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Rapport d'enquête ferroviaire R96C0172

Collision en voie principale
Canadien National
train numéro 117
et 20 wagons partis à la dérive
point milliaire 122,9, subdivision Edson
Prés d'Edson (Alberta)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Dans la soirée du lundi 12 août 1996, les trois hommes qui se trouvaient dans la cabine de la locomotive de tête du train de marchandises no 117 du Canadien National (CN) qui se dirigeait vers l'ouest ont subi des blessures mortelles quand le train qui filait à quelque 54 mi/h a heurté de plein fouet un groupe de 20 wagons partis à la dérive qui roulaient vers l'est à quelque 30 mi/h. L'accident est survenu à quelque 6 milles à l'est d'Edson (Alberta).

Les wagons partis à la dérive avaient été laissés sur une voie au triage Edson par une équipe qui avait serré les freins à main de deux wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement. L'équipe avait fait l'objet de peu de supervision permettant de s'assurer que les procédures de la Compagnie en matiére d'immobilisation des wagons étaient bien suivies. L'enquête a révélé que le rendement des freins à main de ce type de wagon présente une grande variabilité et que cette question de variabilité n'était pas bien connue. De plus, des composants des freins à main des deux wagons dont les freins à main avaient été serrés étaient manquants. L'équipe croyait que les wagons avaient été immobilisés, mais l'effort de freinage des freins sur les deux wagons n'a pas été suffisant pour empêcher les wagons de bouger. En conséquence, le groupe de 20 wagons s'est déplacé lentement vers l'est et a pris de la vitesse en se dirigeant vers la voie principale.

Un dérailleur servant à empêcher le matériel roulant non contrôlé de s'engager sur la voie principale à partir du triage Edson avait été enlevé vers 1990. Cette situation, qui présentait un danger, est passée inaperçue pendant plus de cinq ans. Les wagons partis à la dérive dont rien n'entravait la course se sont engagés sur la voie principale. À mesure que les wagons s'approchaient de Yates, des voyants lumineux reliés au circuit de voie se sont allumés sur le tableau du contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) à Edmonton. Toutefois, le CCF n'a pas vu tous ces voyants, et il n'avait reçu ni formation ni instructions spéciales qui lui auraient permis d'envisager cette situation comme un cas de dérive à cause des indications données par les voyants. Il n'y avait aucune alarme pour aider le CCF à reconnaître la situation comme un cas de dérive.

En conséquence, les membres de l'équipe du train 117 n'ont pas été prévenus que des wagons partis à la dérive se dirigeaient vers eux, et ils n'ont pas pu prendre de mesures pour éviter la collision frontale.

Des wagons ou du matériel roulant qui se déplacent sans être contrôlé sur la voie principale font courir de grands risques au personnel des trains, aux occupants des véhicules automobiles aux passages à niveau non protégés, ainsi qu'aux personnes, aux biens et à l'environnement lorsqu'il se produit une collision ou un déraillement à cause de ce matériel ferroviaire parti à la dérive. Le Bureau a déjà mené plusieurs enquêtes sur des cas de wagons partis à la dérive et avait alors fait des recommandations destinées à réduire les risques de dérive, mais le probléme n'a pas été règlé. De 1991 à 1996, le BST a enregistré 190 cas de dérive; 17 d'entre eux ont causé des collisions en voie principale, tandis que 5 ont occasionné des déraillements en voie principale. La collision survenue près d'Edson et qui fait l'objet du présent rapport s'est produite parce que des wagons ont été mal immobilisés, ce qui a motivé le BST à faire une enquête de grande envergure sur cet accident.

Au cours de l'enquête, le Bureau a découvert plusieurs problémes qui risquaient de compromettre la sécurité du réseau ferroviaire. Il est préoccupé par les six questions suivantes :

l'efficacité des procédures et des méthodes d'exploitation normalisées des chemins de fer pour l'immobilisation du matériel en vue de déterminer le nombre de freins à main qu'il faut serrer, la formation et la supervision relatives au personnel d'exploitation, ainsi que toute autre question spéciale qui peut être pertinente à certains endroits; l'efficacité du système de contrôle de la circulation ferroviaire pour détecter la dérive de wagons, tant sur le plan de l'ergonomie des affichages du poste de travail et des signaux d'avertissement que sur le plan des politiques, des procédures et de la formation en matiére de contrôle de la circulation ferroviaire;

la variabilité de l'efficacité des freins des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement en ce qui concerne la conception des freins à main et leur entretien et le fait que les employés de chemin de fer ne semblent pas connaître cette variabilité;

la valeur de la surveillance de la sécurité ferroviaire par l'organisme de règlementation et de l'habileté de cet organisme à évaluer dans quelle mesure les membres de l'industrie ferroviaire respectent les normes de sécurité nationales;

l'efficacité des programmes de gestion de la sécurité de la Compagnie de chemin de fer et dans quelle mesure ces programmes permettent d'assurer que les renseignements relatifs à la sécurité sont bel et bien communiqués;

la mesure dans laquelle les chemins de fer comptent sur la conformité rigoureuse aux règles, souvent comme seul moyen de protection contre l'erreur humaine.

Le Bureau constate que plusieurs mesures ont déjà été prises par le Canadien National et par Transports Canada et que d'autres sont envisagées en vue d'atténuer la probabilité de dérives dans ces secteurs. Si elles sont toutes prises, ces mesures devraient permettre de réduire les risques que des wagons partent à la dérive. Malgré les efforts considérables qui ont été déployés jusqu'ici, des mesures supplémentaires s'imposent si l'on veut réduire ou éliminer les dangers qui subsistent.

À cette fin, le Bureau a formulé deux recommandations; l'une d'entre elles vise à améliorer la compréhension du personnel sur la grande variabilité de l'efficacité des freins à main (notamment ceux des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement); l'autre vise à améliorer l'habileté de l'organisme de règlementation à bien évaluer l'habileté des chemins de fer à appliquer les normes de sécurité nationales.

De plus, dans ses enquêtes, le Bureau continuera d'évaluer l'efficacité des politiques, des procédures et des méthodes de surveillance des chemins de fer, et dans quelle mesure les chemins de fer sont capables de peser le rôle d'une conformité aux règles et la nécessité d'un système de sécurité à l'épreuve de l'erreur humaine.

1.0 Renseignements de base

1.1 L'accident

Train no 117 vers l'ouest

Le 12 août 1996, vers 23 h 30 HAR (heure avancée des Rocheuses), le train de marchandises no 117 (train 117) du Canadien National (CN), qui se dirige vers l'ouest à partir d'Edmonton (Alberta), file à quelque 54 mi/h sur la subdivision Edson du CN, et approche de Yates (Alberta). Le train mesure 4 850 pieds de long et pése quelque 5 370 tonnes. Il se compose de trois locomotives tirant 73 wagons à chargement mixte.

Le mécanicien est accompagné d'un chef de train et d'un passager qui a accepté de faire le trajet avec l'équipe de train. Les trois hommes sont dans la cabine de la locomotive de tête. Le passager n'avait pas reçu l'autorisation de monter à bord du train 117 de la compagnie de chemin de fer.

Wagons partis à la dérive vers l'est

Environ une demi-heure plus tôt, l'équipe du train 404 avait placé 20 wagons sur la voie 4, au triage Edson du CN, en Alberta. L'équipe se compose d'un mécanicien, d'un chef de train et d'un chef de train adjoint. Les wagons doivent être placés plus tard en tête du train 404 que l'équipe doit conduire jusqu'à Edmonton. Quatorze des 20 wagons sont chargés et six sont vides. Les 20 wagons mesurent environ 1 170 pieds de long et pésent quelque 1 950 tonnes.

La voie 4 accuse une pente d'environ 0,3 % vers l'est. Il faut donc serrer les freins à main pour empêcher les wagons de bouger. Lorsque l'équipe s'éloigne des wagons, elle a l'impression que les wagons sont stables et immobiles. L'équipe immobilise ensuite la locomotive sur la voie 13, puis elle retourne à la gare d'Edson pour attendre l'arrivée du train 404. Rien n'indique que quelqu'un d'autre travaille dans le triage, et l'équipe n'aperçoit aucune personne non autorisée. Les 20 wagons se dirigent lentement vers l'est sur la voie 4 où ils franchissent en accélérant l'aiguillage de voie d'accés est en direction de la voie principale sud.

À 23 h 12 min 43 s, un voyant passe au jaune sur l'écran d'affichage du tableau de commande du contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) de la subdivision Edson-est. Ce voyant s'est allumé quand les wagons partis à la dérive ont atteint le circuit de signalisation. Il s'agit du premier signe que quelque chose ne va pas. Les wagons partis à la dérive ont donné lieu à un ensemble d'indications à mesure qu'ils s'avançaient sur la voie principale sud vers Yates. Le CCF n'a remarqué aucune de ces indicationsNote de bas de page 1 jusqu'à ce qu'il discute (entre 23 h 17 min 25 s et 23 h 21) avec un contremaître de la voie qui se trouvait sur une voie d'évitement près de Yates et qui lui demandait un nouveau permis d'occuper la voie (POV). Le CCF pense alors que le voyant qu'il a vu allumé indique un signal défectueux ou une défectuosité de la voie et téléphone à un préposé à l'entretien des signaux comme l'exigent les directives de la Compagnie.

Le CCF demande qu'un préposé à l'entretien des signaux vérifie s'il y a un probléme, puis il vaque à ses autres occupations. Ce n'est que lorsqu'un autre CCF le prévient qu'il remarque que des voyants continuent de s'allumer (qui signifient que le groupe de 20 wagons sont partis à la dérive vers Yates). L'autre CCF ne conclut pas non plus qu'il s'agit d'un cas de wagons partis à la dérive.

Après avoir roulé sur l'aiguillage de voie d'accés est de la voie 4, les 20 wagons ont dévalé la pente vers l'est en direction de la voie principale. Un dérailleur qui empêchait les wagons partis à la dérive de s'engager sur la voie principale à partir du triage Edson a été enlevé vers 1990. Les 20 wagons non contrôlés s'engagent alors sur le prolongement de la voie sud, à Edson-est, et se dirigent vers l'est sur la voie principale sud, vers Yates.

La collision

Vers 23 h 31, le train 117 heurte de plein fouet les 20 wagons partis à la dérive qui proviennent du triage Edson. L'accident se produit au point milliaire 122,9 de la subdivision Edson du CN à Yates (à quelque six milles à l'est de la ville d'Edson). Les données consignées montrent que le train 117 filait à environ 54 mi/h juste avant l'accident et que l'équipe de train a serré le frein d'urgence quelques secondes avant la collision. Cela signifie que l'équipe de train a soit vu les wagons partis à la dérive ou l'aspect du signal rouge à Yates qui s'est allumé quand les wagons se sont engagés sur le circuit avant Yates. Les wagons filaient à un peu plus de 30 mi/h avant d'entrer en collision avec le train 117.

Les deux premiers wagons partis à la dérive se sont scindés en deux. Les trois wagons suivants ont déraillé et ont été lourdement endommagés. Les deux premiéres locomotives ont été détruites; la troisième a été réparée et remise en service plus tard. Trente et un des wagons plats articulés du train ont déraillé, dont 18 étaient endommagés au point qu'ils n'étaient pas réparables. Au moment de la collision, les réservoirs de carburant des deux premiéres locomotives se sont rompus, et le carburant a pris feu autour de la carcasse écrasée de la locomotive de tête. Les deux membres de l'équipe de train et le passager ont perdu la vie dans l'accident.

Figure 1: Vue du lieu de l'accident
Vue du lieu de l'accident

Après l'accident, le bureau des CCF à Edmonton a reçu un appel téléphonique de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) à Edson, qui signalait un énorme bruit près de Yates et un incendie sur les voies. Le CCF qui a répondu à cet appel a conclu qu'il y avait eu un déraillement. L'équipe du triage Edson a cru elle aussi qu'il y avait eu un déraillement lorsqu'elle a entendu un message d'urgence transmis par la radio de la locomotive.

1.2 Ordre chronologique des événements

L'annexe 1 donne l'ordre chronologique des événements ayant mené à la collision et des événements qui ont suivi la collision, au point milliaire 122,9 de la subdivision Edson.

Les sources d'information sont les suivantes :

Les heures fournies par les consignateurs d'événements et données dans le présent rapport, qui étaient en temps universel coordonné (UTC), ont été converties en HAR. Il a fallu effectuer ce calcul parce que l'horloge interne des consignateurs d'événements des locomotives du CN donne l'heure en UTC, ce qui permet aux locomotives de passer d'un fuseau horaire à un autre sans qu'il soit nécessaire de remettre les horloges des consignateurs d'événements à l'heure juste.

Lorsque le consignateur d'événements est téléchargé, l'heure indiquée par l'horloge de l'ordinateur et l'heure donnée par l'horloge du consignateur d'événements sont toutes deux consignées et imprimées. On peut préciser l'heure indiquée par le consignateur d'événements en comparant les deux heures.

Les horloges des enregistreurs vocaux des CCF et les horloges d'ordinateur de ces derniers sont réguliérement remises à l'heure elles aussi pour donner l'heure selon le fuseau horaire respectif (tous les jours lorsque les bandes sont changées). Cela fournit une source fiable permettant de comparer les interventions verbales des CCF, leurs interventions au tableau de commande et les faits relatifs à la circulation des trains (ces faits sont indiqués par le consignateur d'événements de la locomotive). Les horloges des enregistreurs vocaux des CCF et les horloges d'ordinateur sont remises à l'heure lorsqu'elles présentent une différence de plus ou moins 10 secondes.

1.3 Infrastructure ferroviaire

1.3.1 Voies

Le schéma de la figure 2 montre les voies ferrées les plus directement visées par l'accident. Il retrace le parcours des wagons partis à la dérive depuis la voie 4 du triage Edson jusqu'au point milliaire 122,9 (le point d'impact) de la subdivision Edson. Il montre également le parcours suivi par le train 117 à partir du triage Walker d'Edmonton ouest jusqu'au point d'impact, près de Yates.

Figure 2: Schéma des voies ferrées
Schéma des voies ferrées

1.3.2 Triage Edson

Le triage Edson est situé à environ 130 milles à l'ouest d'Edmonton, entre Edmonton et Jasper. Il couvre une superficie d'environ 7 500 pieds sur 1 200 pieds et est orienté d'est en ouest. Situé au sud de la principale route de la ville d'Edson, le triage est adjacent à cette route.

Jusqu'en 1995, le triage Edson servait de point de reléve aux équipes de train. Aujourd'hui, les équipes d'Edmonton et de Jasper font circuler la plupart des trains en passant par Edson. Les équipes basées à Edson sont essentiellement au service des commerçants de charbon et de ciment établis au sud-ouest dans les subdivisions Foothills et Mountain Park.

Figure 3: Vue du triage Edson
Vue du triage Edson

La figure 4 présente un schéma des voies du triage Edson.

Ce schéma n'existe pas en français.

Figure 4 : Schéma du triage Edson
Schéma du triage Edson

1.3.3 Abords du lieu de l'accident

Pour sortir du triage Edson, les voies de triage se dirigent vers l'est en présentant une pente descendante de 0,3 ou 0,4 % où elles rejoignent deux voies principales (nord et sud) qui sont régies par le système de contrôle du trafic ferroviaire connu sous le nom de commande centralisée de la circulation (CCC).

Figure 5: Vue de la voie aux abords de Yates (depuis le triage Edson)
Vue de la voie aux abords de Yates (depuis le triage Edson)

Les wagons partis à la dérive sur la voie 4 ont franchi l'aiguillage de la voie d'accés est de la voie 4 et ont roulé sur la voie d'évitement jusqu'au circuit de signalisation, puis sur l'aiguillage jusqu'au prolongement de la voie principale. Ils ont ensuite roulé sur la voie principale sud, en franchissant le point contrôlé d'Edson-est, entre les signaux du point milliaire 128,6 et du point milliaire 128,5, au-delà des signaux du point milliaire 126,4, puis franchi un passage à niveau au point milliaire 125,9 et une courbe de un degré au point milliaire 123,0, avant d'atteindre un branchement symétrique (no 20) et un signal du point milliaire 122,9, à Yates. À cet endroit, les voies ferrées sud et nord convergent en une seule voie principale à l'est, vers Edmonton. Cette voie est faite de longs rails soudés de 136 livres. On a observé que la voie était en bon état.

Le train 117 approchait du point d'impact, en provenance de l'est, sur la voie principale de la subdivision Edson à partir d'Edmonton. À l'ouest de la voie d'évitement de Wolf Creek (du point milliaire 119,72 au point milliaire 121,03) se trouve une courbe de un degré vers la droite entre le point milliaire 121,12 et le point milliaire 121,46. Elle offre une vue dégagée de l'aiguillage de Yates à partir du point milliaire 121,3 environ. La voie est faite de longs rails soudés de 136 livres. On a observé que la voie était en bon état. Dans le sens de la marche du train 117, la voie accuse une pente ascendante d'environ 0,5 % à partir de l'aiguillage ouest de Wolf Creek (point milliaire 121,03) jusqu'au point milliaire 122,0. La voie est ensuite en palier sur deux ponts situés au point milliaire 122,24 et au point milliaire 122,69. De cet endroit au point d'impact, la voie accuse une pente ascendante de 0,4 %. La vitesse maximum admissible sur cette voie pour les trains de marchandises ordinaires est de 50 mi/h. La vitesse maximum admissible pour un train express ou rapide (comme le train 117) est de 55 mi/h.

Figure 6: Vue de la voie aux abords de Yates (depuis la voie d'évitement de Wolf Creek)
Vue de la voie aux abords de Yates (depuis la voie d'évitement de Wolf Creek)

1.3.4 Trafic ferroviaire

La CCC régit la circulation des trains sur la subdivision Edson. Le CCF du bureau des CCF du triage Walker, à Edmonton, supervise la circulation.

En général, de 10 à 20 trains par jour circulent dans les deux sens sur la subdivision Edson, y compris trois trains de voyageurs qui y circulent chaque semaine. Le jour de l'accident, le trafic était de léger à normal, c'est-à-dire que de 10 à 15 trains circulaient dans chaque direction.

1.3.5 Circuits de voie et signaux

Les circuits de voie à l'est du triage Edson et en direction de Yates, sur la voie principale sud, comprenaient dans l'ordre : un circuit de signalisation de 227 pieds de long; un circuit de 650 pieds de long pour le point contrôlé, qui consistait en deux voies de liaison entre les voies principales nord et sud, et en quatre aiguillages à double commande; deux circuits de voie de 11 167 et de 17 944 pieds de long respectivement; ainsi qu'un aiguillage symétrique de 440 pieds de long au point contrôlé de Yates. À partir de l'est jusqu'au point d'impact, la voie principale simple avait des signaux et un type semblable de circuits de voie. Ces circuits étaient reliés au tableau de commande du CCF, où des voyants indiquaient que les circuits étaient occupés en passant au jaune. Avant la collision, les circuits de signalisation de voie fonctionnaient comme prévu. La figure 7 montre les circuits de voie et les signaux entre le triage Edson et la voie d'évitement de Wolf Creek.

Figure 7: Schéma des circuits de voie et des signaux
Schéma des circuits de voie et des signaux

1.3.6 Dérailleurs

Au moment de l'accident, il n'y avait aucun dérailleur le long du parcours suivi par les wagons partis à la dérive à partir de la voie 4 du triage Edson. On voyait toutefois les vestiges d'un dérailleur (notamment deux longues traverses de branchement et un poteau en métal qui a certainement pu servir de panneau indicateur de dérailleur quand le dérailleur était utilisable) à environ 2 400 pieds à l'est de l'aiguillage de voie d'accés est de la voie 4, au triage Edson. Ce dérailleur avait été installé pour empêcher les wagons partis à la dérive provenant du triage Edson de s'engager sur la voie principale, mais il avait été enlevé vers 1990.

En enlevant ce dérailleur du triage Edson, on a éliminé un dispositif de sécurité secondaire visant à protéger les trains circulant sur la voie principale de la subdivision Edson contre les wagons partis à la dérive du triage Edson. Cette situation dangereuse existait depuis plus de cinq ans au moment de l'accident.

La figure 8 montre l'emplacement de l'ancien dérailleur (à noter les deux longues traverses de branchement). Vue vers l'ouest.

Figure 8: Emplacement de l'ancien dérailleur
Emplacement de l'ancien dérailleur

1.4 Opérations ferroviaires

1.4.1 Train 351 : d'Edmonton à Edson

Après une bonne nuit de sommeil (ils s'étaient levés entre 7 h et 8 h) et une journée normale, le mécanicien, le chef de train et le chef de train adjoint ont été appelés au travail vers 14 h 45 le 12 août 1996, pour conduire le train 351 vers l'ouest jusqu'au triage Edson. Il ont quitté Edmonton entre 16 h 30 et 16 h 40, et ils sont arrivés au triage Edson environ quatre heures plus tard (à 20 h 40). Le train a croisé trois autres trains sur son chemin, et l'équipe n'a effectué aucune manoeuvre d'aiguillage en route. À son arrivée à Edson, l'équipe a été relevée à la gare d'Edson (adjacente au triage Edson), cédant ainsi la responsabilité du train 351 circulant vers l'ouest à une autre équipe. À ce moment-là, les membres de l'équipe qui arrivait d'Edmonton n'avaient pas dormi depuis 13,5 ou 14,5 heures.

Cette équipe devait effectuer des manoeuvres au triage Edson, et conduire le train 404 jusqu'à Edmonton. L'équipe a examiné une liste des manoeuvres à effectuer, a téléphoné au contrôleur en chef de la circulation ferroviaire (CCCF) et a obtenu la permission de reprendre le travail à 21 h 45, pour effectuer les manoeuvres avant départ. Des locomotives de manoeuvre étaient disponibles au triage Edson, et le train 404 ne devait arriver que deux heures plus tard. L'équipe a quitté le travail vers 21 h 30 et a repris son service vers 21 h 45. L'équipe n'a pas travaillé à bord d'un train et n'a utilisé aucun matériel entre 21 h et 22 h 15.

1.4.2 Manoeuvres au triage Edson

Le chef de train adjoint s'est rappelé qu'il s'attendait à faire certaines manoeuvres avant l'arrivée du train 404 au triage Edson, et que lui-même et les autres membres de l'équipe étaient prêts à le faire. Avant le départ d'Edmonton, le mécanicien avait été informé que le train 404 devait partir du triage Edson vers 23 h 45. Le chef de train adjoint avait estimé qu'il faudrait d'une heure à une heure et demie pour effectuer les manoeuvres nécessaires.

Le chef de train adjoint s'est souvenu en outre que l'équipe avait reçu la permission du CCCF de retirer une grue et un wagon de sécurité plutôt que de les ramener à Edmonton. Cela faisait plaisir à l'équipe parce que si l'équipe avait été obligée de revenir avec la grue, le train 404 aurait vu sa vitesse limitée à 25 mi/h. Le trajet de retour aurait été beaucoup plus long et il aurait peut-être fallu faire appel à une équipe de reléve pour ne pas dépasser le nombre d'heures de travail prescrit.

Les manoeuvres ont été effectuées avant l'arrivée du train 404 pour retarder le moins possible le départ du train du triage Edson. L'annexe 2 donne le détail des manoeuvres effectuées par l'équipe au triage Edson avant l'accident.

Au triage Edson, l'équipe devait entre autres dételer 20 wagons parmi ceux qui avaient été laissés sur la voie 8. Elle devait ensuite les amener sur la voie 4 pour les atteler au train 404. Ce sont ces wagons qui, par la suite, sont partis à la dérive et ont franchi l'aiguillage de voie d'accés est de la voie 4 et se sont engagés sur la voie principale vers Edmonton.

Le plan de base consistait à déplacer le matériel roulant à partir de l'est comme suit : faire passer la grue et le wagon de sécurité, ainsi que 2 wagons couverts, de la voie 8 à la voie 6; ramener les 2 wagons couverts vers la voie 8; amener les 2 wagons-couverts, 6 wagons-tombereaux et 12 wagons-trémies couverts à céréales depuis la voie 8 jusqu'à la voie d'accés. À partir de cet endroit, ces 20 wagons devaient être amenés sur la voie 4. L'ordre des wagons (d'ouest en est) était le suivant : les 6 wagons-tombereaux, les 2 wagons couverts et les 12 wagons-trémies couverts à céréales.

Le groupe de 20 wagons a été déplacé plus à l'ouest, puis immobilisé à 23 h 5 min 55 s, la locomotive remorquée est se trouvant à une distance d'une locomotive et demie à l'ouest de l'aiguillage de la voie d'accés est de la voie 4. Le wagon le plus à l'est était à quelque 160 pieds de l'aiguillage de la voie d'accés est.

1.4.3 Triage Edson : immobilisation des wagons

À 23 h le 12 août 1996, les conditions suivantes régnaient au triage Edson : température de 12 degrés Celsius et vents de l'ouest-nord-ouest de 6 km/h. Les nuages étaient dispersés, mais on pouvait voir de nombreuses étoiles. La lune était dans son quartier, et la visibilité était bonne. Le chef de train s'est rappelé avoir vu des étoiles dans le ciel et avoir senti une brise légére au moment de l'immobilisation des wagons.

1.4.3.1 Souvenirs du chef de train adjoint

Le chef de train adjoint s'est souvenu qu'il avait d'abord grimpé et serré le frein à main du deuxième wagon du groupe de 20 wagons. Le volant du frein à main était situé au bout B (bout frein à main) de ce wagon, et il a pensé que ce bout faisait face à l'est. Toutefois, les renseignements fournis par le scanner d'identification automatique du matériel du CN (IAM) ne corroborent pas les dires du chef de train adjoint.

Le scanner en question indique le lieu et l'heure du passage de matériel roulant au système informatique de repérage des wagons. Il peut signaler l'orientation des wagons à un moment donné. À Yates, le 10 août 1996, le scanner a déterminé que le wagon CNWX 109380, qui faisait partie d'un train circulant vers l'ouest, avait son bout B tourné vers l'ouest. En outre, les dommages qui ont été attribués à la collision donnent à penser que c'est le bout B du wagon qui faisait face à l'ouest puisque le bout A (bout opposé au frein à main) était plus endommagé que le bout B.

Le chef de train adjoint s'est souvenu que le frein à main du deuxième wagon parti à la dérive avait été serré «assez rapidement», et serré «à fond». Il s'est rappelé également qu'il avait serré le frein à main du wagon pendant que les wagons roulaient vers l'ouest. Il a ensuite serré le frein à main du wagon suivant (le premier du groupe, dont le bout B était orienté vers l'est, et immédiatement à l'ouest de la locomotive la plus à l'ouest) lorsque les wagons se sont arrêtés.

Le chef de train adjoint s'est rappelé que lorsque la locomotive s'est arrêtée, il pouvait voir les wagons qui s'étendaient vers l'ouest, et que le «jeu» des attelages entre les wagons s'est refermé au moment où il se tenait debout sur la plate-forme et où il serrait le frein à main du premier wagon derriére la locomotive. À cause de ce «jeu» entre les attelages des wagons, il n'était pas nécessaire de déplacer la locomotive vers l'ouest pour faciliter le dételage des locomotives des wagons immobiles (au moyen du levier de dételage du côté gauche du bout B du wagon).

Le chef de train adjoint s'est souvenu que le frein à main du wagon le plus à l'est avait une «longue chaîne», c'est-à-dire qu'il lui semblait qu'il devait faire faire plus de tours que la normale au volant du frein à main pour serrer le frein. Il s'est rappelé que par ailleurs le frein à main n'avait rien d'inhabituel comparativement à tous les autres qu'il avait serrés.

Il s'est souvenu qu'à un moment donné, il était passé entre les deux wagons.

Il s'est souvenu également que lorsque les locomotives ont été dételées, il avait dirigé le faisceau de sa lanterne sur la roue avant sud (probablement la roue gauche au bout B) du wagon le plus à l'est, pour s'assurer que celui-ci ne bougeait pas. Même s'il n'a pas prêté attention à la maniére dont les semelles de frein serraient les roues, il s'est rappelé qu'il était convaincu que la roue qu'il a regardée ne bougeait pas. Il a estimé en outre qu'il avait fallu trois ou quatre minutes pour tirer les deux locomotives vers l'est, à une certaine distance de la voie d'accés pour mettre l'aiguillage de la voie 4 en position renversée, puis pour circuler vers l'ouest sur la voie d'accés afin de libérer l'aiguillage.

1.4.3.2 Souvenirs du chef de train

Le chef de train n'a pas participé au serrage des freins à main du groupe de 20 wagons, et il n'en a serré aucun. Il s'est souvenu qu'il avait entendu le bruit de la roue à rochet d'un frein à main qu'on était en train de serrer (il se tenait alors debout à l'aiguillage de voie d'accés est de la voie 4, près de la locomotive dont le moteur tournait au ralenti). Il ne se rappelle pas pendant combien de temps la roue à rochet a fait du bruit.

Le chef de train s'est rappelé avoir vu dans l'ombre le chef de train adjoint qui se déplaçait à côté des wagons avec sa lanterne. Il a déclaré que celui-ci avait marché sur toute la longueur du wagon le plus à l'est.

1.4.3.3 Souvenirs du mécanicien

Le mécanicien s'est rappelé que les locomotives étaient à l'arrêt sur la voie 4, et qu'elles étaient restées là pendant 1,5 ou 2 minutes. Dans son esprit, c'était amplement de temps pour serrer les deux freins à main. Les meilleurs renseignements à la disposition du BST indiquent que les locomotives ont été arrêtées pendant 38 secondes (temps consigné).

1.4.3.4 Manoeuvres et observations

Les membres de l'équipe n'ont ni observé les semelles de frein ni déplacé les locomotives pour s'assurer que le frein à main exerçait un effort de freinage sur les 20 wagons qui se trouvaient sur la voie 4. Les membres de l'équipe ont déclaré qu'ils savaient que la compagnie de chemin de fer les obligeait à examiner les semelles de frein, mais ils ont affirmé qu'ils ne connaissaient pas trés bien cette exigence de la Compagnie qui leur avait été communiquée avec l'horaire no 4 du 28 avril 1996 et qui les obligeait à déplacer les wagons légérement pour vérifier si le frein à main exerçait un tel effort de freinage. Les changements de procédure apportés au Réglement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF), notamment à la règle no 112, ont paru dans des bulletins au moment de la délivrance de l'horaire no 4 aux employés.

Une fois les locomotives dételées, elles ont été déplacées vers l'est sur la voie 4, puis elles ont franchi l'aiguillage de voie d'accés est, en s'éloignant d'environ la moitié d'une longueur de locomotive. Le chef de train a mis l'aiguillage de voie d'accés est en position renversée, pour permettre aux locomotives d'être ramenées vers la voie 13, via la voie d'accés. Le chef de train adjoint se tenait à l'extrémité sud-ouest de la locomotive CN4019. Le chef de train se trouvait à l'extrémité nord-ouest de cette locomotive. Le chef de train et le chef de train adjoint ont tous deux dit qu'ils avaient dirigé le faisceau d'une lanterne sur les wagons à l'arrêt, lorsqu'ils sont passés à côté. Ils ont signalé que les wagons semblaient immobiles. L'équipe a commencé à se diriger vers la voie où elle allait laisser les locomotives, vers 23 h 7 (heure consignée).

Le chef de train adjoint s'est rappelé à quel point il était convaincu à ce moment-là que les wagons étaient immobilisés, car s'ils ne l'avaient pas été, ils seraient allés heurter les locomotives alors que celles-ci se déplaçaient vers l'aiguillage de voie d'accés est de la voie 4 et franchissaient cet aiguillage.

L'équipe a ramené les locomotives vers la voie 13 à quelque 10 mi/h. Après les avoir immobilisées, peu après 23 h 10, l'équipe est retournée à la gare d'Edson. Le mécanicien a fait venir des mets à emporter vers 23 h 20. Vers 23 h 35, il est retourné à la gare d'Edson. Peu aprés, l'équipe a pris la reléve de l'équipe du train 404, qui venait d'arriver à la gare d'Edson. Le train 404 a ensuite été déplacé vers le signal d'Edson-est, sur la voie 1, où il a été immobilisé. Le mécanicien a communiqué avec le CCF pour obtenir un signal de position d'aiguilles afin d'assurer la prise en charge à partir de la voie 4.

Le mécanicien s'est rappelé que le CCF semblait énervé et qu'il avait déclaré qu'il ne pouvait pas donner le signal demandé. Il s'est souvenu que le CCF lui avait dit que le train 117 avait reçu le signal à Yates, que trop de temps s'était écoulé, et qu'il ne savait pas ce qui se passait. À peu près au même moment, le préposé à l'entretien des signaux a signalé par radio qu'il pouvait voir un incendie à Yates.

Au triage Edson, les membres de l'équipe n'ont ni vu ni entendu personne dans le triage ou aux alentours lorsqu'ils ont effectué les manoeuvres ou ramené les locomotives. Ils ont mentionné qu'ils avaient déjà vu des vagabonds et des intrus non identifiés dans le secteur auparavant. L'enquête n'a rien révélé permettant de croire qu'il pourrait s'agir d'un acte de vandalisme ou de sabotage et n'a trouvé aucune raison permettant de penser que quelqu'un aurait délibérément desserré un frein à main. La chronologie des événements révéle qu'un vandale aurait eu moins d'une minute pour agir.

