pêcher la crevette de façon rentable dépend souvent de la réduction au minimum des coûts de pré-exploitation et de la maximisation du temps de pêche dans la mesure du possible étant donné les mesures de gestion des ressources halieutiques (GRH) applicables à la pêche à la crevette en Colombie-Britannique.

Les propriétaires du Pacific Siren avaient contracté un important emprunt pour couvrir la réparation du moteur principal du bateau ainsi que les coûts de pré-exploitation de l’opération de pêche de 2012. Les coûts de pré-exploitation incluaient le radoub normal et la modernisation du bâtiment, l’achat de casiers à crevettes et de provisions, et la location du permis de pêche. Les propriétaires avaient prévu l’achat d’un second appareil GPS destiné à permettre au radiotéléphone VHF-ASN de fonctionner de la façon requise; aucun appareil GPS n’était toutefois disponible avant une semaine. L’équipage a donc appareillé de Prince Rupert et commencé à pêcher sans que le bateau soit équipé d’un radiotéléphone VHF-ASN conforme.

Renseignements sur la sécurité

Au cours des années, le BST, TC et WorkSafeBC ont publié de l’information sur la sécurité concernant les effets indésirables des modifications, des mauvaises méthodes de chargement et des pratiques de travail dangereuses sur la stabilité d’un bateau, ainsi que sur l’importance des engins de sauvetage. Les bulletins de la sécurité des navires (BSN) sont le principal moyen utilisé par TC pour transmettre de l’information sur la sécurité. Le Ministère a publié deux BSN qui contenaient de l’information pertinente aux opérations du Pacific Siren.

Le BSN 04/2006 et le questionnaire sur la stabilité qui l’accompagnait ont été envoyés par la poste aux propriétaires de petits bateaux de pêche dont la jauge brute ne dépassait pas 15 tonneaux; on y encourage fortement les propriétaires à faire évaluer la stabilité de leur bateau en présence de certains facteurs de risque, tels que des dispositifs antiroulis, une cargaison liquide, d’importantes modifications et/ou l’ajout de poids aux superstructures, et/ou un fardage important.

Dans le BSN 15/2000, on met en garde les capitaines des bateaux qui sont équipés d’un système amortisseur de roulis contre les risques liés à l’utilisation de ce dispositif, son incidence sur la stabilité, et les conséquences de la défaillance du système.

Dans le BSN 01/2008, on met en évidence l’incidence négative potentielle des modifications  sur la stabilité du bateau et on offre aux propriétaires et aux capitaines des lignes directrices relatives à la consignation des modifications.

Pratiques de travail sécuritaires

Les pratiques de travail sécuritaires sont généralement documentées et elles précisent la façon d’exécuter une tâche tout en minimisant les risques pour les personnes, l’équipement, les matériaux et l’environnement. À bord du Pacific Siren, il y avait des instructions concernant les procédures d’urgence relatives à un incendie et à l’abandon du bateau. Selon la réglementation Note de bas de page 11, il doit y avoir à bord de tout petit bateau de pêche une bonne documentation sur les pratiques de travail sécuritaires et les procédures à suivre en cas d’urgence.

Plan de route

TC recommande aux pêcheurs de préparer un plan de route Note de bas de page 12 avant d’entreprendre un voyage, et d’en laisser un exemplaire à une personne responsable désignée à terre. Une fois que le bateau a appareillé, une communication quotidienne avec la personne responsable fait en sorte que cette dernière est informée de toute modification apportée au plan de route. Si le bateau est en retard, la personne responsable pourra alors aviser les autorités compétentes. Le plan de route contient des renseignements essentiels qui aideront les responsables des opérations de recherche et sauvetage en cas d’urgence. Le capitaine du Pacific Siren s’est servi régulièrement du téléphone satellite ou du radiotéléphone VHF pour communiquer avec des membres de sa famille. Aucun plan de route documenté n’avait toutefois été préparé pour le bateau.

