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Forger des liens et promouvoir la sécurité des transports, une enquête à la fois

Par Jean L. Laporte
Administrateur en chef des opérations, Bureau de la sécurité des transports du Canada

Cet article est d'abord paru dans l'édition d'automne 2013 du bulletin de l'Association canadienne des chefs de police.

Vers 1 h du matin, par une douce nuit d’été, un train de marchandises laissé sans surveillance sur une voie principale amorce une longue descente vers la paisible collectivité de Lac-Mégantic, au Québec. Composé de wagons-citernes remplis de pétrole brut, le train prend de la vitesse en raison de la pente, et sa course prend fin lorsqu’il déraille; plusieurs des wagons-citernes sont perforés, et une boule de feu meurtrière englobe le centre de la ville.

Les catastrophes n’observent pas d’horaire particulier. C’est pourquoi, lorsque le téléphone sonne au milieu de la nuit, le personnel du Bureau de la sécurité des transports du Canada doit être prêt à se mobiliser – peu importe l’heure et le lieu où l’on a besoin d’eux.

Depuis plus de 20 ans, les experts du BST ont enquêté sur des milliers d’événements sur nos plans d’eau, le long de nos pipelines ou de nos voies ferrées ou dans notre ciel, toujours avec le même objectif : promouvoir la sécurité en déterminant le fil des événements, les causes de l’incident et les mesures qui peuvent être prises pour éviter leur répétition. Durant cette période, nous avons collaboré étroitement avec les premiers intervenants aux sites d’accidents dans chacune des provinces et chacun des territoires, dans des villes grandes et petites, et dans de nombreux autres endroits.

Évidemment, les services de police sont parmi les premiers à arriver sur les lieux d’un accident, mais puisque chaque policier n’est peut-être pas familier avec le BST, l’une des premières tâches pour nos enquêteurs consiste à s’identifier aux intervenants sur les lieux. Nous leur expliquons nos objectifs, nos processus, les pouvoirs que nous confère la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports (BCEATST), et la manière dont nous pouvons tous faire notre travail côte à côte.

N’importe quel premier intervenant chevronné vous le dira : la coordination sur les lieux d’un accident est vitale, surtout lorsque la liste des « grandes priorités urgentes » peut paraître contradictoire. Bien entendu, il y a l’impératif de secourir les personnes en danger, de même que de sécuriser les lieux et d’éliminer les dangers, comme un incendie ou des matières dangereuses. Ensuite, les priorités varient en fonction de chaque description de tâche : protéger les éléments de preuve? Protéger l’environnement? Entreprendre à l’improviste le contrôle de la circulation? Évacuer les lieux? Répondre aux médias? Dresser une liste des témoins et commencer les interviews? Commencer à rétablir l’ordre des lieux et les activités normales?

En outre, plusieurs organismes – locaux, provinciaux et nationaux – se retrouvent sur les lieux d’accidents, surtout dans les cas d’accidents graves. Cela exige beaucoup de coordination, surtout lorsque plusieurs enquêtes sont menées en parallèle. Un chemin de fer ou un transporteur aérien, par exemple, peut décider de mener son propre examen interne d’un accident, tandis que le service de police détermine si l’on a posé des gestes criminels et que le médecin légiste établit la cause du décès des victimes.

Afin de garantir l’obtention des renseignements nécessaires, la Loi sur le BCEATST confère d’importants pouvoirs à nos enquêteurs, y compris la capacité d’arrêter les travaux sur les sites d’accidents, de limiter l’accès à ceux-ci, de réquisitionner les épaves, de contraindre les témoins à les rencontrer en interview, d’obtenir des mandats de perquisition ou d’exiger un examen médical. Cela dit, nous savons à quel point il est important de forger des liens; aussi nos enquêteurs s’appuient-ils fermement sur la règle des trois C : communiquer, consulter et coordonner. Plus particulièrement, cela signifie :

Nous avons aussi conclu qu’il est important de préciser ce que le BST ne fait pas. Nous n’attribuons pas de blâme et n’établissons pas de responsabilité. Nous ne sommes pas non plus un organisme de réglementation; nous n’avons ni le pouvoir de prendre des règlements, ni celui de contraindre les parties à les observer. Ainsi, il ne peut être fait usage de nos conclusions dans une procédure judiciaire, et les déclarations de témoins que nous recueillons demeurent strictement confidentielles. Il en va de même pour certains renseignements enregistrés, par exemple les enregistrements audio et vidéo de bord.

La raison de cette confidentialité est simple : elle nous permet de mieux faire notre travail. Les témoins peuvent dire ce qu’ils ont à dire, sans crainte de représailles ou d’accusations, pour que la sécurité soit la priorité.

Alors, qu’est-ce que tout cela signifie pour les hommes et les femmes qui doivent maintenir l’ordre dans notre vaste pays, dans les grandes et petites villes et autres localités, d’un océan à l’autre? Cela signifie que chaque fois que survient un accident maritime, ferroviaire, aérien ou de pipeline, vous nous croiserez peut-être sur les lieux de l’accident – tout comme plus tôt cet été lorsque nous avons répondu à la tragédie à Lac-Mégantic, au Québec. Nous sommes là pour enquêter sur les accidents, et tout comme vous, nous avons pour objectif la sécurité de tous les Canadiens. Espérons qu’en étant conscients les uns des autres et en travaillant main dans la main, nous ferons en sorte que toutes les parties en jeu reçoivent l’information qu’il leur faut, au bon moment et de la bonne façon, pour accomplir leur travail respectif et maintenir la sécurité au Canada.

Le BST est un organisme indépendant qui mène des enquêtes sur des événements maritimes, de pipeline, ferroviaires et aéronautiques. Son seul but est de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Pour obtenir de plus amples renseignements, consultez notre site Web à l’adresse www.bst-tsb.gc.ca.