L'équipe qui a placé les wagons sur la voie 4 s'est rendue sur le lieu de l'accident à Yates. Elle a participé aux recherches pour retrouver l'équipe, a prêté main-forte aux premiers intervenants et est restée dans les environs du lieu de l'accident pendant plusieurs heures.

1.4.3.5 Heures de travail

Les membres de l'équipe de train ont déclaré qu'ils s'étaient levés entre 7 h et 8 h le 12 août 1996. Lorsqu'on les a appelés au travail à 14 h 45, on leur a confié la tâche de conduire le train 351 à Edson et le train 404 à Edmonton. On prévoyait un intervalle de quelque trois heures entre ces deux tâches.

Vu que le trajet de retour à Edmonton devait prendre environ quatre heures, le CCCF avait prévu que l'équipe terminerait le travail vers 4 h. L'équipe aurait alors été éveillée depuis 20 ou 21 heures.

Pour hâter leur départ, les membres de l'équipe ont choisi de profiter du temps entre leurs deux affectations pour déplacer les wagons (plutôt que de s'acquitter de cette tâche après l'arrivée du train 404 à Edson). Ils ont immobilisé les 20 wagons sur la voie 4 peu après 23 h. À ce moment-là, ils n'avaient pas dormi depuis 15 ou 16 heures. Le trajet de retour étant de quatre heures, ils seraient arrivés à Edmonton à 3 h, sans avoir dormi depuis 19 ou 20 heures.

1.4.4 Contrôle de la circulation ferroviaire

1.4.4.1 Déroulement des événements

Le CCF d'Edson-est s'est présenté au travail à 22 h le 12 août 1996. Il a dû immédiatement donner suite à un ordre de limitation de vitesse (10 mi/h) entre Wabamun et Gainford. Il s'est souvenu qu'il n'avait pas aimé la façon dont les trains étaient organisés et il les a placés d'une maniére qui lui permettait de mieux gérer le trafic. Il a commencé à faire des changements pour éliminer ce qu'il considérait comme de l'engorgement. Il a modifié un bulletin de marche (BM) relatif à un train quittant Edmonton parce que celui-ci n'avait aucun chargement exceptionnel. Il s'est souvenu que parce que les autres CCF étaient occupés, il avait quitté son poste pour leur parler afin d'obtenir l'autorisation d'effectuer les changements qu'il voulait. L'un des CCF était un nouveau; c'était un nouvel employé au poste de travail des bulletins de marche (souvent utilisé dans le cadre de la formation en milieu de travail et non dans le cadre d'une affectation au contrôle du trafic), et le CCF d'Edson-est a dû lui montrer comment apporter les changements qu'il voulait. Il a déclaré qu'il avait dû effectuer des tâches qui l'avaient obligé à quitter son poste de travail et à s'occuper de plusieurs choses à la fois.

L'équipe du train 404 relevée à Edson, a déclaré que vers 22 h 45, elle a demandé au CCF un signal de position d'aiguilles par radio, et qu'elle n'a pas reçu de réponse.

Le CCF a reçu, vers 22 h 50, un appel radio de l'équipe d'un train qui se trouvait à Leaman, au sujet d'un passage à niveau défectueux et il a eu des difficultés, c'est-à-dire qu'il n'a pas compris en quoi le passage à niveau était défectueux ni où il était situé. Peu aprés, l'équipe d'Edson a commencé à déplacer les wagons qui sont plus tard partis à la dérive sur la voie 4.

Vers 22 h 54, un contremaître a appelé le CCF pour lui demander un POV pour circuler sur la subdivision Edson, d'Edson-est à la voie d'évitement de Wolf Creek. Ce POV a été donné au contremaître pour lui permettre d'utiliser un véhicule d'entretien sur la voie principale et effectuer des travaux sur la voie dans ce secteur. Les signaux régissant la circulation des trains dans les limites proposées ont été «bloqués à l'arrêt», et le POV a été rendu définitif.

1.4.4.2 Après le déplacement des wagons

Le CCF a discuté d'un probléme de passage à niveau défectueux avec le Groupe de la signalisation et des communications du triage Walker. Vers 23 h 7, on lui a signalé qu'un train était en situation d'urgence sur la voie principale sud près de l'embranchement de Sundance. Le CCF a pris des mesures pour empêcher la circulation des autres trains et leur signaler la situation d'urgence. Il n'a terminé ce travail qu'à 23 h 15.

Pendant que le CCF s'occupait de la situation, les wagons partis à la dérive avaient roulé trés lentement sur la voie 4, accéléré pour franchir l'aiguillage de la voie d'accés est de la voie 4, puis déclenché le circuit de signalisation à l'ouest du point milliaire 128,6, à Edson-est. À 23 h 12 min 43 s, un seul voyant lumineux est passé au jaune sur le tableau du CCF parce que les wagons partis à la dérive avaient atteint le circuit de signalisation. Toutefois, le CCF n'a pas observé le voyant quand il est passé au jaune. C'était la premiére fois que le CCF aurait pu déduire que des wagons étaient peut-être partis à la dérive, sachant qu'un seul voyant lumineux qui s'allume peut également signifier une défectuosité du circuit de voie ou d'autres situations.

Pendant que le CCF essayait de résoudre le probléme sur l'embranchement de Sundance, les wagons partis à la dérive se sont engagés sur la voie principale sud au point contrôlé d'Edson-est, au point milliaire 128,6, vers 23 h 13 min 4 s. À ce moment-là, trois voyants étaient passés au jaune, ce qui signifiait l'occupation du circuit de signalisation et du circuit de point contrôlé de liaison. À 23 h 13 min 49 s, quatre voyants étaient allumés, ce qui signifiait que les wagons en question étaient entrés dans le canton commençant au point milliaire 128,5 et occupaient également les circuits de signalisation et de point contrôlé de liaison. Le CCF a dit qu'il n'avait pas vu ces indications. Le CCF n'avait reçu ni formation ni instructions spéciales du CN qui lui auraient permis d'envisager cette situation comme un cas de dérive.

À 23 h 14 min 23 s, le voyant du circuit de signalisation s'est éteint, ce qui voulait dire que le wagon le plus à l'ouest, parmi les wagons partis à la dérive, avait dépassé le circuit de signalisation. Toutefois, trois voyants étaient encore allumés. Ensuite, à 23 h 15 min 8 s, deux autres voyants se sont éteints, ce qui indiquait que les wagons partis à la dérive s'étaient éloignés du circuit de point contrôlé. Un seul voyant était encore allumé à ce moment-là. Le CCF n'a pas vu les voyants changer. De telles séquences d'allumage/d'extinction de voyants indiquent que du matériel roulant circule sur la voie.

1.4.4.3 Premiére constatation d'un probléme

Vers 23 h 17 min 25 s, le contremaître est arrivé à la voie d'évitement de Wolf Creek où il a constaté qu'elle était dégagée et il a envoyé un message radio au CCF pour annuler son POV et en obtenir un autre. Au cours de cette conversation, le CCF a remarqué pour la premiére fois qu'un voyant était passé au jaune sur son tableau. Il a déduit à juste titre qu'il s'agissait du voyant indiquant l'occupation du canton juste à l'est du point contrôlé d'Edson-est, au point milliaire 128,5. Il a déclaré qu'il y avait déjà eu auparavant un grand nombre de fausses alarmes dans le secteur d'Edson qui avaient fait passer les voyants au jaune.

Le CCF a déclaré que le premier voyant jaune qu'il avait vu n'indiquait pour lui qu'un autre canton hors d'usage. Il a expliqué que les cantons peuvent devenir inopérants pour plusieurs raisons, notamment à cause de la basse tension, d'un rail rompu ou d'une panne de courant sur la voie. On sait également que ces indications se produisent si des motoneiges franchissent les voies, si des intrus placent des barres métalliques sur les voies ou s'il y a une tempête. Le CCF a fait remarquer que si trois voyants avaient signalé un canton hors d'usage, cela aurait voulu dire que des wagons étaient partis à la dérive. Il a ajouté toutefois que sa connaissance des éléments techniques du système de signalisation n'était pas parfaite.

À peu près à la même heure, le CCF a demandé au contremaître, à la voie d'évitement de Wolf Creek, s'il y avait quelqu'un d'autre derriére lui sur la voie sud. Il s'est souvenu qu'il ne voulait pas annuler le POV du contremaître si tel était le cas. Le contremaître lui a expliqué que personne d'autre ne travaillait dans le secteur. Leur conversation a pris fin vers 23 h 21, et le CCF a alors téléphoné au Groupe de la signalisation et des communications pour parler à un préposé à l'entretien des signaux, à cause du canton défectueux indiqué sur son tableau. Il a fait cet appel environ 10 minutes avant la collision et 15 ou 16 minutes après que les wagons partis à la dérive eurent été laissés à l'arrêt sur la voie 4, au triage Edson.

Ensuite, il y a eu une conversation entre le CCF et un employé du Groupe de la signalisation et des communications au sujet du voyant qui était passé au jaune, et du lieu possible du probléme. Ils ont convenu qu'un préposé à l'entretien des signaux examinerait la situation (le probléme était censé être aux alentours du point milliaire 128).

Vers 23 h 23, le CCF a répondu à un autre appel d'une personne qui voulait des précisions sur le lieu du probléme. L'appel provenait vraisemblablement du Groupe de signalisation et des communications. Le CCF a expliqué que le canton problématique était le premier à l'est du point contrôlé d'Edson-est, sur la voie sud. À peu près à la même heure (23 h 23 min 31 s), les wagons partis à la dérive ont pénétré dans le canton entre le point milliaire 126,4 et le point milliaire 123,0. Deux autres voyants s'étaient allumés, ce qui signifiait qu'il s'agissait d'une occupation de la voie, ce qui n'a pas été observé par le CCF.

Le tableau d'affichage de voie est équipé de trois voyants entre le point contrôlé d'Edson-est et le point contrôlé de Yates, sur la voie sud. Un voyant est relié au premier circuit de voie, à l'est du point contrôlé d'Edson-est, et les deux autres sont reliés au circuit de voie est suivant. Pendant que le CCF expliquait où était le lieu du probléme, les voyants ont changé successivement de couleur, ce qui indiquait de nouveau une circulation. Le CCF n'a pas observé cette série de changements.

Lorsque le wagon parti à la dérive le plus à l'ouest est passé au point milliaire 126,4, vers 23 h 24 min 5 s, seuls les deux voyants relatifs au canton concernant le tronçon du point milliaire 126,4 au point milliaire 123,0 ont été consignés comme étant passés au jaune. Le CCF n'a pas observé ces changements.

1.4.4.4 Après le passage du train 117 à Wolf Creek

La locomotive de tête du train 117 a franchi l'aiguillage est, à Wolf Creek, environ trois minutes et demie avant la collision. Les deux voyants qui étaient passés au jaune à 23 h 27 min 49 s sur le tableau du CCF indiquaient que le train 117 passait à côté de la voie d'évitement de Wolf Creek. À 23 h 29 min 8 s, le tableau a indiqué que la locomotive de tête venait de franchir l'aiguillage ouest de la voie d'évitement de Wolf Creek, et les voyants ont montré également que le canton entre cet aiguillage et le point milliaire 122,9 était occupé. Le CCF n'a pas vu ces voyants.

À 23 h 30 min 1 s, soit environ une minute avant la collision, le CCF a reçu un appel radio du contremaître, à la voie d'évitement de Wolf Creek. Le contremaître demandait un autre POV qui lui permettrait de pénétrer de nouveau sur la voie principale à partir du secteur ouest de Wolf Creek, et de travailler entre les aiguillages de la voie d'évitement de Wolf Creek. Le CCF a émis le permis en question mais il ne l'a pas complété. Le CCF a dit au contremaître (relativement au train 117) qu'il (le contremaître) allait devoir attendre que la queue du train soit passée à Yates (ce qui prendrait environ 30 secondes) avant que le CCF mette la derniére main au POV devant autoriser le contremaître à pénétrer de nouveau sur la voie principale à l'aiguillage situé à l'ouest de la voie d'évitement de Wolf Creek. À peu près à la même heure, le CCF a remarqué que deux voyants étaient passés au jaune sur son tableau, relativement au canton suivant situé à l'est de l'endroit où il avait tout d'abord signalé la défaillance de canton, et que le voyant du canton dont il avait signalé la défaillance était maintenant éteint. Il n'a pas attribué ce changement à des wagons partis à la dérive.

1.4.4.5 Observations du contrôleur de la circulation ferroviaire d'Edson-ouest

Vers 23 h 24, le CCF d'Edson-ouest s'est présenté au poste de travail de son collégue d'Edson-est pour vérifier si le train 117 circulait comme prévu puisqu'il allait bientôt pénétrer dans son territoire. Il a remarqué le voyant allumé relié au circuit de voie juste à l'est du point contrôlé, à Edson-est, puis observé que les deux voyants du circuit de voie suivant passaient au jaune et que le voyant précédent s'éteignait. Il n'a pas réalisé que cette séquence indiquait l'occupation non autorisée d'un canton à cause de la circulation de wagons. Il a plutôt fait remarquer au CCF d'Edson-est que des vandales étaient probablement en train de court-circuiter le système de signalisation. Cette observation a renforcé l'opinion initiale du CCF d'Edson-est que les voyants indiquaient un probléme de voie ou de signalisation.

1.4.4.6 Après la collision

Vers 23 h 34, soit trois minutes après la collision, le CCF a dit au contremaître à Wolf Creek que le train 117 était un peu lent. Le contremaître lui a alors demandé s'il avait règlé le probléme à la voie sud, et le CCF lui a répondu qu'il y avait encore un probléme.

Vers 23 h 35 ou 23 h 36, le CCF a fait observer au contremaître que le train semblait s'être arrêté, et qu'il ne savait pas quel était le probléme. Le CCF a indiqué que tout laissait croire que la CCC ne fonctionnait plus depuis Yates, et qu'il ne pouvait pas confirmer que le train était passé.

La communication entre l'ordinateur du CCF et les installations sur le terrain à Yates (le tableau indiquait «in monitor») était interrompue. Cela correspondait au fait que la guérite de signalisation de Yates avait été détruite dans l'accident.

Peu aprés, une agente de la GRC à Edson a téléphoné au chef de corridor, au bureau du contrôle de la circulation ferroviaire, pour lui annoncer qu'elle avait reçu trois appels téléphoniques à l'effet qu'un train avait été entendu dans le secteur d'Edson ainsi qu'un bruit d'explosion. Le chef de corridor a parlé au CCF, qui a téléphoné au train 117, mais sans obtenir de réponse. Le CCF a dit qu'il pensait qu'il y avait eu un déraillement. Plus tard, l'agente de la GRC a téléphoné de nouveau pour confirmer qu'un accident s'était produit et qu'un incendie faisait rage.

Après un certain nombre d'appels radio au train 117, qui sont restés sans réponse, le CCF a appelé le contremaître à la voie d'évitement de Wolf Creek, à 23 h 41, et lui a dit qu'il croyait qu'il y avait eu un déraillement à Yates.

À 23 h 42, un préposé à l'entretien des signaux a appelé le CCF pour demander la permission de se rendre sur la voie, au point milliaire 126, afin de faire le point sur le «probléme de canton» déterminé précédemment. À 23 h 46, il a accepté de vérifier s'il y avait eu un accident à Yates.

À 23 h 50, l'équipe d'Edson (qui avait laissé les 20 wagons sur la voie 4) a demandé un signal de position d'aiguilles au triage Edson. Le CCF a expliqué qu'il y avait un probléme à Yates et a demandé à l'équipe de rester où elle était.

Vers 23 h 52, le préposé à l'entretien des signaux a appelé le CCF pour lui annoncer qu'un incendie faisait rage à Yates et que la guérite de signalisation avait été détruite.

Vers 0 h 2, le 13 août 1996, le CCF a appelé l'ingénieur de district pour lui dire qu'il croyait que des wagons avaient quitté Edson sur la voie sud et étaient allés heurter un train à Yates, car le préposé à l'entretien des signaux pouvait voir des wagons-tombereaux sur la voie sud, à l'ouest de l'incendie qui faisait rage à Yates.

Plus tard, à 0 h 24, en discutant avec le préposé à l'entretien des signaux, le CCF a dit que lorsqu'il avait téléphoné pour la premiére fois au Groupe de la signalisation et des communications pour faire venir quelqu'un, le premier canton à l'est d'Edson-est, sur la voie sud, était hors d'usage; il est tombé soudainement, puis, après sa conversation avec le Groupe de la signalisation, pour faire venir un préposé, ça avait été au tour du deuxième canton, puis celui du canton suivant le long de la voie. Le préposé à l'entretien des signaux a répondu que c'était comme s'il s'agissait d'un train. En se remémorant la situation, le CCF a dit qu'il s'était finalement rendu compte que le voyant jaune du tableau indiquait que des wagons à la dérive avaient quitté le triage Edson.

Le CCF d'Edson-est a expliqué ce que les voyants voulaient dire pour lui. Il a dit qu'en général lorsqu'un train quitte le triage Edson et se dirige vers l'est, trois voyants s'allument simultanément sur son tableau. Cette fois-ci, il n'en avait vu qu'un seul d'allumé. Il a dit qu'il ne savait pas qu'on effectuait des manoeuvres au triage Edson dans la soirée de l'accident et qu'il ne savait pas non plus que le dérailleur avait été enlevé. D'ailleurs, il avait travaillé au triage Edson bien avant qu'on enléve le dérailleur. Le CCF d'Edson-est n'est normalement pas au courant des manoeuvres effectuées au triage Edson à moins que les manoeuvres exigent l'utilisation du point contrôlé à Edson-est.

Le CCF est resté à son poste jusqu'à la fin de sa période de travail et s'est acquitté de ses tâches suivant les besoins.

1.4.5 Train 117

Vers 23 h 6, le train 117 traversait Niton, à 23 milles à l'est de Yates. Vers 23 h 10, il se trouvait entre Niton et Peers, et filait à 54 mi/h, la manette des gaz étant à la position 8. Vers 23 h 12, il a réduit sa vitesse pour se conformer à un ordre de limitation de vitesse, au point milliaire 105,4. À 23 h 17, sa vitesse est remontée à 55 mi/h, au moment où il traversait Peers, au point milliaire 109,8.

En approchant de Wolf Creek, à 23 h 25, le train était à environ cinq milles de Yates. Vers 23 h 29, il passait à Wolf Creek à une vitesse de 55 mi/h, la manette des gaz étant à la position 8. À 23 h 31 min 8 s, il circulait à 54 mi/h, la manette des gaz étant à la même position, lorsque le frein d'urgence a été serré. Le consignateur d'événements de la deuxième locomotive (CN9575) indique que le train s'est arrêté à 23 h 31 min 18 s, environ 25 minutes après que les 20 wagons eurent été laissés à l'arrêt sur la voie 4, au triage Edson.

1.4.6 Passager non autorisé

Le chef de train du train 117 avait invité une de ses connaissances à voyager à bord de la cabine de la locomotive de tête. La Compagnie n'était pas au courant de cette invitation et n'avait pas autorisé cette personne à voyager à bord du train 117.

1.5 Dommages

La collision a eu lieu aux environs de Yates. Le secteur mesure environ 700 pieds de long sur 200 pieds de large et est bordé au nord et au sud par une forêt d'épinettes. À quelque 200 verges à l'est, un pont ferroviaire enjambe la riviére McLeod.

1.5.1 Train 117

Les deux locomotives (CN9627 et CN9575) placées à la tête du train 117 ont été détruites. La troisième locomotive (CN9508) a été réparée et remise en service. Le consignateur d'événements de la premiére locomotive a été détruit dans la collision et l'incendie qui a suivi. Les consignateurs d'événements de la deuxième et de la troisième locomotives ont été récupérés et téléchargés. Rien n'indique que l'une ou l'autre de ces deux locomotives présentait un mauvais fonctionnement avant l'accident.

Au moment de l'impact avec le bout B du premier wagon parti à la dérive, l'avant de la locomotive de tête CN9627 a été enfoncé et s'est retrouvé dans la cabine. La locomotive s'est couchée sur le côté droit, la cabine se trouvant alors près du réservoir de carburant rompu. L'incendie qui a suivi a consumé la caisse défoncée de la locomotive. La locomotive CN9627 s'est détachée de ses bogies et a perdu son moteur diesel et son réservoir de carburant quand elle a été projetée vers le sud. La locomotive CN9575 a déraillé au nord après avoir heurté le deuxième wagon parti à la dérive qui a déraillé lui aussi au nord.

Figure 9: Dommages à la locomotive de tête
Dommages à la locomotive de tête

Au moment de l'impact, les deux bouts du capot moteur des deux premiéres locomotives se sont détachés, et la deuxième locomotive s'est engouffrée sous la locomotive de tête. Le deuxième wagon parti à la dérive a heurté la deuxième locomotive au moment où celle-ci se couchait sur le côté.

Figure 10: Dommages à la deuxième locomotive
Dommages à la deuxième locomotive

La troisième locomotive, immobilisée soudainement par le choc, est restée sur ses roues et a pénétré de force dans la plate-forme de la voie, sur le bout de son capot moteur.

Du gazole a fui parce que les réservoirs de carburant des deux premiéres locomotives ont été perforés dans la collision. En plus d'alimenter le feu, le carburant a contaminé le sol à proximité du lieu de l'accident. Le sol contaminé a été enlevé par la suite.

Trente et un wagons plats articulés ont déraillé juste derriére les locomotives du train 117. La figure 11 montre les dommages importants qu'ont subis ces wagons. Rien n'indique qu'il y ait eu un mauvais fonctionnement de ces wagons avant l'accident.

Figure 11: Dommages aux wagons du train 117
Dommages aux wagons du train 117

1.5.2 Wagons partis à la dérive

Les 5 premiers des 20 wagons partis à la dérive ont déraillé et ont été lourdement endommagés. Les deux premiers wagons étaient essentiels pour l'enquête, car ce sont ceux dont le frein à main était censé avoir été serré. Les mécanismes d'engrenage de frein à main des deux premiers wagons, identifiés grâce aux marques correspondant aux dommages, aux échantillons de sol et aux déclarations des témoins ont été envoyés au Laboratoire technique du BST. En plus des deux mécanismes d'engrenage de frein à main, cinq essieux montés des deux premiers wagons (identifiés en comparant les numéros de roue avec les dossiers de maintenance, et en comparant les numéros de roue avec les numéros des coussinets avec garniture et les marques témoins) ont également été envoyés au Laboratoire technique.

Ces deux wagons se sont fendus en deux sous le choc, et leurs débris ont été éparpillés sur une superficie de 20 000 à 30 000 pieds carrés.

Les figures 12 et 13 montrent ce qui reste du premier wagon (CNWX 109099) et du deuxième wagon (CNWX 109380) partis à la dérive.

Figure 12: Restes du premier wagon (wagon de tête) parti à la dérive
 Restes du premier wagon (wagon de tête) parti à la dérive
Figure 13: Restes du deuxième wagon parti à la dérive
Restes du deuxième wagon parti à la dérive

Ces wagons mesurent 59 pieds de long, ils ont un poids à vide de quelque 62 000 livres et un poids de charge d'environ 263 000 livres. Ce type de wagon a été conçu par les chemins de fer pour le transport des céréales au Canada. Trois fabricants de wagons construisent ce type de wagon au Canada : la National Steel Car de Hamilton (Ontario); la Marine Industries de Sorel (Québec) et la Hawker Siddeley de Trenton (Nouvelle-Écosse). Ces wagons ont été construits par trois entreprises, mais leur conception de base n'est pas différente d'un constructeur à un autre.

Ces wagons ont été mis sur le marché pour la premiére fois au début des années 70. On en compte quelque 19 000 à l'heure actuelle. Ils ont en moyenne 17 ans, la trés grande majorité d'entre eux étant âgés de 7 à 24 ans. L'Amérique du Nord compte plus de 250 000 wagons-trémies couverts de toutes sortes. En 1994, le gouvernement fédéral a acheté 83 autres wagons-trémies couverts à céréales.

Ces wagons appartiennent au gouvernement fédéral et sont conçus pour être utilisés par le CN et le CP. Leurs numéros d'identification permettent de savoir à qui ils sont affectés. Les wagons en service au CN appartiennent à la série CNWX 100000 à CNWX 112999, et à la série CNWX 395000 à CNWX 396999.

1.5.3 Voie

Environ 430 pieds de voie ont été endommagés à Yates, sur le branchement symétrique et sur l'unique voie principale en direction est, où les wagons du train 117 se sont empilés. Un réservoir de propane d'une capacité de 1 000 gallons pour le réchauffeur d'aiguilles à double commande, situé juste au nord de l'aiguillage, a subi des dommages minimes et n'a pas laissé échapper son produit, mais les aiguilles et les traverses de branchement sous le branchement symétrique, au point milliaire 122,9, ont dû être remplacées. Rien n'indique que les rails, la plate-forme, le ballast ou tout autre élément de la voie présentaient une anomalie avant l'accident.

1.5.4 Circuits de voie et signaux

Le mât et la guérite de signalisation de la CCC, à Yates, ont été tellement endommagés qu'ils n'étaient pas réparables. Le scanner d'identification automatique du matériel a été détruit.

1.6 Employés principaux - Expérience, qualifications et aptitudes

1.6.1 Le chef de train adjoint (Edson)

Le chef de train adjoint au triage Edson est entré au service du CN le 6 juin 1984 en qualité d'agent de train/agent de triage. Le 12 janvier 1987, il a été promu chef de train/contremaître. Le 24 août 1992, il est devenu mécanicien. Son dernier examen médical remontait au 22 décembre 1995, date à laquelle il avait été jugé apte au travail.

Le 9 août 1996, il a travaillé à bord d'un train jusqu'à Wainwright, puis il est rentré à Edmonton dans un autre train; il a quitté le travail à 2 h 40 le 10 août. Après une nuit de sommeil normale, il a passé la journée avec sa famille. Il a repris le travail le 11 août, date à laquelle il a travaillé à bord d'un train jusqu'à Edson; il est revenu à Edmonton en taxi et il a quitté le travail à 14 h 15. Il a passé une nuit de sommeil normale. Il a été appelé au travail vers 14 h 45 le 12 août pour travailler à bord du train 351 jusqu'à Edson.

1.6.2 Le chef de train (Edson)

Le chef de train au triage Edson est entré au service du CN le 4 juillet 1977 en qualité d'agent de train/agent de triage, et il a été promu chef de train/contremaître le 31 juillet 1979. En août 1982, il est devenu mécanicien.

Le service médical du CN l'a déclaré apte à exercer des fonctions normales le 17 juillet 1996.

Après plusieurs semaines de vacances, le chef de train a repris le travail le 10 août 1996, après quoi il est resté chez lui où il a attendu qu'on le rappelle au travail. Il s'est couché vers 22 h. Il a reçu un appel à 6 h 45 le 11 août lui demandant de se rendre en taxi à Wainwright pour travailler à bord d'un train à destination d'Edmonton. Après être arrivé au triage Walker, il a quitté le travail à 16 h 30. Il a déclaré qu'il s'était couché tôt le 11 août et qu'il s'était réveillé frais et dispos le lendemain. Ce jour-là, vers 14 h 45, on lui a demandé d'aller travailler à bord du train 351.

1.6.3 Le mécanicien (Edson)

Le mécanicien au triage Edson est entré au service du CN le 22 mai 1975 en qualité d'agent/opérateur et a travaillé à ce titre en divers endroits de la Saskatchewan et du Manitoba. Le 7 juillet 1978, il a été engagé comme agent de train/agent de triage et a travaillé à ce titre un peu partout dans l'Ouest canadien jusqu'en juillet 1982, date à laquelle il a déménagé à Prince Rupert (Colombie-Britannique). Le 8 avril 1982, il est devenu mécanicien et a travaillé à ce titre en Alberta et en Colombie-Britannique. En avril 1987, il a été nommé chef mécanicien à Prince George (Colombie-Britannique) après avoir suivi le programme de stages. En avril 1988, il a été muté à Edmonton, dans le même poste. Le 31 décembre 1991, il a été nommé directeur du Service des trains et locomotives, poste qu'il a occupé jusqu'au 2 octobre 1993, date à laquelle il est redevenu mécanicien; son terminal d'attache était Edmonton.

Son dernier examen médical remontait au 27 septembre 1994, date à laquelle il avait été jugé apte au travail.

Il n'a pas exercé ses fonctions pendant la fin de semaine ayant précédé l'appel lui demandant de reprendre le travail à bord du train 351, appel reçu vers 14 h 45 le 12 août 1996. Il avait passé une nuit de sommeil normale le 11 août 1996.

1.6.4 Le contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) (Edson-est)

Le CCF d'Edson-est est entré au service du CN le 23 mai 1980 en qualité de commis de triage à Jasper où il a occupé divers postes. Jusqu'au 2 mai 1988, il a travaillé comme opérateur à Jasper et ailleurs en Alberta, jusqu'à ce que son poste soit aboli en 1990. Il a ensuite travaillé comme commis au mouvement des trains à Biggar et à Edmonton, puis, le 6 janvier 1991, il est devenu contrôleur stagiaire à Edmonton. Après sa formation de contrôleur le 15 juin 1992, il a commencé à travailler à titre de CCF au bureau des CCF d'Edmonton.

Son dernier examen médical remontait au 14 novembre 1995, date à laquelle il avait été jugé apte au travail.

Il a travaillé au poste de travail de la subdivision Edson-est de 23 h à 7 h, du 2 au 12 août. Le lundi 12 août, il a dormi de 11 h à 20 h. Il a pris un repas vers 21 h et s'est présenté au travail à 22 h (une heure à l'avance par suite d'un accord conclu au préalable avec un collégue).

1.7 Tests de dépistage

Le 20 août 1996, soit huit jours après l'accident, le CN a fait subir des tests de dépistage de drogues au chef de train, au chef de train adjoint et au mécanicien. Le 22 août, soit 10 jours après l'accident, le CN a fait subir ce genre de tests au CCF d'Edson-est. Les tests d'urine ont été effectués sous la direction du médecin chef du CN et visaient à déceler la présence de cocaïne, d'opiacés, de cannabis, d'amphétamines et de phencyclidine (PCP). Les résultats de ces quatre tests de dépistage ont été négatifs.

1.8 Sécurité et supervision

1.8.1 Responsabilités en matiére de sécurité

La section 8.0 des Régles de sécurité du CN, tirée des Instructions générales d'exploitation de la Compagnie, stipule les responsabilités des membres de la direction, des superviseurs et des membres du personnel en matiére de sécurité. On y trouve cet énoncé primordial :

Il incombe à tous les directeurs, superviseurs et employés du CN de créer et de maintenir un milieu de travail sûr et sain.

Les responsabilités des membres de la direction sont les suivantes :

Fournir l'information, les instructions et la formation nécessaires aux membres du personnel; assurer la supervision voulue pour que leurs subordonnés oeuvrent dans un milieu sûr et sain (...) Faire en sorte que (...) le matériel (...) dont se servent leurs employés satisfasse aux normes de sécurité prescrites et puisse être utilisé en toute sécurité dans les diverses conditions d'emploi. Nommer du personnel compétent pour superviser les employés.

Les responsabilités des superviseurs sont les suivantes :

Veiller à ce que tous leurs subordonnés se conforment aux méthodes, aux normes et aux pratiques de travail sécuritaires; donner au besoin des instructions précises concernant la sécurité (...) On ne doit, à aucun moment, compromettre la sécurité au profit de la vitesse (...) Avoir une connaissance adéquate des règles et lignes de conduite portant sur la sécurité dans leur domaine de responsabilité...

Les responsabilités des membres du personnel sont les suivantes :

S'acquitter des tâches prescrites conformément aux instructions reçues et aux méthodes et pratiques approuvées (...) Comprendre toutes les règles (...) et s'y conformer. Travailler de façon à ne pas : se mettre en danger ou mettre d'autres personnes en danger; se blesser ou blesser quelqu'un d'autre; endommager les biens de la Compagnie...

1.8.2 Supervision

1.8.2.1 Rapports hiérarchiques

En 1990, il y avait deux coordonnateurs de train à Edson, chargés de surveiller le personnel d'exploitation dans le triage Edson ainsi que dans les subdivisions Edson, Foothills et Mountain Park. À cette époque, des coordonnateurs de triage et des préposés au contrôle de train assuraient la surveillance du triage. Au moment de l'accident, il n'y avait plus qu'un coordonnateur de triage au triage Edson; il travaillait de jour cinq jours par semaine. Les fonctions de surveillance ont été transférées à Jasper en 1990.

Le jour de l'accident, personne n'encadrait directement l'équipe de train au triage Edson. En vertu de la règle 106 d) du REF, les chefs de train et les mécaniciens sont responsables de la sécurité des trains ou du matériel roulant qui leur sont confiés, ainsi que de l'application du règlement. Le triage était exploité avant tout comme gare de passage. Dans le secteur, les équipes de train avaient été placées sous la supervision d'un coordonnateur de trains en poste à Jasper (à 104 milles de là). Les organigrammes du CN pour le district du sud de la Colombie-Britannique et celui de l'Alberta figurent à l'annexe 3. On y trouve les relations hiérarchiques pour 1990 et 1996.

