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Améliorer la sécurité

Kathy Fox

Bureau de la sécurité des transports du Canada

Cet article a été publié initialement dans l’édition de janvier/février 2020 du magazine Wings.

Un secteur particulier aux défis spéciaux

L’industrie canadienne de l’aviation est aussi variée que le paysage canadien, et le secteur du taxi aérien en est le parfait exemple. Ces avions plus petits fournissent aux Canadiens un large éventail de services. Pensons aux hélicoptères qui mènent des patients à l’hôpital; aux hydravions qui font la navette entre les villes côtières ou desservent des camps de chasse ou de pêche; et aux autres appareils qui conduisent quotidiennement des travailleurs vers les régions éloignées et transportent des passagers, des denrées et de l’équipement vers les communautés isolées.

Toutefois, il y a davantage d’accidents causant plus de pertes de vie dans le secteur du taxi aérien que dans les autres secteurs de l’aviation commerciale au Canada pris ensemble (voir la figure 1).

Figure 1. Nombre total d’accidents et de morts mettant en cause des aéronefs immatriculés au Canada, par type d’exploitant, de 2000 à 2017.
Nombre total d’accidents et de morts mettant en cause des aéronefs immatriculés au Canada, par type d’exploitant, de 2000 à 2017.

Un problème insidieux

Pour en déterminer la cause, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a mené une étude exhaustive sur le taxi aérien au Canada qui a duré quatre ans. Nous avons étudié plus de 716 événements, rencontré 125 personnes et analysé quelque 300 heures d’enregistrements pour finalement déterminer que cet état de fait est attribuable en partie à la nature du travail. Le taxi aérien évolue dans un contexte très différent de celui des autres secteurs de l’aviation commerciale. Souvent, les taxis aériens n’ont pas d’horaire établi et volent dans des espaces aériens non contrôlés vers des régions éloignées où les aérodromes sont plutôt rares. En général, les vols sont moins longs, ce qui occasionne plus de décollages et d’atterrissages. L’accès à l’information météorologique de base ou à une technologie aéronautique de pointe peut être difficile.

Mais la principale explication à l’origine d’un si grand nombre d’accidents est moins évidente et comporte deux éléments : l’acceptation de pratiques non sécuritaires et la gestion inadéquate des dangers opérationnels. Parmi les pratiques non sécuritaires acceptées, notons : la surcharge de l’aéronef, la non-consignation d’anomalies dans le carnet de bord, la « bravade du mauvais temps » et le vol dans des conditions de givrage prévues, avec de l’équipement inutilisable ou avec des réserves de carburant insuffisantes. Quant à la gestion inadéquate des dangers opérationnels, il s’agit par exemple : du jumelage inadéquat de membres d’équipage, de l’affectation d’un autre pilote après le refus d’un premier d’effectuer le vol, de l’absence d’une balance pour s’assurer que l’avion n’est pas en surcharge.

Mais pourquoi commet-on ces erreurs? En bref, c’est qu’au fil du temps, certaines pratiques ont été acceptées en tant que méthodes de travail « normales ». Avec l’enracinement progressif de ces pratiques non sécuritaires et la réussite de vols (sans qu’ils soient pour autant sécuritaires), on en est venu à considérer que les risques connexes « font partie du métier ».

Pressions concurrentes

Comme pour toute entreprise, les exploitants de taxis aériens doivent gérer des pressions concurrentes – pressions opérationnelles, pressions sectorielles et pressions de sécurité – afin de fournir un service, de rester viables financièrement et aussi d’assurer leur sécurité. Tant que ces pressions demeurent équilibrées, un vol devrait se dérouler de façon sécuritaire. Mais en réalité, ces pressions changent continuellement et poussent les exploitants vers les extrêmes, dans un espace qui n’est pas nécessairement sécuritaire. Cela ne signifie pas qu’un vol se soldera nécessairement par un accident, mais cela signifie presque toujours que sa marge de sécurité s’en trouvera réduite – et que la probabilité qu’il se produise un accident sera plus forte (voir la figure 2).

Figure 2. Pressions concurrentes s’exerçant sur les exploitants.
Pressions concurrentes s’exerçant sur les exploitants.

Les deux premiers schémas illustrent les trois pressions concurrentes et la situation opérationnelle d’un vol lorsque ces pressions sont maintenues en équilibre relatif (c.-à-d. que le vol se déroule de façon sécuritaire au centre de limites d’exploitation sûre). Dans le troisième schéma, les pressions sont déséquilibrées : le vol se déroule aux limites des marges de sécurité et s’expose à un plus grand risque d’accident. Le dernier schéma montre le vol se déroulant à l’extérieur des marges de sécurité, dans une zone où le risque d’accident culmine.

Améliorer la sécurité

Il ne sera pas facile de convaincre les clients, passagers, équipages et exploitants d’arrêter d’accepter des pratiques non sécuritaires et de s’exprimer pour qu’elles n’aient pas lieu. Cela exigera des stratégies de même que des activités de promotion et d’éducation pour changer les valeurs, les attitudes et les comportements et ainsi créer une culture où des pratiques non sécuritaires sont inacceptables.

Pour y arriver, le BST a déposé quatre recommandations auprès de Transports Canada et du secteur, visant à :

Prochaines étapes

Pour améliorer la sécurité dans les opérations de taxi aérien, tous les intervenants, ensemble, doivent adopter une culture où les pratiques non sécuritaires sont inacceptables. Le BST entend donner suite :

Ensemble, nous visons à exhorter tout le monde à améliorer la sécurité aérienne dans ce segment vital partout au Canada.