Événements précédents

Les enquêtes menées par le BST sur des événements de pêche aux casiers récents ont soulevé des questions de sécurité semblables à celle liée à l’événement impliquant le Pacific Siren Note de bas de page 13. On a déterminé que les effets cumulatifs de l’ajout de poids au-dessus du centre de gravité d’un bâtiment, des modifications apportées au bâtiment, d’un manque d’évaluation de la stabilité des bâtiments et les mesures de gestion des ressources halieutiques qui ne font pas appel à une approche fondée sur le risque systématique étaient des facteurs contributifs à ces accidents.

Enquête sur les questions de sécurité relatives à l’industrie de la pêche au Canada

En août 2009, le BST a procédé à une vaste enquête sur les questions de sécurité relatives aux bateaux de pêche au Canada. Le rapport intitulé Enquête sur les questions de sécurité relatives à l’industrie de la pêche au Canada (EQS), publié en juin 2012, offre un aperçu général à l’échelle nationale des questions de sécurité relatives à l’industrie de la pêche, en révélant la relation complexe et l’interdépendance entre ces questions. Le Bureau a soulevé les importantes questions de sécurité suivantes, qui méritent une attention particulière : stabilité, engins de sauvetage, GRH, coût de la sécurité, information sur la sécurité, pratiques de travail sécuritaires, approche réglementaire de la sécurité, fatigue, formation et statistiques de l’industrie de la pêche Note de bas de page 14.

Liste de surveillance

Le 16 mars 2010, et de nouveau en juin 2012, le Bureau a publié sa Liste de surveillance, qui mentionne les questions de sécurité cruciales sur lesquelles le BST a enquêté et qui posent les plus grands risques pour les Canadiens. Les pertes de vie à bord des bateaux de pêche sont une de ces questions. La moyenne étant de près de 13 décès par année de 1999 à 2011, le Bureau demeure préoccupé par : les modifications apportées aux bateaux et leurs répercussions sur la stabilité; l’utilisation et la disponibilité des engins de sauvetage; la surveillance réglementaire; les répercussions des mesures de GRH; le manque à la fois d’une culture de sécurité et d’un code de pratiques exemplaires. La Liste de surveillance met en évidence le besoin pour l’industrie d’adopter et de promouvoir des méthodes et des pratiques d’exploitation sécuritaires en vue d’augmenter les connaissances en matière de sécurité des exploitants de bateaux de pêche.

Analyse

Événements ayant mené au chavirement et au naufrage

L’après-midi du 9 mai 2012, après que l’équipage ait remonté les engins de pêche à la crevette à bord, le Pacific Siren a quitté le passage Verney en direction des lieux de pêche du bras Cumshewa, qu’on prévoyait être plus productifs. Les membres d’équipage ont arrimé les engins de pêche mouillés sur le pont principal et la rallonge arrière, et placé les articles plus lourds tels que les ancres et la ligne de fond sur le pont principal, augmentant ainsi le poids des superstructures du bateau.

Après être entré dans le détroit d’Hecate, le bateau a fait route directement vers le bras Cumshewa, ce qui a fait augmenter l’exposition aux vagues et au vent à bâbord avant, et causé le roulis du bateau. Combinée à l’eau embarquée sur le pont, la force exercée par le vent sur les bâches et le poste de boëttage a amené le bateau à donner de la bande sur tribord.

Une forte houle provenant du côté bâbord et une rafale ont par la suite frappé le Pacific Siren au même moment. Le bateau a alors embarqué plus d’eau, qui est demeurée sur le pont, car les sabords de décharge du côté tribord étaient submergés. Les effets cumulatifs de la répartition de la charge du bateau, des paravanes déployés et d’un effet de carène Note de bas de page 15 ont rehaussé le centre de gravité du bâtiment. La force combinée exercée par le vent et les vagues a fait augmenter le gîte du bateau sur tribord, changeant ainsi le centre de carène du bâtiment et réduisant l’énergie de redressement de ce dernier au point où il a été incapable de récupérer.

