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Rapport d'enquête aéronautique A00A0076

Collision avec un plan d'eau
Services des aéronefs du
Ministère des Transports
(Garde côtière canadienne)
Bell 212 C-GCHG
Île Cabot (Terre-Neuve)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

L'hélicoptère Bell 212 de la Garde côtière canadienne, portant le numéro de série 30625, a quitté Newtown (Terre-Neuve) pour un vol à vue à destination de l'île Cabot, une petite île située à 6 milles au large des côtes. L'appareil effectuait la livraison d'eau douce à la résidence du gardien de phare à raison de quatre fûts en plastique de 40 gallons à chaque livraison. Les fûts étaient transportés à l'élingue dans un filet qui se trouvait à 120 pieds sous l'hélicoptère. L'appareil s'est rendu à l'île Cabot où le personnel au sol a décroché le chargement de fûts pleins de l'élingue et y a rattaché un chargement semblable de fûts presque vides pour le voyage de retour. Peu après le départ de l'hélicoptère pour le voyage de retour, un travailleur qui se trouvait sur l'île a remarqué un éclaboussement. On a pu observer de petites pièces provenant de l'épave ainsi que le chargement de fûts qui flottaient non loin de la côte. Le pilote, qui était seul à bord, a subi des blessures mortelles dans l'accident.

Figure 1. C-GCHG effectuant de l'élingage à l'île Cabot
C-GCHG effectuant de l'élingage à l'île Cabot

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

L'hélicoptère Bell 212 (CTG 305) de la Garde côtière canadienne (GCC) effectuait le ravitaillement en eau douce de la résidence du gardien du phare de l'île Cabot à raison de trois chargements de quatre fûts de 40 gallons transportés à l'élingue dans un filet qui se trouvait à 120 pieds sous l'hélicoptère. Au cours de chaque mission, quatre fûts pleins étaient transportés de l'aire de transit, située à Newtown, sur une distance de 6 milles marins (NM) vers l'est jusqu'à l'île Cabot, où le chargement était détaché du bout de l'élingue par le personnel au sol. Un chargement similaire de fûts vides était ensuite raccroché à l'élingue pour être transporté à Newtown où les fûts vides étaient échangés contre quatre fûts pleins pour ensuite être remplis. Un cycle complet s'effectuait en une quinzaine de minutes.

Figure 2. Mission de ravitaillement
Mission de ravitaillement

Le jour de l'accident, le pilote avait commencé les opérations d'élingage à 10 h, heure avancée de Terre-Neuve (HAT)Note de bas de page 1. Il avait effectué 21 livraisons et s'était arrêté à une installation locale de ravitaillement en carburant pour faire le plein à 11 h 40, 14 h 20 et 16 h 35. Au cours de son dernier arrêt, le pilote a pris un léger repas avant de poursuivre les opérations vers 16 h 50. Vers 17 h, le CTG 305 a quitté l'aire de transit avec une charge à l'élingue constituée de quatre fûts remplis d'eau. Au cours du vol vers l'île Cabot, le pilote est entré en contact radio avec le personnel au sol pour lui demander de préparer les articles pour le dernier vol de la journée. À 17 h 02, le pilote a contacté la Garde côtière de St. John's par radio pour leur préciser que les opérations se déroulaient normalement. Il s'est agi de la dernière transmission radio provenant du CTG 305. L'hélicoptère s'est mis en vol stationnaire au-dessus de l'île Cabot vers 17 h 05. Le personnel au sol a remplacé le chargement de fûts pleins par un chargement semblable constitué de fûts presque vides pour le voyage de retour. L'appareil a ensuite quitté l'île avec un vent de face et a fait route vers le nord. Peu après le départ de l'hélicoptère pour le voyage de retour, un travailleur se trouvant sur l'île a remarqué un éclaboussement. On a pu observer de petites pièces provenant de l'épave ainsi que le chargement de fûts qui flottaient non loin de la côte. On a ensuite amorcé une opération de sauvetage. Le pilote, qui était le seul occupant, a subi des blessures mortelles dans l'accident. L'hélicoptère a été détruit, et environ 200 litres de carburant et d'huile provenant de l'appareil se sont déversés dans la baie de Bonavista.

