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Rapport d'enquête aéronautique A03P0199

Collision avec le relief
du Cessna 172M C-GDPD
exploité par Pacific Professional Visual Flight Training Ltd.
à environ 24 nm au nord-nord-ouest
de Harrison Hot Springs (Colombie-Britannique)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

À 18 h 48, heure avancée du Pacifique, le Cessna 172M (portant l'immatriculation C-GDPD et le numéro de série 17262636) décolle de l'aéroport de Boundary Bay (Colombie-Britannique). À son bord se trouvent un instructeur de pilotage, un élève-pilote et un observateur qui vont faire de la formation au vol en montagne dans les environs du lac Stave et du lac Harrison. Environ une heure plus tard, pendant un exercice d'approche forcée effectué à l'ouest du lac Harrison, l'appareil heurte le sol et est détruit. Aucun incendie ne se déclare. Les occupants des deux sièges avant sont grièvement blessés, et l'occupant du siège arrière subit de légères blessures. Environ trois heures après l'accident, on rapporte un signal de radiobalise de repérage d'urgence, ce qui permet de localiser l'appareil à quelque 24 milles marins au nord-nord-ouest de Harrison Hot Springs (Colombie-Britannique). Les trois occupants sont évacués des lieux par hélicoptère.

Renseignements de base

L'élève-pilote, qui prenait place dans le siège avant gauche, était titulaire d'une licence canadienne de pilote privé valide et il totalisait 78 heures de vol au moment de l'accident. Le pilote instructeur, qui était un employé de Pacific Professional Visual Flight Training Ltd., était titulaire d'une licence canadienne de pilote professionnel valide annotée d'une qualification d'instructeur de classe 2, et il prenait place dans le siège avant droit. Il totalisait plus de 6000 heures de vol, dont la majorité en qualité d'instructeur de pilotage sur Cessna 150 et 172. Les pilotes possédaient tous les deux les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol. D'après les dossiers, les temps de service et de vol de l'instructeur étaient conformes à la réglementation en vigueur. L'occupant assis dans le siège arrière suivait une formation pour devenir instructeur de pilotage, et il avait été invité à prendre part au vol afin d'observer l'instruction propre au vol en montagne.

L'élève-pilote avait effectué l'inspection prévol du C-GDPD et en avait calculé la masse et le centrage. Il avait également recueilli les renseignements météorologiques et déposé un plan de vol selon les règles de vol à vue (VFR) indiquant que l'appareil décollerait de l'aéroport de Boundary Bay (Colombie-Britannique)Note de bas de page 1 à 18 h, heure avancée du Pacifique (HAP)Note de bas de page 2, qu'il se dirigerait au nord-est en direction des montagnes et qu'il reviendrait à l'aéroport de Boundary Bay à 21 h. L'ajout de 9 gallons impériaux de carburant avait porté la quantité totale de carburant à bord à 38 gallons impériaux, une quantité suffisante pour voler trois heures et offrir des réserves adéquates; par la suite, un exposé prévol avait eu lieu. Finalement, l'appareil a décollé de l'aéroport de Boundary Bay à 18 h 48 et s'est dirigé vers le nord-est, le long de la route prévue au plan de vol, en direction des montagnes.

Dans le cadre de l'exercice, on a effectué deux approches de précaution ainsi que des virages à rayon minimal (en zone confinée) aux abords d'une bande d'atterrissage abandonnée située à l'extrémité nord du lac Stave. L'appareil a continué à suivre la route qui figurait au plan de vol et il est entré dans la vallée du ruisseau Tretheway, à 9 milles marins (nm) au sud-sud-ouest du lac Harrison. En descendant dans la vallée du ruisseau Tretheway vers le lac Harrison, l'instructeur a ramené la manette des gaz au ralenti de vol et a proposé à l'élève d'effectuer un exercice d'approche forcée. L'élève a accompli un virage à 180 degrés avant de positionner l'appareil en descente vers une région qui ressemblait à un pré qu'il avait survolée en entrant dans la vallée du ruisseau Tretheway. L'appareil est descendu jusqu'à ce qu'il se trouve par le travers du site d'atterrissage choisi, à une altitude bien inférieure à 500 pieds au-dessus du niveau du sol (agl); il a été impossible d'établir l'altitude exacte jusqu'à laquelle l'appareil était descendu. L'instructeur a alors pris les commandes de l'appareil afin d'effectuer une remise des gaz. Il a mis pleins gaz, coupé le réchauffage du carburateur et rentré complètement les volets. Malgré la réaction normale du moteur et des commandes de vol, l'appareil a continué de s'approcher du relief ascendant et l'instructeur a amorcé un virage d'évitement à gauche. Pendant le virage, l'appareil a heurté le versant montagneux, à environ 24 nm au nord-nord-ouest de Harrison Hot Springs. D'après le radar de contrôle de la circulation aérienne et les calculs de la trajectoire de vol, l'accident serait survenu vers 19 h 48.

