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Rapport d'enquête aéronautique A01Q0139

Collision avec le terrain
Hélicoptère Hughes 369D (500D) C-GYTY
Exploité par Helimax Ltd.
Île de Baffin (Nunavut), 69deg;10′ N 074deg;21′ W
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

L'hélicoptère Hughes 369D (500D), immatriculé C-GYTY, portant le numéro de série 270078D, servait au transport de personnel de levé géologique et d'échantillons géologiques. Après avoir pris deux passagers et ramassé des échantillons à une cache, le pilote de l'hélicoptère a effectué une descente indirecte en vue d'atterrir à une autre cache. Pendant l'approche finale, l'hélicoptère a heurté lourdement le sol, a rebondi et a culbuté. Le pilote a été tué sur le coup; les passagers ont survécu à l'impact, mais ont succombé à leurs blessures plus tard. L'hélicoptère a été détruit par le choc et par l'incendie qui s'est déclaré. Au moment de l'accident, le ciel était clair et les vents étaient légers et variables. L'accident est survenu vers 17 heures, heure avancée de l'Est.

Renseignements de base

L'hélicoptère Hughes 369D (500D) sur flotteurs suivait une ligne de cheminement dans le but de récupérer des échantillons géologiques qui avaient été placés à intervalles réguliers le long de cette ligne. Pendant qu'il se dirigeait vers la deuxième cache, le pilote a communiqué par radio avec le personnel qui se trouvait plus loin sur la ligne. On a vu l'hélicoptère survoler l'endroit où était située la deuxième cache puis, à partir d'une hauteur estimée à 200 pieds au-dessus du sol, on l'a vu amorcer un virage serré en descente dans le sens des aiguilles d'une montre pour atterrir près de la cache. L'hélicoptère a fait un virage serré en descente à droite de 270 degrés et il a poursuivi sa descente vers la cache. Le personnel au sol a entendu un bref message radio incompréhensible, sans doute en provenance du pilote. Peu après, on a observé une grande colonne de fumée qui s'élevait du lieu de l'accident.

La région était vallonnée et rocailleuse. L'hélicoptère a heurté le sol en vol avant, avec un taux de descente élevé et dans une assiette de piqué de 25 degrés, en contrebas de la crête d'une colline. À l'impact, le flotteur droit et le tube de patin se sont enfoncés dans le sol, et le flotteur gauche s'est détaché de l'hélicoptère. Le ventre de l'hélicoptère s'est écrasé et le réservoir de carburant souple interne s'est rompu. L'hélicoptère a rebondi, a culbuté et s'est immobilisé le nez orienté en direction opposée au vol, à quelque 60 pieds du point d'impact initial. Une grande quantité de carburant s'est répandue au point d'impact initial et à l'endroit où s'est immobilisé le fuselage; il y avait également de petites flaques de carburant entre les deux points. Un violent incendie alimenté par le carburant a consumé la majeure partie de l'hélicoptère.

On a relevé des marques d'impact faites par le rotor sur le gravier et sur les roches à quelque 10 pieds au delà du point d'impact initial. Les cinq pales du rotor principal ont été trouvées non loin de l'épave. Toutes les pales du rotor principal ont été projetées à une certaine distance du fuselage et se sont rompues en deux ou trois morceaux, ce qui laisse croire que le système rotor était entraîné par le moteur au moment de l'accident. Une bonne partie de la cabine et presque tout le fuselage ont été détruits par le feu. Aucun signe évident d'impact causé par le rotor principal n'a été relevé sur la poutre de queue ou le fuselage. Les dommages relevés sur la poutre de queue et sur les composants du rotor de queue ont été attribués aux forces d'impact. D'autres composants ont été examinés dans la mesure du possible, et on n'a découvert aucun indice permettant de croire à une anomalie mécanique antérieure à l'impact.

On a prélevé plusieurs échantillons de carburant du réservoir d'approvisionnement en carburant de la base d'attache de l'hélicoptère. Le carburant de tous les échantillons était clair et limpide et il ne contenait ni eau ni impuretés. Le moteur (Rolls-Royce Allison 250-C20B) a été examiné au Laboratoire technique du BST et l'examen n'a révélé aucune défaillance mécanique antérieure à l'accident. Un examen a permis d'établir que le moteur produisait de la puissance au moment de l'impact, mais il n'a pas été possible de déterminer la puissance fournie.

L'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'appareil totalisait 7 543 heures de vol et il avait fait l'objet d'une inspection des 300 heures à 7 543 heures. Il ne présentait aucun problème mécanique connu avant le vol. Malgré l'absence de données précises, on a jugé que l'hélicoptère était exploité dans les limites permises pour sa masse et son centrage. Le pilote était en place gauche.

Deux raisons peuvent expliquer le profil de descente et les caractéristiques d'impact de l'hélicoptère dans cet accident : un état de vortex (anneau tourbillonnaire) ou une chute de régime de la turbine de travail (N2). L'état de vortex, qu'on appelle communément « enfoncement avec moteur » est une condition de vol au cours de laquelle l'air qui traverse le rotor principal est recirculé. Dans cette condition de vol, à mesure que l'on augmente la puissance et le pas des pales, le taux de descente augmente également. On s'entend pour dire que trois conditions doivent être réunies pour qu'un état de vortex puisse apparaître : vitesse nulle ou presque nulle, vol propulsé (air induit qui traverse le disque rotor vers le bas avec des réglages de puissance plus élevés et plus critiques), et un taux de descente de 300 à 600 pieds par minute. Dans ces conditions, un hélicoptère peut se mettre à descendre rapidement. Si le pilote augmente le pas collectif pour ralentir la descente, il augmente la déflexion de l'air vers le bas, ce qui intensifie le phénomène de recirculation et augmente le taux de descente. Pour sortir d'un état de vortex, il faut éloigner l'hélicoptère de la colonne d'air perturbé qui est engendrée, soit en passant en autorotation, soit en obtenant de l'air non perturbé en poussant le manche cyclique pour rétablir la vitesse. Lors d'une tentative de rétablissement, l'hélicoptère peut perdre beaucoup d'altitude, et la manoeuvre est souvent impossible si l'altitude disponible est insuffisante.

Une chute de régime de la turbine de travail (N2) survient lorsque la puissance engendrée par le moteur ne peut augmenter en même temps que l'augmentation de pas des pales du rotor. Si l'on fait décélérer l'hélicoptère brusquement ou si au cours d'une décélération normale, l'appareil rencontre un violent courant ascendant, il peut arriver que le régime du rotor principal (NR) dépasse son régime régulé normal. En pareil cas, le régime N2 s'élève momentanément au-dessus du régime N2 régulé normal. L'importance de l'effet varie en fonction de la vitesse de décélération ou de la soudaineté et de l'intensité du courant ascendant. Si les régimes NR et N2 s'élèvent au-dessus des régimes régulés sélectionnés, le régulateur de carburant diminue automatiquement le débit du carburant afin de ramener le régime N2 au régime régulé sélectionné.

Si le pilote tire sur le collectif brusquement dans l'espoir de réduire la vitesse de rotation élevée du rotor ou de mettre un terme à un début d'enfoncement, le régime NR décélère rapidement et le régime N2 chute également, parce que le régulateur de carburant fonctionne encore en mode de réduction de débit. Une fois revenu sous le régime N2 normal, le régulateur commande à nouveau une augmentation du débit carburant; toutefois, il y aura un délai avant que l'augmentation de débit carburant n'entraîne une augmentation des régimes N2 et NR. Au cours de cette période, les régimes NR et N2 peuvent demeurer bas. Si l'appareil se trouve près du sol, il est possible que le régime NR ne se rétablisse pas suffisamment tôt pour interrompre l'enfoncement. Dans les cas les plus extrêmes, la chute de régime peut être suffisamment importante pour entraîner le décrochage des pales du rotor principal.

Le pilote totalisait quelque 7 000 heures de vol sur plusieurs types d'hélicoptère. L'autopsie qui a été pratiquée sur le corps du pilote n'a révélé aucune condition physiologique qui aurait pu perturber ses capacités. Les résultats des analyses toxicologiques visant à déceler la présence d'alcool, de médicaments ou de drogues illicites chez le pilote ont été négatifs.

Analyse

La brève transmission radio pendant la séquence de l'accident laisse croire que le pilote n'a pas été victime d'une incapacité avant l'impact. Le virage serré en descente à droite pendant l'approche donne à penser qu'il n'avait pas établi le contact visuel avec la cache et qu'il effectuait la manoeuvre en fonction de repères visuels fournis par les passagers. Si le pilote avait établi le contact visuel avec la cache, il aurait probablement exécuté un virage à gauche pour garder la cache en vue le plus longtemps possible pendant la manoeuvre et l'approche en vue de l'atterrissage. En exécutant un virage à droite, le pilote doit avoir perdu le contact visuel avec le sol qui approchait, et la cache ne devait pas être visible à cause des passagers à sa droite et du côté droit de l'hélicoptère. En exécutant cette manoeuvre, la vitesse et les réglages de puissance nécessaires doivent avoir été difficiles à estimer.

Le moteur de l'hélicoptère produisait une puissance considérable au moment de l'impact et les dommages relevés sur le rotor principal indiquent que le système rotor était entraîné par le moteur. Comme l'hélicoptère a heurté le sol sans aucun mouvement de lacet apparent, il est probable que les composants du rotor de queue fonctionnaient normalement et que le pilote a conservé la maîtrise en direction. Les marques faites par les tubes de patin au point d'impact initial, la rupture immédiate du réservoir de carburant ventral et l'important déversement de carburant sont tous des signes que le taux de descente était élevé au moment de l'impact. Les autres déversements de carburant sur le sol laissent également croire que l'hélicoptère s'est écrasé avec une faible vitesse avant.

Le faible vent local, le profil de vol lent et le taux de descente de l'hélicoptère décrits dans ce rapport favorisaient tous l'apparition d'un état de vortex. Pendant sa descente finale, l'hélicoptère peut avoir rencontré un léger vent arrière au moment où il volait parallèlement à une ligne de crête à l'ouest de la zone d'atterrissage. Un léger vent arrière aurait été difficilement perceptible par le pilote, mais il aurait pu causer une perte de vitesse en approche finale. Cette perte de vitesse aurait à son tour augmenté les risques d'apparition d'un état de vortex pendant la descente finale. Si un anneau tourbillonnaire s'est formé au cours des dernières étapes de l'approche, les chances de redressement doivent avoir été très minces, et le pilote peut ne pas avoir été en mesure de ralentir le taux de descente de l'hélicoptère.

Le profil de vol de l'appareil immédiatement avant l'accident a été décrit comme un virage serré en descente avec décélération jusqu'à l'atterrissage. Pour effectuer ces manoeuvres, le pilote a sans doute commandé d'importantes et rapides variations de puissance, et une chute de régime en courte finale pourrait avoir empêché le pilote de ralentir le taux de descente.

L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le taux de descente de l'hélicoptère a fortement augmenté en courte finale, et le pilote n'a pas réussi à ralentir le taux de descente avant l'impact.

Faits établis quant aux risques

  1. Du fait que le pilote a exécuté l'approche à droite, la vitesse et les réglages de puissance nécessaires doivent avoir été difficiles à estimer.
  2. L'approche s'est déroulée dans des conditions favorisant l'apparition d'un état de vortex ou d'une chute de régime de la turbine de travail (N2).

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée par le Bureau le .