1.2 Renseignements sur le personnel

Le pilote était âgé de 39 ans et il était titulaire d'une licence de pilote d'hélicoptère professionnel valide. La date d'expiration de son certificat de validité était fixée au 1er mai 2001. Le pilote cumulait 5 012 heures de vol, dont 236 sur type. Dans les 90 derniers jours, il avait volé 82 heures, dont 31 sur type. Il était en service depuis 9 heures lorsque l'accident s'est produit.

1.3 Renseignements sur l'aéronef

Constructeur Bell Helicopter Textron
Type et modèle Bell 212
Année de construction 1974
Numéro de série 30625
Certificat de navigabilité Délivré le 7 avril 1988 - modifié
Nombre total d'heures de vol cellule 12 001 heures
Type de moteur (nombre) Pratt & Whitney PT6T-3 (2)
Masse maximale autorisée au décollage 11 200 livres

L'hélicoptère de la GCC était basé à St. John's et était entretenu et exploité par le personnel de Transports Canada.

Un examen des documents de l'appareil montre que celui-ci était entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Toutes les modifications, les consignes de navigabilité obligatoires ainsi que la maintenance nécessaire avaient été effectuées. L'hélicoptère cumulait 57,6 heures de vol depuis la dernière grande révision périodique, laquelle avait été effectuée le 15 avril 2000. Les dossiers de l'appareil après la révision n'indiquaient aucune activité de maintenance en suspens ni aucun travail récurrent. La masse et le centrage de l'appareil se trouvaient à l'intérieur des limites permises.

L'hélicoptère n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol ni d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage, et la réglementation en vigueur ne l'exigeait pas. L'appareil n'était pas équipé d'une radiobalise sous-marine de repérage d'urgence, et la réglementation en vigueur ne l'exigeait pas. L'hélicoptère était équipé de dispositifs de flottaison d'urgence, communément appelés « flotteurs à gonflage automatique ». Les flotteurs à gonflage automatique peuvent être gonflés avant l'amerrissage, et ils sont conçus dans le but d'augmenter les chances de survie à un amerrissage forcé en retardant le moment où l'appareil commencera à couler.

1.4 Renseignements météorologiques

Il n'y a pas de système d'observation météorologique officiel à l'île Cabot. Cependant, le ciel était dégagé, le vent soufflait vers le nord à environ 30 noeuds et la température extérieure était d'environ deux degrés Celsius. L'Institut océanographique de Bedford a examiné les registres de température de l'eau : la température à la surface de l'eau se situait entre un demi et un degré Celsius.

1.5 Communications

Le pilote était en contact radio direct avec le personnel au sol sur l'aire de transit et à l'île Cabot. Le pilote était aussi en contact radio avec la Garde côtière de St. John's. Il n'y a eu aucune communication de la part du pilote après son départ de l'île lors du dernier voyage.

1.6 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

1.6.1 Position de l'épave

Les débris qui flottaient ont été immédiatement repérés et récupérés par une embarcation de surface locale. On a commencé les recherches sous l'eau le 11 mai à 23 h à l'aide d'un engin sous-marin télécommandé. Les recherches sous l'eau, qui ont été ralenties par les conditions météorologiques défavorables, le fond marin accidenté et les forts courants sous-marins, se sont poursuivies jusqu'à la découverte de débris de l'appareil tard le soir du 20 mai. Le gros de l'épave et le pilote ont été retrouvés le lendemain à 0,3 NM à l'ouest-nord-ouest de l'île Cabot et à 110 pieds de profondeur. La zone des débris mesurait environ 250 pieds de longueur, et la zone principale des débris, où se trouvait la partie principale de la cabine, se situait au nord-est. La répartition des débris correspondait au courant des marées. Les composants moins denses comme le rotor principal, les panneaux et la poutre de queue, s'étaient déposés au sud-ouest (voir l'annexe A). L'épave se trouvait environ 600 pieds plus loin, et elle était alignée avec l'endroit approximatif où les fûts avaient été observés immédiatement après l'accident.