Les occupants des deux sièges avant ont été grièvement blessés. Quant à l'occupant du siège arrière, il a subi de légères blessures et a réussi à localiser la trousse de premiers soins et à aider les pilotes blessés. Le nécessaire de survie et les effets personnels de certains des occupants, comme des vêtements de rechange, ont été éjectés de l'appareil lors de l'accident et, à cause de l'obsécuritéé et de la couverture végétale, il a été impossible de les retrouver. Tous les occupants portaient leur ceinture de sécurité et les occupants des deux sièges avant portaient leur baudrier. Peu après l'accident, les occupants ont fait passer le sélecteur de fonction de la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) de la position « AUTO » à la position « ON » et, à 22 h 30, soit environ trois heures après l'accident, on a rapporté un signal au Centre de coordination des opérations de sauvetage. Des recherches nocturnes ont été lancées et, à 2 h 30, le lendemain matin, un avion de recherche a localisé le C-GDPD. Le personnel de recherche et de sauvetage a repéré plus facilement les lieux de l'accident parce que l'appareil n'avait pas dévié de la route qui figurait au plan de vol et parce que les occupants de l'appareil qui s'était écrasé ont dirigé une lampe-éclair d'appareil photographique vers l'avion de recherche.

Photo 1. Photographie aérienne, prise face à l'ouest, des lieux de l'accident
Photo of Photographie aérienne, prise face à l'ouest, des lieux de l'accident

L'altitude des sommets montagneux situés à proximité des lieux de l'accident varie de 6400 à 7400 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), et il y avait de la neige en altitude, en particulier sur les versants faisant face au nord. L'épave a été retrouvée à environ 2100 pieds asl sur un versant faisant face au nord-ouest, à la jonction de deux vallées glaciaires en U : la vallée du ruisseau Tretheway et une vallée sans nom, un peu plus étroite. L'épave se trouvait à environ 1000 pieds au sud et 300 pieds au-dessus du ruisseau Tretheway. Dans la région immédiate entourant les lieux de l'accident, le contrefort montagneux était recouvert d'une végétation rase de couleur vert clair que l'on trouve habituellement dans les couloirs d'avalanche subalpins; ailleurs dans la région, la végétation prédominante était constituée d'une forêt de conifères foncés.

À l'impact, l'aile gauche, le moteur, la cloison pare-feu et le train avant se sont détachés du fuselage, et la batterie a été projetée hors de l'appareil. On a retrouvé des morceaux du saumon de l'aile gauche et du feu de navigation gauche enchâssés dans le sol, à 130 pieds à l'ouest de la partie principale de l'épave, à peu près à la même altitude que cette dernière. Un grand nombre de marques d'impact et de pièces de l'appareil s'étendaient horizontalement sur le versant, entre les morceaux du saumon d'aile et la partie principale de l'épave. Une partie de l'extrémité de pale d'hélice retrouvée près du début du sillon laissé par l'épave présentait des dommages sur son bord d'attaque, des éraflures dans le sens de la corde et des dommages en torsion, ce qui indique que le moteur fournissait de la puissance à l'hélice. Cette dernière s'est fracturée en surcharge à 20 pouces de son extrémité. L'ELT est demeurée fixée par son support à la partie arrière du fuselage, mais la prise d'antenne et le sélecteur de fonction se trouvant à son extrémité avant ont été endommagés lorsque le fuselage a été écrasé. Même si une importante quantité de carburant d'aviation et d'huile moteur s'est déversée sur les lieux de l'accident, aucun incendie ne s'est déclaré.

Les conditions météorologiques enregistrées à 20 h (12 minutes après l'accident) à l'aéroport d'Abbotsford, situé à 190 pieds asl et à 35 nm au sud des lieux de l'accident, étaient les suivantes : quelques nuages à 23 000 pieds asl, visibilité de 30 milles terrestres, température de 25,3 °C, vent soufflant à 3 noeuds du 240 degrés vrais et calage altimétrique de 30,11. Si on utilise le gradient adiabatique standard de 2 °C par 1000 pieds d'altitude, la température extérieure sur les lieux de l'accident (à 2050 pieds) aurait été d'environ 21 °C. L'heure officielle du coucher du soleil était fixée à 21 h.