Le triage Edson était entretenu par un contremaître d'entretien de la voie et une équipe d'entretien de la voie qui relevaient d'un superviseur de la voie à Edson. L'organigramme de l'ingénierie (services techniques) du CN pour le district du sud de la Colombie-Britannique figure à l'annexe 4, qui indique les relations hiérarchiques pour 1990 et 1996.

1.8.2.2 Bureau de contrôle de la circulation ferroviaire

Le CCF d'Edson-est relevait du contrôleur en chef (CCCF), qui rendait compte pour sa part au chef de corridor, à Edmonton. Ce dernier avait sous sa responsabilité 24 CCF. Le CCF et le CCCF travaillaient tous deux à Edmonton.

1.8.2.3 Canadien National

Pour ce qui est de la formation relative aux techniques de serrage du frein à main, les gestionnaires interrogés par le BST ont déclaré qu'un employé ayant à l'origine établi sa compétence n'avait besoin d'aucune formation supplémentaire. Bien qu'ils aient convenu qu'un grand nombre de règles et d'instructions devaient être assimilées au cours de la formation initiale, ils ont déclaré en général que la formation pratique en milieu de travail (jointe à la formation théorique initiale) produisait des employés tout à fait compétents.

La compétence du personnel d'exploitation devait être vérifiée au moyen de trajets de contrôle (inspection en cours de route). Toutefois, selon les superviseurs de district, il n'y avait aucun plan officiel permettant de s'assurer que chaque membre d'équipe faisait occasionnellement l'objet d'un contrôle, ou permettant de préciser la fréquence nécessaire de ces «trajets». La direction du réseau ferroviaire a déclaré qu'il y avait un plan officiel au moment de l'accident. Le dernier trajet de contrôle du chef de train adjoint au triage Edson avait eu lieu le 27 avril 1994 (28 mois avant l'accident).

Depuis plusieurs années, le CN posséde un vice-président adjoint à la sécurité et aux affaires règlementaires. Au moment de l'accident, celui-ci relevait du vice-président principal à l'exploitation et était chargé de la sécurité pour l'ensemble de la Compagnie. Les affaires règlementaires, le transport des marchandises dangereuses et les services d'hygiéne professionnelle relévent également de ce poste.

Depuis que le dérailleur avait été enlevé à l'extrémité est du triage Edson, les superviseurs ne comptaient plus que sur les connaissances des employés et sur leur habileté à appliquer judicieusement la règle 112 du REF et les instructions spéciales connexes pour immobiliser les wagons à Edson. Ils s'attendaient à ce qu'un nouvel employé dans le secteur demande conseil à des employés chevronnés au sujet de l'immobilisation des wagons à cet endroit. Il n'y avait eu aucune séance de formation supplémentaire, ni aucune réunion officielle d'échange de renseignements, pour aider les employés à s'acquitter efficacement de cette tâche.

Le chef de corridor a expliqué que si une occupation non autorisée est signalée sur le pupitre du CCF, le CCF doit, en vertu de la politique du CN, communiquer immédiatement avec le préposé à l'entretien des signaux pour trouver le probléme. Cette méthode n'assure pas une protection à toute épreuve contre les wagons partis à la dérive.

L'équipe chargée d'immobiliser les wagons au triage Edson a déclaré que la supervision était trés limitée ces derniéres années. Elle a indiqué que même lorsque le superviseur accompagnait une équipe, il ne donnait jamais d'instructions sur la bonne façon d'immobiliser les wagons à Edson.

Il n'y avait aucun programme de supervision officiel faisant état des méthodes à suivre et de la fréquence des activités de supervision dans le cas des équipes de train travaillant dans le territoire comprenant Edson. On encourageait les superviseurs à exercer une supervision proactive, mais fondamentalement à leur discrétion. Le CN a indiqué que la formation périodique relative à l'immobilisation des wagons comprenait des discussions sur les règles à observer et des mesures correctives prises au cours des séances de contrôle, mais ne comprenait pas de système régulier formel de formation pratique.

1.8.3 Transports Canada

La sécurité ferroviaire reléve de Transports Canada (TC) qui a pour mission d'«établir et administrer des politiques, règlements et services pour le meilleur réseau de transport qui soit».

TC est chargé d'administrer et de faire respecter la Loi sur la sécurité ferroviaire, qui donne les définitions suivantes du rôle de la règlementation et de la direction des compagnies de chemin de fer :

TC s'acquitte de ses fonctions en effectuant de la surveillance, des vérifications et des inspections. Toutefois, TC croit que ce sont les compagnies de chemin de fer qui sont responsables de la sécurité ferroviaire.

1.9 Freins à main

1.9.1 Fonctionnement

Le frein à main d'un wagon-trémie couvert à céréales du gouvernement du Canada ne fonctionne pas différemment du frein à main de la plupart des autres wagons de chemin de fer. C'est un dispositif mécanique qui fonctionne indépendamment du système de frein à air.

Le frein à main exerce l'effort de la semelle des freins sur les tables de roulement pour empêcher la roue de bouger ou en ralentir le mouvement. Dans le cas des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement, la timonerie de frein est décalée à partir de l'axe longitudinal du wagon. Les essais ont révélé que le serrage des freins à main entraîne un serrage asymétrique, c'est-à-dire que l'effort des semelles de frein est beaucoup plus important sur un côté que sur l'autre, et sur un bout du wagon que sur l'autre.

L'annexe 5 fournit d'autres renseignements sur la conception et le fonctionnement du frein à main. La relation entre les composants du frein à main et les critéres de rendement y est indiquée en détail.

1.9.2 Régles et méthodes d'exploitation

1.9.2.1 Avant l'accident

Avant la collision, les employés du CN chargés d'immobiliser les wagons avaient reçu des règles et des instructions qui visaient à s'assurer que les freins à main étaient assez serrés pour empêcher les wagons de bouger. Ces instructions comprenaient la règle 112 du REF et les instructions spéciales connexes. Les règles à observer étaient communiquées officiellement aux employés au cours des séances de formation initiales et des cours de mise à jour sur les règles à observer. Les instructions spéciales étaient données aux employés au moyen de bulletins périodiques.

La règle 112 du REF stipule en partie ce qui suit :

Sauf indication contraire dans des instructions spéciales, il faut serrer un nombre suffisant de freins à main pour assurer l'immobilisation du matériel roulant laissé en un endroit quelconque. (C'est nous qui soulignons.)

À la page 7 de la section des données régionales du Manuel d'exploitation du CN, les points 26 et 27 sont entrés en vigueur le 28 avril 1996, trois mois avant l'accident, à savoir :

26) Régle 112 - Instruction spéciale sur l'immobilisation du matériel roulant

Relativement à l'application de la règle 112. À tous les endroits, sauf indication contraire dans des instructions spéciales, comme celles qui figurent dans les manuels de triage, les directives particuliéres de l'indicateur ou les bulletins portant sur des situations relatives au serrage des freins à main, le matériel laissé à l'arrêt doit avoir un nombre suffisant de freins à main serrés pour l'empêcher de bouger. Le nombre minimum de freins à main est indiqué comme étant au moins un. (C'est nous qui soulignons.)

27) Régle 112 - Instructions spéciales sur l'immobilisation du matériel roulant

Avant d'utiliser un ou des freins à main pour immobiliser du matériel laissé sur place ou arrêter un véhicule accompagné à sa destination, il faut en vérifier l'efficacité. Après avoir serré le ou les freins à main, il faut vérifier si la semelle appuie maintenant sur la table de roulement, et déplacer légérement le wagon pour s'assurer que le ou les freins serrés produisent un effort de freinage suffisant.

Le BST a interrogé 49 mécaniciens du CN au Canada pour établir quelles sont les chances d'un mécanicien de déterminer l'effort de freinage en déplaçant légérement divers groupes de wagons après le serrage des freins à main et quelles sont les chances du mécanicien de déterminer si les freins à main sont suffisamment serrés pour empêcher les wagons de bouger. Les résultats montrent que, parmi l'échantillon choisi, le degré de confiance varie considérablement d'un mécanicien à l'autre en ce qui concerne ses possibilités de s'assurer que les freins sont suffisamment serrés en poussant légérement les wagons. Les résultats de ce sondage sont présentés à l'annexe 15.

La section 8.0 des Régles de sécurité d'exploitation du CN et le paragraphe 17 des Instructions générales d'exploitation du CN indiquent les exigences du CN en matiére de serrage des freins à main. Toutefois, ils visent surtout à réduire au minimum les blessures subies par les employés au cours du serrage.

Le paragraphe 17.3 est pertinent en l'occurrence :

Une inspection visuelle des composants de frein à main, notamment le volant, le levier, le cliquet d'arrêt, la roue à rochet et la chaîne, doit être effectuée avant le serrage du frein à main, et tous défauts constatés doivent être signalés immédiatement au superviseur.

Le cliquet, la roue à rochet et certaines parties du mécanisme d'engrenage du frein à main des wagons-trémies couverts à céréales sont contenus dans le carter. C'est pourquoi toute anomalie de ces composants du frein à main est difficile à déceler.

Lorsqu'on a enlevé les dérailleurs du triage Jasper, on a donné des instructions locales qui exigeaient qu'au moins six freins à main soient serrés sur tous les trains immobilisés à Jasper, lorsqu'on dételait les locomotives. On n'a pas donné de telles instructions au triage Edson lorsqu'on a enlevé le dérailleur. Les deux triages présentaient une pente semblable et ils étaient surveillés par le surintendant adjoint, à Jasper.

1.9.2.2 Après l'accident

Après l'accident, le CN a émis les instructions spéciales suivantes :

  1. Tableau «Nombre minimal de freins à main à serrer», indiquant le nombre minimal de freins à main à serrer à fond pour immobiliser le matériel :
    • 1 wagon : 1 frein à main
    • De 2 à 19 wagons : 2 freins à main
    • De 20 à 29 wagons : 3 freins à main
    • De 30 à 39 wagons : 4 freins à main
    • De 40 à 49 wagons : 5 freins à main
    • De 50 à 59 wagons : 6 freins à main
    • De 60 à 69 wagons : 7 freins à main
    • De 70 à 79 wagons : 8 freins à main
    • De 80 à 89 wagons : 9 freins à main
    • 90 wagons et plus : 10 freins à main
  2. Le 18 octobre 1996, le CN a donné des instructions spéciales sur les méthodes d'immobilisation des wagons pour plusieurs endroits dans le district de Great Plains.
  3. Le CN a également fourni un ensemble de lignes directrices relatives aux instructions spéciales susmentionnées, axées sur la règle 112 du REF. En voici quelques-unes :
    1. Les freins à main doivent être serrés sur le matériel non surveillé, conformément au tableau «Nombre minimal de freins à main à serrer».
    2. Si, à certains endroits, les conditions font qu'un plus grand nombre de freins à main doivent être serrés, une instruction spéciale, le manuel d'exploitation de terminal ou une directive particuliére à la subdivision l'indiqueront.
    3. Si, à certains endroits, les conditions font qu'aucun frein à main n'a besoin d'être serré, une instruction spéciale, le manuel d'exploitation de terminal ou une directive particuliére à la subdivision l'indiqueront.
    4. Aucun frein à main ne doit être serré si le matériel est en train d'être tiré ou poussé par une locomotive.
    5. Lorsque des wagons se déplacent sur leur erre, les freins à main peuvent être serrés. Lorsqu'ils s'arrêtent, vérifier si la semelle de frein exerce un effort de freinage.
    6. Les freins à main ne doivent pas être serrés si leur piston est en position sortie, mais ils doivent l'être si le piston du cylindre de frein est «rentré», soit parce qu'il a subi son effet de purge, soit parce que le système de frein à air a complétement desserré les freins.
    7. Si possible, les freins à main doivent être serrés à l'extrémité basse de la voie.
    8. La règle 112 fait référence au matériel roulant laissé en un endroit quelconque, et un train qui prend ou décroche des wagons n'est pas considéré comme du «matériel laissé en un endroit quelconque». À cet égard, si un train s'arrête pour prendre ou décrocher des wagons, il n'a pas besoin d'être immobilisé par les freins à main, à condition que les exigences de l'alinéa 7.2 k) des Instructions générales d'exploitation (IGE) soient respectées. Mais cela dit, ce n'est pas le cas lorsqu'un train laissé à l'arrêt sur la voie principale n'est pas à portée de la vue de l'équipe, car cela élimine la possibilité de serrer d'urgence les freins à air grâce à l'UEA (l'unité d'entrée et d'affichage).
    9. Si l'aiguillage entraîne la construction d'une voie, chaque groupe de wagons doit être immobilisé; mais comme le groupe est encore sous surveillance, il n'est pas nécessaire de se conformer au tableau sur le nombre minimal de freins à main à serrer, jusqu'à ce que toute la voie ait été construite. Lorsque la construction de la voie est terminée, il faut alors observer les prescriptions du tableau.

1.9.3 Formation

Quant au REF, aux instructions spéciales connexes et aux autres sujets prescrits par le Réglement sur les normes de qualification minimums de TC, les équipes sont obligées de rétablir leur compétence tous les trois ans. Ce n'est qu'au cours de la formation initiale d'agent de train/agent de triage que les nouveaux employés reçoivent des instructions officielles sur les aspects pratiques du serrage et du desserrage des freins à main. Dans le cadre de cette formation initiale, les candidats doivent travailler sous la supervision d'employés expérimentés. On compte beaucoup sur cette formation en milieu de travail pour leur enseigner des habiletés pratiques comme le serrage et le desserrage des freins à main, et la détermination de ce qui constitue un nombre «suffisant» de freins à main pour assurer l'immobilisation des wagons.

Les membres de l'équipe d'Edson avaient reçu leur formation initiale de 12 à 19 ans avant l'accident. Le dernier cours qu'ils avaient suivi sur les règles à observer avait été donné un ou deux ans avant l'accident. La règle 10(1) de TC stipule qu'une compagnie de chemin de fer doit, à un intervalle d'au plus trois ans, faire subir un examen portant sur les matiéres obligatoires à chaque employé occupant un poste faisant partie d'une catégorie professionnelle.

Le chef de train adjoint s'est souvenu que lors de sa formation initiale sur le serrage et le desserrage du frein à main, les stagiaires devaient grimper dans l'échelle d'un wagon, adopter la position voulue et serrer et desserrer le frein à main. Cette formation ne comprenait pas la détermination de ce qui constituait un nombre «suffisant» de freins à main en toutes circonstances.

Il n'y a jamais eu de programmes de formation pratique périodique permettant de mettre à jour ses connaissances, mis à part les cours de mise à jour sur les règles à observer et les séances d'information. Il existait toutefois, en ce qui concerne la plupart des aspects du travail, un système de formation informel qui voulait que les employés expérimentés transmettent leurs connaissances et leurs compétences, notamment au chapitre de l'immobilisation des wagons.

Le service des méthodes d'exploitation du CN se concentre sur les tendances que révéle l'examen des rapports de surveillance ou de vérification de TC, et qu'indique la rétroaction au hasard obtenue des surveillants de premier niveau. Le CN confie actuellement la formation en sous-traitance à la CANAC (sa filiale offrant des services de consultation). Le CN renseigne la CANAC sur les tendances pour qu'elle puisse modifier en conséquence les programmes de formation. De plus, le CN évalue les données sur les accidents, effectue des analyses de tendance et fait des analyses détaillées visant à dégager les causes fondamentales des accidents, ce qui donne souvent lieu à des recommandations en matiére de formation. Le CN consulte les autres compagnies de chemin de fer sur les règles d'exploitation et les questions de formation en sa qualité de membre de L'Association des chemins de fer du Canada (ACFC) et des sous-comités sur les méthodes d'exploitation de l'Association of American Railroads (AAR).

Pour ce qui est d'apporter des changements aux méthodes d'exploitation, le CN participe, à titre de membre, aux travaux de l'ACFC, et il est représenté au sein du comité des règles d'exploitation de cette association. Le ministre des Transports est saisi de tous changements que ce comité envisage d'apporter aux règles d'exploitation, conformément aux dispositions de la Loi sur la sécurité ferroviaire. La compagnie de chemin de fer peut également émettre des instructions spéciales pour rendre une règle d'exploitation approuvée plus restrictive, sans devoir obtenir l'approbation de TC.

1.9.4 Essais et observations

Avant l'accident sur la subdivision Edson, les spécialistes des compagnies de chemin de fer et du gouvernement, lorsqu'ils examinaient l'augmentation du nombre de cas signalés de wagons partis à la dérive, centraient leur analyse sur la conformité à la règle 112 du REF, et, dans une moindre mesure, sur la formation et la supervision des équipes de train. Après cet accident, le CN et le BST ont effectué de nombreux essais de rendement des freins à main sur les wagons-trémies couverts à céréales au Canada. Ces essais ont fourni des renseignements nouveaux et importants sur le comportement de ces freins à main dans diverses circonstances. Les renseignements recueillis figurent aux annexes 6 à 12.

L'annexe 6 résume les résultats des essais de rendement des freins à main des wagons CNWX. Les essais ont porté sur les fluctuations de l'effort exercé par les semelles de frein, sur la relation entre le couple de serrage du volant et l'effort exercé par les semelles de frein, sur les effets du taraudage, sur la fiabilité du rendement, sur le fonctionnement du mécanisme, sur la lubrification et sur les bruits de la roue à rochet. Ils ont permis de déterminer la grande variabilité possible de l'effort exercé par la semelle de frein d'une roue à l'autre du même wagon CNWX (la tension de la chaîne étant la même). De plus, ils ont indiqué que l'effort total de freinage pouvait varier considérablement d'un wagon à l'autre, la tension de la chaîne étant uniforme.

L'annexe 7 donne les résultats d'une enquête sur le serrage des freins à main de wagons à l'arrêt choisis au hasard dans l'ensemble du Canada; 64 wagons ont été examinés dans le cadre de cette enquête. Le couple de serrage mesuré variait de 20 à 180 pieds-livres, la moyenne étant de 78 pieds-livres et la médiane de 65 pieds-livres.

L'annexe 8 donne les résultats de l'enquête sur l'état des rouleaux du principal levier vertical des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement. Aucun des 521 wagons mis à l'essai n'avait un rouleau défectueux ou manquant. Toutefois, certains wagons portaient des marques sur la plaque de cisaillement, ce qui indique que le levier principal atteignait (ou presque) le bout de la fente lorsque le frein à main était serré.

L'examen des roues n'a pas permis de déterminer si les freins du premier ou du deuxième wagon parti à la dérive avaient été serrés ou non au triage Edson, ni dans quelle mesure ils l'avaient été. (Voir l'annexe 9).

L'annexe 10 fournit des renseignements sur l'examen des freins à main du premier et du deuxième wagons partis à la dérive. Le frein à main du premier wagon présentait des signes de dommage par écrasement et de grippage de la barre de fixation du tambour de la chaîne qui laissaient croire qu'un couple de serrage s'était exercé sur ce frein. L'examen du deuxième wagon n'a pas permis de déterminer si le frein à main avait été serré ou non.

L'annexe 11 donne les résultats des essais sur l'effort de freinage nécessaire pour empêcher un groupe semblable de 20 wagons de bouger sur la voie 4, au triage Edson, ainsi que les résultats de la modélisation simulée. On a effectué 14 essais de simulation de divers couples de serrage des freins à main des deux wagons les plus à l'est. En tenant compte de la vitesse et des simulations relatives aux freins à main, on a déterminé que :

si un seul frein à main avait été serré, la tension de la chaîne était probablement de 3 560 à 4 340 livres (et le couple de serrage moyen du volant a été estimé à environ 64 à 78 livres);

si deux freins à main avaient été serrés, la tension de la chaîne de chacun ainsi que l'effort exercé par les semelles de frein de même que le couple de serrage du volant correspondaient probablement ensemble à l'effort de freinage d'un wagon ayant une tension de chaîne de 3 560 à 4 340 livres.

L'annexe 12 fournit des renseignements supplémentaires sur l'approbation donnée à la conception des wagons CNWX, ainsi que des informations sur les exigences d'entretien et de conformité.

1.9.5 Transports Canada

Les normes de TC en matiére de conception des freins à main et de leur timonerie sont conformes à celles de l'AAR. Après la collision sur la subdivision Edson, le personnel de règlementation de TC a déclaré que les freins à main des wagons-trémies couverts à céréales étaient de conception asymétrique et avaient d'autres caractéristiques. Le personnel a toutefois souligné que la conception des wagons était conforme à la norme.

Après cette collision, des représentants de TC ont fait l'essai d'environ 1 000 freins à main de wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement pour déterminer s'ils fonctionnaient bien. Ils étaient tous efficaces dans la mesure où leurs semelles appuyaient sur certaines des tables de roulement lorsque le frein était serré. L'effort de freinage exercé par les semelles de frein n'a pas été mesuré. Par conséquent, les essais n'ont pas permis de vérifier l'intensité de l'effort de freinage occasionné par le serrage du frein à main.

1.9.6 Bureau de la sécurité des transports

En 1992, après avoir relevé plusieurs cas de wagons partis à la dérive, le BST se disait inquiet parce que les programmes d'information et de sensibilisation des chemins de fer lui paraissaient insuffisants, et il mettait en doute l'habileté des superviseurs à s'assurer qu'on suivait la bonne méthode pour immobiliser les wagons à l'arrêt. Bien qu'aucun probléme n'ait été isolé au sujet des méthodes prescrites pour immobiliser les wagons à l'arrêt à ce moment-là, le BST avait recommandé que le ministére des Transports méne une évaluation sur place de la qualité de la formation et de la supervision offertes par les chemins de fer canadiens afin de s'assurer que le personnel applique correctement les procédures normalisées d'exploitation lorsqu'il immobilise des wagons à l'arrêt (recommandation R92-14, émise en septembre 1992).

TC avait répondu qu'il partageait l'opinion du BST et qu'il y avait peut-être un lien entre la formation et la supervision, et le non-respect des règles et des règlements en vigueur concernant l'immobilisation du matériel ferroviaire. TC a indiqué récemment qu'il avait pris des mesures relatives aux infractions à la règle 112 du REF bien avant l'accident sur la subdivision Edson. En décembre 1995, TC a publié un rapport intitulé Rapport sur les activités de supervision et de formation (ASR 095-02) dont le CN a pris connaissance et dont les données ont été utilisées pour les programmes de sécurité «perfectionnés» du CN.

1.10 Contrôle de la circulation ferroviaire

1.10.1 Fonctions

Le CCF est chargé de contrôler la circulation des trains et celle des véhicules d'entretien, ansi que les activités relatives aux travaux en voie, dans les subdivisions qui lui sont affectées. Il doit à cette fin être en mesure de protéger les préposés à l'entretien de la voie, de signaler tous les défauts ou tous les états de la voie qui rendent celle-ci dangereuse, ainsi que de planifier et de prioriser ces activités. Il doit recevoir et émettre des ajouts aux bulletins de marche (BM), et recevoir et émettre des BM au sujet des restrictions liées à l'état de la voie, et d'autres renseignements touchant la sécurité de la circulation des trains. Ses fonctions comprennent également la délivrance et l'annulation de feuilles de libération, la réponse aux demandes de permis d'occuper la voie (POV), et la réception des communications sur le terrain des équipes de train travaillant sur son territoire.

De temps à autre, son travail exige un haut degré de vigilance pour que l'exploitation ferroviaire se fasse continuellement en toute sécurité. Grâce aux outils logiciels de support et de planification que possédent la compagnie de chemin de fer, le CCF doit optimiser la productivité en veillant à ce que les trains accusent le moins de retard possible, tout en assurant aux préposés à l'entretien de la voie un temps de circulation maximum pour leur permettre de procéder aux travaux en voie. Pour ce faire, le CCF doit être capable d'effectuer plusieurs choses en même temps et avec précision, sans perdre sa concentration. À cause de ses fonctions administratives et de ses responsabilités primordiales en matiére de communication et de planification, il doit pouvoir travailler avec stratégie et avoir une démarche analytique.

1.10.2 Systéme de commande centralisée de la circulation

La commande centralisée de la circulation (CCC) est un système indépendant de commande des trains, conçu pour un territoire à forte densité de circulation comme la subdivision Edson. La circulation des trains est régie par des indications de signaux. La CCC comprend des points contrôlés où le CCF peut actionner des aiguillages et donner des signaux de canton à l'arrêt, ou demander une indication de signal permissive.

En général, le CCF ne connaît pas l'indication permissive exacte qui en résulte. Il ne commande pas les signaux entre les points contrôlés, mais ces signaux sont actionnés automatiquement par le matériel roulant qui s'en approche. Les indications qu'ils affichent sont également tributaires de l'état des cantons dans lesquels ils régissent la circulation. La circulation des véhicules d'entretien et les activités relatives aux travaux en voie sont commandées grâce à la délivrance d'autorisations ou à la protection par signaleur. Le CCF doit assurer la protection par blocage des signaux avant de délivrer une autorisation à un contremaître.

Les commandes du bureau du CCF, pour la CCC en service dans la subdivision Edson, sont situées sur un tableau recourbé d'environ 180 degrés qui entoure la visibilité vers l'avant qu'a le CCF depuis son siége. Le tableau d'affichage de la circulation des trains comprend un diagramme de base indiquant les points contrôlés, avec des espaces entre eux. Dans ces espaces, des lignes droites horizontales illustrent les voies. Ni la pente ni la courbure ne sont indiquées, et le diagramme n'est pas à l'échelle. Des voyants s'allument pour indiquer l'occupation de la voie ou le mauvais fonctionnement des signaux ou de la voie. Les voyants ne sont pas directement dans le champ de vision normal du CCF.

Aux fins de la CCC, les commandes du bureau sont reliées électroniquement au terrain. Lorsqu'un CCF exerce une fonction de contrôle, comme mettre un aiguillage en position renversée, la commande est envoyée immédiatement. Là où on la reçoit sur le terrain, on renvoie confirmation au bureau, pour faire savoir au CCF qu'on a donné suite à sa commande. Toutes les 11 secondes environ, le système sonde les endroits sur le terrain avec lesquels il est en communication. En conséquence, les changements de l'état des endroits sur le terrain ne sont pas enregistrés immédiatement au bureau du CCF.

1.10.3 Poste de travail du CCF d'Edson

Les pupitres des CCF de la subdivision Edson ont été construits en 1980. Ils sont disposés en demi-cercle. Encastrés dans le pupitre, sous le tableau de commande, se trouvent trois moniteurs d'ordinateur : un terminal de communication, un terminal d'ordinateur pour le contrôle du processus (PCS), et un moniteur d'ordinateur servant à émettre des bulletins de marche. Le terminal d'ordinateur pour le contrôle du processus sert à émettre des POV pour la protection des préposés à l'entretien de la voie (circulant dans des véhicules d'entretien). L'ordinateur affecté aux bulletins de marche sert à émettre des autorisations et des interdictions de faire circuler un train, ainsi que des instructions aux chefs de train. De par sa conception, le poste de travail n'a pas été aménagé pour permettre de surveiller en tout temps l'affichage de la circulation sur la voie ni les voyants indiquant si la voie est occupée. Le tableau n'a pas non plus été conçu pour permettre de détecter la présence de wagons partis à la dérive.

Une imprimante et un téléphone sont situés à gauche. À droite se trouve la feuille des circulations ainsi que l'ordinateur et l'écran d'affichage de l'équipe.

Le poste de travail du CCF d'Edson-est permet de contrôler la circulation ferroviaire tant sur la subdivision Wainwright que sur la subdivision Edson. Il a été aménagé de façon que les écrans d'affichage de la subdivision Wainwright soient en haut, et ceux de la subdivision Edson en bas, tant pour l'affichage de la circulation que dans la section d'affichage à boutons-poussoirs du pupitre. La double capacité du tableau l'oblige à être plus large et plus haut que s'il n'avait été conçu que pour une seule subdivision. De la droite en allant vers la gauche, les affichages inférieurs comprennent les tableaux d'affichage à boutons-poussoirs et de surveillance de la circulation à partir de la gare Procyk à Edmonton, au point milliaire 4,1, jusqu'au triage Jasper, au point milliaire 235,7. Le CCF d'Edson-est exerçait un contrôle sur le tronçon allant de Procyk à Edson. Edson, au point milliaire 129,6, se trouve à peu près au milieu du pupitre. L'utilisation de ce type de CCC fait appel, dans un angle d'environ 180 degrés, au champ de vision latéral du CCF, et, dans un angle d'environ 45 degrés, au champ de vision vertical du CCF.

Selon l'ergonomie contemporaine, l'angle de vision préféré pour ces tableaux de commande est un cône de 15 degrés, en haut, en bas, à gauche et à droite du champ de vision normal de travail. Ce dernier, dans le cas d'un opérateur assis, est d'environ 15 degrés plus bas que le champ de vision de l'opérateur lorsqu'il regarde droit devant. Il y a une zone de vision secondaire qui comprend tout ce qui est à l'extérieur de l'angle de vision préféré. Lorsqu'une surface d'affichage doit être située dans cette zone de vision secondaire, elle ne doit servir qu'aux affichages peu utilisés, ou qui se rapportent à des fonctions non essentielles sur le plan de l'exploitation. Un opérateur qui accomplirait une tâche comportant une surface d'affichage dans l'angle de vision préféré ne verrait probablement pas les renseignements affichés sur un tableau dans la zone de vision secondaire sans avoir une raison précise de le faire, ou à moins qu'un avertissement attire son attention sur ce tableau. Si des tableaux sont installés dans les zones de vision préférée et secondaire, des avertisseurs sensoriels (p. ex. des voyants lumineux ou des tonalités) doivent être utilisés pour faire en sorte que l'opérateur soit sensibilisé aux renseignements cruciaux ou à l'évolution des renseignements figurant sur le tableau de la zone de vision secondaire.

Au pupitre d'Edson-est, les écrans d'affichage d'ordinateur et les claviers sont dans l'angle de vision préféré, si l'opérateur, sur le plan horizontal, se place de façon à voir tous les dispositifs. Les écrans de surveillance de la circulation, notamment les voyants indiquant l'occupation de la voie, sont bien au-dessus de l'angle de vision préféré lorsque l'opérateur regarde son pupitre, les claviers ou les écrans d'ordinateur.

La figure 14 montre le poste de travail du CCF d'Edson-est.

Figure 14: Poste de travail du CCF d'Edson-est
Poste de travail du CCF d'Edson-est

1.10.4 Alarme 429

Une alarme connue sous le nom d'«alarme 429» se déclenche si un train enregistré (c'est-à-dire enregistré dans le système) dépasse un signal d'arrêt (règle 429 du REF). À noter que, dans le cas à l'étude, l'«alarme 429» ne se serait pas déclenchée parce que c'était du matériel parti à la dérive qui circulait sur la voie, et non un train enregistré.

L'«alarme 429» donne à la fois des signaux visuels et des signaux sonores (sonalert). Un voyant clignote sur l'écran d'affichage de la circulation du tableau de commande, et un menu apparaît sur le terminal d'ordinateur pour le contrôle du processus avec le nom de l'endroit qui clignote pour avertir le CCF qu'il y a un probléme sur le terrain.

L'alarme sonore «sonalert» produisant un son distinctif avait été jugée «agaçante» par certains. Elle était présente mais inopérante sur trois postes de travail de CCF du bureau des CCF d'Edmonton. Sur cinq postes de travail de CCF, y compris celui d'Edson-est, l'alarme «sonalert» avait disparu. Il a été impossible de déterminer qui avait enlevé ces alarmes ou les avait rendues inopérantes.

1.10.5 Instructions dans le cas d'une occupation de canton inexpliquée

1.10.5.1 Avant l'accident

Une instruction communiquée aux CCF le 10 mai 1996, soit trois mois avant l'accident, précisait comment les CCF devaient réagir dans le cas d'une «occupation de canton inexpliquée». L'instruction stipulait en partie :

  1. Le CCF doit communiquer avec le poste de travail du préposé du Groupe S&C [Signalisation et communications] et aviser celui-ci du lieu de l'occupation et de l'heure à laquelle elle s'est produite.
  2. Lorsque le préposé du Groupe S&C a été avisé, le préposé à l'entretien des signaux du Groupe S&C et, lorsque des conditions hivernales (précisées ci-aprés) l'exigent, le superviseur de la voie ou le délégué concerné sont également appelés.
  3. Une fois sur place, le préposé à l'entretien des signaux du Groupe S&C et/ou le superviseur de la voie ou le délégué reçoivent immédiatement l'autorisation, avec priorité sur les trains, d'occuper la voie pour effectuer des réparations.
  4. En cas de conditions hivernales, une seule autorisation en vertu de la règle 564 du REF peut être donnée pour que les trains traversent le canton visé, avant qu'il soit inspecté par le personnel technique (Ingénierie). Il faut tenir compte du genre de train qui doit circuler dans ledit canton, et des quantités transportées.

Cette instruction ne donnait aucunement à penser qu'un wagon parti à la dérive pouvait être la raison d'une occupation de canton inexpliquée. Elle indiquait qu'une telle occupation devait être considérée comme un mauvais fonctionnement obligeant un préposé à l'entretien des signaux à effectuer des réparations.

Cette instruction ne s'adressait pas à une situation où une série de voyants s'allumaient successivement.

1.10.5.2 Après l'accident

Le 30 août 1996, 18 jours après l'accident, le CN a émis une instruction à insérer dans le Manuel des contrôleurs de la circulation ferroviaire, intitulée «Occupation non autorisée d'un canton». Elle stipulait en partie :

Lorsqu'une unique occupation non autorisée de la voie se produit, le CCF continue d'informer le Groupe de la signalisation et des communications, comme il le fait actuellement.

Si des cantons flanchent successivement et qu'il n'y a pas de blocage en vigueur, ce qui pourrait amener le CCF à croire qu'il s'agit d'une circulation non autorisée, le CCF doit prendre immédiatement des mesures pour protéger les autres véhicules ferroviaires susceptibles d'être touchés. Lorsque le blocage des signaux ou que la règle 42 est en vigueur dans le canton touché, et que le CCF n'a pas été avisé par le contremaître que la nature du travail va nuire à la signalisation, le CCF doit communiquer immédiatement avec le contremaître pour l'aviser des signaux successifs et en déterminer la cause.

  1. Le CCF doit transmettre immédiatement un message radio d'urgence sur la voie 1, pour le secteur visé.
  2. Le CCF doit communiquer avec tous ceux (y compris le contremaître) que concernent les circulations susceptibles d'être touchées, les informer de la situation et assurer leur sécurité.
  3. Le CCF doit signaler la situation au contrôleur en chef/chef de corridor qui doit informer le plus tôt possible le chef de corridor/chef principal de corridor, ainsi que l'agent d'exploitation chargé du territoire.
  4. Le CCF doit déterminer grâce à sa connaissance du territoire si la circulation non autorisée est du matériel parti à la dérive ou du matériel d'entretien de la voie qui circule sans autorisation, c.-à-d. s'il y a un embranchement ou un triage dans les environs de l'endroit d'où proviennent les signaux successifs.

Cette instruction émise après l'accident reconnaît clairement qu'une circulation imprévue et incontrôlée est possible si le CCF voit des voyants s'allumer successivement, et elle indique ce qu'il faut faire dans ce cas.

1.10.6 Formation

Le programme de formation des CCF du CN comprenaient deux phases : une phase théorique et une phase pratique.

La formation théorique (d'une durée de quelque huit semaines) était donnée au centre de formation du CN situé à Gimli (Manitoba). Les stagiaires sont évalués en fonction de leur précision, de leur compréhension des règles, des facteurs de stress et de la réaction qu'ils provoquent chez eux, de leur planification, de leur souplesse, de leur adaptabilité et de leur personnalité. Les stagiaires reçoivent également une évaluation générale de leur rendement. Le CCF d'Edson-est avait reçu sa formation à Gimli du 19 février au 29 mars 1991. Lors de l'évaluation définitive, ses compétences avaient été jugées satisfaisantes en ce qui concerne tous les aspects des fonctions de CCF.

La formation pratique des CCF est donnée au terminal d'attache, où chacun d'eux est observé et évalué dans l'exercice des fonctions qu'il devra remplir. Le CCF d'Edson-est a reçu cette formation pratique à Edmonton où ses compétences ont été jugées satisfaisantes. Les instructeurs du terminal d'Edmonton ont évalué son rendement pendant toute cette période.

Le CCF d'Edson-est a discuté de la supervision et de la formation qu'il avait reçues, dans la mesure où elles concernaient l'accident. Il a indiqué qu'il ne comprenait pas parfaitement les raisons techniques pour lesquelles les voyants s'allumaient sur son tableau lorsqu'il contrôlait la circulation des trains. Il a toutefois dit qu'il savait que les voyants pouvaient s'allumer s'il y avait un train non enregistré dans le canton. Il a indiqué que lors de sa formation initiale de CCF, on ne lui avait jamais enseigné comment reconnaître les occupations de voie non identifiées. Il ne se souvenait pas d'avoir reçu de la formation sur la façon d'évaluer les déplacements de wagons partis à la dérive ni sur la façon de réagir dans une situation semblable.

On lui avait enseigné, et la supervision qu'il avait reçue lui donnait à penser qu'il fallait communiquer avec le préposé à l'entretien des signaux pour règler le probléme s'il constatait sur son pupitre une indication d'occupation imprévue et non autorisée de la voie. Cela était conforme aux instructions fournies par la direction du CN le 10 mai 1996 (voir la section 1.10.5.1). Aucune instruction n'ordonnait au CCF de préciser la raison d'occupations imprévues de la voie.

1.11 Dérailleurs

1.11.1 Fonction

Un dérailleur est un dispositif de sécurité qui est placé à un endroit stratégique et qui est conçu pour assurer une protection secondaire contre la circulation incontrôlée de matériel roulant sur la voie principale. La protection qu'il offre est secondaire par rapport à celle qu'assure le serrage suffisant des freins des wagons.

Le REF stipule qu'un «nombre suffisant de freins à main doivent être serrés pour immobiliser le matériel laissé en un point quelconque». Dans ce contexte, «suffisant» signifie un effort exercé par les semelles de frein, suffisant pour compenser la force de gravité :

La plupart des compagnies de chemin de fer estiment que le plus important, en matiére d'immobilisation de wagons, est d'observer la règle 112 du REF et les instructions spéciales connexes. Si le frein n'est pas serré suffisamment, un dérailleur mis en position de déraillement, s'il est bien conçu et bien entretenu, s'il y a lieu, agira en tant que dispositif de protection secondaire et fera dérailler le matériel roulant parti à la dérive avant que ce matériel roulant puisse s'engager sur la voie principale.

Il existe actuellement trois types de dérailleurs dont l'utilisation est approuvée sur les voies du CN : les dérailleurs à charniére, les dérailleurs à glissement et les dérailleurs à aiguille. La grande majorité des quelque 6 000 dérailleurs du CN sont commandés à la main. Ils sont tous fixés en permanence à la voie.

La règle 104.5 du REF et toute instruction spéciale connexe exigent que les dérailleurs soient mis en position de déraillement et immobilisés avec un cadenas, sauf si la voie est utilisée. Ces instructions étaient en vigueur au moment de la collision sur la subdivision Edson.

1.11.2 Enlévement du dérailleur

Vers 1990, on a enlevé le dérailleur à l'extrémité est du triage Edson. Le BST n'a pas réussi à obtenir du CN des documents définitifs indiquant pourquoi, et en vertu de quelle autorité, le dérailleur avait été enlevé. L'alinéa a) de la section 2 de la Circulaire sur les méthodes normalisées (CMN 3603) exige qu'on n'enléve pas de dérailleur avant que l'ingénieur de district ait donné son approbation et que le responsable des transports concerné ait été avisé au préalable. Des superviseurs du CN ont dit que des dérailleurs avaient été enlevés sans que ledit ingénieur en ait été avisé. L'ingénieur de district que la chose concernait en 1990 n'a pu se souvenir d'avoir été informé de la décision d'enlever le dérailleur en question.

Dans une lettre qu'il a envoyée en 1990 aux Comités de sécurité et de santé au travail (CSST) de Jasper et d'Edson, le CSST de Calder avait protesté contre l'enlévement «récent» du dérailleur. Le gestionnaire local lui avait répondu que ce dérailleur était devenu désuet parce que la voie de réserve allait protéger contre les locomotives laissées sans surveillance, et que si la règle 112 du REF était observée, aucun wagon ne partirait à la dérive. Le CSST a accepté l'explication du gestionnaire local et n'a pas signalé au niveau de gestion suivant ses inquiétudes concernant l'enlévement du dérailleur.

TC a publié le Réglement sur la sécurité de la voie (TP 11373) le 3 septembre 1992. Celui-ci fait état des exigences minimums relatives aux voies ferrées qui font partie du réseau ferroviaire général. Le paragraphe II de la section E de ce règlement, qui concerne les exigences minimums auxquelles les dérailleurs doivent répondre, stipule ce qui suit :

Des dérailleurs doivent être posés là où du matériel roulant laissé sur une voie autre qu'une voie principale ou qu'une voie d'évitement risque de rouler par gravité et d'obstruer une voie principale ou une voie d'évitement.

Au moment de l'accident, ce règlement s'appliquait aux voies situées dans le triage Edson ou aux environs. Le CN fournit une norme précise pour les dérailleurs dans la CMN 3603. Celle-ci indique en détail le type de dérailleur à installer dans certaines conditions, les endroits qui exigent la protection d'un dérailleur, et le personnel qui doit être avisé de l'installation du dérailleur.

Il existe deux raisons plausibles pour lesquelles le dérailleur a été enlevé.

La premiére théorie veut que le dérailleur ait été enlevé vers 1990 parce que d'autres dérailleurs avaient été installés aux deux extrémités des voies d'arrimage des locomotives. Cette théorie est approuvée par plusieurs employés et un superviseur connaissant bien les activités et l'aménagement du triage Edson. Aucune directive relative à l'installation de dérailleur sur les voies d'arrimage ne figure dans les dossiers de TC, selon qui une telle directive n'aurait pas été versée dans ses dossiers. Ni le BST ni le CN n'ont pu retracer une telle directive. On était d'avis que la présence de dérailleurs sur les voies d'arrimage éliminait le besoin d'autres dérailleurs dans le triage Edson (le REF s'appliquait d'ailleurs à l'immobilisation des wagons).

La seconde théorie invoquée lors de l'enquête veut que le dérailleur en question ait été enlevé après la mise en service de trains sans wagon de queue (autorisée en décembre 1987). Lorsque ces trains circulent, l'équipe est à la tête du train. Comme aucun des membres de l'équipe ne se trouve à l'arriére du train, lorsque celui-ci a libéré un dérailleur, un membre de l'équipe doit aller règler le dérailleur, puis regagner l'avant du train avant que celui-ci puisse poursuivre son chemin. On a allégué que des dérailleurs (comme celui d'Edson-est) ont été enlevés pour supprimer cette tâche qui faisait perdre beaucoup de temps.

1.11.3 Bureau de la sécurité des transports

Par suite d'une enquête portant sur un wagon parti à la dérive sur des voies ferrées du Canadien Pacifique (CP), et d'une analyse de la fréquence des cas de wagons partis à la dérive au Canada, le BST s'est inquiété de l'absence de dérailleurs là où des wagons partis à la dérive risquaient d'obstruer la voie principale (rapport no R93M0001 du BST). En citant les consignes du CP au sujet de la voie et le Manuel des circulaires sur les méthodes normalisées du CN, qui font état des exigences de ces compagnies concernant l'installation de dérailleurs aux endroits où il est possible que du matériel laissé à l'arrêt sur des voies autres que des voies principales ou des voies d'évitement soit déplacé par le vent ou par la force de gravité et aille obstruer une voie principale ou une voie d'évitement, le BST a présenté la recommandation suivante afin d'assurer une protection suffisante contre les wagons partis à la dérive :

Le ministére des Transports veille à l'installation de dérailleurs partout au Canada où la déclivité de la voie risque d'entraîner la dérive des wagons et l'obstruction de la voie principale.
Recommandation R94-06 du BST

1.11.4 Transports Canada

Le 3 septembre 1992, le Réglement sur la sécurité de la voie de TC entrait en vigueur. Ce règlement fournit des normes relatives à l'infrastructure ferroviaire. Pour s'assurer de la sécurité de l'infrastructure, TC examine ou vérifie les dossiers du programme des chemins de fer en matiére de surveillance de la conformité. Il examine ensuite le résultat final en faisant des inspections sur le terrain pour vérifier de plus près les systèmes de sécurité, voir si les règlements sont respectés et relever les problémes de sécurité à l'échelle du réseau. Les ressources allouées au programme sont restées à peu près les mêmes depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur la sécurité ferroviaire. Des mesures spéciales visant à faire respecter les normes relatives à l'installation des dérailleurs avaient été prises avant l'accident sur la subdivsion Edson. Les inspecteurs passent de 50 à 75 % de leur temps sur le terrain. En régions, 75 à 80 % du budget relatif à l'infrastructure est consacré aux inspections sur le terrain. TC ne tient pas l'inventaire des installations ferroviaires et ne vérifie pas toujours les résultats des vérifications effectuées par les compagnies de chemin de fer pour s'assurer qu'ils sont valables. Les manquements relevés ne sont pas consignés de sorte qu'on ne peut pas vérifier s'ils ont été corrigés.

Lorsqu'ils relévent une situation qui dérogent aux prescriptions règlementaires, les agents de sécurité de la Direction générale de la sécurité ferroviaire de TC cherchent tout d'abord à obtenir du contrevenant qu'il se conforme volontairement au règlement. Si la situation persiste, ils envoient alors une série de lettres au contrevenant. Si la compagnie de chemin de fer ne fait rien pour remédier à la situation, TC peut alors invoquer les dispositions de l'article 31 de la Loi sur la sécurité ferroviaire et donner un avis, ou un avis et un ordre. Il peut également avoir recours à l'article 31 s'il juge que la situation constitue une menace immédiate à la sécurité ferroviaire. Si la situation persiste, TC peut engager des poursuites.

Le 17 août 1994, le ministre des Transports en poste à ce moment-là avait répondu à la recommandation R94-06 en ces termes :

L'incident est attribuable au fait que des équipes de triage n'avaient pas bien immobilisé les wagons, comme le prévoit la règle 112 du Réglement d'exploitation ferroviaire du Canada. Dans la lettre du 30 septembre 1993 qu'elle a adressée au Bureau, la compagnie de chemin de fer a indiqué qu'elle avait pris des mesures disciplinaires à l'égard de l'équipe responsable et avait organisé des séances d'information avec les employés pour leur rappeler l'importance de bien immobiliser le matériel roulant stationné. Cette mesure provisoire a satisfait le ministére.

Pour ce qui est de la recommandation, on m'informe que le CP a installé un dérailleur à l'endroit en question, le rendant ainsi conforme au Réglement sur la sécurité ferroviaire (sic).

De plus, des 3 500 branchements inspectés en 1993 dans le cadre du programme de surveillance de l'infrastructure, quelque 15 d'entre eux n'étaient pas conformes puisqu'on n'y trouvait pas de dérailleurs. Mon ministére a pris des mesures immédiates à ces endroits afin de les rendre conformes au Réglement sur la sécurité ferroviaire (sic). Les bureaux régionaux du Groupe de surface sont au courant de la situation et les agents régionaux de la sécurité continueront d'accorder une attention particuliére à ce probléme dans le cadre du programme de surveillance de l'infrastructure de 1994. De plus, L'Association des chemins de fer du Canada recevra un exemplaire de cette lettre, ainsi que du rapport, pour qu'elle informe les compagnies de chemin de fer membres des mesures que prend le ministére.

À cet égard, TC n'a appris l'élimination du dérailleur d'Edson qu'au moment de l'enquête du BST. Il ne savait pas non plus qu'il y avait eu un dérailleur à cet endroit. Les représentants de TC croyaient qu'après l'entrée en vigueur du Réglement sur la sécurité de la voie, les chemins de fer allaient réagir d'une façon appropriée et installer des dérailleurs aux endroits appropriés. TC ne tient pas à jour un registre des dérailleurs qui indiquerait les endroits où il y en a et ceux où il en faut.

TC a fait savoir que depuis qu'il a pris connaissance de la recommandation R94-06, il a accordé une attention particuliére aux dérailleurs et a pris note de tous les endroits évidents où il manquait un dérailleur (il en a dénombré 65 de 1993 à 1996). Les agents régionaux de l'infrastructure ont inspecté tous les dérailleurs qu'ils ont vus dans les subdivisions échantillonnées ou inspectées. Les défauts des dérailleurs signalés depuis les quatre derniéres années figurent dans le tableau ci-aprés. Source : Systémes de contrôle des services techniques de Transports Canada.

ANNÉE MANQUANT MAUVAISE DIMENSION MAL POSÉ PAS ASSEZ VISIBLE SANS CADENAS FONCTIONNE MÊME EN POSITION BLOQUÉE TOTAL
1993 16 2 9 15 10 2 38
1994 22 7 13 10 23 - 53
1995 4 3 5 6 14 - 28
1996 23 30 40 22 33 1 126
TOTAL 65 42 67 53 80 3 245

Figure 15 : Dérailleurs défectueux signalés par type et par année

TC était préoccupé par la question des dérailleurs bien avant la publication de la recommandation R94-06. En 1992, TC avait réussi à convaincre l'ACFC d'ajouter un point relatif aux dérailleurs dans le Réglement sur la sécurité de la voie. Aux États-Unis, la Federal Railroad Administration (FRA) ne définit pas les endroits où il faut installer des dérailleurs.

À la suite de l'incident de wagons partis à la dérive au point milliaire 5,42 de la subdivision McAdam du CP en 1993, les agents régionaux de l'infrastructure de TC se sont concentrés sur la question des dérailleurs pour veiller à ce que toute situation qui déroge aux prescriptions de cette règle soit signalée et que des mesures correctives soient prises par les compagnies de chemin de fer. Depuis ce temps, la question des dérailleurs a souvent fait l'objet de discussions avec la direction des compagnies de chemin de fer à l'échelon national et aux niveaux régionaux. Les premiéres réunions qui se sont tenues entre TC et les compagnies de chemin de fer pour discuter de la recommandation R94-06 du BST ont eu lieu à Montréal avec le CN le 7 décembre 1994 et avec le CP le 8 décembre 1994.

En 1997, le CN et le CP ont présenté aux bureaux régionaux de TC une liste des endroits où de nouveaux dérailleurs avaient été installés et une liste des endroits où ils se proposaient d'en installer. Des vérifications sur le terrain ont été faites aux endroits où des dérailleurs ont été installés et aux endroits où les compagnies de chemin de fer ont indiqué que des dérailleurs n'étaient pas nécessaires. Pendant cette campagne-éclair, 231 dérailleurs ont été vérifiés, ce qui a permis de relever un certain nombre de défauts. Tous les défauts cernés ont été corrigés.

1.11.5 Canadien National

Après l'accident survenu sur la subdivision Edson, le CN a indiqué qu'il avait évalué la situation en 1994 et qu'il avait conclu qu'il n'était pas nécessaire d'installer des dérailleurs supplémentaires parce que la conformité aux exigences de la règle 112 du REF en matiére de serrage des freins à main offrirait la protection voulue contre les risques de dérive des wagons.

1.12 Wagons partis à la dérive

1.12.1 Historique et fréquence

Du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1996, le BST a enregistré 190 cas de wagons partis à la dérive. Dans 22 des cas, les wagons partis à la dérive ont causé une collision en voie principale (17) ou un déraillement en voie principale (5) mettant en cause du matériel roulant ou des trains ou les deux (soit dans 12 % des cas). Outre ces 22 cas et un accident à un passage à niveau et un accident mettant en cause un véhicule d'entretien, il y a eu 29 cas de wagons partis à la dérive en voie principale qui n'ont causé aucun dommage.

Avant l'accident sur la subdivision Edson, le nombre de cas de wagons partis à la dérive avait commencé à augmenter depuis un certain temps. Le nombre d'accidents et d'incidents causés par ces wagons avaient commencé à augmenter depuis 1992.

Sur les 17 cas de wagons partis à la dérive mettant en cause des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement qui se sont produits entre 1991 et 1996, quatre sont survenus en voie principale, et deux d'entre eux ont causé une collision.

Un examen des cas de wagons partis à la dérive sur les subdivisions du CN de 1991 à 1996 a révélé que 26 % des cas étaient survenus sur 4 subdivisions seulement, et que la plupart d'entre eux étaient survenus dans des triages ou à proximité. Ces subdivisions sont les suivantes :

Nombre de cas de wagons partis à la dérive par subdivision Subdivision
8 Guelph
7 Kingston
5 Edson
7 Strathroy

Figure 16 : Cas de wagons partis à la dérive par subdivision (de 1991 à 1996Note de bas de page 2, liste partielle)

1.12.2 Bureau de la sécurité des transports

Par le passé, les cas de wagons partis à la dérive sur lesquels le BST a fait une enquête étaient surtout des événements mettant en cause des wagons laissés à l'arrêt et qui avaient été immobilisés uniquement par les freins à air, ou des cas où des wagons n'avaient pas été attelés correctement. Les cas signalés de wagons partis à la dérive, qui à l'origine, avaient été laissés à l'arrêt sans que les freins à air aient été serrés, et où il fallait serrer les freins à main, ont rarement fait l'objet d'une enquête parce qu'on a supposé que les freins n'avaient probablement pas été serrés suffisamment. On a examiné sommairement le fonctionnement des freins à main. Les enquêtes du BST ont donné lieu à la publication de recommandations en 1992 et en 1994 visant à réduire le risque que des wagons partis à la dérive s'engagent sur des voies principales.

1.13 Réaction du Canadien National

1.13.1 Rapport de la Rail Sciences Inc.

Le CN a retenu les services de la Rail Sciences Inc. (RSI) d'Atlanta (Georgie) aux États-Unis, et l'a chargée d'enquêter pour son compte sur l'accident d'Edson. La RSI a terminé son rapport en octobre 1996.

Le rapport de la RSI attribuait la collision à deux causes principales :

  1. Une pression insuffisante des freins à main sur le groupe des wagons à l'arrêt au triage Edson.
  2. Le fait que l'équipe du triage n'a pas soumis ces freins à un essai obligatoire.

En outre, la RSI a déterminé trois facteurs contributifs et a formulé des recommandations à cet égard :

  1. L'absence d'un dérailleur à l'extrémité est du triage Edson. Recommandation de la RSI : Qu'un dérailleur soit installé à Edson.
  2. L'absence d'une alarme au bureau de contrôle de la circulation ferroviaire à Edmonton. Les circuits de signalisation dans le secteur est du triage Edson ne sont pas conçus pour avertir les CCF du type de situation (wagons partis à la dérive) qui est survenue le 12 août 1996. Recommandation de la RSI : Que les signaux soient modifiés pour pouvoir donner l'alerte advenant un déplacement de wagons de ce genre, et que l'alarme soit sonore.
  3. Le CCF de service la nuit de l'accident n'a pas conclu, lorsqu'il a vu les voyants indiquant une occupation inexpliquée de la voie, que des wagons partis à la dérive se déplaçaient sur la voie. Recommandation de la RSI : Que le CN enseigne aux CCF à reconnaître les indications de voie occupée pouvant résulter d'un déplacement de wagons partis à la dérive, et leur enseigne les procédures à suivre advenant un tel déplacement.

1.13.2 Observations et initiatives

Le CN a déclaré que, selon lui, la cause principale de l'accident est que l'équipe d'Edson n'a pas immobilisé suffisamment les wagons (conformément aux règles et instructions applicables), et il a ajouté qu'il ferait tout pour empêcher que d'autres wagons partent à la dérive.

Le CN a signalé qu'il installerait un dérailleur à Edson-est. À la suite d'un examen du réseau, il a installé 600 dérailleurs et en a déplacé 200. Le CN s'est engagé à examiner les avantages qu'il y aurait à modifier le tableau du CCF d'Edson-est pour l'équiper d'un dispositif d'alarme qui indiquerait que des wagons sont partis à la dérive. Il s'est également engagé à enseigner aux CCF comment se rendre compte que la voie est occupée par des wagons partis à la dérive.

1.13.3 Instructions spéciales

Après la collision survenue sur la subdivision Edson, le CN a émis des instructions spéciales connexes à la règle 112 du REF. La section 1.10.5.2 du présent rapport donne un aperçu de ces instructions.

1.14 Initiatives du Canadien Pacifique

Le CP a fait savoir au BST qu'il avait pris des mesures de sécurité après la collision survenue sur la subdivision Edson du CN. Ces mesures concernent les dispositifs d'alarme, le plan d'action en matiére de sécurité, l'immobilisation du matériel par les employés de chemin de fer, et les dérailleurs. Ces mesures de sécurité sont mentionnées à l'annexe 14.

2.0 Analyse

Depuis toujours, les compagnies de chemin de fer canadiennes ont su conserver un système de protection et un ensemble de règles et d'instructions spéciales pour se protéger contre les cas isolés de comportement laissant à désirer et d'autres défaillances de fonctionnement. Elles reconnaissent de plus en plus toutefois que, souvent, un accident n'est pas dû à une seule erreur ou à une défaillance unique, mais plutôt à un ensemble de facteurs reliés entre eux. La collision survenue sur la subdivision Edson et les raisons pour lesquelles elle s'est produite en sont un bon exemple.

Avant d'ouvrir une enquête, le BST se demande avant tout si l'analyse de l'accident permettra de réduire les risques pour les personnes, les biens et l'environnement. Le Bureau détermine les causes et les facteurs qui ont joué un rôle dans l'accident, cerne les manquements à la sécurité et fait des recommandations pour remédier à la situation.

De plus, des situations dangereuses peuvent exister à l'état latent pendant des années si la compagnie et l'organisme de règlementation n'exercent pas une surveillance adéquate. Ces lacunes risquent d'apparaître au grand jour si les mesures de sécurité et les dispositifs de sécurité ne donnent pas les résultats escomptés. C'est cette situation qui prévalait et qui a mené à l'accident.

Le Bureau adopte le point de vue le plus général possible pour déterminer pourquoi un accident s'est produit et quelles sont les mesures préventives à prendre pour réduire les risques. Le Bureau ne s'est pas limité à cerner la ou les causes de l'accident et les facteurs contributifs, mais a poussé l'enquête davantage afin de dégager les causes fondamentales de l'accident.

À cet égard, le Bureau a adopté une approche différente de celle du CN et de ses enquêteurs contractuels de la RSI. Le Bureau est d'accord dans la mesure où la RSI a relevé un effort de freinage insuffisant comme cause principale et l'absence de dérailleur à l'extrémité est du triage Edson, l'absence d'alarme pour signaler la présence de wagons partis à la dérive sur le pupitre du CCF, et le manque d'instructions données au CCF concernant la circulation de matériel roulant non contrôlé. Toutefois, le Bureau a poussé l'enquête davantage afin d'évaluer le rendement des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement et l'état mécanique des deux premiers wagons partis à la dérive ainsi que d'autres questions plus générales comme la gestion de la sécurité et la surveillance règlementaire afin d'établir pourquoi les wagons en question n'ont pas été immobilisés ou pourquoi cette situation n'a pas été décelée pendant que les wagons se dirigeaient vers Yates. Cela a permis au Bureau de découvrir des faits supplémentaires qui ont révélé un certain nombre de problémes de sécurité de base autres que la non-conformité à une règle ou à une instruction spéciale.

2.1 Portée de l'analyse

Comme nous l'avons vu précédemment, de 1991 à 1996, le BST a enregistré 190 cas de wagons partis à la dérive, y compris des groupes de wagons, du matériel roulant et des trains. Dans 17 cas, les wagons ont causé des collisions en voie principale. Dans 5 cas, ils ont causé des déraillements en voie principale.

Compte tenu des graves conséquences des collisions en voie principale causées par des wagons partis à la dérive et du nombre croissant de cas de wagons partis à la dérive, on considére que les risques de dérive sont élevés. La gravité de la collision survenue près d'Edson le 12 août 1996 et la possibilité de prendre des mesures correctives définitives pour réduire les risques de récurrence ont motivé le BST à faire une enquête de grande envergure sur cet accident.

Le BST a essayé avant tout de déterminer pourquoi les 20 wagons placés sur la voie 4 du triage Edson ont commencé à circuler, pourquoi on ne s'est pas aperçu qu'ils bougeaient et pourquoi on ne les a pas empêchés d'accélérer et de s'engager sur une voie où se trouvait un train qui approchait et dont l'équipe ne se doutait de rien.

L'analyse examine également les points suivants :

2.2 Sécurité de l'exploitation

2.2.1 Mesures préventives initiales

Un groupe de 20 wagons provenant de la voie 4, au triage Edson, ont franchi l'aiguillage de voie d'accés est et ont roulé vers la voie principale, ce qui ne se serait pas produit si les freins à main des wagons avaient exercé un effort de freinage suffisant pour empêcher les wagons de bouger.

Pour prévenir ce type d'événement à Edson, le CN comptait avant tout sur :

2.2.2 Mesures préventives secondaires

Dans l'industrie ferroviaire, on reconnaît de plus en plus l'importance des moyens de protection secondaires visant à empêcher les wagons partis à la dérive de s'engager sur des voies principales. Des dispositifs comme les dérailleurs, et des mesures visant à prévenir les CCF des circulations imprévues et non autorisées, peuvent s'avérer de bons moyens de protection secondaires. Un tel dispositif de sécurité (le dérailleur) avait été enlevé environ cinq ans avant la collision.

La collision survenue à Yates montre bien qu'on ne peut compter simplement sur la conformité rigoureuse aux règles d'exploitation par les employés de chemin de fer pour assurer la sécurité. Cette stratégie s'est révélée insuffisante. En fait, il faut absolument prendre des mesures de prévention secondaires au cas où les mesures de sécurité principales feraient défaut.

2.3 L'équipe de train à Edson

2.3.1 Compétence

Les membres de l'équipe chargés de placer les 20 wagons sur la voie 4, à Edson, possédaient les qualifications et l'expérience nécessaires pour remplir leurs fonctions en vertu des exigences de la Compagnie. Le plan qu'ils avaient établi pour les manoeuvres à effectuer avec les 20 wagons en vue du retour à Edmonton à bord du train 404 était raisonnable. Il n'y avait aucune raison apparente qui aurait pu les obliger à se dépêcher ou à se préoccuper d'autres choses tout en effectuant lesdites manoeuvres.

Tous les membres de l'équipe connaissaient bien le triage Edson ainsi que les exigences de la règle 112 du REF. En outre, ils avaient signé le bulletin contenant des instructions spéciales sur la façon de déplacer les wagons pour s'assurer que les freins à main étaient serrés et que les wagons étaient immobilisés. Ils ont avoué toutefois qu'ils ne connaissaient pas parfaitement ces instructions et qu'ils n'avaient pas reçu toute la formation qui leur aurait permis de s'y conformer, toutefois aucun d'entre eux n'avait demandé d'explications sur la signification des instructions (une exigence des règles). Leur tâche n'avait rien de particuliérement difficile ou d'inhabituel. La visibilité était réduite parce qu'il faisait nuit, mais les conditions météo n'ont pas nui à l'exécution des tâches.

2.3.2 Formation

L'enquête a permis d'en apprendre davantage sur le rendement prévu des freins à main. Ces renseignements pourraient s'avérer d'une importance capitale en ce qu'ils pourraient permettre d'assurer une meilleure immobilisation des wagons. Le contenu des séances de formation des équipes de train et d'autres employés de chemin de fer ne permet pas aux stagiaires d'acquérir une compréhension parfaite des exigences en matiére d'immobilisation des wagons.

Les faits révélent également que le personnel d'exploitation n'avait pas reçu la formation lui permettant d'acquérir une connaissance parfaite du mécanisme des freins à main et n'avait pas reçu la formation qui lui aurait permis de comprendre la variabilité du serrage des freins. En outre, la formation dispensée aux CCF ne les renseignait pas suffisamment sur la façon dont les voyants lumineux fonctionnaient, ni sur l'importance des signaux successifs qui pouvaient indiquer des wagons partis à la dérive ou une circulation imprévue.

2.3.3 Travail d'équipe

La conduite d'un train en toute sécurité, les manoeuvres et l'immobilisation des wagons sont des manoeuvres qui font appel au travail d'équipe. L'enquête a révélé que le travail effectué par les membres de l'équipe de train d'Edson dénotait une certaine planification collective. Pendant les manoeuvres, les membres de l'équipe ont travaillé en équipe. Toutefois, lors du serrage des freins à main, les membres de l'équipe ont eu tendance à travailler séparément et se sont fiés à l'expérience du chef de train adjoint pour s'assurer que les wagons étaient immobilisés.

Trois autres faits se sont révélés importants en ce qui concerne l'immobilisation des wagons au triage Edson :

2.4 Immobilisation des wagons

Ce sont avant tout les mesures prises par l'équipe de train qui a placé et immobilisé les wagons au triage Edson, ainsi que le rendement du mécanisme et de la timonerie des freins à main, qui permettent d'expliquer pourquoi les wagons ont quitté la voie 4. Les renseignements qui permettent d'évaluer ces facteurs sont les suivants :

2.4.1 Manoeuvres

Les données du consignateur d'événements de la locomotive de manoeuvre correspondent en général aux souvenirs de l'équipe concernant la chronologie des manoeuvres. Toutefois, les souvenirs des membres de l'équipe sont moins précis que les renseignements fournis par le consignateur d'événements. Le consignateur d'événements donne l'heure exacte à laquelle la locomotive s'arrête, repart et circule. Les données ainsi consignées sont jugées plus fiables pour ce qui est des heures auxquelles ont eu lieu les manoeuvres et les heures d'immobilisation des wagons.

2.4.1.1 Ordre chronologique

La figure 17 donne l'ordre chronologique des manoeuvres effectuées au triage Edson. Il s'agit de la description la plus probable de ce qui s'est réellement produit (d'après les souvenirs des membres de l'équipe de train et les données du consignateur d'événements de la locomotive). Il est arrivé que les souvenirs des trois membres de l'équipe divergeaient. Toutefois, ces différences n'affectent en rien l'ordre chronologique suivant :

Figure 17
Triage Edson : Ordre chronologique des manoeuvres

2.4.1.2 Scénarios plausibles

Questions découlant des renseignements présentés au BST :

Les hypothéses suivantes ont été envisagées :

Il est difficile de prouver un ou plusieurs de ces scénarios à la lumiére des faits disponibles. Toutefois, les faits suffisent à indiquer quel scénario est le plus plausible.

2.4.1.3 Serrage des freins à main

Si les 20 wagons se trouvant à Edson ont commencé à circuler vers l'est en direction de Yates, il ne fait pas de doute que l'effort exercé par les semelles de frein a été insuffisant pour les immobiliser, puisque les wagons ont effectivement bougé. Toutefois, le fait que les wagons se sont mis à circuler ne constitue pas en soi une preuve que les freins à main n'avaient pas été serrés suffisamment quand les wagons ont été immobilisés pour la premiére fois. Ci-après un exposé plus approfondi de la situation.

Tout d'abord, il faut déterminer ce qui aurait constitué un serrage suffisant des freins à main des wagons qui se trouvaient sur cette pente et qui étaient soumis à une brise légére. Des essais ont permis de déterminer ce qui suit :

Les résultats ci-dessus n'indiquent pas clairement ce qui constitue un frein à main suffisamment serré pour empêcher les wagons à l'essai de bouger. Comme les résultats du serrage d'un frein à main jusqu'à ce que celui-ci ait une certaine tension de chaîne ne peuvent se comparer à ceux de la diminution de la tension de chaîne, cela pose un probléme. De plus, comme les freins ne bénéficient pas nécessairement d'une forte tension de chaîne lorsqu'ils sont serrés pour la premiére fois (à cause de la résistance des freins à la friction), la réduction du couple de serrage du volant ne fait pas nécessairement diminuer sur-le-champ une tension de chaîne élevée.

À la lumiére des essais où la tension exercée sur la chaîne du ou des freins à main était augmentée jusqu'à un certain point, il appert qu'un couple de serrage de 95 à 105 pieds-livres est nécessaire pour que les freins à main des wagons à l'essai empêchent les 20 wagons de bouger (voir le premier et le quatrième points ci-dessus).

Compte tenu des essais où les freins ont été desserrés jusqu'à un certain point, il appert qu'un couple de serrage dépassant les 70 à 75 pieds-livres est nécessaire pour que les freins à main des wagons à l'essai empêchent les 20 wagons de bouger (voir le troisième et le cinquième points ci-dessus).

Les résultats des tests de rendement des freins à main indiquent que l'effort de freinage varie considérablement d'un wagon à l'autre même si le couple de serrage du volant est le même. Par exemple, un serrage de frein à main moyen d'environ 65 pieds-livres de couple de serrage du volant (fondé sur des mesures relatives à des wagons immobilisés choisis au hasard) peut produire un effort exercé par les semelles de frein de 8 000 à 19 000 livres environ.

Par ailleurs, un opérateur pourrait donner un couple de serrage de 90 pieds-livres à un wagon CNWX et n'obtenir qu'un effort de 10 000 livres exercé par les semelles de frein, soit l'effort moyen pouvant être obtenu au moyen de 55 à 60 pieds-livres seulement de couple de serrage. Cette variabilité est si importante qu'il faut être trés prudent quand on applique les résultats des essais effectués avec certains wagons CNWX pour déterminer ce qui aurait été un serrage suffisant des freins à main des deux premiers wagons partis à la dérive.

Ces résultats ne permettent donc pas de préciser ce qui aurait été un serrage suffisant des freins à main du premier et du deuxième wagons partis à la dérive. Les résultats indiquent toutefois qu'un couple de serrage se situant quelque part entre un couple de serrage de 75 pieds-livres et un couple de serrage de 95 pieds-livres (soit le couple de serrage le plus bas permettant d'assurer l'immobilisation des wagons, et le couple de serrage le plus élevé lorsque ceux-ci ont commencé à se déplacer) aurait probablement tout juste suffi à immobiliser les 20 wagons sur la voie 4 (c'est-à-dire si le rendement des freins à main du premier et du deuxième wagons partis à la dérive était comparable à celui des wagons à l'essai).

Le BST a mis au point un modéle informatique qui lui a permis de déterminer l'effort de freinage exercé par les freins à main correspondant au temps qu'il a fallu aux wagons partis à la dérive pour se rendre de la voie 4 au point d'impact. En convertissant cet effort de freinage au couple de serrage nécessaire pour l'obtenir, le modéle a indiqué :

Ces résultats confirment qu'au moins un frein à main avait été serré au moins au couple de serrage «normal» déterminé par l'enquête, soit environ 65 pieds-livres, sinon à un couple de serrage supérieur. Ils indiquent également que l'intensité avec laquelle le ou les freins à main ont été serrés était probablement inférieure à celle qui pourrait passer pour «suffisante» d'après les résultats des essais de frein à main effectués après l'accident (de 64 à 78 pieds-livres de couple de serrage plutôt qu'à un couple de serrage de 75 à 95 pieds-livres).

L'examen effectué par le BST du mécanisme du frein à main écrasé du premier wagon semble indiquer que le couple de serrage du volant était d'environ 80 pieds-livres et que la tension de chaîne était d'environ 4 750 livres au moment de l'impact. Ce résultat correspond à celui que les essais sur place ont indiqué comme étant suffisant pour immobiliser les 20 wagons (couple de serrage de 75 à 95 pieds-livres), et il avoisine la limite supérieure du couple de serrage relatif aux wagons partis à la dérive, obtenue grâce au modéle informatique du BST (couple de serrage de 64 à 78 pieds-livres).

Compte tenu des résultats des essais sur le terrain, du modéle informatique et des essais portant sur le mécanisme du premier frein à main, si un couple de serrage de 80 pieds-livres a été donné dans le cas du premier wagon parti à la dérive, l'effort exercé par les semelles de frein a dû être inférieur à celui qu'on pourrait prévoir dans le cas d'un wagon CNWX moyen dont le couple de serrage du frein à main serait le même. Les essais sur le terrain indiquent que si le couple de serrage du volant de frein à main est de 80 pieds-livres, la tension de chaîne peut varier d'environ 3 000 à 5 500 livres, et l'effort exercé par les semelles de frein, d'environ 10 000 à plus de 20 000 livres.

Si les marques en bandes sur les roues gauches du premier wagon parti à la dérive ont été faites juste avant l'impact, on pourrait penser que le frein à main du premier wagon avait été serré. Si l'une des roues portant des marques en bandes provenait du deuxième wagon parti à la dérive (ce qui est fort probable), et vu l'énorme variabilité de l'effort exercé par les semelles de frein de tels wagons, on pourrait penser qu'au moins une semelle de frein exerçait de la pression sur une table de roulement du deuxième wagon parti à la dérive. Toutefois, on ne peut prouver ni l'une ni l'autre de ces hypothéses.

Compte tenu de ce qui précéde, on peut conclure que :

Compte tenu des renseignements qui précédent, il est probable que les souvenirs du chef de train adjoint sont exacts, c'est-à-dire que deux freins à main avaient été serrés pour immobiliser les 20 wagons. Toutefois, il est également probable que l'effort de freinage total prévu ne s'est pas concr étisé.

En général, les souvenirs du chef de train adjoint à propos de ce qui s'est passé sont exacts. Il a probablement fait ce qu'il dit avoir fait, mais vraisemblablement avec les conséquences suivantes :

2.4.2 Intervention humaine

Le consignateur d'événements de la locomotive d'Edson indique que les 20 wagons ont été laissés à l'arrêt vers 23 h 6 min 33 s et que les locomotives sont parties vers l'ouest, en s'éloignant des wagons, vers 23 h 7 min 15 s. Il est probable que s'il y avait eu un vandale, l'équipe l'aurait aperçu pendant ce temps.

Tout indique que les wagons ont commencé à circuler peu après avoir été laissés à l'arrêt, mais qu'ils ne se sont tout d'abord déplacés qu'à trés basse vitesse. Si un vandale avait desserré le frein à main du deuxième wagon de sorte que ce dernier n'arrivait plus à empêcher les 20 wagons de bouger, il aurait fallu qu'il s'écoule un certain temps entre le moment où l'équipe a quitté les wagons et le moment où les wagons ont commencé à rouler. Les essais sur le terrain ont indiqué que sans frein à main, il aurait fallu environ cinq minutes aux 20 wagons partis à la dérive pour se rendre à plus de 2 645 pieds à l'est de l'endroit où ils avaient été laissés. Lors de l'essai au cours duquel les freins avaient été serrés tout juste insuffisamment pour immobiliser les 20 wagons, il a fallu environ une minute de plus aux wagons pour couvrir la même distance.

Il semble par conséquent qu'un vandale ou un saboteur n'aurait disposé que de trés peu de temps pour desserrer le frein du deuxième wagon parti à la dérive. C'est une explication possible, mais il faut se rappeler que personne n'a été aperçu, et que pour que quelqu'un puisse procéder à cette intervention dans aussi peu de temps, il aurait fallu que cette personne soit trés au fait du mécanisme de desserrage des freins à main et qu'elle ait couru le risque d'être aperçue par l'équipe.

On peut donc en conclure qu'il est trés peu probable, bien que ce soit possible, que le frein à main du deuxième wagon parti à la dérive ait été desserré par un vandale ou un saboteur.

2.4.3 Mauvais fonctionnement

Le fait que le rouleau du principal levier vertical du frein à main du deuxième wagon parti à la dérive était absent donne à penser que le grippage de ce levier était possible et aurait pu empêcher les semelles de frein d'exercer un effort suffisant. Le chef de train adjoint s'est souvenu que le frein s'était serré rapidement et avait été serré à fond.

Le chef de train adjoint a également déclaré que la chaîne du frein à main du premier wagon parti à la dérive était plus longue que la normale. Il se pourrait que cette impression soit attribuable au serrage rapide du frein à main du deuxième wagon parti à la dérive et que cela ne signifie pas que la chaîne était plus longue qu'une chaîne normale ou que le frein à main fonctionnait mal. Il est trés peu probable que le frein à main ait été mal ajusté. Cela aurait pu provoquer le déplacement du levier principal jusqu'au bout de sa fente et faire en sorte qu'il entre en contact avec le châssis du wagon. Il aurait pu s'effondrer (si le couple de serrage avait été d'environ 80 pieds-livres), en donnant l'impression que le frein à main était serré à fond, même s'il ne l'était pas. C'est ainsi qu'un wagon dont la semelle de frein à main avait été vérifiée à Edmonton (le CNWX 109057) a passé pour avoir un levier atteignant le bout de la fente dans le cas d'un couple de serrage de 85 pieds-livres, alors que l'effort mesuré exercé par les semelles de frein n'était que de 13 670 livres. Il est également fort peu probable que le frein à main du deuxième wagon parti à la dérive ait été partiellement serré avant que le chef de train adjoint ne le serre, lui donnant l'impression que le frein s'était serré rapidement.

L'inspection des freins à main (l'engrenage) ne laisse pas supposer que les freins à main avaient mal fonctionné sur l'un ou l'autre des wagons, mais au cours des essais faits sur d'autres wagons, on a observé que les faibles tensions de chaîne diminuaient parfois d'elles-mêmes après le serrage des freins à main.

Il se peut également, bien que ce soit trés peu probable, que la chaîne ait été plus longue que la normale. Dans un cas aussi invraisemblable, le couple de serrage du frein à main du premier wagon aurait pu être inférieur à 80 pieds-livres, mais le serrage du frein à main du deuxième wagon aurait alors été relativement plus important.

Des essais ont également démontré qu'un frein à main non lubrifié, sans ressort de cliquet, peut être serré au moment où le cliquet de blocage par gravité est désenclenché entièrement ou partiellement. Par conséquent, il est possible que le frein à main du premier wagon ait été serré sans que le cliquet de blocage par gravité ait été entièrement enclenché. On ignore si un facteur quelconque, comme le franchissement de trois aiguillages par le premier wagon parti à la dérive, aurait dégagé partiellement le cliquet. Comme les wagons circulaient déjà à ce moment-là, il est évident que le serrage des freins à main était insuffisant, et, puisque l'augmentation de la vitesse était plutôt faible au moment du franchissement des deux aiguillages, on estime qu'il est probable que le cliquet de blocage par gravité a été enclenché. Le premier frein à main écrasé ne portait aucune marque donnant à penser que ce cliquet tournait librement au moment de l'impact.

Le fait que le ressort sur le cliquet de blocage par gravité du frein à main du premier wagon parti à la dérive était absent a été examiné en tenant compte de la secousse produite par le jeu des attelages qui se refermait au moment du serrage du frein. Il est probable que tout choc causé à ce moment-là n'aurait fait qu'augmenter les chances pour que le cliquet soit entièrement enclenché. En outre, comme le processus de serrage du frein s'est poursuivi après le jeu des attelages, on a écarté l'hypothése selon laquelle un frein serré maintenu uniquement par la friction dans son mécanisme d'engrenage et par l'enclenchement partiel de son cliquet aurait été desserré par le jeu des attelages qui se refermait.

La possibilité du grippage du principal levier vertical, le manque de lubrification des composants rouillés et usés de l'engrenage du frein à main, le mauvais ajustage apparent de la timonerie et la variabilité du rendement en ce qui concerne la relation entre le couple de serrage du frein à main et l'effort exercé par les semelles de frein d'un wagon à un autre, auraient eu tendance à rendre le serrage d'un frein à main suffisant plus difficile qu'il ne l'aurait été si le frein avait été bien entretenu. Chacune de ces conditions, ou une combinaison de celles-ci, aurait pu donner à l'opérateur l'impression que le frein était suffisamment serré, même si ce n'était pas le cas.

2.4.4 Formation et instructions

Les agents de train et de triage des chemins de fer reçoivent une formation initiale sur les aspects pratiques du serrage et du desserrage des freins à main. Les stagiaires doivent travailler sous la surveillance d'employés expérimentés. Les chemins de fer comptent énormément sur ce mode de formation en milieu de travail pour s'assurer que leurs employés pourront acquérir la formation qui leur permettra de répondre aux exigences en matiére d'immobilisation de wagons à l'arrêt. La formation en milieu de travail offre bon nombre d'avantages concrets et peut s'avérer trés utile. Cette formation exige toutefois une structure formelle permettant de réduire au minimum les risques de lacunes dans les méthodes de travail qu'on enseigne aux stagiaires. L'efficacité accrue est tributaire d'un cadre ou d'une stratégie en vigueur dans l'ensemble de la Compagnie et faisant en sorte que les méthodes normales soient universellement reconnues et suivies. La formation en milieu de travail doit également comprendre un élément de surveillance des séances de formation. Or, le CN n'avait adopté, dans l'ensemble du réseau, aucune stratégie de formation qui lui aurait permis de s'assurer que les stagiaires apprenaient d'une façon uniforme les techniques normales d'immobilisation des wagons.

Le CN fournissait aux équipes de train travaillant au triage Edson des règles et des instructions générales relatives à l'immobilisation des wagons. Ces règles obligeaient les employés à vérifier s'ils serraient un nombre suffisant de freins à main pour empêcher les wagons de bouger. Elles précisaient qu'un «nombre minimum de freins à main» signifiait «au moins un frein». Elles stipulaient également qu'il fallait déplacer le wagon pour vérifier si la semelle de frein appuyait sur la table de roulement. Il n'y avait aucune instruction spéciale locale applicable aux manoeuvres exécutées à Edson, qui aurait permis de renseigner davantage les intéressés sur le nombre de freins à main à serrer pour s'assurer que les wagons à l'arrêt ne bougeraient pas.

En l'absence de telles instructions spéciales connexes à la règle 112 du REF, un nombre «suffisant» de freins à main ne pouvait que signifier suffisamment de freins à main serrés pour empêcher un groupe de wagons donné de bouger, compte tenu du poids et du type de wagons, de la pente de la voie où ils sont laissés, ainsi que de la vitesse et de la direction réelles et possibles du vent.

2.4.5 Conformité aux règles

S'ils se conforment aux instructions spéciales, les employés peuvent recevoir de la rétroaction qui leur indique que les freins ont été serrés et que les semelles de frein exercent un certain effort de freinage (qui n'est pas connu), mais les employés qui serrent et desserrent les freins à main ne reçoivent aucune rétroaction définitive leur confirmant que l'effort exercé par les semelles de frein est suffisant. Par conséquent, ils n'ont aucun moyen de savoir s'ils répondent parfaitement aux attentes de la direction de la Compagnie chaque fois que des wagons sont immobilisés conformément à la règle 112 du REF.

Le frein à main produit un effort de freinage lorsque l'employé tourne le volant du frein à main. Plus le couple de serrage est important, plus la tension de chaîne est élevée, et plus l'effort exercé par les semelles est important. Un nombre «suffisant» de freins à main signifie également un nombre adéquat de freins à main serrés avec couple de serrage du volant, de façon que l'effort exercé par les semelles dépasse la force de gravité et celle du vent qui s'exercent sur les wagons à l'arrêt (compte tenu également de la résistance (force antimouvement) naturelle des wagons dont le frein à main n'a pas été serré).

Compte tenu des lignes directrices et des instructions disponibles, la détermination de ce qui constitue un serrage «suffisant» du frein à main est une tâche qui exige plus de renseignements que ceux que les employés avaient à leur disposition, ainsi qu'une meilleure compréhension des variables connexes et de leur interrelation que celle que leur formation leur avait permis d'acquérir. À moins que les employés ne comprennent ces facteurs et n'en tiennent compte, la détermination de ce qui constitue un serrage «suffisant» des freins à main est fondée principalement sur l'expérience personnelle et celle des collégues, acquises dans des situations où des wagons soit n'ont pas bougé, soit sont partis à la dérive.

Avant la collision survenue sur la subdivision Edson, la direction du CN n'avait émis aucune instruction spéciale sur le nombre de freins à main qu'il fallait serrer à Edson, ni dans quelle mesure il fallait les serrer. En revanche, elle avait émis des instructions spéciales à Jasper, lorsque des dérailleurs avaient été enlevés en 1990, pour indiquer qu'il fallait serrer au moins six freins à main pour un train laissé sans matériel de traction.

Les méthodes d'exploitation normalisées ne tiennent pas compte du fait que les freins à main peuvent être plus ou moins serrés, selon le couple de serrage de leur volant. Il n'en demeure pas moins que le couple de serrage que les employés peuvent physiquement produire grâce au volant varie de l'un à l'autre. De la même façon, les instructions sur l'essai consistant à déplacer légérement les wagons ne tenaient pas compte du fait que la preuve qu'une semelle de frein exerce un effort sur une table de roulement ne confirme aucunement que cet effort est suffisant pour empêcher les wagons laissés à l'arrêt de bouger sous l'effet de la force de gravité et du vent. Cela signifie que chaque membre de l'équipe devait décider lui-même du nombre de freins à serrer et dans quelle mesure ces freins devaient être serrés. Les lignes directrices à l'intention des employés ne leur permettaient pas de s'assurer qu'ils immobilisaient toujours complétement le matériel à l'arrêt, même si les freins à main fonctionnaient bien.

Les faits révélent que le bruit fait par le serrage du frein à main sur le premier wagon parti à la dérive aurait été bien différent que sur d'autres wagons CNWX parce que le ressort de cliquet était manquant. Le paragraphe 17.3 de l'article 8 des Instructions générales d'exploitation du CN exige que l'opérateur fasse une inspection visuelle des composants de frein à main, y compris le cliquet d'arrêt, avant le serrage du frein à main. Ces instructions se rattachent aux vérifications visuelles et il est difficile, voire impossible dans certains cas, de voir tous les composants à cause du carter de frein à main. Le chef de train adjoint ne se souvient pas d'avoir essayé de faire une inspection visuelle des composants du frein à main avant de serrer le frein; compte tenu de la conception du frein à main, il n'aurait pas pu voir si le ressort de cliquet était manquant. En d'autres termes, il n'aurait pas pu respecter à la lettre les exigences du paragraphe 17.3 de l'article 8 des Instructions générales d'exploitation du CN. Toutefois, le bruit du serrage du frein à main aurait été différent du bruit fait par un wagon CNWX moyen muni d'un ressort de cliquet, mais le chef de train adjoint n'a, semble-t-il, pas perçu cet état de choses comme une situation anormale. Lorsqu'on tourne rapidement le volant d'un frein à main de grande puissance, et lorsque l'embrayage se met en place, le ressort de cliquet ne produit pas le bruit normal de roue à rochet qui résulte du serrage d'un frein à main. De plus, les employés sont peut-être conditionnés à entendre le bruit des freins à main sans ressort de cliquet. Les freins à main qu'on retrouve sur un grand nombre de wagons couverts ne font pas un bruit prononcé de roue à rochet parce qu'ils ne sont pas équipés de ressorts de cliquet. Comme il n'est pas inhabituel qu'une roue à rochet fasse un bruit inférieur à la normale, l'employé qui entend ce bruit n'est pas nécessairement porté à penser que quelque chose ne va pas. Le CN considére néanmoins que le fait de ne pas avoir remarqué que le ressort de cliquet manquait constitue une dérogation à ses Instructions générales d'exploitation.

Les règles doivent établir des normes claires, et elles ne peuvent faire état de variations pour parer à toute éventualité. Toutefois, il est essentiel que la formation relative aux règles et la supervision indiquent comment la règle s'applique concrétement sur le terrain si l'on veut atteindre l'objectif visé (dans ce cas-ci, l'immobilisation des wagons).

Les wagons laissés à l'arrêt sur une pente et dont les freins ont apparemment été serrés sont des wagons-trémies couverts à céréales CNWX du gouvernement. Les essais ont montré que l'effort exercé par les semelles de frein à main d'un wagon pouvait être trés différent de celui exercé par les semelles d'un autre, même si le couple de serrage du volant de frein à main est identique. En général, on n'a compris cette caractéristique des freins à main que lorsqu'on a analysé les résultats des essais de rendement.

En observant le mécanisme du frein à main du premier et du deuxième wagons partis à la dérive (et d'autres freins à main fournis par le CN), on a constaté qu'ils n'étaient pratiquement pas lubrifiés, de sorte qu'il était d'autant plus difficile de serrer le frein pour que les semelles exercent tout l'effort possible. De plus, il y a lieu de croire à un grippage éventuel du levier parce qu'il heurtait le bout de la fente, ou à cause d'un rouleau manquant. Il se peut que l'un ou l'autre de ces facteurs ait réduit l'efficacité du levier. Dans ce cas, un employé aurait pu penser à tort qu'il avait serré suffisamment le frein à main.

L'équipe a apparemment examiné les roues des wagons à la lumiére d'une lanterne pour voir si elles bougeaient une fois les locomotives dételées, mais aucun des membres n'a vérifié le serrage des freins à main en déplaçant légérement les wagons au moyen de la locomotive pour s'assurer que l'effort de freinage était suffisant. Ils n'ont pas non plus examiné les semelles de frein (contrairement aux instructions). Comme il est mentionné précédemment, toutefois, ces instructions spéciales ne tenaient pas compte du fait que la preuve qu'une semelle de frein exerce un effort sur une table de roulement ne confirme aucunement que cet effort est suffisant pour empêcher les wagons laissés à l'arrêt de bouger sous l'effet de la force de gravité et du vent.

2.4.6 Supervision et surveillance

À la suite de la recommandation R92-14 du BST, TC avait répondu qu'il allait augmenter le niveau de surveillance accordé aux chemins de fer sous juridiction fédérale pour s'assurer que le personnel applique correctement les procédures normalisées d'exploitation lorsqu'il immobilise des wagons à l'arrêt. TC se concentrait davantage sur l'immobilisation réelle des wagons plutôt que sur la surveillance de l'efficacité de la formation et de la supervision de cette procédure. Comme on continue de relever des cas de wagons partis à la dérive sur la voie principale dans certaines subdivisions, les préoccupations que le BST a formulées dans le passé au sujet de la supervision et de la formation assurées par les compagnies de chemin de fer restent valables. Le BST constate toutefois que la fréquence des cas de wagons partis à la dérive a diminué au cours de la premiére partie de 1997.

2.5 Contrôle de la circulation ferroviaire

2.5.1 Matériel

Le pupitre du CCF d'Edson-est était d'une conception qui, de concert avec les autres fonctions du CCF (dont bon nombre l'obligeaient à regarder son pupitre plutôt que son tableau d'affichage de la circulation), réduisait ses possibilités de remarquer l'allumage soudain des voyants du tableau d'affichage. Comme le travail du CCF consiste avant tout à regarder son pupitre, il ne faut pas s'attendre à ce que le CCF ait le regard continuellement tourné vers le tableau d'affichage de la circulation.

D'un point de vue ergonomique, le pupitre était conçu de telle sorte que les voyants qui annonçaient la collision imminente étaient placés à un endroit qui n'était pas situé dans l'angle de vision préféré du CCF. Comme les voyants étaient dans la zone de vision secondaire, le CCF avait besoin d'une stimulation supplémentaire pour apercevoir immédiatement les voyants passant au jaune, ce qui signifiait une circulation non autorisée de matériel. Si une alarme se déclenchait chaque fois que les voyants s'allument de façon imprévue, les CCF pourraient se rendre compte que des wagons sont partis à la dérive.

2.5.2 Formation et instructions

Peu importe la conception du pupitre, on avait enseigné au CCF que son pupitre avait une «alarme 429» pour lui permettre de s'apercevoir de la circulation d'un train enregistré ou prévu, mais il n'y avait aucune alarme semblable pour déceler la circulation de matériel non autorisé, comme des wagons partis à la dérive.

Le CCF d'Edson-est et ses collégues n'avaient pas reçu une formation suffisante pour pouvoir reconnaître les cas de wagons partis à la dérive et y réagir. Rétrospectivement, l'allumage successif des voyants indiquait une circulation non autorisée, mais la formation qu'avait reçue le CCF, son expérience et les instructions en vigueur à ce moment-là l'amenaient toutes à conclure que l'allumage d'un voyant ou d'une série de voyants signifiait un mauvais fonctionnement exigeant seulement qu'il prévienne le préposé à l'entretien des signaux. Sa formation venait également étayer la ligne de pensée selon laquelle une fois qu'il avait signalé le probléme au Groupe de la signalisation et des communications, la suite n'était plus de sa compétence et il pouvait passer à autre chose plutôt que d'accorder la priorité à ce probléme.

2.6 Dérailleur

2.6.1 Enlévement

Si un dispositif de sécurité est enlevé, les conséquences doivent être évaluées à fond et des mesures compensatoires doivent être prises. Au triage Edson, toutefois, aucun directeur du CN n'a pu se rappeler exactement pourquoi le dérailleur avait été enlevé, ni qui avait décidé de l'enlever. Il semble bien qu'on ait enlevé le dérailleur en question sans bien évaluer les conséquences sur la sécurité. Le CSST de Calder a soulevé la question, mais n'a pas poussé plus loin. On n'a installé aucun dispositif de sécurité, ni établi de procédure de sécurité compensatoire.

2.6.2 Contrôles internes

La norme CMN 3603 (une norme des services techniques) du CN stipulait qui devait ordonner l'installation ou l'enlévement des dérailleurs (l'ingénieur de district dans ce cas-ci) et à qui il fallait signaler l'installation ou l'enlévement (le responsable des transports que concernait la chose). L'ingénieur de district en poste au moment de l'enlévement du dérailleur a dit qu'il n'avait pas ordonné l'enlévement du dérailleur et qu'il ne se rappelait pas d'avoir été avisé au moment de son enlévement. Les responsables des transports concernés (le surintendant et le surintendant adjoint à ce moment-là) ne se souvenaient également pas d'avoir été informés de l'enlévement du dérailleur au moment de son enlévement. En conséquence, il semble que la norme CMN 3603 du CN n'ait pas été respectée en ce qui concerne l'enlévement du dérailleur à Edson-est. Aucun membre du personnel du CN ne savait s'il y avait des documents relatifs à l'enlévement du dérailleur, ce qui suggére qu'il n'existait pas de système de consignation des modifications apportées. Le surintendant adjoint a été informé de l'enlévement du dérailleur par une lettre d'un membre du CSST qui se plaignait de l'enlévement du dérailleur. Le surintendant adjoint a répondu que le dérailleur était devenu désuet et que les équipes étaient tenues d'immobiliser le matériel roulant conformément à la règle 112 du REF. Le surintendant ne se souvient pas d'avoir été mis au courant de la lettre du CSST ni de la réponse faite par le surintendant adjoint. Le CN n'avait aucun système de sécurité officiel en matiére d'enlévement ou d'installation des dérailleurs. Rien ne permettait de vérifier l'installation ou l'enlévement des dérailleurs, et ce, même si un dérailleur est un dispositif de sécurité destiné à empêcher le matériel roulant parti à la dérive de s'engager sur une voie principale et de faire ainsi courir des risques aux trains qui approchent.

2.7 Dépistage

Ni l'équipe de train qui travaillait à Edson, ni le CCF, n'ont été soumis, dans un délai scientifiquement raisonnable, à des tests exhaustifs visant à déceler la présence de boissons alcooliques ou d'autres substances. Les tests effectués par le CN se limitaient à des analyses visant à déceler la présence de drogues illégales, et ils ont été exécutés trop longtemps après l'accident pour fournir des indications fiables.

Le dépistage de la présence de substances illégales par les employeurs et la police sert en général à déterminer s'il y a lieu de prendre des mesures disciplinaires ou judiciaires. Toutefois, le BST a des préoccupations différentes. Le Bureau cherche avant tout à savoir si la présence d'une substance quelconque dans le corps d'un employé ayant subi un accident de transport aurait nui, ou aurait vraisemblablement pu nuire, au rendement de cette personne sur le plan de la sécurité. Plutôt que d'essayer de déterminer si la limite légale a été dépassée, le BST essaie de déceler la plus petite quantité susceptible d'avoir compromis le rendement de la personne.

2.8 Gestion de la sécurité

2.8.1 Atténuation des risques

Les compagnies de chemin de fer doivent déterminer les dangers et évaluer et gérer efficacement les risques si elles veulent réduire le plus possible les risques d'accidents et le nombre d'accidents. À cette fin, les moyens de protection contre l'erreur humaine et contre les défaillances mécaniques doivent intervenir, s'il y a lieu.

À la suite de l'accident, le CN a énoncé des règles nouvelles et plus explicites relativement au nombre de freins à main à serrer lorsqu'un nombre de wagons donné doivent être immobilisés. Ces règles semblent constituer une amélioration sensible par rapport à celles qui étaient en vigueur au moment de la collision. Le Bureau n'est au courant d'aucun nouveau programme de formation pratique en milieu de travail qui viendrait s'ajouter à ces règles nouvelles pour faire en sorte que les équipes soient conscientes des variations susceptibles de se produire dans le nombre de pieds-livres de couple de serrage d'un employé à l'autre et d'un frein à main à l'autre. Le CN a réalisé un film vidéo qui s'intitule L'exécution sécuritaire des manoeuvres que tous les employés sont tenus de visionner dans le cadre de séances de formation spéciales sur les bonnes méthodes d'immobilisation des wagons.

Les nouvelles instructions sur le nombre minimum de freins à main à serrer pour immobiliser des wagons stipulent qu'il faut serrer au moins trois freins à main si l'on veut empêcher 20 wagons de bouger. Cette exigence semble suffisante, car elle offre une marge de sécurité considérable pour des wagons CNWX moyens et des employés dont les capacités physiques sont moyennes, lorsque lesdits wagons se trouvent sur une pente semblable à celle de la voie 4. Il se pourrait que la marge de sécurité devienne nulle si les freins à main les moins performants sont serrés par l'employé le plus faible. Cependant, les nouvelles instructions en matiére d'immobilisation des wagons ne tiennent toujours pas compte de la force exercée par une pente abrupte ou un vent violent. Ces facteurs sont présumément pris en compte grâce à des instructions spéciales locales, à une meilleure formation ou supervision, de même qu'à l'implantation de moyens de protection secondaires que constituent les dérailleurs dans des zones critiques.

Le CN a installé quelque 600 dérailleurs supplémentaires et en a déplacé 200, au terme d'une inspection à travers tout le réseau effectuée à la suite de l'accident sur la subdivision Edson. Les nouveaux dérailleurs et ceux qui ont été déplacés fourniront un meilleur moyen de protection ou un moyen de protection supplémentaire contre le matériel roulant non contrôlé qui se dirige vers la voie principale.

Le CN a indiqué qu'il envisage d'ajouter des dispositifs d'alarme en cas de circulation non autorisée de matériel, pour aider les CCF à s'apercevoir que des wagons sont partis à la dérive. Toutefois, le BST ne sait pas encore si ces dispositifs seront installés dans l'ensemble du réseau.

2.8.2 Affectation des équipes

La communauté des transports reconnaît que la fatigue a joué un rôle dans une foule d'accidents. L'étude Canalert 95, conçue pour élaborer, mettre en oeuvre et vérifier des mesures pouvant faire échec à la fatigue, refléte les inquiétudes de l'industrie ferroviaire à cet égard.

Les recherches sur la fatigue ont montré clairement qu'après être restés éveillés pendant 18 heures, les gens démontrent qu'ils ont perdu jusqu'à 30 % de leur capacité de subir avec succés certains tests d'acuité intellectuelle et de vigilance. Au moment de l'accident, le mode d'affectation des équipes faisait qu'une équipe pouvait rester éveillée pendant plus de 20 heures sans même faire plus d'heures qu'une journée normale de travail. Étant donné que leur horaire les obligeait à être en disponibilité à partir du début du jour, il est probable que les équipes couraient un risque important de commettre des erreurs au cours de la derniére partie de leur quart de travail.

Étant donné qu'ils ne peuvent prédire avec exactitude quand ils seront rappelés au travail, les membres des équipes ne sont pas en mesure de maximiser leurs périodes de repos en gérant d'une façon appropriée leurs périodes de sommeil ou leurs siestes. Ils risquent par conséquent d'être dans une situation où leur aptitude à exécuter leurs tâches en toute sécurité est sensiblement diminuée.

2.9 Conformité aux règles de sécurité

La santé, la sécurité et le bien-être des employés de chemin de fer, du public voyageur et des gens qui vivent à proximité d'une ou de plusieurs voies ferrées peuvent être mis en péril par des méthodes de travail laissant à désirer au chapitre de la sécurité, ou par une infrastructure ou du matériel mal conçu ou mal entretenu. Les compagnies de chemin de fer canadiennes ont démontré qu'elles étaient déterminées à assurer la sécurité, c'est-à-dire à faire en sorte que les risques que le transport par chemin de fer font courir au public soient acceptables.

Les faits entourant la collision survenue sur la subdivision Edson suscitent toutefois certaines préoccupations, notamment en ce qui concerne les dispositifs de protection secondaires contre les wagons partis à la dérive. Bien que le CN ait pris des mesures de sécurité d'une maniére relativement rapide après l'accident, il n'en demeure pas moins que c'est une situation dangereuse qui existait depuis plus de cinq ans qui a précipité l'accident.

Le gouvernement fédéral assume depuis toujours un rôle en matiére de sécurité ferroviaire. En tant qu'organisme de règlementation, il établit des règles et des normes de sécurité, et voit à la surveillance et à l'application des normes établies en promulguant des arrêtés.

Dans le cadre de son Programme de surveillance de l'infrastructure ferroviaire, TC examine les registres des chemins de fer et leur propre programme de surveillance de la conformité. Il effectue également des inspections directes limitées. TC ne vérifie pas toujours les résultats de la surveillance de la conformité effectuée par les compagnies de chemin de fer pour s'assurer qu'ils sont valables, et il ne tient pas de registres pour s'assurer que les manquements relevés ont été corrigés.

En vertu du Réglement sur la sécurité de la voie de TC (entré en vigueur le 3 septembre 1992), un dérailleur était nécessaire à l'extrémité est du triage Edson. Compte tenu des informations dont le BST dispose, rien n'indique que les représentants de TC savaient qu'on avait enlevé le dérailleur de ce triage. La surveillance règlementaire que TC exerçait ne lui permettait pas d'assurer la conformité au Réglement sur la sécurité de la voie, ni de découvrir une lacune de longue date au chapitre de la sécurité.

Les recommandations faites par le BST en 1992 et en 1994 demandaient à TC de s'assurer que :

Le CN avait signalé que les questions visées par la recommandation formulée en 1992 concernant la formation et la supervision avaient été incorporées dans ses programmes de sécurité perfectionnés; toutefois, des mesures n'ont pas été prises avant l'accident sur la subdivision Edson pour exercer un suivi efficace de ces recommandations, de sorte que les manquements constatés par le BST n'avaient pas été corrigés.

Le CN donne à ses gestionnaires et à ses superviseurs des lignes directrices globales. L'esprit et le contenu de ces lignes directrices constituent le fondement théorique d'une bonne gestion de la sécurité. Si ces lignes directrices avaient été suivies, elles auraient réduit au minimum les risques qu'une collision comme celle qui est survenue sur la subdivision Edson se produise.

Les faits établis par le Bureau révélent toutefois que les lignes directrices du CN n'ont pas toujours été observées. Voici quelques exemples :

Les lignes directrices que le CN imposait aux superviseurs en matiére de sécurité étaient trés valables. Toutefois, les faits entourant l'accident soulignent l'importance de les suivre.

Bref, les lignes directrices de la Compagnie au chapitre de la sécurité étaient précises, mais les gestionnaires, les superviseurs et les autres employés ne les suivaient pas toujours. En effet, à Edson et à d'autres endroits, la direction ne comptait que sur un seul moyen de protection, qui consistait pour le personnel d'exploitation à évaluer judicieusement chaque situation et à bien serrer les freins à main pour empêcher les wagons de bouger. La direction du CN est d'avis que la Compagnie et chaque membre du personnel d'exploitation ont le droit de s'attendre à ce que chacun des membres fasse preuve de jugement et applique d'une maniére uniforme les règles et les instructions établies. Ceci, bien entendu, présuppose qu'il est possible de suivre les règles et les instructions établies, peu importe les circonstances.

Après la collision, la haute direction du CN a pris des mesures rigoureuses pour améliorer les situations qui présentaient des lacunes sur le plan de la sécurité. Ces mesures permettront d'améliorer énormément la sécurité. Par ailleurs, les enseignements qui se dégagent de l'accident ont permis d'adopter de meilleures méthodes de sécurité concernant l'exploitation des chemins de fer partout au Canada.

3.0 Conclusions

3.1 Le rôle du Bureau

Dans cette partie, le BST donne les résultats de son enquête et mentionne les facteurs contributifs et les causes de la collision survenue au point milliaire 122,9 de la subdivision Edson du CN. Les conclusions de l'enquête portent sur :

Ces conclusions permettront de déterminer quelles mesures de sécurité s'imposent à la suite de l'accident. Le BST croit que les enseignements qui se dégagent de l'enquête sur cet accident survenu le 12 août 1996 à Yates aideront les personnes investies de l'autorité de faire des changements à prendre des mesures permettant d'améliorer la sécurité ferroviaire.

3.2 Que s'est-il donc passé?

Vers 23 h 31 HAR, le 12 août 1996, le train de marchandises 117 du CN, qui se dirigeait vers l'ouest, et 20 wagons partis à la dérive depuis le triage Edson, se sont heurtés de plein fouet au point milliaire 122,9 de la subdivision Edson du CN, à Yates. Les réservoirs de carburant des deux premiéres locomotives du train se sont rompus, et le carburant répandu a pris feu. La locomotive de tête qui avait été emboutie est alors devenue la proie des flammes. Les dommages ont été considérables. Les trois occupants de la locomotive de tête ont perdu la vie.

Le Bureau a déterminé que les wagons partis à la dérive avaient quitté le triage Edson, dévalé une pente et pénétré sur la voie principale parce que l'effort de freinage exercé par les semelles de frein avait été insuffisant pour résister à la force de gravité. Les wagons ont poursuivi leur course et se sont engagés sur la voie principale sans obstacle parce qu'un dérailleur avait été enlevé à l'extrémité est du triage Edson plus de cinq ans auparavant (vers 1990). Le contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) à Edmonton ne s'est pas rendu compte qu'il s'agissait de wagons partis à la dérive qui s'engageaient sur la voie principale, et il n'a pas pris de mesures pour empêcher la collision ou pour prévenir les membres de l'équipe de train du danger qui les guettait.

3.3 Faits établis

Manoeuvres et immobilisation des wagons au triage Edson

  1. Dés la fin des manoeuvres, et tandis que les wagons se déplaçaient encore, le chef de train adjoint a probablement serré le frein à main au bout ouest du deuxième wagon parti à la dérive. Il a ensuite serré le frein à main au bout est du premier wagon parti à la dérive.
  2. Avant de quitter le matériel à l'arrêt, il est possible que le chef de train adjoint ait éclairé de sa lanterne la roue avant du premier wagon parti à la dérive pour voir si elle bougeait, mais aucun membre de l'équipe n'a vérifié l'efficacité des freins à main, soit en faisant une vérification visuelle pour déterminer si la semelle de frein produisait son effet, soit en déplaçant les wagons (conformément aux Instructions spéciales du CN).
  3. Les opérateurs qui immobilisent les wagons grâce aux freins à main ne reçoivent pas une rétroaction suffisante pour s'assurer que l'effort exercé par les semelles de frein est «suffisant», conformément aux exigences de la règle 112 du REF.
  4. Les essais ont démontré que l'efficacité de l'effort de freinage sur les wagons CNWX présentait une grande variabilité. Les opérateurs de freins à main ne savaient pas comment tenir compte de cette variabilité pour déterminer si l'effort de freinage était «suffisant».
  5. Il est fort peu probable que quelqu'un ait desserré à dessein le frein du deuxième wagon parti à la dérive, puisque cette personne aurait eu trés peu de temps pour le faire.

    Essais des wagons et des freins à main
  6. Un examen détaillé du frein à main écrasé du premier wagon parti à la dérive permet de penser que ce frein avait été serré au moyen d'un couple de serrage du volant supérieur à la moyenne.
  7. Les essais de simulation ont révélé que le couple de serrage du volant du premier wagon parti à la dérive aurait produit un effort de freinage probablement inférieur à celui auquel on aurait pu s'attendre pour un wagon CNWX moyen faisant l'objet du même couple de serrage.
  8. Il y a tout lieu de croire qu'un rouleau du levier principal du frein à main du deuxième wagon parti à la dérive était manquant au moment du serrage du frein à main de ce wagon sur la voie 4. Résultat, la semelle de frein a probablement exercé un effort de freinage négligeable ou aucun effort du tout sur les tables de roulement.
  9. Les freins à main des deux wagons n'étaient pratiquement pas lubrifiés. Un manque de graisse à des endroits critiques se serait traduit par un frein plus difficile à serrer pour obtenir l'effort de freinage maximum. Toutefois, la lubrification à l'huile des freins à main des wagons CNWX aux endroits déterminés par l'industrie n'améliore pas leur rendement, et les engrenages de frein à main n'étaient pas conçus pour être graissés sur le terrain.

    Dérailleurs
  10. Le dérailleur qui se trouvait à l'extrémité est du triage Edson avait été enlevé vers 1990. L'enlévement de ce dispositif de sécurité secondaire a créé une situation dangereuse qui est passée inaperçue pendant plus de cinq ans avant la collision. Le dérailleur a été remplacé peu après la collision.
  11. La présence d'un dérailleur bien conçu, bien entretenu et mis en position de déraillement à l'extrémité est du triage Edson aurait empêché les wagons partis à la dérive d'entrer en collision avec le train 117.

    Contrôle de la circulation ferroviaire
  12. Compte tenu des fonctions assignées au CCF d'Edson-est, les affichages à son poste de travail étaient mal disposés puisque les renseignements critiques pour la sécurité étaient affichés hors de l'angle de vision préféré recommandé par les spécialistes de l'ergonomie. De plus, il n'y avait aucun signal compensatoire pour avertir le CCF de la circulation non autorisée de matériel.

    Supervision et formation
  13. Les méthodes de travail dangereuses et non normalisées relevées au cours de l'enquête mettent en doute la formation qui est donnée au personnel d'exploitation et la supervision dont ce personnel fait l'objet.
  14. Le CN n'avait émis aucune instruction spéciale pour le triage Edson après l'enlévement des dérailleurs. Au triage Jasper, où la pente est semblable à celle du triage Edson, le CN avait donné des instructions spéciales aux superviseurs lorsque les dérailleurs avaient été enlevés à cet endroit.
  15. La formation sur le serrage et le desserrage des freins à main était donnée dans le cadre de la formation initiale d'agent de train/agent de triage. Au cours de cette formation, les employés recevaient des instructions sur les aspects pratiques du serrage et du desserrage des freins à main et devaient travailler sous la surveillance d'employés expérimentés. La Compagnie n'avait adopté aucune stratégie de formation qui lui aurait permis de s'assurer que les stagiaires et les employés apprenaient d'une façon uniforme les techniques d'immobilisation des wagons grâce à des directives occasionnelles données par les superviseurs, notamment en ce qui concerne les nouvelles instructions spéciales relatives à la règle 112 du REF.
  16. La formation périodique comprenait principalement des discussions sur les règles à observer, mais les employés ne recevaient aucune formation pratique en milieu de travail sur l'immobilisation des wagons après leur entrée en fonction à la compagnie de chemin de fer.
  17. La formation était insuffisante en ce sens qu'elle ne permettait pas au CCF de comprendre qu'une série de voyants qui s'allumaient successivement pouvait signifier que des wagons étaient partis à la dérive. En outre, cette formation et les instructions écrites pouvaient trés bien faire croire que l'allumage d'un voyant (non occasionné par un train connu) signifiait le mauvais fonctionnement d'un signal ou une défaillance du circuit plutôt qu'un wagon parti à la dérive.

    Méthodes de sécurité du CN
  18. La Circulaire sur les méthodes normalisées (CMN 3603) du CN (une norme des services techniques) stipulait qu'il devait y avoir un dérailleur à Edson-est; toutefois, la direction de l'ingénierie n'a pas été informée que ce dérailleur avait été enlevé, et il n'y avait aucun autre système de gestion de la sécurité pour compenser, de sorte qu'on a accordé trop de confiance à la protection primaire que procure la conformité à la règle 112 du REF et aux instructions spéciales qui s'y rattachent, et on n'a pas tenu compte de la possibilité d'une erreur humaine ou d'un rendement mécanique inférieur.
  19. Bien qu'on ait jugé que ce facteur n'avait joué aucun rôle dans l'accident, l'enquête a révélé que les méthodes de la Compagnie en matiére d'affectation des équipes et de rappel au travail exigeaient parfois que les employés effectuent de longues périodes de veille et de service. Ces méthodes sont susceptibles de provoquer une diminution du rendement, ce qui risque de compromettre l'habileté des équipes à s'acquitter de leurs tâches en toute sécurité. Le nombre d'heures de service que les membres de l'équipe d'Edson auraient dû effectuer s'ils avaient travaillé à bord du train 404 jusqu'à Edmonton en est un exemple.
  20. Le système d'alarme visuel et sonore (sonalert) utilisé pour la surveillance des trains enregistrés était absent du poste de travail du CCF d'Edson-est. L'enquête n'a pas révélé comment ce dispositif avait disparu ni qui était responsable de cet état de choses.

    Surveillance règlementaire
  21. La surveillance exercée par TC était insuffisante en ce sens qu'elle n'a pas permis d'assurer la conformité au Réglement sur la sécurité de la voie ni de découvrir l'absence du dérailleur qui aurait pu empêcher cet accident s'il avait été mis en position de déraillement.
  22. Le suivi accordé à la préoccupation signalée par le BST en 1992 au sujet de la qualité de la supervision et de la formation en matiére d'immobilisation des wagons à l'arrêt, de même qu'à son inquiétude exprimée en 1994 à l'égard de l'installation de dérailleurs à des endroits comme Edson, où la pente de la voie pouvait contribuer à la dérive de wagons jusque sur la voie principale, a été insatisfaisant. Rien n'avait été fait avant l'accident pour améliorer la situation en ce qui concerne les manquements à la sécurité relevés dans ces deux domaines. Toutefois, le nombre de cas de wagons partis à la dérive semble avoir diminué depuis l'accident, ce qui constitue une amélioration à court terme.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Risques cernés

Au cours de l'enquête, le Bureau a découvert plusieurs problémes qui risquaient de compromettre la sécurité du réseau ferroviaire. Il est préoccupé par les six grandes questions suivantes :

4.2 Atténuation des risques

Après l'accident, l'industrie et l'organisme de règlementation ont beaucoup fait pour atténuer les risques cernés dans ces domaines. Malgré les efforts considérables faits à ce jour, il faut prendre d'autres mesures dans certains domaines pour réduire ou éliminer les risques qui restent.

4.2.1 Procédures d'immobilisation des wagons

Le Bureau doute de l'efficacité des méthodes et procédures d'exploitation normalisées des chemins de fer en matiére d'immobilisation du matériel en ce qui concerne la détermination du nombre de freins à main à serrer, la formation et la supervision du personnel d'exploitation et la considération des facteurs propres à un endroit donné. La variabilité de l'efficacité des freins des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement complique la situation. Les lacunes des instructions et des directives données aux employés peuvent créer des situations qui aménent ces derniers à ne pas fournir le rendement attendu; de fait, le personnel en cause dans cet accident ne s'est pas comporté exactement comme la Compagnie l'espérait.

Le Bureau constate que les opinions des professionnels divergent fort sur des questions comme : la valeur concréte de la règle 112 du REF dans la détermination du nombre «suffisant» de freins à serrer et les meilleurs moyens d'appliquer l'effort de freinage suffisant; le type et le degré de formation et de supervision nécessaires au personnel expérimenté qui s'occupe de l'immobilisation des wagons; le moyen le plus efficace de s'assurer que les wagons ne bougeront pas, une fois les freins serrés. (Le sondage que le BST a réalisé auprès des mécaniciens après l'accident a confirmé que les opinions divergeaient beaucoup au pays sur la valeur pratique de l'essai règlementaire qui consiste à déplacer légérement les wagons.)

Vu le grand nombre de variables qui influent sur l'efficacité de l'immobilisation de wagons, il n'y a pas de solutions simples. Le CN a toutefois pris plusieurs mesures pour réduire le risque que de telles anomalies dans les méthodes d'immobilisation entraînent la dérive d'autres wagons. Voici ces mesures :

Malgré les mesures prises, le Bureau doute encore de l'efficacité de la supervision de la sécurité des activités ferroviaires quotidiennes, et notamment du serrage des freins à main. Il a constaté des lacunes semblables au niveau de la surveillance immédiate des activités quotidiennes dans d'autres enquêtes sur des accidents. Le Bureau continuera d'évaluer l'efficacité des politiques, des procédures et des méthodes de surveillance des chemins de fer dans de futures enquêtes.

4.2.2 Efficacité du système de contrôle de la circulation ferroviaire

Le Bureau doute que le système de contrôle de la circulation ferroviaire permette de déceler la présence de wagons partis à la dérive, tant sur le plan de l'ergonomie des affichages du poste de travail et des signaux d'avertissement que sur le plan des politiques, des procédures et de la formation en matiére de contrôle de la circulation ferroviaire. Ni la conception du matériel ni la formation n'ont permis de reconnaître la présence de wagons partis à la dérive en temps opportun.

Pour réduire le risque que les CCF ne décélent pas la dérive de matériel, le CN a pris les mesures suivantes :

Ces mesures permettront d'augmenter les chances pour qu'un CCF décéle la dérive de matériel ou d'autres mouvements inconnus et y donne suite correctement.

De plus, TC a exprimé :

4.2.3 Variabilité de l'efficacité des freins

L'enquête a démontré que les freins à main des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement avaient une efficacité qui variait considérablement. Cette variabilité était liée à la conception, à l'état et à l'entretien des freins, ainsi qu'aux différences de capacité physique et de technique personnelle entre les opérateurs. Il se peut notamment que le couple de serrage produit par l'opérateur ne soit pas proportionnel à l'effort de freinage réel. En d'autres termes, un couple de serrage élevé ne produit pas forcément un effort de freinage important. Il y a donc des risques a dépendre de l'habileté de l'employé à déterminer combien de freins à main sont suffisants et s'il les a suffisamment serrés.

On reconnaît qu'un grand programme de modification du matériel coûterait extrêmement cher, étant donné le nombre de wagons en service munis de freins à main semblables. On a toutefois pris plusieurs mesures pour réduire les risques de dérive; les instructions spéciales du CN concernant le nombre minimum de freins à main à serrer devraient notamment aider à compenser la variabilité au niveau du serrage des freins à main. Cependant, comme les employés de chemin de fer ne semblent pas connaître cette variabilité et l'incidence qu'elle peut avoir sur la détermination du nombre de freins à main à serrer, le Bureau recommande que :

L'Association des chemins de fer du Canada encourage ses membres à faire comprendre à leurs employés la grande variabilité de l'efficacité des freins à main (notamment ceux des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement) et le besoin qui en résulte de faire preuve de plus de vigilance dans l'immobilisation des wagons.
Recommandation R97-05 du BST

4.2.4 Valeur de la surveillance règlementaire de la sécurité ferroviaire

L'enquête a permis de constater des lacunes dans les méthodes adoptées par les chemins de fer pour la mise en place des dérailleurs et dans les efforts que l'organisme de règlementation faisait pour assurer le respect de son Réglement sur la sécurité de la voie. On avait notamment enlevé un dérailleur là où il en fallait un à Edson en 1990. Malgré la recommandation que le BST a faite en 1994 concernant l'obligation d'installer des dérailleurs à des endroits comme Edson, TC ne s'était pas assuré que les chemins de fer avaient établi un bon système pour s'assurer qu'il y avait des dérailleurs aux endroits voulus.

Compte tenu des risques d'une protection insuffisante contre la dérive de matériel, le CN :

De plus , Transports Canada :

Les dérailleurs supplémentaires réduiront sans aucun doute la probabilité de dérives. Le Bureau s'inquiéte toutefois de voir qu'il a fallu cet accident pour déclencher une réaction à l'échelle du réseau à cet égard.

Les compagnies de chemin de fer doivent être chargées de veiller à la sécurité des activités ferroviaires quotidiennes. Dans l'intérêt du public, le Bureau croit toutefois que TC doit s'assurer, par sa surveillance règlementaire, que les chemins de fer ont établi de bons systèmes pour veiller à l'application des normes de sécurité dans leurs activités quotidiennes. Étant donné que le CN a reconnu qu'il fallait installer un grand nombre de dérailleurs au pays, le Bureau n'est pas convaincu que TC avait maintenu une surveillance satisfaisante de l'infrastructure et de la conformité aux règlements pour s'assurer que les chemins de fer respectaient constamment les exigences du Réglement sur la sécurité de la voie.

La principale inquiétude que cet accident souléve à cet égard concerne la surveillance règlementaire de l'infrastructure ferroviaire; toutefois, les lacunes relevées sur le plan de la conformité aux normes de sécurité nationales compromettent peut-être la sécurité ferroviaire à d'autres égards. Le Bureau a déjà fait des observations sur la possibilité de lacunes généralisées dans des domaines comme les méthodes d'inspection des wagons et d'exploitation des triages. Afin de s'assurer que les normes de sécurité nationales sont respectées, le Bureau recommande que :

Le ministére des Transports élabore et mette en oeuvre des politiques et des procédures pour la réalisation d'un programme national de vérification qui permette de bien évaluer l'habileté des chemins de fer à appliquer les normes de sécurité nationales.
Recommandation R97-06 du BST

4.2.5 Efficacité des programmes de gestion de la sécurité de la Compagnie

Le CN a réagi vigoureusement et rapidement à l'accident, comme en témoigne son programme d'initiatives en matiére de sécurité annoncé peu aprés. Le Bureau croit néanmoins que le CN aurait dû déterminer le besoin d'un grand nombre de ces mesures avant l'accident grâce à ses programme courants de gestion de la sécurité.

Le Bureau se préoccupe de l'efficacité de ces programmes et se demande s'ils permettent de recevoir les renseignements liés à la sécurité et de bien les communiquer. Par exemple, les inquiétudes du Comité de santé et sécurité au travail (CSST) local au sujet de l'enlévement du dérailleur à Edson n'ont pas reçu l'attention voulue (ni par la compagnie ni par le syndicat), et aucune instruction spéciale n'a été émise après l'enlévement de ce dérailleur. Des instructions spéciales sur la nécessité de déplacer légérement les wagons ont été diffusées dans les bulletins périodiques adressés aux employés sans qu'on s'assure par une formation ou une supervision complémentaires que ces employés les avaient comprises ou mises en oeuvre. Le sondage que le BST a réalisé après l'accident auprès des mécaniciens a confirmé que les opinions divergeaient largement partout au pays sur la valeur de l'essai règlementaire qui consiste à déplacer légérement les wagons.

Le CN a pris plusieurs mesures qui devraient lui permettre davantage de recevoir et de bien communiquer des renseignements critiques pour la sécurité en temps opportun. Il a notamment :

Avec l'amélioration de la surveillance règlementaire recommandée plus haut, ces mesures réduiront le risque que la direction de la Compagnie néglige de prendre des mesures concernant les méthodes et les conditions de travail dangereuses.

4.2.6 Rôle de la conformité rigoureuse aux règles

La conformité rigoureuse aux règles est la pierre angulaire sur laquelle les chemins de fer et TC ont fondé leur philosophie de la sécurité. Le Bureau croit que la conformité aux règles est nécessaire pour prévenir les accidents de transport, mais n'accepte pas qu'à elle seule, elle soit suffisante pour maintenir la sécurité dans un réseau de transport complexe. Les organisations qui ont trop confiance dans la conformité rigoureuse aux règles ont tendance à croire que les règles de sécurité qu'elles ont établies ne laissent pas de place à l'erreur humaine. Une culture fondée sur les règlements peut porter à croire que les accidents résultent tous d'inobservations individuelles des règles. Malheureusement, dans un système complexe comme le réseau de transport, même le règlement le plus rigoureux ne prévoit pas toutes les éventualités; les personnes devront l'interpréter dans les situations imprévues. À vrai dire, malgré leur connaissance des règles, même les employés les plus motivés sont sujets aux erreurs, aux défaillances et aux oublis normaux qui caractérisent le comportement humain. Le principe des «barriéres multiples» que les spécialistes de la sécurité préconisent pour les systèmes complexes prévoit des moyens de protection multiples et divers pour réduire le danger des erreurs humaines normales.

L'industrie ferroviaire a fait beaucoup de choses qui tiennent compte implicitement de la nécessité de telles barriéres multiples. Malgré les améliorations dans ce secteur, le Bureau craint toujours qu'une culture fondée depuis toujours sur les règlements n'entrave la mise au point et le maintien permanents d'un réseau de transport ferroviaire sûr. Dans ses enquêtes, le Bureau continuera d'évaluer dans quelle mesure les chemins de fer sont capables de peser le rôle d'une conformité aux règles et la nécessité d'un système de sécurité à l'épreuve de l'erreur humaine normale.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.

Annexes

Annexe 1— Ordre chronologique des événements

Annexe 2— Manoeuvres effectuées avant l'accident

1. Planification

Dés son arrivée au triage Edson, l'équipe du train 351 examine une fiche de manoeuvre qui a été dressée à son intention par le coordonnateur du mouvement des trains d'Edson (celui-ci n'est pas de service quand l'équipe arrive). Sachant qu'il y a des locomotives au triage Edson et que le train 404 n'arrivera probablement pas avant un certain temps, l'équipe téléphone au CCCF et obtient la permission de reprendre le service à 21 h 45 afin d'amorcer les manoeuvres précédant le départ.

Le chef de train adjoint s'est souvenu qu'il s'attendait à exécuter quelques manoeuvres avant l'arrivée du train 404 au triage Edson, et que lui-même et les autres membres de l'équipe étaient prêts à le faire. Le mécanicien a été informé, avant de partir d'Edmonton, que le train 404 devait quitter le triage Edson vers 23 h 45. Le chef de train adjoint a estimé qu'il lui faudrait d'une heure à une heure et demie pour effectuer les manoeuvres.

Le chef de train adjoint s'est également souvenu que l'équipe avait reçu la permission du CCCF d'enlever une grue et un wagon de sécurité plutôt que de les ramener à Edmonton. L'équipe était contente parce que si l'équipe avait été obligée de ramener la grue à Edmonton, le train 404 n'aurait pas pu rouler à plus de 25 mi/h.

Les manoeuvres ont été exécutées avant l'arrivée du train 404 pour retarder le moins possible le départ du train du triage Edson. À cet endroit, une partie des responsabilités de l'équipe consistait à dételer 20 wagons des wagons laissés sur la voie 8. Pour ce faire, l'équipe a utilisé deux locomotives de triage, soit la CN4009 et la CN4019. Le mécanicien s'est rappelé que les locomotives se trouvaient à l'origine sur la voie 13. Elles étaient stationnées dans le triage, près de la gare, car c'était commode pour le personnel et cela améliorait la productivité. Elles n'étaient pas garées sur les voies de réserve du triangle de virage situé à l'extrémité ouest du triage. Les deux bouts de ces voies de réserve sont protégés par des dérailleurs. La locomotive CN4009 était en tête, cabine face à l'est, et la locomotive CN4019 suivait, cabine face à l'ouest. (Nota : Après l'enlévement du dérailleur en 1990, une des principales inquiétudes sur le plan de la sécurité était que les locomotives devraient être garées sur des voies protégées par un dérailleur de chaque côté des locomotives.)

Du côté ouest de la voie 8, il y avait 12 wagons-trémies couverts à céréales chargés, et le seul frein à main qui avait été serré était celui du wagon le plus à l'ouest. À huit longueurs de wagon à l'est de ces wagons se trouvaient six wagons-tombereaux vides dont les freins à air avaient été serrés et dont un frein à main avait été serré également sur le wagon le plus à l'est. À une longueur de wagon à l'est de ces wagons, il y avait une grue et un wagon de sécurité attelés à deux wagons couverts chargés qui se trouvaient à l'est de la grue. Le plan de base était de déplacer le matériel du bout est comme suit : faire passer la grue et le wagon de sécurité (attelés aux deux wagons couverts) de la voie 8 à la voie 6; ramener les deux wagons couverts à la voie 8, puis déplacer les deux wagons couverts, les six wagons-tombereaux et les 12 wagons-trémies couverts à céréales, de la voie 8 à la voie d'accés. À partir de là, le plan consistait à aller placer les 20 wagons sur la voie 4 dans l'ordre suivant (d'ouest en est) : 6 wagons-tombereaux, 2 wagons couverts et 12 wagons-trémies couverts à céréales.

Le mécanicien n'a pas pu se rappeler pourquoi les wagons devaient être dirigés vers la voie 4 plutôt que vers une autre voie. Il s'est souvenu que cette décision avait été prise par les deux autres membres de l'équipe. Ceux-ci se sont rappelés qu'ils avaient l'intention de placer les wagons dans un ordre qui permettrait de les placer plus facilement à la tête du train 404. En procédant ainsi, ils permettraient aux wagons qui devaient être dételés en route d'Edson à Edmonton d'être plus près des locomotives de ce train.

2. Manoeuvres

Après avoir discuté du plan, l'équipe quitte la gare d'Edson vers 22 h. Le chef de train marche jusqu'à la voie 8 pour inspecter les wagons et les préparer à circuler. Le mécanicien se rend jusqu'à la voie 13, mais il se rend compte qu'il a oublié les clés des locomotives à la gare et qu'il doit retourner les chercher. Dans le même temps, le chef de train adjoint marche jusqu'à la voie d'accés et oriente les aiguillages de la voie 13 vers la voie 8 pour que ce soit plus facile de déplacer les deux locomotives jusqu'à la voie 8.

Le chef de train inspecte les 12 wagons-trémies couverts et ne desserre pas le frein à main du wagon le plus à l'ouest. Les deux locomotives sont déplacées jusqu'à la voie 8, à 22 h 27 min 32 sNote de bas de page 3(temps consigné), où elles arrivent à 22 h 30 min 53 s pour commencer les manoeuvres.

L'équipe a de la difficulté à faire circuler certains des wagons pour qu'ils quittent la voie 8. Le mécanicien s'est rappelé que lui et ses collégues avaient dû desserrer les freins à air de certains wagons. L'équipe enléve la grue et le wagon de sécurité de la voie 8 et les place sur la voie 6. Enfin, elle fait en sorte que les 20 wagons quittent la voie 8, avec le frein à main du wagon-trémie qui se trouve en derniére position toujours serré.

Le mécanicien s'est souvenu qu'il avait demandé au CCF un signal de position d'aiguilles à Edson-est, vers 22 h 45, mais qu'il n'avait pas reçu de réponse. Après une minute ou deux, il s'est mis en marche de toute façon parce qu'il pouvait effectuer les manoeuvres sans utiliser les voies principales, et n'avait donc pas besoin de la permission du CCF.

Vers 22 h 49, la deuxième locomotive (CN4019) s'arrête faute de carburant. Le mécanicien sort de la cabine de commande de la locomotive CN4009 et arrête la sonnerie en actionnant le sectionneur de batterie dans la cabine de la locomotive CN4019. Cela éteint également les phares avant du bout ouest.

Les wagons à déplacer vers la voie 8 et les wagons partis à la dérive sont les suivants :

RÉPARTITION DES WAGONS
SUR LA VOIE 8
RÉPARTITION DES WAGONS
DESTINÉS AU TRAIN 404
PARTIS À LA DÉRIVE
OUEST CNWX 109246Note de bas de page 4 OUEST BN 565467
CNWX 100589 BN 556602
CNWX 396898 BN 565594
CNWX 109057 BN 561860
CNWX 107484 BN 500300
CNWX 109219 BN 500258
CNWX 110093 NOKL 4514
CNWX 109086 CLC 3853
CNWX 107521 CNWX 109246
CNA 385945 CNWX 100589
CNWX 109380 CNWX 396898
CNWX 109099 CNWX 109057
Espace d'une longueur de huit wagons CNWX 107484
BN 565467 CNWX 109219
BN 556602 CNWX 110093
BN 565594 CNWX 109086
BN 561860 CNWX 107521
BN 500300 CNA 385945
BN 500258 + espace d'une longueur d'un wagon CNWX 109380
GRUE ET WAGON DE SÉCURITÉ EST CNWX 109099
NOKL 4514
EST CLC 3853

Voici la chronologie des événements concernant le placement des wagons sur la voie 4, d'après les données du consignateur d'événements de la locomotive et les souvenirs des employés.

Annexe 3— Organigramme du CN Transports 1990 et 1996

DISTRICT DU SUD DE LA C.-B.
1990 1996
POSTE ENDROIT POSTE ENDROIT
Chef de la direction Montréal Chef de la direction Montréal
Premier vice-président et chef de l'exploitation Montréal
Premier vice-président Ouest canadien Edmonton Premier vice-président
Ouest canadien
Edmonton
Directeur général
Exploitation
Edmonton
Directeur de district Kamloops Vice-président adjoint et directeur de district Vancouver
Surintendant de district Kamloops Surintendant de district Kamloops
Surintendant adjoint Jasper Surintendant adjoint Jasper
Coordonnateur de trains Edson (2)

DISTRICT DE L'ALBERTA

1990 1996
POSTE ENDROIT POSTE ENDROIT
Chef de la direction Montréal Chef de la direction Montréal
Premier vice-président et chef de l'exploitation Montréal
Premier vice-président
Ouest canadien
Edmonton Premier vice-président
Ouest canadien
Edmonton
Directeur général
Exploitation
Edmonton
Directeur de district Edmonton Vice-président adjoint et directeur de district Edmonton
Surintendant de district Edmonton Surintendant de district Edmonton
Surintendant adjoint Edmonton Surintendant adjoint Edmonton
Coordonnateur de trains Edmonton

Annexe 4— Organigramme du CN Ingénierie 1990 et 1996

DISTRICT DU SUD DE LA C.-B.

1990 1996
POSTE ENDROIT POSTE ENDROIT
Chef de la direction Montréal Chef de la direction Montréal
Premier vice-président et chef de l'exploitation Montréal
Premier vice-président
Ouest canadien
Edmonton Premier vice-président
Ouest canadien
Edmonton
Directeur général
Exploitation
Edmonton
Directeur de district Kamloops Vice-président adjoint et directeur de district Vancouver
Ingénieur de district Kamloops Ingénieur de district Kamloops
Ingénieur de la voie Kamloops
Superviseur de la voie Edson Superviseur de la voie Edson

Annexe 5— Wagons CNWX : Conception et rôle des freins à main

1. Renseignements sur les wagons

Les principaux wagons en cause dans l'accident sont des wagons-trémies couverts à céréales. Ils mesurent 59 pieds de long, ont un poids à vide de quelque 62 000 livres et un poids de charge d'environ 263 000 livres. Ce type de wagon est conçu conjointement par les chemins de fer pour le transport des céréales au Canada, et construit par trois fabricants de wagons canadiens : la National Steel Car de Hamilton (Ontario); la Marine Industries de Sorel (Québec); la Hawker Siddeley de Trenton (Nouvelle-Écosse). Ces wagons ont été construits par trois sociétés, mais leur conception de base n'est pas différente d'un constructeur à un autre.

Ces wagons ont été mis sur le marché pour la premiére fois au début des années 70. On en compte quelque 19 000 à l'heure actuelle. Ils ont en moyenne 17 ans, la trés grande majorité d'entre eux étant âgés de 7 à 24 ans. L'Amérique du Nord compte plus de 250 000 wagons-trémies couverts de toutes sortes. En 1994, le gouvernement fédéral a acheté 83 autres wagons-trémies couverts à céréales.

Ces wagons appartiennent au gouvernement fédéral et sont conçus pour être utilisés par le CN et par le CP. Leurs numéros d'identification permettent de savoir à qui ils sont affectés. Les wagons en service au CN appartiennent à la série CNWX 100000 à CNWX 112999, et à la série CNWX 395000 à CNWX 396999.

Figure 15. Vue du bout A d'un wagon CNWX
Vue du bout A d'un wagon CNWX
Figure 16. Vue du bout B d'un wagon CNWX
Vue du bout B d'un wagon CNWX

2. Conception et rôle des freins à main

Les freins à main des wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement canadien jouent un rôle trés semblable à celui des freins à main de la plupart des autres wagons. En substance, ils ont un système mécanique (distinct du système de frein à air) grâce auquel les semelles de frein exercent un effort sur les tables de roulement pour empêcher la roue de bouger ou pour la ralentir.

Volant, engrenage, embrayage et cliquet

Les freins à main comprennent normalement un volant fixé au bout B du wagon, du côté gauche par rapport à l'axe longitudinal du wagon. Le volant est relié à un jeu d'engrenages, dont le dernier posséde un tambour intégré d'enroulement de la chaîne, auquel la chaîne est reliée.

Figure 17 Volant, entrenage, embrayage et cliquet

Le mécanisme d'engrenage posséde un système d'embrayage qui permet le desserrage progressif plutôt que rapide des freins à main. Il est doté d'un cliquet à ressort qui l'empêche de tourner librement une fois que le tambour est en charge lorsque le volant de frein à main est soumis à un couple de serrage.

Les freins à main des deux premiers wagons partis à la dérive sont des produits de l'Ellcon National Inc., et du type Peacock Brake Assembly, modéle 6500-2, AAR HP (haute puissance). Les marques qui y figurent indiquent qu'ils ont tous deux été fabriqués en juillet 1982.

Les freins à main doivent être approuvés par l'AAR, et les compagnies de chemin de fer ne peuvent accepter les wagons d'une autre compagnie de chemin de fer aux lieux de correspondance que si les wagons sont équipés de piéces approuvées par l'AAR.

Figure 18. Timonerie
Timonerie

La chaîne du frein à main se rattache à la timonerie en passant sur un réa. La timonerie comprend un ensemble de leviers, de tiges et de goupilles de raccordement. La chaîne est tendue lorsqu'on fait tourner le volant de frein à main, d'un diamétre d'environ 22 pouces, dans le sens des aiguilles d'une montre. La tension de chaîne vient agir sur les semelles de frein au moyen de la timonerie. L'effet de freinage se produit lorsque les semelles de frein faites d'un matériau composite exercent un effort considérable sur les tables de roulement (voir ci-dessous).

Timonerie

Dans les wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement, les freins sont conçus pour que les semelles de frein exercent l'effort de freinage nécessaire sur les huit roues, qu'il s'agisse du frein à air ou du frein à main. Deux triangles de frein sont placés entre les essieux de chaque bogie et paralléles aux essieux. Chaque triangle de frein a une semelle de frein à ses bouts gauche et droit. Les deux triangles de frein de chaque bogie produisent leur effet en se déplaçant vers l'essieu monté adjacent, ce qui fait en sorte que les semelles de frein exercent une pression sur les tables de roulement.

3. Serrage des freins

Freins à air

Lorsque les freins fonctionnent grâce à la pression de l'air, chaque triangle de frein est poussé vers les roues par une tige-poussoir qui sort du cylindre de frein en réaction aux changements dans la pression exercée par la conduite générale. Il y a deux cylindres de frein par bogie, soit un par triangle de frein. Chaque tige-poussoir est ajustable, pour faire en sorte qu'un effort de semelle de frein approprié soit maintenu pendant toute la course de piston résultant éventuellement de l'usure normale de la semelle de frein et de la table de roulement. Comme les deux cylindres de frein sont également compensés et exercent à peu près le même effort, les triangles de frein restent perpendiculaires à l'axe du wagon lorsque les freins à air sont serrés, et l'effort des semelles s'exerce à peu près également sur toutes les tables de roulement au moment du serrage.

Vu que les wagons-trémies à céréales du gouvernement sont équipés de freins à air montés sur bogie et à action directe, la majeure partie de la timonerie dont sont dotés communément les wagons à freins montés sur la caisse est inutile dans le cas des freins à air. Toutefois, comme les freins à main fonctionnent indépendamment des freins à air, ils doivent avoir leurs propres bielles de timonerie (ou de tirage), leviers et goupilles de raccordement pour pouvoir transmettre le même effort aux semelles qui viennent appuyer sur les tables de roulement des wagons.

Freins à main

Lorsqu'on serre les freins à main en tournant le volant de frein à main, c'est un processus différent de celui des freins à air qui entre en jeu. La chaîne du volant de frein à main et du mécanisme d'engrenage se raccorde à un levier vertical, d'une longueur de 19 pouces et quart environ, équipé de deux rouleaux à son bout supérieur. Il est suspendu à la caisse grâce à une fente de la plaque de cisaillement au bout du wagon. Les rouleaux facilitent le mouvement en douceur du bout supérieur du principal levier vertical en roulant le long d'une fente sur la plaque de cisaillement. Ce levier est raccordé par une tige à un balancier actif de bogie d'une longueur de 19 pouces et quart, sur le triangle de frein du bout B qui se raccorde également à un balancier passif de bogie d'une longueur de 19 pouces et quart, par un connecteur des balanciers de bogie ajustable de 37 pouces et demi de longueur, qui passe sous la traverse danseuse. Le principal levier vertical se raccorde également par une tige à un dispositif semblable du bogie du bout A. Sous l'effet de la tension de la chaîne, ces leviers se déplacent de façon que les tiges séparent les deux triangles de frein de chacun des deux bogies, tout comme c'est le cas lorsque la pression d'air force les cylindres de frein à séparer les deux triangles. L'objectif est le même, c'est-à-dire faire en sorte que les huit semelles de frein se déplacent vers les huit tables de roulement et exercent une pression sur les tables de roulement.

4. Restrictions relatives aux freins à main

Si l'un des rouleaux du bout supérieur du levier vertical est rompu ou manquant, ou les deux, ce qui reste du levier peut frotter contre la surface de la plaque de cisaillement aux alentours de la fente au bout du wagon lorsqu'on serre le frein à main. Dans ce cas, la friction supplémentaire peut empêcher la partie supérieure du levier principal de bouger, lorsque la tension de chaîne est plus élevée. Le grippage, susceptible de restreindre la mesure dans laquelle la partie supérieure du levier peut se déplacer, est possible lui aussi. Advenant cela, il se peut qu'il ne soit pas nécessaire de tourner autant le volant du frein à main, avant qu'il donne l'impression d'avoir été tourné suffisamment, que si les rouleaux étaient en place et fonctionnaient comme prévu. Cette situation peut amener l'employé qui serre le frein à main à penser que celui-ci est serré à fond, alors qu'en fait, l'effort exercé par les semelles sur les tables de roulement est inférieur à celui auquel on pourrait s'attendre. Des marques de piéce traînante ou de raclage étaient présentes autour de la fente du deuxième wagon parti à la dérive. Les marques étaient typiques d'un serrage de frein à main effectué avec un rouleau de levier manquant. Un examen plus poussé d'une photographie de la plaque de cisaillement et de la fente de ce deuxième wagon parti à la dérive, photographie prise peu après la collision, a permis de confirmer que le wagon n'avait qu'un seul rouleau de principal levier vertical (voir ci-dessous).

Figure 19. Deuxième wagon parti à la dérive : plaque de cisaillement du principal levier vertical
Deuxième wagon parti à la dérive : plaque de cisaillement du principal levier vertical

Deuxième wagon parti à la dérive : plaque de cisaillement du principal levier vertical

Le CN a fourni au BST des rouleaux de remplacement et une goupille de rouleau. Le BST a constaté que ces rouleaux, lorsqu'on les plaçait sur la goupille de remplacement de conception nouvelle, produisaient une telle «interférence» qu'ils ne roulaient pas librement sur la goupille ou l'essieu. Or, lorsque les rouleaux ne roulent pas librement, ils glissent sur la plaque de cisaillement, de sorte que la friction entrave le mouvement de la partie supérieure du principal levier vertical.

Une autre situation qui peut entraîner le grippage du levier de frein à main, c'est lorsque le frein à main est mal ajusté. Si celui-ci a plus de jeu que la normale, le principal levier vertical peut se déplacer jusqu'au bout de la fente et venir en contact avec la caisse du wagon. Dans cette éventualité, tout effort supplémentaire exercé par les semelles de frein risque de ne pas être transmis par elle, mais d'être plutôt dirigé vers le châssis du wagon. En outre, dans ce cas, l'opérateur peut avoir la fausse impression que l'effort de freinage est suffisant, alors qu'en réalité, il ne l'est pas. Deux wagons ont laissé voir cette possibilité au cours des essais et des examens effectués dans le cadre de l'enquête.

Les tiges et leviers de raccordement d'autres parties de la tringlerie de frein à main sont soutenus par des supports en U qui ne sont que des guides. Ces derniers sont fixés au soubassement du wagon, et seule leur longueur restreint le mouvement des leviers. On estime communément que l'usure de la semelle et de la table de roulement peut être compensée par un enroulage accru de la chaîne du volant, mais il n'en est pas toujours ainsi parce que le mouvement des leviers peut être limité par la longueur des guides. Lorsque cela se produit, le resserrement de la chaîne fait en sorte que les leviers aménent la semelle à exercer l'effort prévu, mais seulement jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus bouger. Toutefois, toute autre augmentation de la tension de chaîne risque de ne pas correspondre à une augmentation proportionnelle de l'effort total exercé par les semelles de frein. Dans le cas de l'accident qui fait l'objet du présent rapport, rien ne donne à penser que ce probléme existait sur les deux premiers wagons partis à la dérive.

5. Réglage de la timonerie

On peut effectuer le réglage de la timonerie soit aux connecteurs de balanciers de bogie, soit à la manille d'ancrage qui fixe les balanciers passifs à la caisse du wagon. La manille est une piéce de métal en U au bout du triangle de frein, ou un raccord dont un boulon retient une piéce qui s'ajuste entre les bouts forcés d'une autre.

Aux deux endroits se trouve un axe d'articulation de la timonerie qu'on peut règler à tous les deux pouces pour tenir compte de l'usure de la semelle et de la table de roulement, de même que de toute autre usure susceptible de se produire dans les divers éléments de la tringlerie. Les axes d'articulation respectifs de la timonerie des deux premiers wagons partis à la dérive étaient dans la position initiale, ce qui laissait croire que la timonerie de frein à main de ces wagons n'avait fait l'objet d'aucun réglage (voir le schéma sur la timonerie).

6. Critéres de rendement des freins à main

Le mécanisme des freins à main a été conçu de façon que la relation entre le couple de serrage du volant et l'effort total exercé par les semelles de frein (la somme de l'effort déployé par toutes les semelles) soit à peu près linéaire. L'effort de freinage total exercé par les semelles augmente en proportion du couple de serrage. Dans un wagon neuf, lorsqu'un couple de serrage d'environ 125 pieds-livres est exercé sur le volant, l'effort exercé par les semelles doit être égal à 10 ou 11 % environ de la charge brute (celle-ci équivaut à 263 000 livres dans le cas des wagons CNWX). La charge brute est le poids maximum d'un wagon donné, considéré comme un effort exercé sur le rail (réf. AAR Manual of Standards and Recommended Practices, S-401). Ces 10 ou 11 % de la charge brute sont une norme de conception des wagons neufs ou remis en état dotés de semelles de frein à matériau composite. Le couple de serrage de 125 pieds-livres n'est pas celui qu'on envisage qui sera exercé chaque fois qu'un wagon est immobilisé. En effet, les essais effectués pendant l'enquête ont montré que ce ne sont pas toutes les personnes en bonne condition physique qui peuvent exercer ce genre de couple de serrage, notamment si le mécanisme d'engrenage est usé, rouillé et non lubrifié.

L'usure maximum des composants qui relient wagon et bogie ne doit en aucun cas réduire à moins de 6,5 % de la charge brute l'effort de freinage exercé par les freins à main (article 8.3 de la norme S-401 de l'AAR), critére qui équivaut à l'exigence minimum de rendement du système de frein à air des wagons neufs.

7. Serrage non uniforme

Les wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement ont une tuyére centrale d'évacuation par le fond et une longrine tronquée (c'est-à-dire qu'ils n'ont pas de longeron de caisse). La plus grande partie de la timonerie de frein à main est située à gauche de l'axe longitudinal du wagon.

Lorsque les freins sont serrés, les semelles de frein n'exercent pas un effort uniforme, l'effort de freinage qu'elles exercent étant beaucoup plus important sur les roues du côté gauche.

De par la nature de la timonerie de frein à main, l'effort exercé par les semelles sur le bogie du bout B est plus important que celui des semelles sur le bogie du bout A, à cause de la friction produite par la timonerie ainsi que des pivots, des tiges et des leviers supplémentaires nécessaires pour transmettre la tension de chaîne à la timonerie du bout A. (Voir l'annexe 6 Répartition de l'effort exercé par les semelles de frein). En examinant la répartition de l'effort exercé par les semelles de frein, les enquêteurs et le personnel des chemins de fer qui ont participé aux essais ont été surpris de constater que les semelles de frein du côté droit du wagon ne touchaient pas toujours aux tables de roulement, même lorsque les semelles de frein exerçaient un effort assez important du côté gauche. Ils ont étudié plus à fond le manque d'uniformité des efforts déployés par les freins à main.

L'évolution du système de frein à main des wagons, qui a vu celui-ci passer d'un mécanisme du bout B seulement au système visant les deux bogies, a été surtout une question de rentabilité. L'ancien système ne permettait de freiner que quatre des huit roues d'un wagon. Le nouveau système permet de freiner les huit roues. L'expérience acquise au sujet du premier système montrait que les roues du bout B devenaient souvent défectueuses à cause des freins, beaucoup plus rapidement que les roues du bout A qui ne connaissaient que le serrage des freins à air. Il fallait par conséquent changer les roues du bout B plus souvent que celles du bout A, ce qui était coûteux et qui a, par conséquent, suscité le désir de concevoir un système qui répartirait plus uniformément sur toutes les huit roues les efforts exercés par les freins à main. Un tel nouveau système devait causer moins de déformations indirectes aux roues du bout B causées par les méplats et l'exfoliation et devait augmenter la durée réguliére des roues. Le nouveau système a également l'avantage supplémentaire de doter les deux bouts du wagon d'un frein à main efficace, de sorte que si, à l'un des bouts, le frein à main a une défaillance, celui qui est situé à l'autre bout peut encore exercer son effort de freinage.

Annexe 6— Wagons CNWX : Rendement des freins à main

1. Introduction

Les wagons CNWX ont fait l'objet d'essais pour déterminer le rendement de leurs freins à main (nota : la veille des essais, le CN avait lubrifié certains des wagons ayant servi aux essais.) On a remplacé les semelles de frein par des dispositifs «JIM Shoe» fabriqués par l'Inter Swiss Mfg. de Chicago (Illinois) aux États-Unis, qui comprenaient un appareil permettant de mesurer l'effort exercé par la semelle de frein (nota : celui-ci donne les mêmes résultats que si la semelle était neuve). Une goupille de jauge de contrainte placée dans la manille de chaîne a permis de mesurer la tension de la chaîne de frein à main, et une clé dynamométrique serrant l'écrou de volant du frein à main, de mesurer le couple de serrage du volant.

2. Effort exercé par les semelles de frein

L'échantillon suivant de données d'essai est un bon exemple de l'effort moyen exercé par les semelles de frein et de la variabilité de cet effort auquel on peut s'attendre lorsque la tension de chaîne est d'environ 6 800 livres (nota : on suppose que 6 800 livres de tension peuvent entraîner une efficacité des freins de 10 ou 11 %, répondant aux spécifications de l'AAR relatives aux wagons neufs et remis en état).

Effort exercé par les semelles de frein (en lb.) sur chaque roue
Wagon no
(CNWX)
Tension de la chaîne G1 G2 G3 G4 D1 D2 D3 D4 TOTAL
101080 6 770 8 740 7 440 4 230 3 840 1 610 1 480 660 550 28 550
109057 6 840 7 910 7 950 1 590 1 810 1 290 1 180 0 10 21 740
109075 6 830 6 100 6 520 4 850 4 920 840 820 660 580 25 290
109110 6 860 11 540 10 830 2 570 2 110 1 800 1 670 0 70 30 590
109219 6 870 6 590 6 220 4 530 4 930 850 730 540 700 25 090
109246 6 840 7 040 6 680 3 550 3 690 1 220 780 430 450 23 840
109256 6 830 7 200 7 170 4 280 4 490 950 1 080 560 520 26 250
109314 6 790 5 860 6 260 4 830 4 650 790 850 650 460 24 350
109371 6 790 6 210 6 340 4 620 4 900 970 840 540 550 24 970
109378 6 950 7 870 7 390 3 120 2 780 1 190 1 050 0 300 23 700
109416 6 820 8 170 7 460 4 600 4 740 1 510 1 370 630 590 29 070
109684 6 830 8 040 7 590 3 900 4 200 1 340 1 150 590 550 27 360
109807 6 770 6 930 6 660 5 190 5 290 1 090 940 590 650 27 340
109854 6 800 9 640 9 420 3 890 4 020 1 490 1 290 640 640 31 030
110093 7 040 5 950 5 850 5 490 5 570 690 870 740 840 26 000
110320 6 830 6 780 7 540 3 230 3 330 1 210 920 460 400 23 870
110379 6 790 5 470 5 230 5 320 5 620 1 030 740 830 810 25 050
111097 6 840 7 730 6 860 3 990 3 950 1 190 1 160 760 520 26 160
111253 6 930 8 950 8 370 3 230 3 760 1 440 1 020 400 0 27 170
111848 6 900 7 880 7 950 3 480 3 290 1 500 1 180 360 280 25 920
395200 6 820 5 840 5 410 3 210 3 300 840 610 440 330 19 980
395574 6 790 4 240 4 130 6 570 6 050 550 410 970 1 170 24 090
396415 6 800 8 980 7 650 3 640 3 770 1 430 1 330 450 410 27 660
396518 6 810 5 400 5 000 4 750 4 740 570 650 710 750 22 570
396809 6 770 7 750 7 420 3 910 3 330 1 060 1 370 430 460 25 730
396863 6 880 7 750 7 280 3 500 3 200 1 210 1 130 350 240 24 660
396898 6 890 8 120 6 720 4 220 3 900 1 130 1 050 690 530 26 360
Haut 11 540 10 830 6 570 6 050 1 800 1 670 970 1 170 40 600
Bas 4 240 4 130 1 590 1 810 550 410 0 0 12 730

Dans le cas des wagons CNWX : a) l'effort exercé par les semelles de frein sur les roues du côté gauche est beaucoup plus important que l'effort exercé sur les roues du côté droit; b) l'effort exercé par les semelles de frein sur les roues du bout B dépasse largement celui qui s'exerce sur les roues du bout A; c) dans le cas de n'importe quelle roue donnée, l'effort exercé par la semelle de frein, la tension de chaîne étant la même, peut varier considérablement d'un wagon à l'autre; d) l'effort total exercé par les semelles de frein peut varier énormément d'un wagon à l'autre lorsque la tension de chaîne est à peu près la même (de 20 à 31 kips).

3. Le couple de serrage par rapport à l'effort exercé par les semelles de frein

L'échantillon de données ci-dessous indique la relation entre le couple de serrage du volant de frein à main et l'effort total exercé par les semelles de frein, et l'efficacité des freins obtenu à une tension de chaîne d'environ 6 800 livres.

Rapport entre le couple de serrage exercé et l'efficacité des freins
Wagon no
(CNWX)
Couple de Serrage
(pi - lb)
Effort exercé par les semelles de frein
(lb)
Effort exercé/couple de serrage
(lb/pi - lb)
Efficacité des freins
(%)
101080 120 28 550 237,9 10,9
109057 140 21 740 155,3 8,3
109075 115 25 290 219,9 9,6
109110 125 30 590 244,7 11,6
109219 120 25 090 209,1 9,5
109246 115 23 840 207,3 9,1
109256 120 26 250 218,8 10,0
109314 130 24 350 187,3 9,3
109371 135 24 970 184,9 9,5
109378 130 23 700 182,3 9,0
109416 135 29 070 215,3 11,1
109684 130 27 360 210,5 10,4
109807 135 27 340 202,5 10,4
109854 170 31 030 182,5 11,8
110093 115 26 000 226,1 9,9
110320 130 23 870 183,6 9,1
110379 145 25 050 172,8 9,5
111097 160 26 160 163,5 9,9
111253 125 27 170 217,4 10,3
111848 125 25 920 207,4 9,9
395200 125 19 980 159,8 7,6
395574 165 24 090 146,0 9,2
396518 120 22 570 188,1 8,6
396863 130 24 660 189,7 9,4
396898 140 26 360 188,3 10,0
Haut 170 31 030 244,7 11,8
Bas 115 19 980 146,0 7,6

D'après les données d'essai : a) l'effort total exercé par les semelles de frein varie considérablement d'un wagon à l'autre si le couple de serrage du frein à main est à peu près semblable (efficacité de 7,6 à 11,8 %); b) le couple de serrage nécessaire pour obtenir la même tension de chaîne d'un wagon à l'autre varie considérablement (il faut de 115 à 170 pieds-livres pour obtenir une tension de chaîne d'environ 6 800 livres). Par ailleurs, l'effort exercé par les semelles (en livres) par pied-livre de couple de serrage varie d'environ 146 à 245 livres.

La figure ci-dessous montre le genre de répartition de l'effort des semelles de frein auquel on peut s'attendre dans le cas d'un wagon CNWX, et la séquence typique de serrage des semelles (indiquée par (1), (2), (3) et (4)). Pour un couple de serrage du frein à main d'environ 125 pieds-livres, environ 90 % de l'effort total exercé par les semelles peut s'exercer en définitive sur les tables de roulement des roues du côté gauche, et 66 % de l'effort total exercé par les semelles peut viser les tables de roulement des roues du bout B. En outre, l'effort total exercé par les semelles peut varier considérablement d'un wagon à l'autre.

Figure 20. Répartition de l'effort exercé par les semelles de frein
Répartition de l'effort exercé par les semelles de frein

4. Effets du taraudage sur l'effort exercé par les semelles de frein

L'échantillon suivant de données d'essai montre les effets du taraudage de la timonerie de frein pour distribuer la tension entre les composants, et ses effets sur l'effort exercé par les semelles de frein. Le taraudage s'est effectué au moyen d'un marteau de mécanicien de quatre livres utilisé délicatement pour simuler les vibrations susceptibles de réduire la friction prononcée aux points de pivotement de la timonerie.

Effet du taraudage de la timonerie de frein
Effort exercé par les semelles de frein
Wagon no (CNWX) Couple de serrage (pi - lb) Avant le taraudage (lb) Après le taraudage (lb) Diff. (lb)
109684 30 5 240 5 170 - 70
55 10 030 9 650 - 380
70 14 120 13 970 - 150
95 19 060 20 010 + 950
110 23 240 24 630 + 1 390
130 27 360 28 400 + 1 040
109854 40 7 550 7 480 - 70
65 12 110 12 250 + 140
90 16 640 17 350 + 710
100 21 750 22 850 + 1 100
140 27 160 28 450 + 1 290

Ces données d'essai révélent que le taraudage de la timonerie de frein peut entraîner un équilibrage des efforts dans les composants de la timonerie, de sorte que l'effort total exercé par les semelles varie, et qu'au moment d'un serrage moindre du frein à main cet effort diminue, et qu'il augmente lors d'un serrage plus énergique.

5. Fiabilité du rendement des freins à main

Les données d'essai sur l'effort exercé par les semelles de frein dans le cas de couples de serrage différents du volant de frein à main (les wagons étant divers) ont révélé une grande variabilité de l'efficacité des freins même si le couple de serrage est semblable.

Figure 21. Effort exercé par les semelles de frein par rapport au couple de serrage du volant
Effort exercé par les semelles de frein par rapport au couple de serrage du volant

Effort exercé par les semelles de frein par rapport au couple de serrage du volant

À noter qu'en moyenne, la relation entre le couple de serrage et l'effort exercé par les semelles de frein est presque linéaire, car il répond à la norme de l'AAR, qui est de 10 ou 11 % du poids brut du véhicule si le couple de serrage du volant de frein à main est de 125 pieds-livres. Toutefois, il se peut trés bien que l'effort exercé par les semelles de frein soit beaucoup plus important ou beaucoup plus faible dans le cas d'un wagon plutôt que d'un autre, même si l'intensité de serrage du volant est la même (d'après les données relatives aux 27 wagons CNWX). L'opérateur qui serre le frein à main ne se doute pas de cette variabilité parce que ce n'est qu'en touchant le volant et en regardant les semelles de frein serrant les tables de roulement qu'il peut mesurer l'effort de freinage exercé par les freins. Le fait de pousser ou de tirer les wagons immobilisés au moyen d'une ou de plusieurs locomotives ne fournirait probablement pas la rétroaction nécessaire pour évaluer l'importance de la variabilité.

Ce tableau permet de voir que la variabilité trés approximative est la suivante :

Effort exercé par les semelles de frein (000 lb)
Couple de serrage
(pi - lb)
Bas Moyenne Haut
40 6 6 8
50 5 9 12
60 6 10 18
70 9 12 22
80 12 14 21
90 10 17 28
100 16 19 23
110 13 22 25
120 15 23 29

Si le couple de serrage du volant est de 60 à 80 pieds-livres (c'est celui auquel on peut s'attendre de la plupart des employés), l'effort exercé par les semelles susceptible d'en résulter peut, à la lumiére des données recueillies, varier selon un coefficient de 2 ou 3.

Le couple de serrage assuré par l'employé qui tourne le volant de frein à main force le mécanisme d'engrenage à tendre la chaîne qui le relie à la timonerie. La figure ci-dessous montre la mesure dans laquelle la tension de chaîne peut varier dans le cas d'un éventail complet de couples de serrage du volant de frein à main.

Figure 22. Tension de chaîne par rapport au couple de serrage
Tension de chaîne par rapport au couple de serrage

La variabilité est trés grande, comme dans le cas de celle de l'effort exercé par les semelles de frein (voir le tableau Effort exercé par les semelles de frein par rapport au couple de serrage du volant).

La figure ci-dessous montre la relation entre la tension de chaîne et l'effort exercé par les semelles en ce qui concerne les wagons CNWX qui ont été mis à l'essai.

Figure 23. Effort exercé par les semelles de frein par rapport à la tension de chaîne
Effort exercé par les semelles de frein par rapport à la tension de chaîne

Il existe une relation relativement étroite entre l'effort exercé par les semelles de frein et la tension de chaîne : plus la chaîne est tendue, plus cet effort varie. En examinant les trois tableaux qui précédent, on peut conclure que la plus grande variabilité de l'effort résulte de la conversion du couple de serrage en tension de la chaîne grâce au mécanisme d'engrenage des freins, lorsque le couple est relativement faible, ainsi que d'une combinaison des effets du mécanisme d'engrenage et de la timonerie de frein lorsque le couple de serrage est important.

6. Essais relatifs au volant, à l'engrenage, à l'embrayage et au mécanisme de desserrage

Les essais menés par le Laboratoire technique du BST relativement à un wagon et à plusieurs freins à main fournis par le CN ont révélé que le volant de frein à main pouvait être serré grâce à un couple de serrage normal d'environ 65 pieds-livres, et que cette intensité de serrage ne changeait pas, même si le cliquet à gravité n'était pas enclenché pour maintenir en place le mécanisme d'engrenage. La résistance à la friction de ce mécanisme (fourni par le CN) lui permettait de résister à la tendance de la tension de la chaîne à forcer le volant à tourner dans le sens contraire des aiguilles d'une montre. L'engrenage n'était pratiquement pas lubrifié, et ses bagues indiquaient une certaine usure et une certaine détérioration, de sorte qu'elles donnaient l'impression d'avoir besoin d'entretien. Certaines des zones critiques n'avaient pas été lubrifiées du tout. Lorsque les coussinets (ou paliers) et les bagues du tambour de chaîne, du double engrenage et de l'arbre de moyeu ont été graissés, la résistance à la friction a diminué à un point tel que le mécanisme d'engrenage, sans le cliquet, ne pouvait maintenir le couple de serrage important donné au volant de frein à main.

Dans un wagon CPWX de l'année 1980, l'application d'un couple de serrage au volant de frein à main a semblé produire un rendement variable à cause du jeu excessif de la bague arriére de l'arbre du volant de frein. Le frein à main du premier wagon parti à la dérive avait perdu son ressort de cliquet à gravité, et le patin de ressort ne présentait aucune marque d'usure récente. En nettoyant le patin de ressort, on a relevé certaines marques d'usure révélant qu'il y avait déjà eu un ressort. L'évaluation théorique du ressort de cliquet soumis à la force d'inertie d'une collision survenue à 85 mi/h avec une butée d'un pied a révélé que ce ressort n'aurait pas pu se desserrer au moment de la collision.

Les essais portant sur un wagon donné ont montré qu'une personne (pesant 165 livres) qui serre un frein à main agissant sur un mécanisme non lubrifié pouvait augmenter considérablement la tension de la chaîne et effectuer le serrage plus facilement lorsqu'on avait graissé d'abord le mécanisme d'engrenage. Ce n'est que par un tel graissage qu'on a pu améliorer le rendement du frein à main. Et on n'a pas enlevé, avant le graissage, les débris dus à la rouille et à l'usure sur les mécanismes d'engrenage fournis par le CN. Pour cette raison, on a procédé à des essais plus poussés au sujet de l'importance du graissage sur le rendement des freins à main.

En mars 1997, le rendement des freins à main de cinq wagons-trémies couverts à céréales a été vérifié à Montréal. Le premier essai consistait à mesurer la tension de la chaîne et le couple de serrage du volant de frein à main des wagons (tels qu'on les a reçus). L'état dans lequel on a reçu les freins à main ressemblait à l'état du wagon soumis précédemment à des essais (c'est-à-dire que les coussinets (ou paliers) et les bagues du tambour de chaîne, du double engrenage et de l'arbre de moyeu étaient rouillés). Le deuxième essai a été une répétition du premier, mais cette fois on a lubrifié à l'huile les composants du frein à main à des endroits déterminés par l'industrie. Le troisième essai a donné lieu à des mesures semblables, sauf que les bagues de l'engrenage du frein à main ont été graissées au préalable.

Les essais ont révélé que la lubrification à l'huile des endroits déterminés par l'industrie n'avait aucune incidence sur le rendement des freins à main, mais que le graissage des bagues d'engrenage l'améliorait considérablement.

7. Essais portant sur les sons émis par la roue à rochet

Le BST a décidé de vérifier quels étaient les bruits émis par la roue à rochet, qu'elle soit munie ou non du ressort de cliquet. Cette vérification a été faite pour les raisons suivantes :

L'objectif était de déterminer si le bruit de la roue à rochet d'un des deux freins à main aurait pu être entendu dans des circonstances semblables à celles de la nuit du 12 août 1996, sur la voie 4 du triage Edson.

Deux locomotives (comme celles utilisées au triage Edson) ont été placées avec trois wagons CNWX, d'une façon semblable à celle dont les wagons avaient été alignés sur la voie 4. Le moteur de la locomotive la plus proche des wagons a été arrêté, et celui de l'autre locomotive a été mis au ralenti. Un enquêteur du BST et un représentant de la compagnie de chemin de fer se sont placés à peu près à l'endroit où se trouvait le chef de train du triage Edson. Un autre enquêteur du BST a fait ce que le chef de train adjoint a affirmé avoir fait : il a serré les freins à main des deux wagons. Bien qu'il ait serré les deux freins à main, on n'a entendu le bruit que d'une seule roue à rochet. Le frein à main qui avait perdu son ressort de cliquet (même s'il était plus proche de l'endroit où se tenait le chef de train) n'a pas pu être entendu à cause du bruit de la locomotive dont le moteur tournait au ralenti. De plus, on n'a pas entendu le bruit même quand le moteur des deux locomotives était arrêté. Cela indique donc que le bruit de roue à rochet qu'a entendu le chef de train s'est fort probablement fait entendre lorsque le chef de train adjoint a tourné le volant du frein à main du deuxième wagon parti à la dérive.

Annexe 7 - Enquête sur le serrage des freins à main

1. Résumé

Peu après l'accident, le BST a mené une étude sur le couple de serrage du volant de frein à main relatif à des wagons à l'arrêt choisis au hasard dans l'ensemble du Canada. On s'est servi de clés dynamométriques pour déterminer la mesure dans laquelle les employés avaient serré les freins à main.

On a fait l'essai de 64 wagons : le couple de serrage mesuré variant de 20 à 180 pieds-livres, la moyenne étant de 78 pieds-livres et la médiane de 65 pieds-livres. Comme il avait été constaté que les couples de serrage trés élevés résultaient trés probablement de ce que les freins à air avaient été serrés avant les freins à main, cette moyenne et cette médiane sont probablement élevées dans des conditions où les capacités physiques et la technique démontrées par l'employé serrant les freins à main sont les seuls critéres. L'examen de la documentation relative à l'éventail d'habiletés nécessaires pour pousser ou tirer vient confirmer cette hypothése.

2. Triage Edson

Le BST a éprouvé la compétence du chef de train adjoint qui a serré les freins à main au triage Edson, pour déterminer comment celui-ci procédait habituellement pour effectuer ce travail. Le chef de train adjoint a serré les freins correctement, et il pouvait assurer un couple de serrage du volant bien supérieur à la normale.

En effectuant d'autres essais au triage Edson, le BST a demandé à un employé de chemin de fer expérimenté de démontrer comment il serrait habituellement les freins à main. Celui-ci était d'une taille bien au-dessus de la moyenne. Il a tourné le volant en plaçant ses doigts de la main droite sur un rayon du volant, jusqu'à ce que celui-ci s'arrête, puis il lui a fait faire encore un quart de tour. Il ne s'agit pas de la méthode approuvée pour serrer les freins à main. Le couple de serrage indiqué sur le volant était de 40 pieds-livres, bien inférieur à la médiane. Une deuxième personne de plus petite taille, utilisant ses deux mains et se tenant debout sur le sol, a tourné le volant davantage pour lui donner un couple de serrage d'environ 100 pieds-livres. Cette méthode est également jugée inappropriée, mais le couple de serrage exercé était bien supérieur à la médiane.

3. Triage Belleville

Plus tard, le BST a mené des essais semblables au triage Belleville du CN. On a demandé à deux wagonniers mâles expérimentés de serrer le frein à main. On a demandé ensuite à deux personnes inexpérimentées, un homme et une femme, de faire de même. Le couple de serrage mesuré variait de 85 à 125 pieds-livres lorsqu'on le réalisait sur le sol, et de 65 à 95 pieds-livres lorsqu'on le produisait à bord du wagon. Le couple de serrage sur des wagons choisis au hasard au triage Belleville variait de 50 à 75 pieds-livres, la moyenne étant de 61 pieds-livres.

Annexe 8— Enquête sur l'état des rouleaux du principal levier vertical

Le CN a fourni quatre wagons CNWX au BST pour les essais. Le BST a constaté que des rouleaux du principal levier vertical étaient manquants sur deux des wagons.

Comme le deuxième wagon parti à la dérive semblait lui aussi avoir perdu l'un de ces rouleaux, le BST a examiné 39 wagons-trémies CNWX vers la fin août 1996. Il a découvert que deux de ces wagons avaient eux aussi un rouleau manquant.

Le BST a alors décidé d'examiner un échantillon plus large de wagons-trémies couverts à céréales du gouvernement dans l'ensemble du pays, en janvier et février 1997, pour déterminer l'état de leurs rouleaux de levier vertical.

certains avaient une plaque de cisaillement portant des marques indiquant que le levier principal atteignait (ou presque) le bout de la fente lorsque le frein à main était serré.

Cette derniére situation signifie qu'il se peut que, sur ces wagons, le couple de serrage dépassant un certain nombre de pieds-livres ne soit pas transmis entièrement par la timonerie pour produire un effort de semelle de frein supplémentaire.

L'examen de 521 wagons (sur un total de 19 000) a été jugé suffisant pour s'assurer que, contrairement à ce qu'on craignait, il ne s'agissait pas d'un probléme trés répandu. L'examen a révélé que l'absence de rouleaux était rare. Les résultats d'une enquête indépendante menée par le CN viennent corroborer cette constatation.

Annexe 9— Wagons CNWX partis à la dérive : Serrage des freins à main

L'examen des débris a révélé qu'au moment de l'impact, aucun frein à main n'avait été serré dans les 18 wagons partis à la dérive qui étaient les plus à l'ouest. On a examiné neuf essieux montés pour déterminer s'ils appartenaient au premier ou au deuxième wagon parti à la dérive. Dans le cas de quatre d'entre eux, la table de roulement d'une roue par essieu portait des marques en bandes.

Des marques en bandes sur la table de roulement d'une roue par essieu sont en général attribuables à la circulation d'un wagon dont le serrage des freins à main n'est pas uniforme, et elles n'ont rien à voir avec le serrage des freins à air. Le frottement des semelles de frein sur les tables de roulement produit de la chaleur qui modifie la couleur de la surface de la roue en acier.

Le fait que des marques en bandes sur la table de roulement ont été relevées d'un côté seulement révéle que les freins étaient serrés plus fortement de ce côté du wagon que de l'autre. L'observation d'autres wagons CNWX a révélé que des marques semblables existaient sur la table de roulement de wagons qui n'avaient pas été immobilisés tout récemment par des freins à main. Par conséquent, il est impossible d'affirmer catégoriquement que les marques en bandes de roues provenant du lieu de l'accident résultent de l'effort exercé par les semelles de frein pendant la dérive.

Le BST a effectué un examen des dossiers du premier et du deuxième wagons partis à la dérive et les a comparés aux données sur les roues, les essieux et les paliers ou coussinets. En se fondant sur les marques des roues (peut-être des marques résultant de la collision avec l'engrenage de grande taille d'une locomotive, et des marques bleues dues à l'impact contre les aiguillages) et sur les résultats de l'examen en question, le BST a déterminé que trois des quatre essieux montés portant des marques en bandes appartenaient fort probablement au premier wagon parti à la dérive. Il se peut également que l'une des quatre roues portant des marques appartienne au deuxième wagon parti à la dérive.

Aucune des roues retrouvées ne portait de marques de surchauffe sur la table de roulement, et aucune ne portait de marques d'extrême surchauffe. Les roues atteignaient toutes et même dépassaient les exigences en matiére d'épaisseur minimum de la table de roulement. Toutes les semelles de frein connexes atteignaient et même dépassaient les exigences en matiére d'épaisseur.

L'examen des roues, toutefois, n'a pas permis de déterminer d'emblée si les freins du premier ou du deuxième wagon avaient été serrés ou non, ni dans quelle mesure ils étaient serrés au moment de la collision.

Annexe 10— Examen des freins à main

Des freins à main Peacock (freins à main trés performants de modéle 6500-2 de l'AAR) ont été retrouvés dans les débris du premier et du deuxième wagons partis à la dérive. Ils étaient tous deux endommagés, mais ils ont été examinés pour déterminer dans quelle mesure, s'il y a lieu, leurs freins étaient serrés au moment de l'impact.

L'examen du frein à main du premier wagon a révélé ce qui suit :

Par la suite, le BST a procédé à un essai visant à déterminer quelle tension de chaîne et quel couple de serrage correspondraient à la position de la manille de chaîne (11 heures) de même qu'avec l'état des semelles de frein et des roues du premier wagon. Les résultats obtenus, qui correspondaient à peu près à l'usure des semelles de frein et des roues du premier wagon (ils étaient relativement neufs), ont révélé que le couple de serrage avait probablement été d'environ 80 pieds-livres, et la tension de chaîne, d'environ 4 750 livres, soit un couple de serrage de frein à main dépassant le couple normal de 65 pieds-livres (la médiane) dont il a été question précédemment. Les résultats ont également révélé un effort de freinage correspondant probablement aux marques en bandes des roues du côté gauche. La tension de chaîne et le couple de serrage ont été mesurés directement.

Si le ressort de cliquet n'était pas en place dans le premier wagon parti à la dérive, la mesure dans laquelle le frein à main était serré au moment de l'accident peut avoir été inférieure au serrage initial effectué lorsque le wagon a été placé sur la voie 4. Comme il est mentionné plus haut (dans l'annexe 6 portant sur le rendement des freins à main des wagons CNWX), dans un wagon dont le mécanisme de frein à main était mal lubrifié, on pouvait serrer efficacement le frein à main, et le garder serré, sans que le cliquet n'ait été enclenché, jusqu'à ce que le wagon en question ne subisse une secousse. Lorsque le premier wagon parti à la dérive a été immobilisé sur la voie 4, cette immobilisation aurait pu se faire sans que le cliquet ne soit enclenché, et, à cause d'une secousse ou sous l'effet des vibrations produites par la circulation du wagon avant l'accident, les engrenages de frein à main auraient pu tourner dans le sens contraire des aiguilles d'une montre, relâchant ainsi la tension de la chaîne lorsque le cliquet serait descendu en position d'enclenchement. Si c'est le cas, le couple de serrage initial du volant de frein à main du premier wagon parti à la dérive peut avoir été supérieur à 80 pieds-livres.

L'examen du frein à main du deuxième wagon parti à la dérive n'a pas révélé si ce frein était serré au moment de l'accident. L'examen du deuxième frein à main récupéré sur les lieux de l'accident et de trois freins à main fournis comme référence par le bureau du CN (Edmonton) au Laboratoire technique du BST a révélé que, dans chaque cas, le ressort du cliquet de retenue était présent. Le CN et le BST ont utilisé ces freins à main de référence pour effectuer des essais à Edmonton. Pour chaque frein à main de référence, ils ont appliqué sur place l'imagerie endoscopique vidéo au ressort de cliquet et de serpentin afin d'en documenter l'état et le mouvement relatif lors du serrage normal des freins. Le démontage et l'inspection subséquents ont révélé des marques d'usure causées par le ressort sur le cliquet dans les trois freins à main de référence, de même que dans le deuxième frein à main récupéré sur les lieux de l'accident. Le cliquet du frein à main écrasé du premier wagon parti à la dérive ne présentait pas de marques d'usure semblables. À premiére vue, l'absence de marques d'usure signifie qu'il est tout à fait possible : qu'il n'y ait jamais eu de ressort; que le ressort ait été présent à l'origine mais qu'il était déjà tombé depuis un certain temps au moment de la collision; que le ressort ait été présent mais que le choc de l'accident l'ait fait sauter et que le manque d'utilisation, ou un usage minimum, n'ait produit aucune marque d'usure. Il fallait donc analyser plus à fond ces marques, ou leur absence.

Annexe 11— Triage Edson : Essais de simulation portant sur les freins à main et la vitesse

1. Exigences minimums de serrage des freins à main

Le 25 août 1996, des essais de simulation ont été menés sur la voie 4, au triage Edson, pour déterminer les exigences minimums de serrage des freins à main pour l'immobilisation d'un groupe aussi semblable que possible au groupe de 20 wagons partis à la dérive. On a utilisé tous les wagons originaux de ce groupe, sauf les cinq premiers, et on les a placés à peu près dans le même ordre qu'à l'origine.

Les wagons partis à la dérive pesaient 3 910 700 livres; les wagons utilisés pour la simulation pesaient 3 882 700 livres.

Résultats des essais

En tout, 14 essais de simulation ont été effectués sur la voie 4, pour lesquels on a serré différemment les freins à main des deux wagons-trémies les plus à l'est. On a obtenu les résultats suivants :

Essai 1 Aucun serrage des freins à main

Les 20 wagons étaient retenus par une seule locomotive. On n'a serré les freins à main d'aucun d'entre eux. On a donné libre cours au jeu des attelages et à la stabilisation. Lorsque la locomotive s'est déplacée vers l'est, les wagons ont immédiatement descendu la pente dans cette direction.

Essai 2 Serrage du frein à main d'un seul wagon (tension de chaîne de 5 240 livres)

Les 20 wagons ont été retenus comme dans l'essai 1. On a serré le frein à main du wagon qui était le plus à l'est jusqu'à ce que la tension de la chaîne soit de 5 240 livres (effort équivalant en moyenne à un couple de serrage de frein à main de 95 pieds-livres). Lorsque la locomotive s'est dirigée vers l'est, les wagons ont roulé sur une longueur de wagon puis ont été arrêtés par la locomotive. Lorsque les wagons se sont immmobilisés, la tension de chaîne avait chuté à 4 760 livres (tension équivalant en moyenne à un couple de serrage de frein à main de 85 pieds-livres).

Essai 3 Serrage du frein à main d'un seul wagon (tension de chaîne de 6 780 livres)

On a répété l'essai 2, mais avec une tension de chaîne initiale de 6 780 livres (équivalant en moyenne à un couple de serrage de frein à main de 125 pieds-livres). Lorsque la locomotive s'est déplacée vers l'est, les wagons ont roulé sur environ trois pieds, se sont arrêtés et sont restés immobiles pendant 10 minutes.

Essai 4 Serrage du frein à main d'un seul wagon (tension de chaîne de 4 050 livres)

On a desserré lentement le frein à main du wagon qui avait été soumis à l'essai 3, jusqu'à ce que les wagons bougent. Ils ont bougé lorsque la tension de chaîne a atteint 4 050 livres (équivalant en moyenne à un couple de serrage de frein à main de 75 pieds-livres).

Essai 5 Essai de vibration portant sur un seul wagon (tension de chaîne de 5 690 livres)

On a serré deux freins à main et l'on a desserré peu à peu le frein à main du deuxième wagon le plus à l'est, la tension de chaîne du frein à main du wagon le plus à l'est étant alors de 5 690 livres. On a fait circuler deux locomotives qui ont dépassé ces wagons sur la voie d'accés. Les wagons n'ont pas bougé, mais la tension de chaîne a été réduite à 5 650 livres.

Essai 6 Serrage du frein à main de deux wagons (tension de chaîne de 3 860 livres)

On a produit des couples de serrage semblables pour les deux wagons les plus à l'est. La tension de chaîne du premier wagon était de 3 860 livres (équivalant en moyenne à un couple de serrage de frein à main de 70 pieds-livres). Lorsque la locomotive s'est dirigée vers l'est, les wagons ont bougé momentanément, se sont arrêtés, puis sont restés immobiles pendant cinq minutes.

Essai 7 Essai de vibration portant sur deux wagons (tension de chaîne de 3 860 livres)

On a répété l'essai 6, la tension de chaîne du premier wagon étant cette fois de 3 790 livres. On a fait circuler deux locomotives qui ont dépassé les deux wagons. On n'a constaté aucun mouvement. Les couples de serrage des freins à main étaient respectivement de 80 et 50 pieds-livres pour le premier et le deuxième wagons.

Essai 8 Jeu dans les attelages

On a mis l'un derriére l'autre trois wagons-tombereaux BN vides, et permis au jeu dans les attelages de se refermer jusqu'à la locomotive, en mesurant le temps. La réaction dans les attelages a duré 12,48 secondes.

Essai 9 Effet de la réaction dans les attelages : le frein à main d'un wagon ayant été serré

On a serré le frein à main du wagon le plus à l'est, et permis au jeu dans les attelages des 20 wagons de se refermer (ce qui a duré 12 ou 13 secondes). La tension de chaîne était de 6 740 livres avant la réaction dans les attelages, et de 6 470 livres aprés. Les wagons ont parcouru une distance d'un pied puis sont restés immobiles pendant cinq minutes.

Essai 10 Réaction dans les attelages : les freins à main de deux wagons ayant été serrés

On a serré les freins à main des deux wagons les plus à l'est, les couples de serrage étant respectivement de 75 et 65 pieds-livres. La tension de chaîne du premier wagon était de 4 200 livres. On a permis au jeu dans les attelages de se refermer, ce qui a duré 12 ou 13 secondes, et qui a provoqué le déplacement des wagons sur quelque six pieds. Les wagons se sont alors arrêtés puis sont restés immobiles pendant cinq minutes.

Essai 11 Essai de vibration : les freins à main de deux wagons ayant été serrés

Les wagons étaient là où les avait laissés l'essai 10. Un train est passé sur la voie nord à une vitesse de 25 mi/h. On n'a observé aucun mouvement.

Essai 12 Essai de mouvement initial : les freins de deux wagons ayant été serrés

Les freins à main ont été serrés comme pour l'essai 11. On a desserré lentement le frein à main du wagon le plus à l'est jusqu'à ce qu'un mouvement soit observé. Les wagons se sont déplacés lorsqu'on a réduit à 480 livres la tension de chaîne. Il a fallu porter la tension de chaîne du premier wagon à 7 280 livres pour arrêter les wagons lorsqu'ils ont commencé à bouger.

Essai 13 Essai de chronométrage : les freins à main de deux wagons ayant été serrés

On a reconstitué les événements de la nuit du 12 août 1996 en déplaçant les 20 wagons vers l'est de façon que les 12 wagons-trémies soient à part des autres sur la voie 4 et refoulés de nouveau sur cette voie. Un employé est monté à bord du deuxième wagon, a serré un frein à main pendant que le wagon était en marche, est descendu, puis est monté dans le premier wagon où il a serré le frein à main et il est descendu. Le couple de serrage du frein à main du deuxième wagon le plus à l'est était de 70 pieds-livres, et celui du premier, de 55 pieds-livres. Il s'est écoulé 34 secondes entre le moment où l'employé est descendu du deuxième wagon et celui où il est descendu du premier. Les wagons se sont déplacés légérement avant de s'immobiliser.

Essai 14 Essai de roulement des 20 wagons

On a laissé les 20 wagons rouler de la voie 4 jusqu'au circuit de signalisation d'Edson-est. Les 20 wagons ont mis cinq minutes et six secondes pour parcourir 2 645 pieds. Les wagons ont atteint une vitesse de 12 mi/h.

2. Simulations de vitesse et de l'efficacité des freins à main

Le Laboratoire technique du BST a mis au point un modéle informatique pour déterminer à quel point il faudrait que le serrage des freins à main ralentisse la circulation des wagons sur le parcours connu depuis la voie 4 jusqu'au point d'impact (environ 33 200 pieds), compte tenu du temps connu et consigné que ces wagons ont mis pour franchir cette distance (au total, un peu moins de 25 minutes). Le modéle informatique a permis de tirer les conclusions suivantes :

Annexe 12— Wagons CNWX : Approbation de la conception et entretien

1. Approbation et vérification de la conception

Le gouvernement fédéral a acheté les wagons-trémies couverts à céréales pour aider les compagnies de chemin de fer à assumer leurs frais de manutention des céréales au tarif obligatoire du «Nid-de-corbeau». Des représentants du CN et du CP ont participé à la conception de ces wagons-trémies. On a fait appel à leur compétence pour s'assurer que les constructeurs construiraient des wagons conformes aux normes de l'AAR.

Ni Transports Canada ni la Commission canadienne des transports n'ont participé directement à la conception ou à l'approbation des wagons.

2. Entretien des freins à main

Exigences

L'article 21.1 de la partie III du Réglement sur les freins de train de Transports Canada stipule que :

Tout l'équipement de frein doit être maintenu dans un état sûr et convenable pour le service.

a) Les freins des véhicules remorqués doivent être entretenus conformément aux exigences de l'AAR et aux méthodes prescrites par la compagnie ferroviaire.

La section E de la norme S-475 de l'AAR Manual of Standards and Recommended Procedures stipule ce qui suit :

Hand Brakes must be lubricated, if necessary, at points shown in Section H-Part III, Rule F Standard S-736 ... and as referenced in Interchange Rule 13.E.5...

(TRADUCTION : Les freins à main doivent être lubrifiés, s'il y a lieu, aux endroits indiqués dans la norme S-736 de la règle F de la section H - partie III (...) et comme le prescrit la règle 13.E.5 sur les lieux de correspondance...)

La règle 8.3 de la section H de la partie III du même document stipule ce qui suit :

Lubricate only at points indicated on the field lubrication chart...

(TRADUCTION : Ne lubrifier qu'aux endroits indiqués sur le tableau de lubrification sur le terrain...)

Le tableau de lubrification sur le terrain indique que les freins à main du type Ellcon National D-6500-2 doivent être lubrifiés sur le terrain, à l'emplacement de l'arbre de transmission principal et à celui de l'arbre du levier de desserrage, avec du All Year Journal Box Lubricating Oil (lubrifiant toutes saisons de la boîte d'essieu), ou de la Automatic Slack Adjuster Grease (graisse pour règleur automatique de timonerie) de type AAR.

La règle 13(E)5 du Field Manual of the AAR Interchange Rules stipule ce qui suit :

Geared hand brake mechanism and connections must be inspected, tested, and lubricated if necessary, when car is on shop or repair track.

(TRADUCTION : Le mécanisme et les raccords à engrenages de frein à main doivent être inspectés, mis à l'essai et lubrifiés s'il y a lieu, lorsque le wagon est à l'atelier ou sur une voie de réparation.)

Le document du CN intitulé Instructions relatives aux freins à main au cours d'un essai sur voie de réparation stipule ce qui suit :

Lubrifier les freins à main et les serrer, en s'assurant que les semelles appuient fortement sur les tables de roulement. (Vérifier au moyen d'une barre appropriée.)

Lors des essais sur les wagons effectués par un constructeur de wagons, il faut vérifier le frein à main pour s'assurer que sa semelle peut exercer l'effort nécessaire pendant toute la course du piston. On le fait en enlevant la semelle de frein pour simuler une longue course du piston, c'est-à-dire l'usure maximum de la roue et de la semelle de frein.

La norme S-484 de la section E II du AAR Manual of Standards and Recommended Practices contient des renseignements sur la façon de règler la course du piston et le mécanisme des freins à main. Elle stipule que les freins doivent être règlés lorsque les wagons sont neufs, après la pose de toute roue neuve ou de remplacement, et après le remplacement des bogies.

La règle 3 (2) du Field Manual of the AAR Interchange Rules stipule ce qui suit :

When car is on shop or repair track, all WABCOPAC et NYCOPAC cars without slack adjusters must be checked to ensure proper piston travel. If piston travel exceeds 3 inches (without brake shoe renewal) adjustment in accordance with AAR Standard S-484, latest revision is required.

(TRADUCTION : Lorsqu'ils sont à l'atelier ou sur une voie de réparation, il faut vérifier tous les wagons WABCOPAC et NYCOPAC sans règleur de timonerie pour assurer la course efficace du piston. Si celle-ci dépasse trois pouces (sans renouvellement des semelles de frein), il faut procéder à l'ajustage conformément à la norme S-484 de l'AAR, version la plus récente.)

Si le système de frein à air est mal règlé, le rendement du frein à main risque d'être inférieur.

Conformité

Le BST a noté que plusieurs des wagons qu'il a utilisés au cours des essais avaient des mécanismes de frein à main secs, rouillés et raides. Ils étaient en mauvais état et rouillés et n'étaient pratiquement pas lubrifiés. La lubrification des endroits indiqués sur le tableau de lubrification sur le terrain ne semble pas s'adresser aux bagues de chaque côté des trois engrenages situés dans le carter de frein à main. Il n'existe pas de graisse convenable pour lubrifier ces endroits critiques. Les essais ont montré que le huilage des points accessibles, aux endroits précisés dans le tableau, n'avait aucune incidence sur le rendement des freins à main.

La tringlerie des freins à main de presque tous les wagons qui ont fait l'objet d'essais était dans les trous d'origine de l'axe d'articulation. La course du piston n'a pas été mesurée parce que la plupart des essais de freins à main ont été effectués sans air.

Annexe 13— Initiatives de sécurité prioritaires du Canadien National

  1. Envoi d'une lettre du Président à tous les employés.
  2. Élaboration de méthodes de travail générales et spécifiques
    • Méthodes de travail spécifiques pour les triages, y compris :
      • freins à main
      • dérailleurs
      • employé à bord du dernier wagon
      • système de télécommande des locomotives
      • arrêt des wagons à l'aide de locomotives
      • aiguillages
    • Formation et manuels d'exploitation propres à chaque installation
    • Formation des superviseurs au système de télécommande des locomotives
    • Revue de l'emplacement des dérailleurs
  3. Contact direct par les gestionnaires hiérarchiques
    • Meilleurs encadrement et communication
    • Méthodes et système pour assurer un suivi
  4. Participation du Comité de sécurité et de santé
    • Rencontres avec les comités
    • Élaboration de plans d'action
    • Reconnaissance du meilleur comité
  5. Mise en oeuvre d'un numéro 800 et création d'un poste de protecteur du personnel
  6. Analyse des tendances
    • Effectuée tous les trois mois pour s'assurer que les secteurs à risques élevés sont identifiés et que des mesures sont prises
    • Élaboration de plans d'action
  7. Vérification de la sécurité
    • interne et externe
  8. Participation mensuelle du chef de la direction et du Comité de gestion stratégique aux dossiers clé portant sur la sécurité
    • Rapports d'étape sur les initiatives de sécurité et sur le nombre d'accidents
  9. Analyse de la cause fondamentale
    • Formation aux techniques pertinentes
    • Suivi informatisé des recommandations
  10. Congrés sur la sécurité pour chaque district
  11. Programme de mesures incitatives à la sécurité
    • à l'échelle de la compagnie et adressées aux employés
  12. Montrer aux gestionnaires hiérarchiques comment communiquer effectivement l'information sur la sécurité
  13. Plan d'exploitation hivernale
    • Mise en oeuvre d'un plan d'exploitation hivernale pour réduire la fréquence et la gravité des déraillements
  14. CANALERT
    • Programme de vigilance

Initiatives de sécurité supplémentaires

  1. Vérification des statistiques par le BST
    • Vérification externe pour s'assurer que les rapports statistiques du CN sont conformes aux exigences de la FRA
  2. Revue de l'entretien des voies secondaires
    • Analyse des tendances en matiére de sécurité par installation
  3. Tolérance zéro
    • Finir de rédiger la définition de Tolérance zéro et la communiquer à tous les employés
  4. Politique disciplinaire
    • Régles cardinales, infractions qui peuvent entraîner le congédiement, et sanctions précises pour les infractions
    • Évaluations, par conférences téléphoniques à l'échelle du réseau, des mesures disciplinaires en cas de violations graves
  5. Politique sur l'usage de drogues et d'alcool
  6. Formation en matiére de sécurité
    • Élaboration de méthodes pour la collecte et l'entrée de renseignements sur la formation dans une base de données
  7. Vérification et recommandations par DNV
    • Liste de points à traiter issus du rapport de DNV et qui n'ont pas été traités dans les présents plans d'action
  8. Paie au plein tarif pour la participation aux réunions de sécurité
    • Stratégie de modification du système de rémunération pour la participation aux réunions de sécurité
  9. Participation de la haute direction du syndicat dans la sécurité
  10. Présentation spéciale au Conseil sur les questions de sécurité
  11. Information sur la sécurité présentée au Comité exécutif tous les mois
  12. Méthodes de dissémination des directives de Transports Canada
  13. Politique et lignes directrices sur l'accés à la propriété du CN
  14. Systémes de signalisation et de contrôle de la circulation ferroviaire
    • Besoins de nouvelles installations et améliorations à apporter aux systèmes de signalisation actuels
  15. Vérification des compétences des contrôleurs de la circulation ferroviaire (CCF)
  16. Ratio de supervision
    • Revue du nombre de superviseurs par rapport au nombre d'employés
  17. Un agent de district à temps plein sera responsable de la formation et des examens
  18. Téléchargement des données des consignateurs d'événements dans tous les cas d'accidents en voie principale à signaler
    • Utilisation d'un logiciel pour réduire la charge de travail
  19. Spécialistes/experts en rendement

Annexe 14— Initiatives de sécurité du Canadien Pacifique

Avis de vigilance

Plan d'action en matiére de sécurité

Sensibilisation de la clientéle

Immobilisation du matériel par les employés de chemin de fer

Dérailleurs

Annexe 15— Résultats d'un sondage du BST auprès des mécaniciens du CN

Possibilité que le simple déplacement d'un groupe de wagons permette au mécanicien de déterminer si le frein à main exerce un effort de freinage.

Lors des manoeuvres, vous placez un groupe de wagons à l'arrêt, l'agent de train serre un ou plusieurs freins à main. Vous devez ensuite déplacer les wagons légérement vers l'arriére ou vers l'avant.

Indiquez quelles sont vos chances (de 1 : peu probable, à 5 : fort probable) dans les situations suivantes de pouvoir vous assurer, uniquement en déplaçant légérement les wagons, que le ou les freins à main exerce(nt) un effort de freinage :

Diagramme 1.1

Immobilisation de 20 wagons sur une voie de niveau

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 9 2 10 9 19
Chargés 10 8 13 6 12
Total 19 10 23 15 31

Diagramme 1.2

Immobilisation de 20 wagons sur une pente

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 10 4 12 7 16
Chargés 12 7 12 5 13
Total 22 11 24 12 29

Diagramme 1.3

Immobilisation de 100 wagons sur une voie de niveau

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 12 3 7 7 20
Chargés 15 6 9 2 17
Total 27 9 16 9 37

Diagramme 1.4

Immobilisation de 100 wagons sur une pente

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 14 3 10 5 17
Chargés 19 4 7 5 14
Total 33 7 17 10 31

Possibilité du mécanicien de déterminer à partir du simple déplacement d'un groupe de wagons si le frein exerce un effort de freinage suffisant.

Si vous avez été capable de vous rendre compte que le(s) frein(s) à main exerçait (exerçaient) un effort de freinage, pourriez-vous dire si dans les situations suivantes l'effort de freinage exercé serait suffisant pour empêcher les wagons de bouger une fois les locomotives dételées :

Diagramme 2.1

Immobilisation de 20 wagons sur une voie de niveau

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 13 3 7 4 22
Chargés 16 5 9 4 15
Total 29 8 16 8 37

Diagramme 2.2

Immobilisation de 20 wagons sur une pente

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 16 4 9 5 15
Chargés 17 5 12 6 9
Total 33 9 21 11 24

Diagramme 2.3

Immobilisation de 100 wagons sur une voie de niveau

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 16 2 6 5 20
Chargés 19 4 8 5 13
Total 35 6 14 10 33

Diagramme 2.4

Immobilisation de 100 wagons sur une pente

peu probable

1



2
probable


3



4
fort
probable

5
Vides 18 4 13 3 11
Chargés 21 7 10 3 8
Total 39 11 23 6 19