Figure 3. Emplacement de l'épave
Emplacement de l'épave

1.6.2 Examen de l'épave

Parmi les composants principaux récupérés du fond de l'océan se trouvaient la cabine de l'appareil, les deux moteurs, le rotor principal qui s'était détaché, la transmission principale et la structure environnante, la poutre de queue, le rotor de queue qui s'était détaché et les boîtes d'engrenages 42 et 90 degrés de la transmission du rotor de queue.

La structure de l'hélicoptère a subi de grandes déformations en raison de l'impact avec le plan d'eau. De plus, on a constaté des dommages causés par des impacts de rotor en vol et par de la corrosion sous l'effet de l'eau salée. Les marques de contact du rotor indiquent que le rotor principal s'est détaché de l'hélicoptère avant l'impact avec le plan d'eau. Les impacts du rotor principal étaient évidents du côté droit de la partie principale du fuselage et de la poutre de queue. Cette dernière a été percutée à deux reprises par le rotor principal, soit près de l'avant au niveau du compartiment à bagages et à l'arrière de la boîte d'engrenages 42 degrés du rotor de queue. Le côté gauche de la partie principale du fuselage et le haut de la poutre de queue étaient écrasés en raison de l'impact avec le plan d'eau, ce qui indique que la poutre de queue s'est séparée du fuselage avant l'impact. Les divers composants de l'appareil ont été examinés dans la mesure du possible; rien n'indique la présence de défaillances mécaniques avant l'impact. Les dommages subis par l'hélicoptère indiquent que toutes les portes de la cabine et du poste de pilotage étaient fermées au moment de l'impact. Le contact d'armement de largage du chargement a été retrouvé en position « armed ». Il est probable que le contact était armé en permanence pendant la mission pour permettre au pilote de larguer immédiatement la charge.

Le rotor principal a été retrouvé dans la partie sud-ouest de la zone des débris, tandis que le rotor de queue ainsi que d'autres composants de la boîte de transmission du rotor de queue ont été retrouvés dans la partie du centre, juste au sud de la cabine. Un examen du rotor de queue a révélé que la transmission du rotor de queue s'est séparée en vol en raison des forces en surcharge générées au cours de la séquence de désintégration. La séquence de la défaillance des composants du rotor de queue n'a pas pu être déterminée.

Les dommages indiquent que la partie inférieure du crochet de l'élingue et la bague de retenue du crochet ont été arrachées de l'appareil dans un mouvement vers l'arrière. Ces composants n'ont pas été retrouvés. L'absence de traces d'écrasement sur les composants adjacents à la partie inférieure du crochet indique que cette partie du crochet ne se trouvait pas sur l'appareil au moment de l'impact avec le plan d'eau. Les marques d'impact indiquent que la partie supérieure du crochet s'est déplacée de 30 degrés vers l'arrière au moment de l'impact avec le plan d'eau. La charge sous élingue et l'équipement de transport ont été retrouvés en bon état et rien n'indique que l'équipement était entré en contact avec l'hélicoptère. Les fûts de plastique se trouvaient à l'intérieur du filet de transport. Trois des fûts ne présentaient aucun dommage, tandis que la partie supérieure du quatrième fût s'était détachée du reste du fût.

On a remarqué une décoloration à l'intérieur d'une portion craquelée du pare-brise fracassé. Des témoins avaient signalé de l'activité aviaire dans la région, et on a étudié la possibilité que la décoloration ait été causée par un impact d'oiseau. Cette partie du pare-brise a été analysée dans le but de déterminer si un oiseau avait heurté le pare-brise; cependant, l'analyse en laboratoire n'a pas permis de déterminer la source de la décoloration.

1.7 Questions relatives à la survie de l'occupant

Le pilote a été retrouvé à l'intérieur de l'appareil. En raison de la violence de l'impact, il n'était pas possible de survivre à l'accident. La sangle sous-abdominale du pilote était bouclée sans être serrée, et le baudrier de la ceinture du pilote n'était pas attaché à la sangle sous-abdominale. Le pilote ne portait pas de gilet de sauvetage ni de combinaison (d'immersion) pour passagers d'hélicoptère. Un radeau de sauvetage était rangé dans la cabine; cependant, celui-ci n'était pas à la portée immédiate du pilote parce qu'un filet d'arrimage de fret allant du plancher au plafond était installé en travers de la cabine, séparant cette dernière du poste de pilotage. Les .flotteurs à gonflage automatique ne se sont pas gonflés, que se soit avant ou après l'accident, et ils ont été retrouvés dans leur enveloppe protectrice, qui avait été partiellement ouverte par les forces générées à l'impact.

1.7.1 Utilisation des bretelles de sécurité

Le pilote avait l'habitude de porter les bretelles de sécurité disponibles; cependant, c'est sans doute à cause de l'amplitude des mouvements du corps qu'il est nécessaire de faire durant les opérations à référence verticale que les bretelles de sécurité n'ont pas été utilisées. Le pilote occupe habituellement le siège droit; toutefois, afin de voir clairement la longue élingue et le chargement, le pilote occupe le siège gauche pendant les opérations à référence verticale en plus de se pencher de façon très prononcée vers la gauche. Les bretelles de sécurité approuvées ne permettent pas au pilote d'adopter une telle position. Le fait de ne pas utiliser les bretelles et de boucler la ceinture de sécurité sans la serrer afin de permettre une plus grande mobilité durant les vols à référence verticale est une pratique répandue chez les pilotes. L'hélicoptère en question avait été configuré et approuvé pour des opérations à référence verticale à partir du siège gauche.

Au cours d'un vol stationnaire à haute altitude, l'hélicoptère se situe à l'intérieur de la zone « à éviter » de la courbe de la hauteur en fonction de la vitesse. Les opérations dans la zone à éviter comportent des risques, une autorotation ayant peu de chance de réussir dans une telle situation. L'alinéa 605.24(5)b) et le paragraphe 605.27(3) du Règlement de l'aviation canadien (RAC) exigent qu'un hélicoptère qui est utilisé pour le transport d'une charge externe soit muni, pour chaque personne à bord, d'un siège et d'une ceinture de sécurité comprenant des bretelles de sécurité. Au moins un pilote doit être assis aux commandes de vol et doit avoir sa ceinture de sécurité bouclée durant le temps de vol.

Le BST est au courant de sept autres accidents d'hélicoptère depuis 1985Note de bas de page 2 pendant lesquels bretelles de sécurité pourtant disponibles n'ont pas été portées durant le travail avec une longue élingue. Bien qu'on ignore si la gravité des blessures aurait été moindre avec le port des bretelles de sécurité, des études ont démontré que lors d'un accident d'hélicoptère, environ 70 % des blessures graves et mortelles se produisent au niveau de la tête, de la colonne vertébrale, du torse et du cou. Une analyse de la dynamique des accidents d'hélicoptère effectuée par ColtmanNote de bas de page 3 a démontré que seulement 9 % des personnes impliquées dans les accidents et qui portaient des bretelles de sécurité au moment de l'accident ont subi des blessures graves, contre 34,3 % pour les personnes qui ne portaient qu'une ceinture de sécurité.

1.7.2 Survie en eau froide

Une personne qui est soudainement immergée dans de l'eau froide (moins de 15 degrés Celsius) doit surmonter les quatre obstacles suivants : choc hypothermique, incapacité de nager, hypothermie et collapsus post-sauvetage. Les trois premiers obstacles constituent des dangers immédiats : un choc hypothermique peut tuer une personne non protégée en 5 minutes, une incapacité de nager peut être fatale après 15 minutes et la mort causée par l'hypothermie peut survenir en 30 minutes. Une combinaison d'immersion et un gilet de sauvetage fournissent une protection immédiate contre ces dangers, et un radeau de sauvetage offre une protection à plus long terme en permettant aux survivants de se sortir de l'eau. Ni le pilote ni les autres personnes transportées au-dessus du plan d'eau au cours de la journée ne portaient de combinaison d'immersion ni n'étaient équipés de manière à survivre à un amerrissage forcé en eau glacée. La réglementation n'exigeait pas le port d'une combinaison d'immersion. Puisque le pilote a subi des blessures mortelles, son degré de protection face à la survie en cas d'immersion n'a pas été un facteur.

1.7.3 Équipement de survie - Vols au-dessus d'un plan d'eau

Les paragraphes (4) et (5) de l'article 602.63 du RAC énoncent les exigences réglementaires concernant le transport d'un radeau de sauvetage à bord d'un hélicoptère :

(4) Il est interdit d'utiliser, au-dessus d'un plan d'eau, un hélicoptère monomoteur ou un hélicoptère multimoteur ne pouvant se maintenir en vol en cas de panne d'un moteur au-delà de 25 milles marins ou d'une distance qui peut être parcourue en 15 minutes de vol, à la vitesse de croisière précisée dans le plan de vol ou l'itinéraire de vol, d'un site convenable pour un atterrissage d'urgence, selon la distance la plus courte, à moins que ne soient transportés à bord des radeaux de sauvetage d'une capacité nominale totale permettant de recevoir toutes les personnes à bord.

(5) Il est interdit d'utiliser, au-dessus d'un plan d'eau, un hélicoptère multimoteur pouvant se maintenir en vol en cas de panne d'un moteur au-delà de 50 milles marins ou d'une distance qui peut être parcourue en 30 minutes de vol, à la vitesse de croisière précisée dans le plan de vol ou l'itinéraire de vol, d'un site convenable pour un atterrissage d'urgence, selon la distance la plus courte, à moins que ne soient transportés à bord des radeaux de sauvetage d'une capacité nominale totale permettant de recevoir toutes les personnes à bord.

Le Manuel d'exploitation des hélicoptères de la GCC de Transports Canada applique les exigences les plus rigoureuses à tous ses hélicoptères. Cependant, en pratique, le radeau de sauvetage est considéré comme un équipement standard pour tous les vols. Le manuel d'exploitation exige aussi qu'un gilet de sauvetage se trouve à bord pour chacun des occupants et que ces derniers portent les gilets lorsque l'hélicoptère est exploité au-dessus d'un plan d'eau. Dans le cas présent, il y avait un gilet de sauvetage à bord, mais le pilote ne le portait pas, et ce, probablement parce que le fait de le porter aurait nui à sa capacité de se positionner dans le poste de pilotage durant les opérations à référence verticale.

L'article 602.63 du RAC établit aussi les exigences relatives aux combinaisons d'immersion :

Il est interdit d'utiliser un hélicoptère au-dessus d'un plan d'eau dont la température est inférieure à 10 °C lorsque des radeaux de sauvetage doivent être transportés à bord en application des paragraphes (4) ou (5), à moins que les conditions suivantes ne soient réunies :

  1. la combinaison pour passagers d'hélicoptère est mise à la disposition de chaque personne à bord;
  2. le commandant de bord de l'hélicoptère donne l'ordre aux personnes à bord de porter la combinaison pour passagers d'hélicoptère mise à leur disposition.

Le manuel d'exploitation stipule que, pour les hélicoptères multimoteurs, le port d'une combinaison d'immersion est obligatoire lorsque l'hélicoptère survole un plan d'eau à plus de 15 milles marins d'un navire, de la côte ou d'une surface glacée continue capable de supporter l'appareil.

1.8 Essais et recherches

Un vol représentatif a été effectué à bord d'un autre Bell 212 dans des conditions de vents et de masse similaires. Le vol a permis de confirmer que la charge de travail du pilote durant le vol stationnaire à l'aire d'élinguage a dû être assez élevée. Le vol a aussi permis de démontrer que le pilote a peut-être effectué, entre l'île et le lieu de l'accident, un virage en montée vers une altitude estimée à 500 pieds.

1.9 Renseignements supplémentaires

1.9.1 Accidents liés à la résistance du chargement

On a passé en revue seize accidents d'élingage impliquant des hélicoptères canadiens au cours desquels le chargement a offert de la résistance ou l'équipement de transport est resté accroché. On a noté que dans tous les cas, une des conséquences importantes se traduisait par un changement soudain et extrême de l'assiette de l'appareil. Si la résistance provient directement de l'arrière, il y aura brusque mise en piqué. La proximité de l'appareil avec le sol laisse peu de temps au pilote pour réagir. Si la résistance est suffisante, les composants internes du crochet peuvent se déplacer au-delà de leur débattement habituel et causer des dommages à d'autres composants.

1.9.2 Cognement du mât

Le Bell 212 possède un rotor principal semi-articulé et basculant. Les pales sont libres de battre verticalement de façon à compenser les diverses forces aérodynamiques qui s'exercent sur l'hélicoptère lorsqu'il est en vol. L'angle de battement des rotors semi-articulés et basculants est restreint par des limites spécifiques : sur le Bell 212, une butée statique montée sur la chape des pales limite le battement par contact avec la surface du mât rotor. Un battement excessif des pales en vol fait en sorte que la chape entre en contact avec le mât, situation connue sous le nom de « cognement du mât ». Un cognement maximal du mât est habituellement catastrophique parce le mât se détache aux points d'écrasement, situation qui se produit lorsque les butées statiques des chapes frappent violemment le mât. En vol vers l'avant, le battement excessif peut se produire en réponse à une mauvaise réaction du pilote alors qu'il effectue une manoeuvre à faible G, à une défaillance ou à une perte des commandes de vol ou des composants du rotor ou à des forces extérieures agissant sur l'appareil.

2.0 Analyse

2.1 Généralités

Le pilote possédait la formation pour effectuer des opérations d'élingage et des vol à référence verticale et il avait l'expérience de ce genre de manoeuvre. De plus, il s'était bien acquitté de sa mission tout au long de la journée. La mission s'était déroulée sans problème jusqu'à ce que l'appareil quitte l'aire de transit pour le dernier voyage. Les conditions météorologiques convenaient à la mission. L'enquête n'a révélé aucun signe de défaillance mécanique antérieur à l'impact qui aurait pu contribuer à l'accident.

Un appel radio effectué quelques minutes avant l'accident indique que le pilote n'avait rien remarqué d'anormal dans le fonctionnement de son appareil. L'absence d'appel de détresse de la part du pilote donne à penser que les premiers signes qu'un accident se produisait ont été soudains et violents et que l'occasion de faire un appel de détresse ne s'est pas présentée. Une des premières choses à envisager au cours d'une situation d'urgence qui survient pendant une opération d'élingage, c'est de larguer le chargement. Ce dernier n'a pas été largué avant que l'appareil n'entre en contact avec la surface de l'eau, ce qui laisse croire que le pilote n'était au courant d'aucune situation d'urgence et que l'accident a été provoqué par un événement soudain et violent.

2.2 Contact du chargement avec la surface de l'eau

La perte du crochet vers l'arrière de l'appareil, la rupture des commandes de vol près du crochet, le cognement du mât et la soudaineté de l'accident sont caractéristiques d'un chargement qui entre en contact avec la surface de l'eau. Pour que le chargement entre en contact avec la surface de l'eau, il aurait fallu que l'hélicoptère effectue une descente après avoir quitté l'île. L'enquête n'a toutefois pas permis de déterminer le profil de vol de l'appareil pour cette portion du vol et il n'a pas été possible de justifier une telle descente.

2.3 Cognement du mât

Une caractéristique des accidents inhérents à une séparation en vol du mât rotor tient au fait que le rotor et la cellule ne tombent pas au même endroit. Après la séparation, la cellule descend de façon balistique selon sa dernière trajectoire. Le rotor peut cependant continuer à voler sur une distance considérable avant l'impact. Dans l'accident en question, l'endroit où se trouvait le rotor principal dans la zone des débris laisse croire que la séparation du mât rotor s'est produite à basse altitude. Le profil de vol n'exigeait pas l'exécution de manoeuvre à faible G, et il est peu probable qu'un pilote d'expérience ait sollicité par mégarde un bas régime rotor au cours d'une mission de routine au-dessus d'une surface plane. La résistance provoquée par le contact du chargement avec la surface de l'eau a probablement causé un brusque mouvement de tangage, le cognement du mât et la séparation du rotor principal. Les dommages subis en vol par les commandes de vol après que le crochet s'est arraché ont pu contribuer aux angles excessifs de battement et ont pu aussi empêcher le pilote de redresser l'appareil après le brusque mouvement de tangage.

2.4 Utilisation de la ceinture-baudrier

En raison de la gravité des forces d'impact, une ceinture-baudrier n'aurait pas pu sauver la vie du pilote, même si ce dernier l'avait portée. Néanmoins, les opérations de transport de charges externes comportent des risques accrus et l'utilisation de l'équipement de sécurité disponible semble être de mise. L'accident en question et d'autres accidents relatifs à des opérations à référence verticale ont montré que la sangle sous-abdominale et le baudrier disponibles nuisent au pilotage à référence verticale au cours des opérations de transport de charges externes. Les pilotes effectuant ce genre de vol ne devraient pas avoir à mettre de côté les équipements de protection disponibles et requis dans le but d'accomplir une tâche comportant des risques accrus.

2.5 Équipement de survie - Vols au-dessus d'un plan d'eau

La réglementation concernant les équipements de survie est basée sur le temps et la distance qui séparent l'appareil d'une aire d'atterrissage d'urgence. Cependant, pour une personne immergée en eau glacée, le temps de vol et la distance n'ont aucune importance. Le facteur principal est d'être capable de survivre dans l'eau jusqu'à ce que le radeau soit gonflé ou jusqu'à ce que les secours arrivent. Puisque les exigences relatives à l'équipement de survie sont basées sur des critères de temps et de distance, le transport de l'équipement de survie adéquat à bord d'un hélicoptère n'est pas toujours assuré même si les dangers d'immersion soudaine en eau froide sont graves et immédiats. Les exigences relatives à l'utilisation des combinaisons d'immersion devraient être indépendantes de l'exigence de transporter un radeau de sauvetage et devraient se baser sur des facteurs comme le type d'appareil, le type d'opération, la température de l'eau, la température de l'air, le temps de vol jusqu'à la côte et le temps de sauvetage estimé. Les critères devraient aussi reconnaître les effets potentiels du stress dû à la chaleur en cas de port d'une combinaison d'immersion en vol et devraient fournir des directives à ce sujet.

2.6 Radiobalise sous-marine de détresse

Il est important de retrouver rapidement une épave lorsqu'elle est sous l'eau, non seulement pour des raisons humanitaires, mais aussi pour fins d'enquête. L'examen de l'épave est une étape fondamentale de l'enquête suivant un accident aéronautique, surtout lorsque l'appareil impliqué dans l'accident n'est pas équipé d'un enregistreur de données de vol ou lorsque l'équipage n'a pas survécu. Si l'hélicoptère en question avait été équipé d'une radiobalise sous-marine de détresse, les recherches auraient sans doute donné des résultats beaucoup plus rapidement.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Au moment de quitter l'île, l'hélicoptère a amorcé une descente, pour des raisons qu'on ignore, jusqu'à une altitude qui a permis le contact du chargement avec la surface de l'eau.
  2. La résistance du crochet pendant le contact du chargement avec la surface de l'eau a provoqué la perte du crochet, endommagé les commandes de vol, entraîné une perte de maîtrise de l'appareil et une séparation du mât rotor.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Le pilote ne portait pas la ceinture-baudrier ni de gilet de sauvetage requis parce que ces articles nuisaient à sa capacité d'effectuer l'opération à référence verticale. Il s'agit d'une pratique répandue chez les pilotes qui doivent effectuer ce genre d'opération.
  2. La réglementation n'exigeait pas le port d'une combinaison d'immersion, et le pilote n'en portait pas. De plus, le pilote n'avait pas à sa portée le radeau de sauvetage qui se trouvait à bord de l'appareil. Au cours d'un accident d'une gravité moindre, un tel équipement peut augmenter les chances de survie.
  3. La récupération de l'appareil a été retardée parce que celui-ci n'était pas équipé d'une radiobalise sous-marine de détresse. La réglementation n'exigeait pas que l'appareil soit équipé d'un tel dispositif.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures prises

4.1.1 Installation de radiobalises sous-marines de détresse

Le 6 novembre 2000, le BST a envoyé une lettre d'information sur la sécurité aérienne à Transports Canada (TC) pour suggérer à l'organisme que les exploitants qui effectuent un grand nombre d'opérations au-dessus de l'eau étudient la possibilité d'installer une radiobalise sous-marine de détresse dans les appareils qui ne sont pas équipés d'enregistreur de données de vol. TC a répondu le 12 décembre 2000 en indiquant qu'un article paraîtrait dans la publication Sécurité aérienne - Nouvelles dans le but de faire connaître cette suggestion à l'industrie. Un article sur l'installation de radiobalises sous-marines de détresse a été effectivement publié dans le numéro 4/2001 de la publication Sécurité aérienne - Nouvelles.

TC a entrepris l'installation de radiobalises sous-marines de détresse dans tous les hélicoptères exploités par la Garde côtière canadienne, sans égard au nombre de sièges destinés aux passagers.

4.1.2 Utilisation du harnais de sécurité

Le 20 février 2000, le BST a envoyé un avis de sécurité aérienne à TC pour lui demander d'étudier la possibilité d'effectuer une enquête et d'exiger l'utilisation d'autres dispositifs de retenue du personnel durant les opérations à référence verticale. TC a répondu à cet avis le 2 mai 2001, en indiquant, en partie, que :

. . . Les exigences de certification des dispositifs de retenue des pilotes sont décrites aux chapitres 527 et 529 du Manuel de navigabilité (MN). Depuis le 1er juillet 1986 (première édition du MN), l'article 785 stipulait l'exigence suivante : « Chaque siège de pilote doit avoir un dispositif de retenue consistant en un ensemble ceinture et bretelles à point de débouclage unique qui permette au pilote d'accomplir tous les gestes inhérents à sa fonction quand il est assis et retenu par le dispositif ». Cette exigence a été appliquée rétroactivement à tous les giravions fabriqués après le 16 septembre 1992, peu importe leur base de certification (articles 527.2 et 529.2 du MN). De plus, l'article 702.44 du RAC stipule que le siège pilote et tout siège situé à côté du siège pilote de tout appareil effectuant un travail aérien doivent être munis de bretelles de sécurité et le paragraphe 605.27 (3) du RAC exige qu'au moins un des pilotes ait sa ceinture bouclée en tout temps.

Transports Canada a pour mandat de réglementer la sécurité des opérations aériennes. Transports Canada a approuvé les dispositifs de retenue des pilotes et a promulgué les règlements relatifs à leur installation et à leur utilisation. L'industrie a la responsabilité de se conformer à la réglementation et, s'il y a lieu, de faire certifier la configuration qui respecte ses besoins opérationnels.

Le Bureau reconnaît que l'industrie a la responsabilité de se conformer à la réglementation. Cependant, les bretelles de sécurité approuvées ne « permettent pas au pilote d'accomplir tous les gestes inhérents à sa fonction » comme le stipule le paragraphe ci-dessus. Le Bureau croit qu'il est nécessaire que TC étudie plus à fond la question.

4.1.3 Équipement de survie - Vols au-dessus d'un plan d'eau

Le 26 février 2001, le BST a envoyé un Avis de sécurité aérienne à TC pour lui demander d'étudier la possibilité de passer en revue les critères relatifs au transport et à l'utilisation de l'équipement de survie pendant les vols au-dessus d'un plan d'eau. TC a répondu le 2 avril 2001 en précisant qu'un groupe de travail avait été réuni afin d'examiner la question des opérations aériennes au large des côtes et de formuler des recommandations. Le groupe de travail prendra en considération, entre autres choses, les exigences relatives au transport et à l'utilisation de l'équipement de survie ainsi que l'accessibilité d'un tel équipement.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisé par le Bureau le .

Annexes

Annexe A - Schéma de la répartition de l'épave

Schéma de la répartition de l'épave