D'après les calculs de masse et de centrage effectués au cours de l'enquête, la masse de l'appareil au décollage était d'environ 2260 livres, c'est-à-dire 40 livres de moins que sa masse brute maximale totale, laquelle est de 2300 livres, et le centre de gravité se situait dans la plage normale. Au moment de l'accident, le centre de gravité de l'appareil se situait dans la plage normale.

D'après le manuel d'utilisation du Cessna 172M, le meilleur taux de montée de cet appareil à sa masse brute, lorsqu'il vole à 2000 pieds asl par une température extérieure de 20 °C, est de 535 pieds par minute. Ce manuel mentionne également que, pour obtenir le meilleur angle de montée, l'appareil doit se trouver dans la configuration suivante : volets rentrés, pleins gaz, réchauffage du carburateur coupé et vitesse indiquée de 64 noeuds. Ces valeurs du meilleur taux de montée et du meilleur angle de montée supposent que l'appareil vole les ailes à l'horizontale. Des manoeuvres en vol, comme un virage agressif, entraînent une brusque diminution des performances de montée de l'appareil.

D'après les dossiers, l'aéronef était entretenu conformément aux consignes existantes. Rien dans les livrets techniques d'entretien n'indiquait qu'il restait des anomalies à corriger.

Pendant le dernier segment de la trajectoire de vol, juste avant le virage à 180 degrés, l'aéronef se trouvait face au soleil, alors qu'il volait vers le soleil couchant. Les lieux de l'accident se trouvaient dans une vaste zone ombragée qui était déjà à l'ombre plusieurs heures avant l'accident. Même si les pilotes n'avaient signalé aucun courant descendant ni aucun vent catabatique (mouvement local descendant d'air frais) pendant le vol, le refroidissement de l'air dans les régions ombragées ainsi qu'au-dessus des surfaces recouvertes de neige sont des causes connues de courants descendants en régions montagneuses.

La Pacific Professional Visual Flight Training Ltd. possède des directives verbales destinées à tous les instructeurs enseignant dans les montagnes, et le chef instructeur de vol (CIV) conseille individuellement ces instructeurs. Les directives peuvent varier d'un pilote à l'autre, selon l'évaluation que fait le CIV de l'instructeur. Pour l'entreprise, l'altitude minimale de sécurité en régions montagneuses est d'au moins 1000 pieds au-dessus du fond de la vallée. De plus, cette altitude minimale de sécurité est d'au moins 2000 pieds pendant des vols à basse altitude à l'intérieur de canyons, si des courants descendants sont prévus. De plus, le CIV propose également que les instructeurs ne simulent des approches forcées dans les montagnes que dans des conditions sûres et de manière à perdre 200 à 300 pieds d'altitude avant la fin de l'exercice. L'entreprise estime cette perte d'altitude suffisante pour que l'instructeur évalue la réaction de l'élève-pilote dans une telle situation d'urgence simulée.

L'instructeur en question dans cet accident utilisait des feuilles manuscrites comme aide-mémoire lorsqu'il effectuait des contrôles de vol en montagne, lesquelles feuilles ont été retrouvées à l'intérieur de l'épave du poste de pilotage après l'accident. L'instructeur avait personnellement préparé ces feuilles alors qu'il travaillait pour une autre école de pilotage. Ces feuilles comportaient des notes pertinentes concernant les approches de précaution, les virages à rayon minimal (en zone confinée), les approches forcées, l'augmentation de l'altitude du relief plus rapide que la capacité de l'appareil à monter et, enfin, la perception visuelle dans différentes conditions de luminosité. Sous la rubrique intitulée « Valley Rising Steeper Than A/C Performance » (Augmentation de l'altitude de la vallée trop rapide pour les performances de l'appareil), les notes de l'instructeur comportaient la mise en garde suivante : [Traduction] « à la suite d'une panne moteur, il faut partir en plané vers le fond de la vallée, jusqu'à un endroit où le relief est moins élevé ». Pendant le vol en question dans cet accident, l'instructeur a expliqué et démontré nombre des éléments qui figuraient sur les feuilles de contrôle de vol en montagne, notamment les virages en zone confinée et les approches de précaution, mais il n'a ni expliqué ni démontré comment faire des approches forcées.