Le bateau a fini par couler à la suite d’un envahissement par les hauts par la porte du rouf et les évents des réservoirs sur le pont principal. Comme le bateau n’a pas été récupéré, le Bureau de la sécurité des transports (BST) n’a pas été en mesure de déterminer la cause exacte du naufrage ou de procéder à une évaluation postévénement de la stabilité du bâtiment.

Enquête sur les questions de sécurité relatives à l’industrie de la pêche au Canada

Les accidents comme celui impliquant le Pacific Siren sont l’effet cumulatif de pratiques dangereuses, de facteurs environnementaux et de conditions d’exploitation formant une conjoncture favorable permettant à un accident de survenir. Dans le rapport intitulé Enquête sur les questions de sécurité relatives à l’industrie de la pêche au Canada, on a classé en 10 questions de sécurité importantes les mesures ayant une incidence sur la sécurité et constaté qu’il existait des relations complexes et des interdépendances entre ces questions Note de bas de page 16. On trouvera ci-après l’explication de la façon dont 6 de ces 10 questions de sécurité importantes ont eu un effet sur le Pacific Siren.

Stabilité

Connaissance de la stabilité qu’ont les exploitants

Une bonne formation et une bonne connaissance de la stabilité permettent à un capitaine de comprendre les conséquences préjudiciables d’une mauvaise répartition du poids, des conditions environnementales et des paravanes stabilisateurs pour la stabilité d’un bâtiment Note de bas de page 17. Elles lui permettent également de reconnaître les effets de carène liquide de l’eau embarquée sur le pont, même si l’épaisseur n’est que de quelques pouces, ainsi que des effets de surface libre des liquides contenus en cale dans des réservoirs, des bouchains ou des cales.

Les pêcheurs ne sont pas tenus d’avoir suivi une formation axée sur les compétences ou de détenir un certificat leur permettant d’exploiter un bateau de la taille du Pacific Siren. Le capitaine du Pacific Siren était titulaire d’un certificat de formation de conducteur de petits bâtiments (FCPB), bien que celui-ci n’ait pas été obligatoire. La FCPB comprend une heure de formation sur la stabilité. L’étendue de la formation du capitaine en matière de stabilité ne suffisait pas à lui fournir une connaissance convenable des principes de stabilité, qui n’ont par conséquent pas été appliqués aux opérations de pêche. À la lumière de l’événement en question et de nombreux autres événements sur lesquels le BST a fait enquête Note de bas de page 18, il est évident que les capitaines de bateau de pêche ne sont pas toujours au courant des principes de base de la stabilité d’un bâtiment.

Paravanes amortisseurs de roulis

Le Pacific Siren était équipé de dispositifs amortisseurs de roulis qui réduisent le mouvement du bateau dans un bras de mer pour augmenter le confort de l’équipage. Au moment de l’événement, les paravanes amortisseurs de roulis du Pacific Siren étaient déployés. L’utilisation de paravanes ne va pas sans risque Note de bas de page 19. Les systèmes de paravanes amortisseurs de roulis ont été mis au point de façon ponctuelle, et il n’y a eu que peu d’études formelles visant à déterminer la corrélation précise entre l’effet de redressement induit par les paravanes et la stabilité transversale inhérente d’un bâtiment. Le capitaine du Pacific Siren ne connaissait pas bien les risques liés à l’utilisation de paravanes.

Fardage

Lorsqu’il est entré dans le détroit d’Hecate, le Pacific Siren a donc suivi la route directe augmentant l’exposition du côté bâbord du bateau aux vagues et au vent. Le côté bâbord du rouf, le poste de boëttage et les bâches tendues sur le pont principal constituaient une grande surface efficace qui a créé un fardage supplémentaire. Celui-ci a eu une incidence défavorable sur la stabilité du bâtiment.

Évaluations de la stabilité

Il n’y avait à bord du Pacific Siren aucun livret de stabilité destiné à offrir au capitaine et aux membres d’équipage des conseils au sujet des limites sécuritaires du bateau dans diverses conditions d’exploitation. À l’heure actuelle, rien n’exige que les données sur l’assiette et la stabilité des bateaux de pêche d’une jauge brute de moins de 15 tonneaux soient présentées à Transports Canada (TC) pour information, examen ou approbation. Ces renseignements sont nécessaires pour la production d’un livret de stabilité. Les évaluations de la stabilité ainsi que des renseignements simplifiés aideraient le capitaine à prendre des décisions d’exploitation à bord d’un bateau de pêche.

Les changements apportés aux mesures de gestion des ressources halieutiques (GRH) et les exigences opérationnelles font en sorte que les bateaux de pêche doivent continuellement faire l’objet de modifications Note de bas de page 20. En 2008, TC a publié le Bulletin de la sécurité des navires (BSN) 01/2008, qui incite les propriétaires et les capitaines de petits bateaux de pêche à consigner volontairement les modifications apportées à la structure ou à l’équipement d’un bâtiment, ou tout équipement qui entraîne l’ajout, la suppression ou le transfert de plus de 100 kg.

Les modifications apportées au Pacific Siren n’ont pas changé la jauge brute du bâtiment et n’ont donc pas été consignées. Certaines modifications peuvent toutefois influer sur la stabilité d’un bateau, et elles sont souvent exécutées sans qu’un architecte naval ou un organisme réglementaire en fasse l’évaluation Note de bas de page 21. Le Règlement sur la sécurité des bateaux de pêche proposé par TC et qui doit être publié à l’automne 2014 exigerait des représentants autorisés qu’ils s’assurent de tenir des dossiers des modifications apportées aux bateaux de pêche. Sans une évaluation complète de la stabilité, les décisions opérationnelles risquent de reposer sur des renseignements imprécis ou incomplets, au détriment de la sécurité.

Engins de sauvetage

Au moment de l’événement, les deux appels MAYDAY lancés par le capitaine sur le radiotéléphone VHF sont restés sans réponse. Conformément aux exigences, il y avait un radiotéléphone VHF-ASN à bord, mais celui-ci n’était pas installé correctement. Un message MAYDAY envoyé sur un radiotéléphone VHF-ASN correctement installé identifie automatiquement le bâtiment et son emplacement. Cette information aide les sauveteurs à atteindre le navire le plus rapidement possible Note de bas de page 22.

Il n’y avait pas de RLS à bord du bateau, et la réglementation n’exigeait pas la présence d’une telle balise. Après avoir lancé les deux messages MAYDAY qui n’ont pas été captés, l’équipage ne disposait d’aucun autre moyen de lancer un signal de détresse. En conséquence, il s’est retrouvé coincé pendant neuf jours avant d’être repéré par hasard. Un engin de sauvetage tel qu’un radiotéléphone VHF-ASN correctement installé et une RLS augmentent les chances de survie durant une urgence en mer.

Il y avait des combinaisons d’immersion, des gilets de sauvetage et un VFI à bord du bateau, mais ces articles étaient inaccessibles après le chavirement à cause de l’emplacement où ils étaient rangés. Les engins de sauvetage doivent être accessibles pour que les chances de survie soient meilleures durant une urgence en mer.

Gestion des ressources halieutiques

La longueur de la coque immergée du Pacific Siren respectait les restrictions relatives à la longueur mentionnées dans le permis délivré par le ministère des Pêches et des Océans (MPO); il devait toutefois y avoir une rallonge arrière servant à loger les 300 casiers à crevettes alloués au permis. Au moment de l’événement, il y avait environ 100 casiers sur la rallonge, ce qui rehaussait le centre de gravité du bateau. Le MPO n’exige pas que le bâtiment soit évalué en fonction de la fin prévue avant d’accorder le permis Note de bas de page 23. L’évaluation détaillée d’un bateau permet toutefois au propriétaire d’obtenir des renseignements précieux au sujet des limites relatives à la stabilité du bâtiment.

Les mesures de GRH créent un environnement concurrentiel qui risque d’influer sur le consentement d’un pêcheur à accepter certains risques afin d’optimiser les opérations de pêche. Dans le cas de l’événement en question, les activités entraînant un risque telles que le chargement de casiers sur la rallonge arrière, la navigation dans de mauvaises conditions météorologiques et l’exploitation sans équipement de sécurité bien installé ont mis l’équipage et le bateau en péril.

Coût de la sécurité

La réalité économique de la pêche, c’est que la plupart des propriétaires et des capitaines essaient de minimiser le coût et de maximiser le profit. Les coûts de pré-exploitation, le besoin de gagner sa vie et l’exploitation de la pêche à la crevette Note de bas de page 24 peuvent influer sur les décisions opérationnelles, ce qui entraîne l’acceptation de risques au détriment de la sécurité Note de bas de page 25.

Pour que le temps de pêche soit maximisé, le Pacific Siren a suivi la route la plus courte jusqu’à Cumshewa, ce qui a augmenté l’exposition du bateau aux vagues et au vent. En outre, le fait que le bateau ait appareillé de Prince Rupert sans le second appareil GPS signifie que le radiotéléphone VHF-ASN n’était pas installé de manière à fonctionner de la façon prévue, ce qui a retardé le sauvetage de l’équipage.

Dans le cas de l’événement en question, il y avait un manque de connaissance des limites du bateau et des effets que les conditions environnementales auraient sur celui-ci. En conséquence, les décisions opérationnelles visant à maximiser le nombre de jours de pêche excluaient les autres options, telles que le fait de suivre une route plus longue mais plus sécuritaire, le transport des casiers par camion jusqu’au lieu de pêche et le fait de s’assurer que tout l’équipement de sécurité était bien installé. Les décisions opérationnelles qui sont centrées sur la maximisation du nombre de jours de pêche peuvent avoir des répercussions négatives sur la sécurité du bateau et celle de l’équipage.

Renseignements sur la sécurité

Les bulletins de la sécurité des navires (BSN) sont le principal moyen utilisé par TC pour diffuser de l’information sur la sécurité. Le Ministère a publié les BSN 04/2006 et 15/2000, qui contenaient tous les deux des renseignements pertinents aux opérations du Pacific Siren. Le capitaine du bateau n’a ni reçu le BSN 04/2006 et le questionnaire sur la stabilité qui l’accompagnait ni cherché à se les procurer. Le bateau n’a jamais été évalué en fonction de ces facteurs de risque et le questionnaire du BSN n’a jamais été rempli. Le capitaine du Pacific Siren n’était pas au courant de l’existence du BSN 15/2000 et des risques pour la stabilité liés aux paravanes stabilisateurs. L’information sur la sécurité qui ne parvient pas au public cible met les bateaux et leur équipage en péril Note de bas de page 26.

Pratiques de travail sécuritaires

Le capitaine et l’équipage avaient déjà travaillé ensemble et connaissaient bien le bateau. Le capitaine n’avait toutefois remis à l’équipage aucune documentation sur les pratiques de travail sécuritaires, pas plus qu’il ne lui avait permis de se familiariser avec le bâtiment avant la pêche.

À bord du Pacific Siren, certaines pratiques de travail dangereuses étaient évidentes :

Les pratiques de travail dangereuses continuent de mettre les pêcheurs et leurs bateaux en péril Note de bas de page 27.

Interdépendance des questions de sécurité

La sécurité des pêcheurs est compromise par de nombreuses questions qui sont étroitement liées (annexe B). Les questions de sécurité mentionnées ci-après ont en commun une relation complexe et elles ont contribué à l’événement en question.

Les tentatives passées en vue de traiter ces questions de sécurité au cas par cas n’ont pas donné le résultat escompté, soit un milieu de travail sécuritaire pour les pêcheurs. L’EQS précise que pour qu’il soit possible de vraiment améliorer la sécurité de la pêche de façon durable, il est impératif que le changement ne concerne pas uniquement une seule des questions de sécurité en cause dans un accident, mais la totalité d’entre elles, et qu’il faut reconnaître l’existence d’une relation complexe et d’un lien étroit entre ces questions. La suppression d’une seule condition dangereuse peut prévenir un accident, mais elle ne réduit que légèrement le risque associé aux autres conditions.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. La répartition de la charge du Pacific Siren, alliée au déploiement des paravanes et à un effet de carène liquide, a rehaussé le centre de gravité du bateau.
  2. La route directe à travers le détroit d’Hecate a augmenté l’exposition du bateau au vent et aux vagues, ce qui a amené le bâtiment à donner assez de bande pour que le livet de pont soit submergé.
  3. La submersion du livet de pont a changé le centre de carène du bateau, ce qui, conjointement avec le rehaussement du centre de gravité du bâtiment, a réduit l’énergie de redressement à un point tel que ce dernier a été incapable de récupérer.

Faits établis quant aux risques

  1. La sécurité des pêcheurs sera compromise tant que la relation complexe et l’interdépendance entre les questions de sécurité n’auront pas été reconnues et traitées.
  2. Sans une évaluation détaillée de la stabilité, les décisions opérationnelles risquent de reposer sur des renseignements imprécis ou incomplets, au détriment de la sécurité.
  3. Les pêcheurs qui ne sont pas conscients des effets défavorables des paravanes stabilisateurs sur la stabilité du bateau mettent l’équipage et le bâtiment en péril.

Mesures de sécurité

Mesures prises

Cinq jours avant le chavirement du Pacific Siren, il y a eu un accident semblable impliquant le petit bateau de pêche à la crevette Jessie G Note de bas de page 28.

À la lumière de l’événement en question et de celui impliquant le Jessie G, la Pacific Prawn Fishermen’s Association (PPFA) a mis sur pied un comité de pêcheurs à la crevette qui avait pour mandat de collaborer avec les responsables du programme Fish SAFE à l’élaboration d’un code de pratiques exemplaires relatif à la pêche à la crevette. À la fin de 2012, le comité de la PPFA et les responsables du programme Fish SAFE s’étaient réunis une fois pour discuter des pratiques exemplaires relatives à la pêche à la crevette en Colombie-Britannique, les formuler et les documenter. Au début de 2013, le comité a préparé un code de pratiques exemplaires relatif à la pêche à la crevette, dont le conseil d’administration de la PPFA a approuvé la publication et la distribution aux pêcheurs. Le code de pratiques exemplaires a pour objet de traiter des pratiques de travail dangereuses qui continuent de mettre les pêcheurs, les équipages et les bateaux en péril.

Le présent rapport met un terme à l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le . Il est paru officiellement le .

Annexes

Annexe A — Secteur de l’événement

Annexe A — Secteur de l'événement
Annexe A — Secteur de l'événement

Annexe B — Conditions dangereuses et questions de sécurité connexes

Conditions dangereuses Questions de sécurité
Stabilité GRH Engins de sauvetage Formation Info. Coûts Pratiques de travail
Modifications apportées au bateau pour permettre plusieurs genres de pêche et le stockage d’engins de pêche, et respecter les restrictions relatives à la longueur mentionnées dans le permis X X X X X X
Modifications du bateau jamais approuvées ou consignées, malgré le BSN 01/2008 X X X X X
Dérive en raison du vent créé par des bâches tendues le long et en travers du pont principal X X X X
Participation à une pêche à laquelle le bateau ne convenait pas X X X X X X
Appel de détresse incomplet; aucun radeau de sauvetage, aucune RLS, aucun gilet de sauvetage ou plan de route X X X X X
Bateau exploité hors des limites de stabilité sécuritaires : aucune évaluation de la stabilité malgré le BSN 04/2006 X X X X X X
Pratiques de chargement d’engins de pêche ou d’équipement dangereuses : nombre excessif de casiers, rehaussement du centre de gravité X X X X X X
Route dans une direction qui augmentait l’exposition du bateau au vent et aux vagues X X X X X X