La formation qu'avait reçue antérieurement l'élève en matière d'approche forcée lui avait été donnée par d'autres instructeurs de Pacific Professional Visual Flight Training Ltd., et elle avait eu lieu au-dessus d'un relief non montagneux. Pendant cette formation, l'élève avait maintenu l'appareil en descente jusqu'à ce que l'instructeur demande une remise des gaz, ce qui se produisait typiquement lorsque l'appareil atteignait environ 500 pieds agl.

Analyse

La masse et le centrage de l'appareil se trouvaient dans les limites prescrites, et la quantité de carburant à bord était suffisante pour le vol. Aucune anomalie mécanique ayant pu provoquer une perte de puissance moteur ou une perte de maîtrise en vol n'a été signalée ou décelée. Les dommages subis par l'hélice montrent que le moteur fournissait une puissance importante à l'impact. D'après les dommages qu'a subis l'appareil ainsi que la longueur et l'orientation du sillon laissé par les débris, tout indique que le pilote a conservé la maîtrise de l'appareil jusqu'à l'impact; rien n'indique que l'appareil a décroché avant de heurter le sol. L'absence d'incendie après impact est probablement due en partie au fait que la batterie de l'appareil a été projetée hors de ce dernier pendant la séquence de dislocation, ce qui a sans doute empêché qu'une étincelle n'enflamme le carburant.

Pendant la formation sur les approches forcées au-dessus d'un relief non montagneux que lui avait donnée d'autres instructeurs de Pacific Professional Visual Flight Training Ltd., l'élève avait maintenu l'appareil en descente jusqu'à ce que l'instructeur demande une remise des gaz. Comme aucun exposé n'avait été donné quant à la technique à utiliser en cas d'approche forcée pendant le vol en question dans cet accident, l'élève a effectué cette approche forcée de la même façon. En attendant que l'instructeur demande une remise des gaz, l'élève a continué la descente jusqu'à une altitude bien inférieure à l'altitude de remise des gaz de 500 pieds agl utilisée dans le cadre de sa formation antérieure sur les approches forcées. Il a été impossible d'établir l'altitude exacte jusqu'à laquelle l'appareil était descendu avant la remise des gaz. Il se peut qu'il y ait eu détérioration des repères visuels habituellement utilisés pour déterminer l'altitude-sol, parce que les lieux de l'accident étaient ombragés et que, contrairement aux régions environnantes, ils n'étaient pas boisés.

Même si les feuilles de contrôle vol en montagne de l'instructeur indiquaient qu'à la suite d'une panne moteur, il fallait partir en plané vers le fond de la vallée jusqu'à un endroit où le relief est moins élevé, après avoir ramené la manette des gaz pour simuler une panne moteur, l'instructeur n'a pas empêché l'élève de partir en plané vers le haut de la vallée en direction du relief plus élevé.

L'appareil se trouvait dans la configuration lui permettant d'obtenir le meilleur angle de montée à la remise des gaz, et aucun ennui mécanique n'avait été signalé; l'appareil n'a cependant pas été en mesure de monter au-dessus du relief. La masse importante de l'appareil, l'altitude à laquelle il volait et la température extérieure ont eu un effet négatif sur ses performances de montée. Il se peut également que ces dernières se soient détériorées davantage à cause du virage agressif à gauche qui a eu lieu après la prise des commandes par l'instructeur. Il se peut que les courants descendants causés par le refroidissement de l'air dans les régions ombragées ainsi que par la neige recouvrant le sol à haute altitude dans les montagnes, aient eu un effet négatif sur les performances de montée de l'appareil.

L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L'instructeur n'a pas donné à l'élève d'exposé sur les procédures d'approche forcée et l'a laissé poursuivre l'approche forcée jusqu'à une altitude qui ne permettait pas à l'appareil d'éviter le relief ascendant.
  2. L'appareil était presque à sa masse brute maximale, ce qui, combiné aux effets de l'altitude, de la température extérieure et d'une manoeuvre agressive, a contribué à amoindrir ses capacités de monter au-dessus du relief.

Autres faits établis

  1. Il se peut que l'ombre et l'absence de repères visuels, comme des arbres, dans la région où a été effectuée l'approche forcée aient réduit les capacités du pilote à évaluer l'altitude-sol de l'appareil.
  2. Le risque d'un incendie de carburant après l'impact était élevé, mais la projection de la batterie hors de l'appareil a éliminé une source d'inflammation potentielle.

Mesures de sécurité

À la suite de cet accident, Pacific Professional Visual Flight Training Ltd. a apporté les changements suivants :

  1. les aéronefs ne seront plus autorisés à survoler les montagnes le soir,
  2. des limites de survol du relief montagneux ont été établies.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .